En voilà une belle brochette de loustics. Vraiment, ils s'entendaient pour faire vibrer les murs ceux-là. Cependant, si un producteur futé et connaisseur n'avait pas pris le temps d'écouter ces lascars, ils auraient très bien pu continuer à jouer encore longtemps pour juste une bonne poignée de fans ; ainsi que pour les castors, carcajous et les caribous des forêts limitrophes, car, à l'évidence, ces gars là se délectent d'une puissance sonore à faire trembler les murs et les érables les plus robustes.
C'est qu'il leur a fallu tout de même huit années de dur labeur avant d'avoir l'opportunité d'enregistrer ce premier essai. Une longue période de maturation qui leur a aussi permis de réaliser cette galette coup-de-poing (ou coup de pied) qui sans réel antécédent, va séduire une multitude de métalovores de tout pays. Certes, la mode était au Heavy-metal, et l'industrie musicale (du moins l'Anglo-saxonne) n'avait jamais autant fourni d'efforts pour ses poulains chevelus dispensateurs de décibels. Mais d'un autre côté, la concurrence était rude et conséquente. En aparté, ce qui n'a pourtant pas empêché de voir éclore des nuées de disques artisanaux enregistrés avec les pieds. Parfois un choix calculé pour masquer les lacunes et les insuffisances musicales.
Par bien des côtés, ce quintet canadien est proche de la caricature, concentrant tous les poncifs du genre. Une source d'inspiration, un exemple pour le "Spinal Tap" de Rob Reiner, sorti la même année que ce "Vices". Corps de guitares aux couleurs criardes, basses en forme de double-hache, fûts de batterie exagérément allongés et incurvés, pantalons moules-burnes (ou compresseur de roustons), tee-shirt deux tailles en dessous, tignasses permanentées et bouffantes, bandanas et étoffes noués autour des membres, bref ... quasiment toute la panoplie inhérente au genre dans les années 80, à jamais traumatisé par le phénomène Van Halen (et inspiré par les retombées sonnantes et trébuchantes de son succès commercial).
Kick Axe, c'est avant tout une réunion de copains de Regina (province de Saskatchewan), formalisée en 1976, avec pour noyau central les deux frères Langen, Brian et Victor, respectivement batteur et bassiste, et le guitariste Larry Gillstrom. Initialement recentrés autour du patronyme "Hobbit", ils changent pour Kick Axe. "Kick" pour la force de frappe du frangin sur ses peaux, et "Axe" pour le tranchant des guitares. Par la suite, ils regretteront un peu d'avoir gardé ce nom typé "adolescent", même s'il sonne bien. John Romita Jr et Mark Millar ont bien eu du succès avec leur Kick Ass. La formation se stabilise en 1978 avec l'arrivée de Raymond Arthur Harvey en second guitariste (après avoir essayé un claviériste) et de Brian, le frère de Larry, à la batterie.
A l'aube des années 80, quelques petits singles commencent à doucement établir leur réputation. Dont "Weekend Ride", guère folichon, typé Sammy Hagar avec une basse très en avant, et un intéressant - bien que maladroit - "Reality is The Nightmare", capturé live par une émission de radio de Vancouver, où se mélangent pêle-mêle les influences de ZZ-Top, Nugent, Pat Travers, Hagar et Grand Funk. Cette chanson est sélectionnée par la revue Playboy pour une compilation qu'elle a réalisée : "Street Rock".
Cependant, le chanteur semble ne pas parvenir à trouver ses marques au milieu de cette puissance de feu, paraissant légèrement décalé, voire dépassé. Finalement, il est remplacé par un énergumène extraverti, George Criston, qui va aider la troupe à passer un palier, et même à la faire chanter à sa suite. Dorénavant, Kick Axe est renforcé par une puissante chorale bardée de fer. Tout le groupe est mis à contribution, soit quatre jeune gaillards débordant de vitalité.
Certes, on pourrait les juger comme une chorale de barbares passablement imbibés de cervoise, tant ils semblent s'époumoner dans leur micro avec force et entrain. Cependant, ils chantent juste et fusionnent totalement avec la chanson, la soutenant même, l'amenant dans une nouvelle dimension ; au delà du simple Heavy-metal avec gros riff et hurleur.
