Organisé en hommage à Brian Jones, mort noyé dans sa piscine, l’événement accueille un demi million de personnes. Loin d’être intimidé par cette foule, KING CRIMSON livre un set d’une intensité remarquable qui s’achève sur une ovation générale. Ce soir-là, le groupe a aussi joué une première version de "In The Court Of The Crimson King", le titre contenant la formule qui mènera à l’enregistrement d’un premier disque historique.
Avec le recul, Fripp admet ne pas être totalement responsable de la grandeur de ses premières heures. Selon lui, la musique jouée à cette époque était le résultat inexplicable de l’union de cinq musiciens touchés par la grâce. Pire, "In The Court Of The Crimson King" représenterait la fin d’un cycle ayant déjà atteint son apogée lors des concerts précédents. De même, Fripp refusera toujours l’étiquette Rock Progressif qui lui sera collé après que sa musique ait donné naissance à une série de formations élitistes.
On lui accordera que les textes de "In The Court Of The Crimson King", dépeignant une société paranoïaque, aliénée par ses dirigeants et angoissée par la menace d’une nouvelle guerre mondiale, tranche avec l’optimisme ambiant. On est bien loin des hymnes à l’amour du Flower Power et contrairement à ses descendants KING CRIMSON base son œuvre sur une lucidité sombre. Cette cour du roi cramoisi, c’est le monde dans lequel les vietnamiens sont brulés au Napalm par des jeunes embarqués dans une guerre inutile, un monde occidental décadent, dont le destin est confié à des fous.
Dans ce contexte, la mélodie cotonneuse de "Epitaph" ne peut que retranscrire la tristesse angoissée d’une génération qui sent que ce jeu sinistre va mal se terminer. Et, musicalement, le groupe célèbre ce déclin en grande pompe, ouvrant le bal sur le riff rageur de "21st Century Schizoid Man", un Free Jazz destructeurs et psychotique balancé comme un cri d’alerte.
"I Talk To The Wind" exprime le sentiment d’aliénation d’une partie de la jeunesse, soumise à une hiérarchie qu’elle considère comme illégitime. Le patron n’est pas un sur-homme mais un individu placé là après avoir montré la ferveur de sa soumission et légitimé par une routine qui ne peut être considérée comme glorieuse que par un individu façonné dans un moule sordide, auquel s’oppose une jeunesse représentée par un "Late man". Entre le conformisme des premiers et la révolte hystérique des seconds, la confrontation ne peut que mener à un dialogue de sourds. Voila le constat réjouissant que pose le titre sur fond de Jazz Symphonique déchirant.
Dans ce contexte, "Moonchild" pourrait apparaitre comme une berceuse apaisante, un appel à la rêverie pour fuir ce monde de fous. Mais, entre cette voie vaporeuse et la mélodie symphonique larmoyante, le titre fait plutôt penser à la plainte d’un homme qui a perdu le dernier don in-confiscable par ce monde d’oppression : la raison. "Epitaph" clôt le récital sur un constat sans appel : « j’ai bien peur de devoir encore pleurer demain...».
La symphonie se referme dans les oreilles du premier auditeur et, dans les jours suivants, le rêve hippie est massacré par la sauvagerie de la Manson Family et définitivement enterré à Altamont. Alors cette jeunesse se remit à écouter cet album prophétique et Pete Townshend salua l’album par ces mots : « Un troublant chef d’œuvre ».
Album mythique. Un des premiers albums du rock-prog. Rien à jeter même 51 ans plus tard !
RépondreSupprimerJ'ai cauchemardé sur cette pochette quand j'étais gamin, posée parmi les 33 tours des frangines, je n'osais même pas l'écouter !
RépondreSupprimerPauvre petit bonhomme ! Il avait peur du méchant roi ......Fallait pas , il est gentil comme tout! Blague à part , bien que peu fan du prog , je considère ce disque comme un véritable monument et comme le dit Pat Slade rien à jeter!
RépondreSupprimerLa pochette de Queen "News of the world" avec le robot qui massacre le groupe, m'avait aussi marquée. J'suis une p'tite nature !
RépondreSupprimerJ'espère pour toi que tes frangines n'avaient pas de disques du Grateful Dead ! avec toutes ces têtes de mort qu'ils foutaient partout , t'aurais pissé dans ton froc!!!!!
RépondreSupprimerNan ! Mais tout de même, on ne dira jamais assez l'impact d'une pochette sur le public ! Celle de "Machine head" avec ces têtes comme coulées dans le métal m'avait épatée. Et la musique qui allait avec encore plus ! OU celle de "Recorded live" de Ten Years After, une photo d'un magnéto, je trouvais ça bizarre, cheap, pas sexy, cela attisait la curiosité, où la pochette du 45 tours de "Angie" des Stones ! Là je cause de quand j'avais 6 ou 7 ans, on est impressionnable !
RépondreSupprimerLa pochette intérieure de "News of the World" avait quelque chose d'inquiétant.
RépondreSupprimerQuant à celle de ce "In the Court of King Crimson", elle a aussi eu un fort impact sur le jeune Stephen King, qui en un lieu et un personnage énigmatique de son roman fleuve "La Tour Sombre".
(par ailleurs, complètement massacré par Hollywood qui en a fait un film ridicule, sans queue ni tête - dire qu'il y a eu des procès pour moins que ça -)
Prochainement, en exclusivité sur Le Deblocnot', chaîne de culture générale préconisée par toutes les facs de France et de Navarre, "Les pochettes qui filent les j'tons !!".
RépondreSupprimerAh ouais, bonne idée ! Mais au premier degré, car au second, il y en a pléthore ! La production heavy-glam des 80's a eu son lot de pochettes à vomir ! Dans un autre registre, celles de Iron Maiden avec leur personnage fétiche (il a un nom ?) étaient censées heurter la ménagère de moins de 50 ans, mais c'était plus rigolo qu'effrayant.
RépondreSupprimerEt les pochettes sexy ? Y'aurait pas une suite de prévue ?
Eddy, pour la mascotte de Steve Harris et ses potos.
RépondreSupprimerUne réussite qui engendra une série de navrants ersatz.
Effectivement, les années 80 ont fait fort dans le genre pochettes rebutantes ou ridicules. De véritables refouloirs.
(dire qu'il y a eu des procès pour moins que ça)
On y pense ...
Du prog? Pour moi le prog c'est fait par des ziquos de jazz frustrés mais malins, incapables de pondre une mélodie car trop occupés par se pignoler sur leur dissonance. Que celui qui trouve pas mélodieux I Talk To Thé Wind aille se faire un twist...
RépondreSupprimer"se pignoler sur leur dissonance"... Ca résume assez bien les choses !
RépondreSupprimerça dépend de ce que tu appel le prog .
RépondreSupprimerJe reste très attaché au yes des début à vdgg et genesis , pour ne citer que les plus fameux.
Sans oublier la scène de Canterbury et , plus récemment , les flower kings et Steven Wilson (même si il part un peu en couille en ce moment).
Ce prog là représentait , d'une certaine façon , l'âge d'or d'un rock qui absorbait tout.
Génésis peut se vanter au début des années 90 m'avoir dégoûté des concerts (Stade de l'ouest, Nice, 19 juillet 92) pendant 5 mois. Heureusement, Faith No More (avec L7 en guest) passait en décembre et j'en ai profité pour me nettoyer les oreilles...
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