On pensait que ”Innuendo“ serait le dernier album de Queen, mais
le miracle de la technique fera revivre Freddy Mercury
Mercury au Paradis
Quatre ans après leur dernier album ”Innuendo“ et la mort de leur charismatique chanteur, les membres restant du
groupe vont déterrer des bandes, des enregistrements de la voix de
Mercury captée pendant les sessions
d’”Innuendo“ et d’autres albums retravaillés en studio. Mercury enregistrera jusqu’à son dernier souffle... Certains diront que ”Made in Heaven“ n’est pas le dernier album de Queen. Il y aura une Guest-star comme
Georges Michael en 1992 qui
donnera un mini album live et en 2008 ils avaient enregistré ”The Cosmos Rocks“ avec Paul Rodgers (ex. Free et
Bad Company). Les trois membres restant ont régulièrement confirmé ne jamais vouloir remplacer
officiellement Mercury, Le plus
affecté de la mort du chanteur sera le bassiste
John Deacon. Il choisit de ne pas collaborer avecPaul Rodgers et il prendra
définitivement sa retraite, il a toujours dit que
Queen sans
Freddy ce n’est plus
Queen.
”Made in Heaven“ un très belle album pour fermer la page de
Queen.
”It's a Beautiful Day“ : Freddy et
Deacon travaillent ensemble pendant
les sessions de ”The Game“. ”Made in Heaven“ : une chanson que l’on trouve sur l’‘album solo de
Mercury ”Mr BadGuy“, il sera retravaillé après sa mort en y ajoutant un chœur et des
guitares. ”Let Me Live“ : il devait figurer sur ”The Works“ un morceau qui balance
entre la soul et le gospel. ”Mother Love“ : la dernière chanson enregistrée par
Freddie, le chanteur n'a pas
pu terminer la chanson et ce sera
Brian May qui chantera le
dernier couplet. La chanson se termine par des extraits du concert à
Wembley en 1986. ”My Life Has Been Saved“ : un morceau de John Deacon qui prouve encore une fois qu’il était un bon compositeur et Freddy
le poussait toujours à composer. ”I Was Born To Love You“ : encore un morceau de ”Mr Bad Guy“ elle sera retravaillé en y ajoutant des instruments
supplémentaires pour prolonger la chanson.
”Heaven For Everyone“ : un morceau de
Roger taylor que l’on peut trouver
sur l’album de son groupe
The Cross ”Shove It“. ”Too Much Love Will Kill You“ : une très belle chanson de
Brian May que l’on peut retrouver sur
son album solo ”Back to the Light“ et que j’ai pu entendre en live quand ce dernier donna un concert à
l’Élysée Montmartre en 1993. Pour l’anecdote, je me suis
présenté au Zenith, l’endroit où le concert devait avoir lieu ;
c’était imprimé sur les billets d’entrée. Arrivé à La Villette, pas un
chat et en croisant des fans qui comme moi se retrouvaient perdus et
désappointés, nous avons eu l’information où avait réellement
lieu le concert, et nous voila partis au pas de course jusque dans le
XVIIIe arrondissement. ”You Don't Fool Me“ : enregistré en 1991 elle sera retravaillée par le groupe,
un très bon titre.
”A Winter's Tale“ : le testament musical de Freddy, la dernière chanson qu’il écrira et enregistrera à
capela.
En 1995 le groupe captera la musique et une partie
vocale supplémentaire. ”It's a Beautiful Day (reprise)“ : simplement la suite de ”It's a Beautiful Day“ avec une lourde rythmique. ”Yeah“ : quatre secondes en forme de bouche trou pour conclure
l’album ? Non, il y a un dernier morceau long de 22
minutes, une longue phrase instrumentale constituée
essentiellement de bruitages et de claviers.On entend trois fois Freddie répéter «Are You Runnin?». Voilà un morceau qui rappellerait
Tangerine Dream, étrange,
inquiétant, surréaliste avec le rire de
Freddy en écho. Après écoute,
il fait froid dans le dos.
Dès sa sortie, l’album se classera en haut des ventes dans la
plupart des pays. En un an, il s'est écoulé à plus de 8 millions
d'exemplaires dans le monde et sera certifié disque de platine plusieurs fois un peu
partout.