Les vagues générées par la troupe prennent de l'ampleur jusqu'à aller toucher Spencer Proffer. Ancien musicien et compositeur, ancien directeur chez United Artists Records, reconverti en producteur, il crée ses propres studios d'enregistrement à Los Angeles, puis son propre label, Pasha Records. Un label qui va rapidement se faire remarquer par une production de qualité, ample, puissante et définie, assez moderne dans son approche. Mais aussi par le choix de ses artistes, à commencer par Billy Thorpe - qui deviendra son ami -, lançant pour le coup une nouvelle carrière de l'Australien aux USA ; mais c'est surtout l'immense succès de Quiet Riot qui va pointer les projecteurs sur le jeune label. (et dans une moindre mesure, la B.O. de "Staying Alive", qui eut plus de succès que le film).
Proffer s'entiche des Canadiens et leur offre une chance. Les reprises des années 70 ont le vent en poupe. Un phénomène initié par "Cum'on feel the Noize" de Slade repris par Quiet Riot et produit par Proffer himself, propulsant ces Angelins au bord de la rupture en tête des charts américains et européens. Affolés par cet incroyable succès, beaucoup de groupes en recherche de coup de pouce s'y mettent, espérant faire le bon choix quant au morceau choisi. (Ce que n'ont pas manqué de faire des groupes tels que Girlschool, WASP, Mama's Boys, Raven, Twisted Sister, Pretty Maids, Van Halen, Mötley Crüe, etc)
C'est pourquoi il incite ses poulains à reprendre "30 Days in the Hole" d'Humble Pie. Une belle et respectueuse version qui va servir au passage de bande son pour la comédie "Up the Creek" (1) (produit par ... Pasha Records), sans parvenir à faire autant de remous que leurs collègues.
A l'aube des années 80, quelques petits singles commencent à doucement établir leur réputation. Dont "Weekend Ride", guère folichon, typé Sammy Hagar avec une basse très en avant, et un intéressant - bien que maladroit - "Reality is The Nightmare", capturé live par une émission de radio de Vancouver, où se mélangent pêle-mêle les influences de ZZ-Top, Nugent, Pat Travers, Hagar et Grand Funk. Cette chanson est sélectionnée par la revue Playboy pour une compilation qu'elle a réalisée : "Street Rock".
Cependant, le chanteur semble ne pas parvenir à trouver ses marques au milieu de cette puissance de feu, paraissant légèrement décalé, voire dépassé. Finalement, il est remplacé par un énergumène extraverti, George Criston, qui va aider la troupe à passer un palier, et même à la faire chanter à sa suite. Dorénavant, Kick Axe est renforcé par une puissante chorale bardée de fer. Tout le groupe est mis à contribution, soit quatre jeune gaillards débordant de vitalité.
Certes, on pourrait les juger comme une chorale de barbares passablement imbibés de cervoise, tant ils semblent s'époumoner dans leur micro avec force et entrain. Cependant, ils chantent juste et fusionnent totalement avec la chanson, la soutenant même, l'amenant dans une nouvelle dimension ; au delà du simple Heavy-metal avec gros riff et hurleur.
Les vagues générées par la troupe prennent de l'ampleur jusqu'à aller toucher Spencer Proffer. Ancien musicien et compositeur, ancien directeur chez United Artists Records, reconverti en producteur, il crée ses propres studios d'enregistrement à Los Angeles, puis son propre label, Pasha Records. Un label qui va rapidement se faire remarquer par une production de qualité, ample, puissante et définie, assez moderne dans son approche. Mais aussi par le choix de ses artistes, à commencer par Billy Thorpe - qui deviendra son ami -, lançant pour le coup une nouvelle carrière de l'Australien aux USA ; mais c'est surtout l'immense succès de Quiet Riot qui va pointer les projecteurs sur le jeune label. (et dans une moindre mesure, la B.O. de "Staying Alive", qui eut plus de succès que le film).
Proffer s'entiche des Canadiens et leur offre une chance. Les reprises des années 70 ont le vent en poupe. Un phénomène initié par "Cum'on feel the Noize" de Slade repris par Quiet Riot et produit par Proffer himself, propulsant ces Angelins au bord de la rupture en tête des charts américains et européens. Affolés par cet incroyable succès, beaucoup de groupes en recherche de coup de pouce s'y mettent, espérant faire le bon choix quant au morceau choisi. (Ce que n'ont pas manqué de faire des groupes tels que Girlschool, WASP, Mama's Boys, Raven, Twisted Sister, Pretty Maids, Van Halen, Mötley Crüe, etc)
C'est pourquoi il incite ses poulains à reprendre "30 Days in the Hole" d'Humble Pie. Une belle et respectueuse version qui va servir au passage de bande son pour la comédie "Up the Creek" (1) (produit par ... Pasha Records), sans parvenir à faire autant de remous que leurs collègues.
