Pour ceux
qui ne sont pas au courant, elle s’est faite renverser à vélo, à
18 ans, détruite de la tête aux pieds, des années d’hosto, de
rééducation, de musicothérapie. Elle en garde des trous de
mémoire, s’aide d’une canne pour marcher, est hypersensible à
la lumière, d’où les lunettes noires.
Derrière le rideau, l’orchestre a commencé à jouer, ambiance orageuse, bourdon de contrebasse, cymbales aux mailloches, sax free, et Melody Gardot les rejoint au piano pour « Rain ». Puis deux autres soufflants (trompette, sax) se pointent pour « Goodbye » en mode bastringue honkytonk. Elle laisse sa place au piano au franco-brésilien Philippe Baden Powell, avec qui elle a écrit son dernier album, en piano-voix. Ils chanteront ensemble « C’est magnifique » une douce bossa nova réellement... magnifique.
Melody Gardot, par son look, son phrasé, renvoie une image un peu snob, aristocratique. C’est exactement l’inverse sur scène. Alourdie par sa grossesse, elle se déplace peu, esquisse quelques pas de danse, compense par de longues apartés, sur son état, sa vie en France, la musique, elle parle très bien français, son vocabulaire est souvent très fleuri… On est parfois proche du sketch lorsqu’elle peine à s’asseoir au piano (« j’admire les hommes, comment vous faites avec vos gros bides, syndrome Super Bock ? ») à croiser les jambes sur un tabouret pour jouer de la guitare, ou avec l’entame d’une reprise vieux jazz, hommage à Saint Germain de Près (elle y avait un appart en arrivant à Paris), un truc très swing, tempo élevé, musiciens debout devant la scène, le batteur n’avait qu’une caisse claire en bandoulière façon fanfare, jeu au balais, et petit solo.
Au fond un rideau s’ouvre sur une chorale venue d’Afrique du sud (« des gamins incroyables, ils apprennent tout à l’oreille, je les ai découverts sur internet, je les ai appelés : ça vous direz de venir faire un concert à Paris ? »). S’emparant de sa guitare, qu'elle peine à poser sur son bide rebondi, Gardot donne une version hargneuse de « Preacherman », de la soul boueuse, un son qui me rappelle l’album « Sweat tea » de Buddy Guy, c’est dire le bourbier. Lubiana et sa kora reviennent sur scène, la chorale aussi, avec Gardot seule à la guitare pour « Baby I’m a fool ».
Si avec Melody Gardot on pourrait s’attendre à un récital poli et feutré, c’est sans compter sur sa présence en scène, décontractée, drôle, elle maîtrise et dirige toutes les inclinaisons de sa musique, visiblement ravie d’être là, un ravissement qu’elle a su nous communiquer.
Les photos qui illustrent l'article ne proviennent pas du concert, ni de cette année, mais la vidéo vient de l'Olympia. Le cadrage, c'est un métier... mais c'est tout ce que j'ai trouvé.
Que pense la Faculté de cette exposition d'un fœtus à des rythmes cosmopolites?
RépondreSupprimerQu'elles ne seront pas atrophiées, ses facultés !
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