LUNDI :
Luc ne sort pas de chez lui uniquement pour aller au cinéma, au
concert aussi, il a vu Melody Gardot à l’Olympia, où la diva du
New Jersey a régalé la salle de son répertoire jazzy et bossa,
une prestation toute en humour et décontraction.
MARDI :
Pat était
fâché avec Pink Flyod, la fin de l’ère Waters, le voilà
rabiboché grâce à « Momentary Lapse of Reason » et aux
compositions du seul David Gilmour, plus mélodieuses, un très bon
cru, même s’il n’égale pas les classiques du groupe.
MERCREDI :
le retour discographique du duo landais,
The Inspector Cluzo, alias Laurent Lacrouts et Mathieu Jourdaindes,
« Less
is more » contient son
lot de pièces brûlantes, mid
tempo, brutes, brassant dans ses redoutables remous blues terreux,
proto-stoner, heavy-rock abrasif.
JEUDI :suite
de notre feuilleton de l’été, Jeff a quitté Dora en apprenant
qu’elle était enceinte du frère siamois de l’oncle Ramòn, Pénélope s’interroge sur ses sentiments pour Humphrey après
l’accident qui lui a coûté un ongle, Victoria a vendu l'hôtel du Fermoir-de-Monssac à un oligarque népalais, et... Heu, pas du tout, il
s’agit de la saga de Benjamin sur le « Rock Progressif », avec King Crimson, Yes,
Genesis...
VENDREDI :séance
cinéma avec le dernier Quentin Dupieux, moins frappadingue, mais
toujours aussi juste et féroce « L’Accident de piano »
montre une
journaliste peu scrupuleuse tenter
de percer le mystère d’une super
star
du Web. Humour
et malaise règnent sur cette fable
sur
la célébrité, un
bon cru.
👉La
semaine prochaine, côté
musique on aura du Queen et du Max Reger (plus Bruno of course, mais
à l’heure où nous mettons sous presse… bla bla bla…) et au
cinéma un thriller chinois de Ji Zhang.
La semaine dernière, à propos du dernier Wes Anderson, j’entamais
mon billet par « Les films de Wes Anderson se suivent et… se ressemblent ».
A propos de cet iconoclaste de Quentin Dupieux, c’est l’inverse, ses films se
suivent et ne se ressemblent pas. A chaque fois c’est la surprise, quelle veine
va-t-il suivre ? Le fantastique bricolé, la comédie potache déjantée, le
jeu absurde de mise en abîme, la réflexion métaphysique mélancolique ?
Raison pour
laquelle il convient d’aller voir ses films, vierge de toutes informations,
accepter de faire confiance au réalisateur pour nous amener dans son univers.
Evitez notamment l’article de Wikipédia qui raconte bêtement l’intrigue par le détail… mais vous pouvez lire le mien !
L’ACCIDENT
DE PIANO est plus classique dans la forme. Ce n’est pas un ovni
cinématographique comme DEUXIEME ACTE qui était construit autour de longs plans
séquences et jeux de miroirs. Dupieux, qui cumule aussi les postes de directeur photo, compositeur et monteur, opte ici pour un découpage plus académique.
Mais l’écriture y est ciselée (Dupieux est un formidable scénariste qui sait construire une intrigue) et entretient habilement le mystère autour du
personnage de Magalie, star des réseaux sociaux sous le nom de Magaloche. Imbuvable, égocentrique, autoritaire, dotée d’un melon inversement proportionné
à son QI. Lorsque l’histoire commence elle emménage dans un chalet isolé à la montagne,
comme pour s’exclure du monde. Qui est-elle, d'où lui vient sa renommée,
que s’est-il passé pour passer de millions de vues à une vie d’ermite ?
