lundi 7 juillet 2025

MELODY GARDOT - Concert à l'Olympia de Paris, 3 juillet 2025

 


La diva du New Jersey (terre fertile en talents) a posé ses valises pour quelques dates à l’Olympia, après une mini tournée en province. Car en ce moment, on lui conseille plutôt du repos. Elle est enceinte jusqu'aux dents, vu son ventre très arrondi, elle doit en être au huitième mois. « Merci de passer votre soirée avec une femme mi-femme mi-pastèque… d’un autre côté, c’est un fruit de saison ». Cet entame a donné le ton d’un concert placé sous le double signe de la musique et de la décontraction.

Avant cela on a découvert en première partie la chanteuse belgo-camerounaise Lubiana, qui s’accompagne d’un kora, instrument à 21 cordes (« ne vous inquiétez pas, je ne vais pas toutes les ré-accorder »), une voix magnifique, des textes en français, anglais ou camerounais, qui célèbrent la Terre, l'Amour et... son grand père. Petite pause… Des images sont projetées sur le rideau rouge de l’Olympia, un mini court métrage qui retrace le parcours cabossé (sic) de Melody Gardot

Pour ceux qui ne sont pas au courant, elle s’est faite renverser à vélo, à 18 ans, détruite de la tête aux pieds, des années d’hosto, de rééducation, de musicothérapie. Elle en garde des trous de mémoire, s’aide d’une canne pour marcher, est hypersensible à la lumière, d’où les lunettes noires.

Derrière le rideau, l’orchestre a commencé à jouer, ambiance orageuse, bourdon de contrebasse, cymbales aux mailloches, sax free, et Melody Gardot les rejoint au piano pour « Rain ». Puis deux autres soufflants (trompette, sax) se pointent pour « Goodbye » en mode bastringue honkytonk. Elle laisse sa place au piano au franco-brésilien Philippe Baden Powell, avec qui elle a écrit son dernier album, en piano-voix. Ils chanteront ensemble « C’est magnifique » une douce bossa nova réellement... magnifique. 

A côté de la batterie, il en trône une deuxième, complétée d’un tas de percussions. Je n’ai pas trouvé les noms de ses musiciens, mais ça vole très haut, notamment le second batteur-percussionniste, qui sort dont on ne sait où des dizaines de trucs qui font du bruit, créant un tapis coloré et rythmique.

Melody Gardot, par son look, son phrasé, renvoie une image un peu snob, aristocratique. C’est exactement l’inverse sur scène. Alourdie par sa grossesse, elle se déplace peu, esquisse quelques pas de danse, compense par de longues apartés, sur son état, sa vie en France, la musique, elle parle très bien français, son vocabulaire est souvent très fleuri… On est parfois proche du sketch lorsqu’elle peine à s’asseoir au piano (« j’admire les hommes, comment vous faites avec vos gros bides, syndrome Super Bock ? ») à croiser les jambes sur un tabouret pour jouer de la guitare, ou avec l’entame d’une reprise vieux jazz, hommage à Saint Germain de Près (elle y avait un appart en arrivant à Paris), un truc très swing, tempo élevé, musiciens debout devant la scène, le batteur n’avait qu’une caisse claire en bandoulière façon fanfare, jeu au balais, et petit solo.

La musique de Melody Gardot n'est pas celle des Jazz Messengers. Plus douce, cosy. Elle donne une superbe version du quasi blues « From Paris with love », qui est orné en studio de violons magnifiques, ici c’est l’harmonie des cuivres, plus roots, bluesy, et enchaîne avec le classique « Moon river », la chanson du film Diamants sur canapé composée par Henri Mancini. On est aux anges, ça vole haut, vers… « Les étoiles » qui nous renvoie vers le Brésil chaloupé et ensoleillé.

Au fond un rideau s’ouvre sur une chorale venue d’Afrique du sud (« des gamins incroyables, ils apprennent tout à l’oreille, je les ai découverts sur internet, je les ai appelés : ça vous direz de venir faire un concert à Paris ? »). S’emparant de sa guitare, qu'elle peine à poser sur son bide rebondi, Gardot donne une version hargneuse de « Preacherman », de la soul boueuse, un son qui me rappelle l’album « Sweat tea » de Buddy Guy, c’est dire le bourbier. Lubiana et sa kora reviennent sur scène, la chorale aussi, avec Gardot seule à la guitare pour « Baby I’m a fool ».

Après un rapide passage en coulisse, le groupe revient pour un « Who will confort me » bien cuivré, et le concert s’achève sur une reprise de « La chanson des vieux amants » de Jacques Brel, superbe, refrain repris par le public. Deux heures dix sur scène, et ce huit soirs de suite, dans son état, chapeau. Grappillant dans tous ses disques, tous les genres, Melody Gardot nous a tout simplement régalés. Le son de l’Olympia est juste parfait, on se demande même si les musiciens ont besoin d’être sonorisés. Musiciens à qui la chanteuse laisse de longues plages musicales, ça chorus en veux-tu en voilà.

Si avec Melody Gardot on pourrait s’attendre à un récital poli et feutré, c’est sans compter sur sa présence en scène, décontractée, drôle, elle maîtrise et dirige toutes les inclinaisons de sa musique, visiblement ravie d’être là, un ravissement qu’elle a su nous communiquer.

Les photos qui illustrent l'article ne proviennent pas du concert, ni de cette année, mais la vidéo vient de l'Olympia. Le cadrage, c'est un métier... mais c'est tout ce que j'ai trouvé.  


2 commentaires:

  1. Shuffle Master.8/7/25 08:31

    Que pense la Faculté de cette exposition d'un fœtus à des rythmes cosmopolites?

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    1. Qu'elles ne seront pas atrophiées, ses facultés !

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