Et l'album a vraiment de quoi donner du grain à moudre à tous les anti-Rock-durs. A commencer par le bien nommé "Heavy-Metal Shuffle" qui entame le disque dans une avalanche de descente de fûts, de guitares saturées au vocabulaire primitif, de hurlements de berserkers et de martèlement de Mjöllnir. La parfaite bande son pour habiller le combat de Thor contre les géants de glace où les coups sont autant de "fracassement" de rochers que d'éclats de foudre résonnant dans de profonds fjords cernés de vertigineuses barrières de roche. Ça gueule et vocifère comme si le chanteur était pris de rage et de folie guerrière. Les chœurs n'en sont pas moins guerriers.
Ou encore avec "Maneater", dont la section rythmique pourrait être apparenté à une jam improbable entre Van-Halen et Queen of the Stone Age. Simple, rudimentaire et martial, temporisé par un chant et des chœurs apportant une fraîcheur comme du rhum dans un café serré.
"Regardez qui arrive maintenant : Une lionne agitée et déchaînée, léchant ses lèvres. Elle est prête à entamer son festin... Elle est cruelle et sans vergogne, toujours à l'affût. Elle scrute le désir et grogne" Baudelaire n'aurait pas fait mieux. 😁
"On The Road to Rock" et "Alive & Kickin' " sont d'énièmes odes à la scène et au sacerdoce imposés par une vie consacrée au Rock, avec leur lot de clichés surannés.
Sur "All the Rights Moves", George Criton finit sa tirade de post-adolescent en rut, par un large râle pareil au mugissement d'une rage de dents.
Tandis que "Cause for Alarm" est un défouloir, une excuse pour écraser le champignon en faisant fi de toute limitation de vitesse.
Néanmoins, ces Canadiens savent limiter leurs (h)ardeurs - mais pas trop quand même -. Ainsi "Stay On Top" ralentit le tempo et modère la force de frappe. Mieux, "Dreamin' About You" présente carrément une autre facette qui sera d'ailleurs largement développée sur le disque suivant. Sans vraiment se départir de leur gros son percutant, Kick Axe parvient à habilement déployer une fibre romantique, sortant pour l'occasion une guitare folk, certes de temps à autre malmenée par une électrique. C'est qu'on est un groupe de Heavy-metal, un vrai ; même si, sous la carapace, il y a un cœur qui bat. 😁 Le chant, bien plus nuancé et emprunté pour l'occasion - à l'image d'un romantique en peine, pétrifié par ses sentiments - paraît alors tenu par un autre. Une bonne ballade Heavy, mais dont la cadence est tout de même un poil élevée pour taquiner le slow sans risquer de s'assommer mutuellement avec sa partenaire.
"Au-delà des mots, de la beauté et du désir, un souvenir de toi m'embrase"
En comparaison, étonnamment, la chanson qui a été choisie pour baptiser l'album, paraît anémique. L'impressionnante production ne parvient pas à l'extraire d'un conformisme limite affligeant. Tout comme les paroles qui n'ont que la prétention d'avoir le potentiel de titiller les chastes oreilles des dames de la PMRC, alors en pleine campagne.
"Ne regarde jamais en arrière le paradis ou l'enfer. Nous vivons tous dans nos vices. Nous nous livrons ce soir. C'est juste une partie de ce monde que nous apprécions."
Rien de transcendant à première vue, cependant ce qui donne du jus, de la saveur à cet album, c'est la communion des riffs, de la rythmique brutal, au travail apporté aux chants. Chants au pluriel car il y a bien une interaction entre le chant principal de George Criston et celui de ses sbires.
Kick Axe a tenté de faire la symbiose entre l’exubérance de Triumph et du Rush première période avec le monolithe Bachman Turner Overdrive, et le lyrisme Pop-rock de Bryan Adams et celui plus métallique de Goddo, le tout trempé dans l'énergie d'Humble Pie et la puissance d'un ours kodiak.