Magaloche cultive un mystère qu’une journaliste, Simone Herzog, pas si affable que sa voix le suppose, lui propose de dévoiler
lors d’un long entretien. Sa demande d’interview tient franchement du chantage. Herzog
prétend connaitre la vérité sur l’accident de piano, menace de dénoncer Magaloche si elle n’obtient pas un rendez-vous. Et cette petite
phrase lourde de sens de Patrick, secrétaire, larbin et souffre-douleur : « il
faut accepter, sinon on va finir en prison »…
Donc très vite dans le film,
sous couvert de scènes loufoques, amusantes ou grinçantes (le fan en scooter,
les repas à base de yaourt, l’accoutrement de Magaloche, quadruple épaisseur de vêtements, minerve au cou, plâtre
au bras, bagues aux dents) on sent que le terrain est plus dangereux et sombre
qu’il en a l’air. S’il y a une tristesse, une solitude qui se dégage des personnages,
rapidement on en découvre la face obscure. Magaloche, timbrée et sociopathe,
le trop gentil et vénal Patrick, Simone la journaliste vaniteuse aux procédés contestables, Roméo le fan un peu con et pervers majuscule, comme sorti d'une bédé de Vuillemin. Filmés dans un bel
écrin - photographie désaturée, cadres rigoureux, décor enneigé, mouvements élégants de caméra
- ces personnages font peur. Dupieux filme des monstres.
Le réalisateur lève peu
à peu le voile. D’abord avec cet interview, au centre du film, égrené de
flash-back sur l’enfance de Magalie. Dupieux nous régale
alors de scénettes où la gamine, reprenant le concept de Jackass, s’inflige
mille traumas qu’elle diffuse sur le Net, des vidéos qui feront sa gloire et sa
fortune, contrainte d’aller toujours plus loin dans ses mises en scène pour
consolider son audience. Et cette question qui taraude la journaliste : « Pourquoi
continuez-vous alors que vous êtes si riche ? ». La question exaspère
son interlocutrice, qui se ferme comme une moule.
Puis Dupieux, aux deux tiers
du film, nous montre le fameux accident de piano. Scène géniale. Si Dupieux filme des monstres, ce sont des
monstres froids (comme le décor de montagne) qui jamais ne se remettent en
question. Parce qu’ils sont bêtes à bouffer du foin, totalement inconscients,
amoraux, ou parce qu’enfermés dans une addiction perverse, prisonniers des
personnages qu’ils se sont créés ?
A partir de là, on sent que le pire peut arriver, le ton du film bascule en comédie noire, macabre. Dupieux
pousse, comme il sait le faire, le curseur de l’absurdité, la férocité monte crescendo,
jusqu’aux dernières séquences où les monstres se bouffent entre eux, s’auto
désintègrent. Mention spéciale pour la scène où Roméo pénètre
dans le chalet. La frontière entre réalité et virtuel est abolie. Le type jouit presque en se frottant au poster de Magaloche punaisé au mur, pelote sa poitrine surdimensionnée. Son petit frère, dans un bref moment de lucidité, lui explique que si les seins paraissent énormes, c’est
que la photo n’est pas en taille réelle... Cette abolition des sens culmine à la dernière séquence, glaçante, et hélas tout à fait réaliste.
Adèle Exarchopoulos livre une
composition foutraque qui rappelle celle de MANDIBULES, elle a des fulgurances de
regards, de tons, de gestuelles qui font sourire mais inquiètent, qui dénotent
la folie de son personnage. Karim Leklou en Roméo cradingue est fabuleux, Jerôme Commandeur et Sandrine Kiberlain, en apparence plus posés, sont aussi impeccables, autre point fort de Dupieux, sa direction d'acteurs.
Il faut toujours un peu de temps pour digérer
un Quentin Dupieux. Souvent la première impression est : c’est n’importe
quoi ce truc ! Et à y repenser, non. Dupieux c’est rarement n’importe
quoi, tout y est au contraire réfléchi, élaboré, millimétré. Un malaise suinte de cette fable
féroce sur la célébrité et la bêtise humaine hissée au rang d’art majeur, ponctuée
par la musique minimaliste de Mr Oizo (donc Dupieux lui-même !) deux notes
de piano graves qui vous vrillent le crâne.
Suivant
la tendance d’une pop anglaise de plus en plus baroque, Peter Giles
rencontra Robert Fripp en publiant une annonce pour trouver un
organiste chanteur. Sobrement nommé Fripp, Giles and Giles, la
formation ne parvint qu’à publier quelques 45 tours vite oubliés.
Le noyau dur de ce qui devint King Crimson
fut réuni lorsque le groupe intégra Greg Lake et Ian McDonald.
