lundi 23 juin 2025

R.I.P. Le pianiste Alfred BRENDEL nous a quittés (1931-2025) – par Claude Toon


- Ah un hommage en ce lundi Claude… Un pianiste de très haut niveau je crois… Quel âge avait ce virtuose ?

- 94 ans Sonia, mais Brendel ne se produisait ni en concert ni au disque depuis 2008…

- Un homme sympathique ?

- Oui avec parfois des prises de position un peu à contre-courant, le musicien n'était pas un fan des excentricités de la modernité dans l'interprétation de la musique…

- Tu vas nous faire écouter de belles pièces je suppose….

- Bien sûr, quelques repères biographiques sur une carrière fort longue et la magie dans Mozart ou Beethoven quoique qu'en pensent certains critiques de tout poil…


Alfred Brendel n'a curieusement été invité qu'une seule fois dans le blog ! Mais pour ce que je considère à titre personnel comme le must des derniers concertos pour piano de Mozart, le 22ème (on pourrait dire le must des musts pour respecter les affinités personnelles).

Pour ce billet j'avais rédigé une biographie exhaustive. Je risque fort de me répéter… Donc solution de facilité, d'autant que lundi approche vite, j'ose le copier-coller plus pratique qu'un lien. Cela dit pour écouter le concerto, voici le lien YouTube :


Non, Brendel n'était pas introvert mais discret...
 

Impensable d'écrire une biographie de ce pianiste qui mérite une chronique personnelle. Quelques repères : Brendel qui naît en 1931 à Wiesenberg en Tchécoslovaquie, est pourtant considéré comme autrichien. Il est vrai que l'artiste vit pendant la guerre à Graz puis, dès 1947, après le chaos hitlérien, il séjourne à Vienne où il s'installe en 1949. Il partira en 1971 pour Londres, capitale d'une Angleterre qui deviendra son pays d'adoption…

Dès l'âge de six ans, enfant, il suit des cours de piano quasi en amateur. Il ne mettra jamais les mains dans un conservatoire de premier plan. Il faut dire qu'à 14 ans, en pleine débâcle des armées nazies, il doit creuser des tranchées dans la glaise gelée. Ses mains ne souffriront pas de séquelles d'épouvantables engelures. (Parfois on voit Brendel jouer avec des pansements au bout des doigts ; aucune affection en cause, mais un gadget pour supprimer le cliquetis des ongles sur les touches ; je confirme, ça agace ceux qui ont des doigts fins 😊).

 

Les années 1947-1948 forment un tournant, il se perfectionne en auditeur libre à Vienne, donne quelques récitals et expose des aquarelles ! Oui, l'homme du jour est aussi poète, écrivain et peintre… succédant par cette pluralité de talents à Felix Mendelssohn… Côté apprentissage de l'interprétation, elle se fera en autodidacte par l'écoute des disques d'Arthur SchnabelAlfred CortotWilhelm Kempff ou Edwin Fischer… Une bonne méthode qui explique le jeu sensible et très intériorisé d'Alfred Brendel.


Brendel amateur de berêt !

Dans cette Europe en reconstruction, la carrière du jeune virtuose ne commence réellement qu'en 1958. La firme Vox lui propose d'enregistrer l'œuvre pour clavier de Beethoven, une première dans 'histoire du disque ! Plus tard, il sera l'un des artistes phares pour PhillipsSchubert et Mozart feront aussi partie de ses compositeurs de prédilection. Je vous parle d'un pianiste que les moins de vingt ans connaissent mal. Fin du siècle dernier, l'arthrite limitera ses interprétations des œuvres aux difficultés techniques trop vertigineuses. Et depuis une dizaine d'années, Alfred Brendel souffrait de surdité.

 

L'homme place le compositeur et sa musique avant tout; et prend ses distances avec le moindre hédonisme. Les mesquineries du Showbiz "classique" lui font horreur. En 2006, une bronca de critiques teutons vise à dézinguer l'anglais Simon Rattle alors directeur de la Philharmonie de Berlin, ayant succédé à Claudio Abbado luttant contre la maladie et surtout à Herbert von Karajan, garant de la tradition germanique ; Simon Rattle aurait "assécher" le son grave et lourd typique de la formation berlinoise (Ah oui, parfois pour être lourd…) Bref, une polémique attisée par des aficionados du passé qui voulaient placer leur poulain Christian Thielemann, certes bon chef, un peu irrégulier et qui dirige en effet dans un style disons très "intégriste". Furieux de cette kabbale débile, Brendel écrit une lettre ouverte : "Contrairement à ce qui est dit par quelques critiques, la Philharmonie de Berlin est dans une forme superlative. Ce n'est certes plus l'orchestre de Karajan ou d'Abbado, mais il a entièrement conservé sa richesse dans les symphonies romantiques tout en s'ouvrant à la musique contemporaine ainsi qu'au répertoire baroque du XVIIIe siècle."


On a parfois critiqué Brendel à propos d'une supposée sécheresse de son jeu, un manque d'émotion. À ce sujet, citons la revue Diapason qui vient d'annoncer la disparition du pianiste autrichien et cite un élève de Brendel, Imogen Cooper : "Il est en perpétuel processus de changement et de recherche et il est extraordinairement ouvert". Et d'ajouter "C'est un musicien aux sentiments très profonds. Il faut résister à l'idée de le qualifier d'intellectuel. J'ai vu tant de cas où ses décisions musicales étaient absolument guidées par ses sentiments ! ". Brendel s'imposait une lecture sans aucune excentricité ou dérapage par rapport au texte. Avouons que certains débutants très médiatisés comme Lang-Lang ou Fazıl Say ont oscillé en début de carrière entre la fidélité associée à la virtuosité et les altérations pas toujours pertinentes et désarticulant les partitions… Chacun ses goûts…

 

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Brendel a construit sa carrière principalement à partir du grand répertoire classique et romantique, s'aventurant peu dans la modernité… Je vous propose l'écoute de grandes œuvres. La plupart ont été chroniquées dans le blog depuis sa création par d'autres grands interprètes. (Le lien vers ces articles est indiqué dans ce cas.)

Dans l'ordre :

 

Ludwig von Beethoven : Concerto N°3Orchestre Philharmonique de Vienne dirigée par Simon Rattle. Une belle intégrale du début du XXIème siècle (Chronique)

Franz Schubert : Sonate N° 21 D 960 – (Chronique)

Franz Liszt : (1) Bénédiction de dieu dans la solitude (Chronique) et (2) Fantaisie et fugue sur le thème B-A-C-H.

Joseph Haydn : Sonate in mi bémol majeur No. 62, Hob XVI:52


Écoute au casque ou avec des enceintes additionnelles plus que conseillée.

Le son des PC, sauf exception, est vraiment une injure à la musique…


INFO : Pour les vidéos ci-dessous, sous réserve d'une écoute directement sur la page web de la chronique… la lecture a lieu en continu sans publicité 😃 Cool. 





1 commentaire:

  1. j'aimais bien Alfred Brendel avec son regard rieur sur beaucoup de ses pochettes d'albums. Je ne possède qu'un album avec les sonates "Pathétique", "Clair de Lune", "Appassionata" chez Philips en72 et 75

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