(1) Traduit en français par "Les branchés du bahut"
🎼𝇚🎵🔉
Ou encore avec "Maneater", dont la section rythmique pourrait être apparenté à une jam improbable entre Van-Halen et Queen of the Stone Age. Simple, rudimentaire et martial, temporisé par un chant et des chœurs apportant une fraîcheur comme du rhum dans un café serré.
"Regardez qui arrive maintenant : Une lionne agitée et déchaînée, léchant ses lèvres. Elle est prête à entamer son festin... Elle est cruelle et sans vergogne, toujours à l'affût. Elle scrute le désir et grogne" Baudelaire n'aurait pas fait mieux. 😁
"On The Road to Rock" et "Alive & Kickin' " sont d'énièmes odes à la scène et au sacerdoce imposés par une vie consacrée au Rock, avec leur lot de clichés surannés.
Sur "All the Rights Moves", George Criton finit sa tirade de post-adolescent en rut, par un large râle pareil au mugissement d'une rage de dents.
Tandis que "Cause for Alarm" est un défouloir, une excuse pour écraser le champignon en faisant fi de toute limitation de vitesse.
Néanmoins, ces Canadiens savent limiter leurs (h)ardeurs - mais pas trop quand même -. Ainsi "Stay On Top" ralentit le tempo et modère la force de frappe. Mieux, "Dreamin' About You" présente carrément une autre facette qui sera d'ailleurs largement développée sur le disque suivant. Sans vraiment se départir de leur gros son percutant, Kick Axe parvient à habilement déployer une fibre romantique, sortant pour l'occasion une guitare folk, certes de temps à autre malmenée par une électrique. C'est qu'on est un groupe de Heavy-metal, un vrai ; même si, sous la carapace, il y a un cœur qui bat. 😁 Le chant, bien plus nuancé et emprunté pour l'occasion - à l'image d'un romantique en peine, pétrifié par ses sentiments - paraît alors tenu par un autre. Une bonne ballade Heavy, mais dont la cadence est tout de même un poil élevée pour taquiner le slow sans risquer de s'assommer mutuellement avec sa partenaire.
"Au-delà des mots, de la beauté et du désir, un souvenir de toi m'embrase"
En comparaison, étonnamment, la chanson qui a été choisie pour baptiser l'album, paraît anémique. L'impressionnante production ne parvient pas à l'extraire d'un conformisme limite affligeant. Tout comme les paroles qui n'ont que la prétention d'avoir le potentiel de titiller les chastes oreilles des dames de la PMRC, alors en pleine campagne.
"Ne regarde jamais en arrière le paradis ou l'enfer. Nous vivons tous dans nos vices. Nous nous livrons ce soir. C'est juste une partie de ce monde que nous apprécions."
Rien de transcendant à première vue, cependant ce qui donne du jus, de la saveur à cet album, c'est la communion des riffs, de la rythmique brutal, au travail apporté aux chants. Chants au pluriel car il y a bien une interaction entre le chant principal de George Criston et celui de ses sbires.
Kick Axe a tenté de faire la symbiose entre l’exubérance de Triumph et du Rush première période avec le monolithe Bachman Turner Overdrive, et le lyrisme Pop-rock de Bryan Adams et celui plus métallique de Goddo, le tout trempé dans l'énergie d'Humble Pie et la puissance d'un ours kodiak.
- "Heavy Metal Shuffle" (Kick Axe) - 3:15
- "Vices" (Kick Axe/Spencer Proffer) - 4:22
- "Stay on Top" (Kick Axe) - 4:06
- "Dreamin' About You" (Kick Axe) - 4:32
- "Maneater" (Kick Axe) - 3:21
- "On the Road to Rock" (Kick Axe) - 4:22
- "Cause for Alarm" (Kick Axe) - 4:38
- "Alive & Kickin'" (Kick Axe) - 3:50
- "All the Right Moves" (Kick Axe) - 4:36
- "Just Passing Through" (Kick Axe/Spencer Proffer) - 4:48
- "30 Days in the Hole" (Steve Mariott) - 3:52 - bonus / réédition
(1) Traduit en français par "Les branchés du bahut"
🎼𝇚🎵🔉
à lire également : KICK AXE "Welcome to the Club" (1985)
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