Aussi doué à la flûte, au saxophone et
au clavier, ce dernier poussa le groupe
dans les bras d’un jazz fusion rêveur et angoissé. McDonald
présenta également au groupe Pete Sinfield, un poète visionnaire
dont les textes révélaient un homme torturé par de sombres
prémonitions. Pleinement intégré au processus de composition cet
oiseau de mauvais augure baptisa le groupe King Crimson,
qui n’est autre que l’un des surnoms qui furent donnés au
diable. Le plus important pour le poète est de développer son
style, qui n’est rien d’autre que l’expression lumineuse d’une
personnalité unique.
Les ayant vus lors de l’un de leurs premier
concerts, les deux managers du groupe furent si impressionnés par
leur cauchemar majestueux que l’un d’eux hypothéqua sa maison
pour lui permettre d’enregistrer son premier album. Devenu une
attraction d’un Londres ayant déjà fini de swinguer, King Crimson devint la nouvelle lubie du programmateur John Peel, qui fit tourner
ses premiers titres en boucle sur les ondes de la BBC. Ayant eu vent
de l’ascension fulgurante du groupe, les Stones l’engagèrent
pour effectuer la première partie de leur concert historique à Hyde
Park. Nageant à contre courant de l’histoire, le groupe de Keith
Richards dut abandonner la pop planante au moment où Brian Jones se
perdit dans ses délires narcotiques.
Il faut dire que, malgré ses
dons de multi instrumentiste, le martyr blond n’eut jamais la
grandiose imagination du duo Lennon / McCartney. Ayant entamé
quelques jours plus tôt leur retour aux sources sur l’incontournable
« Beggar’s banquet », les Stones laissèrent à
d’autres le soin de défricher les nouveaux chemins d’une musique
en pleine expansion. Sur la scène d’Hyde Park, King Crimson déploya le chaos tonitruant du « 21st century schizoid man ».
Les hippies présents ce soir là ne le savaient pas encore, mais cet
enfant schizoïd du 21e siècle
sera le fils maudit de leur hédonisme insouciant. Poursuivant sa
prestation avec la mélodie cotonneuse d’« Epitaph »,
le groupe déclama sur un ton prophétique « and I guess
tomorrow I will be cryin ».
Quelques jours plus tard advint le
chaos d’Altamont, où les hells angels massacrèrent le rêve
hippie à grands coups de poignard. Loin de suivre la noirceur de
l’acte de naissance du mouvement progressif, qui fut
l’enregistrement du premier album de King Crimson,
les enfants du roi cramoisi dessinèrent ensuite la carte de son
grand rêve musical.
Commençons donc par l’album qui canalisa
toute la haine que certains eurent pour le mouvement, le symbole de
ce que les esprits étroits n’hésitèrent pas à qualifier de "virtuosité pompeuse". Si le progressisme fut d’abord
un majestueux acte de résistance face à la simplification
tonitruante du rock, alors « Tales of the topographic ocean »
est un chef d’œuvre du genre. En composant quatre longues pièces
s’étalant chacune sur une face de vinyle, Yes atteint sur cet
album le sommet de sa splendeur onirique.
Le clavier de Rick Wakeman
nous immerge dans un océan lumineux, la guitare de Steve Howe bâtit
des escaliers vers des Edens que Jimmy Page n’aurait pu imaginer.
Puis il y’a la voix de Jon Anderson, qui sut retrouver le lyrisme
des grandes cantatrices à l’époque des hurleurs du heavy blues.
Yes remit la douceur et le raffinement au centre de toutes les
préoccupations, les notes des chorus de guitare éclatant telles des
bulles de savon, gouttelettes de virtuosité illuminant les mélodies
sans les brusquer. Le groupe récupéra la philosophie de ces grands
orchestres symphoniques, dans lesquelles chaque musicien fut l’humble
ouvrier au service de la mélodie. Peut on encore parler simplement
de rock devant une telle somme de beautés introspectives ?
Au
diable les étiquettes et le purisme, la musique faisait ici un pas
de géant. Esquissé sur « Sergent pepper » et « Day
of the future passed », la reprise en main de la pop par le
génie mélodique européen se concrétisait sur quatre grandes
fresques classico rock. Il est bien sûr essentiel de se laisser
porter par les mélodies aventureuses de l’album
« Fragile », de laisser son
esprit divaguer sur les plaines musicales de « Close to the
edge », sans oublier que ces monuments préparent le terrain
aux merveilles aquatiques de « Tales from a topographic
ocean ». S’il n’est qu’une contrée de la fabuleuse carte
tracée par le rock progressif, le
rock symphonique fut doté de possibilités apparemment infinies.
Le
musicien est un peintre, le silence est sa toile, les notes sa
palette de couleurs, les vides qu’il laisse des traits dessinant ce
qu’il souhaite imprimer dans l’esprit de l’auditeur. Musique de
studio par excellence, l’histoire du rock progressif n’en fut pas
moins jalonnée de grandes performances scéniques. Le public de
cette soirée apparemment banale ne sut à quoi s’attendre, Genesis
n’étant alors qu’un groupe planant aux ambitions artistiques mal
assumées. Folk rock vaguement baroque, pop bucolique flirtant
timidement avec un symphonisme limité, « Trespass » pose
des pistes qu’il n’ose pas encore explorer. Dans le public, les
mieux renseignés firent l’éloge de la nouvelle recrue de ce jeune
groupe, Steve Hackett, véritable clef de voute de ce symphonisme
rêveur. Les plus admiratifs garantissaient que, pour Genesis,
l’arrivée de Steve Hackett
fut comme le passage du noir et blanc à la couleur. Ils n’eurent
pas besoin d’argumenter, les premières notes de synthétiseur
introduisant le concert telle une porte s’ouvrant sur un autre
monde. Affublé d’une majestueuse robe rouge et d’un masque de
renard, Peter Gabriel chanta avec le lyrisme troublant d’une veuve
de marin :« I’ve been so far
from here, So far from your warm arms, It’s good to feel you again,
It’s been for a long time »
Et la mélodie se déploya telle
une grande fresque, dévoilant un monde à mi chemin entre les décors
merveilleux de Lewis Carroll et l’Odyssée d’Homère. Planté au
milieu d’un foisonnement de notes de flûtes et d’orgue, Steve
Hackett entretint la tension dramatique à grands coups de chorus
atmosphériques. Prenant toute la face B de « Foxtrot »,
« Supper’s ready » est une véritable pièce de théâtre
rock dont les virages mélodiques sont autant d’actes. « Close
to the edge » venait alors de sortir, son morceau titre donnant
envie à chaque groupe de graver sa fresque musicale. Genesis ne s’y
essaya véritablement que sur « Supper’s ready », le
groupe ayant toujours eu soin de trouver un compromis entre la beauté
séduisante de la pop anglaise, la poésie rêveuse de Peter Gabriel
et l’énergie spectaculaire du rock’n’roll. Ainsi naquit
« Selling England by the pound », ultime chef d’œuvre
de ce symphonisme électrique, chant du cygne d’un monde dont la
porte fut fermée par le monumental « The lamb lies down on
Broadway ». Les notes cristallines du synthétiseur forment un
rideau mystérieux, qu’un crescendo mélodique ouvre avec la
nonchalance gracieuse des rideaux des vieux cinémas. « The lamb » répond d’abord à un défi
simple, trouver une nouvelle forme d’expression à l’ambition
musicale progressive.
Critique comme public commençaient alors à se
lasser des grandes fresques musicales, des groupes tels que les
Stooges ou les Who ayant déjà annoncé la grande révolution punk à
venir. Si les titres de « The lamb lies down on Broadway » sont relativement courts, leurs mélodies sont de véritables
facettes d’un diamant dont la beauté chatoyante est entretenue par
l’union du clavier et des arpèges rêveurs de Steve Hackett.
Véritable film pour les oreilles dont le scénario rappelle les
grands romans initiatiques d’Hermann Hesse, « The lamb lies down on Broadway » est une succession de grandes mélodies dont
les Beatles n’auraient pas renié la complexité séduisante.
Voilà
ce que fut au fond Genesis, un héritier de l’ambition populaire du
groupe de Paul McCartney, une sorte de savant fou cherchant la
formule du rock de demain. Après un tel coup d’éclat, Peter
Gabriel refusa de stagner, son groupe eut le sentiment de ne pouvoir
aller plus loin. Le chanteur claqua alors la porte, laissant ainsi
son groupe célébrer un génie qu’il n’avait plus. Ainsi naquit
« Wind and wuthering », chant du cygne d’une virtuosité
rock moribonde, l’une des dernières fresques rock avant
l’avalanche de guimauves pop.