mardi 18 mars 2025

ÉPOUSES et CONCUBINES de Zhang Yimou (1991) - par Pat Slade



Un très beau film sur la polygamie en Chine à l’époque des seigneurs de la guerre. Mais peut-on dire que la polygamie est une bonne chose ?



LES LANTERNES DE LA POLYGAMIE 




Dans toutes les périodes de ma vie, j’ai regardé des films qui étaient en rapport avec mon propre destin. J’ai regardé ”L’éveil“ quand je suis sorti du coma (clic) et depuis, quand je suis revenu de Chine, je me suis "gavé" de films évoquants l’empire du milieu comme ”Adieu ma Concubine“ de Chen Kaige en 1993, ”Le Dernier Empereur“ de Bertolucci en 1987, ”Épouses et Concubines“ de Zhang Yimou en 1991 et  beaucoup d’autres encore. Le cinéma chinois est très riche et ce n’est pas seulement grâce aux films de Kung-fu et de moines Shaolins. Les endroits montrés dans ces films, il fallait que je les voie. C’est étrange mais je suis tombé amoureux de l’Asie en général et de la Chine en particulier après avoir lu ”Tintin et le Lotus Bleu“ quand j’étais gamin. De Shanghaï à Pékin, de la Muraille de Chine à l’armée des soldats en terre cuite de Xian, de la Cité Interdite de Pékin au village de Pingyao qui servira de décor au film, j’aurais parcouru, sac au dos, ce pays riche en histoire.

Gong Li

 A une époque qui n’est pas si lointaine de la notre, celle des seigneurs de la guerre (1916-1928), la femme chinoise était encore perçue comme un objet, voire une poule pondeuse. Mais c’était aussi pour les familles pauvres pouvoir donner un statut et un niveau de vie plus élevé à leurs progénitures. Songlian (Gong Li) a dix neuf ans quand elle arrive dans cet endroit clos qui va lui servir de logis et où le temps s’est arrêté. Rien ne montre une once de modernisme dans ce huis-clos où la tradition ancestrale reste très rigoureuse. Songlian sera la quatrième épouse du riche maître Chen, dès son arrivée, elle sera présentée aux autres épouses. La première épouse, Yun, la plus âgée, reste très attachée aux valeurs ancestrales même si désormais délaissée par le maître, elle fait office de matriarche.

Les quatres épouses
Zhuoyun, la seconde épouse, semble être la plus amicale et enfin la troisième, Meishan, ancienne chanteuse de l’opéra chinois voit en Songlian une rivale. En faisant le tour de cette petite ”cité interdite“, Songlian découvre une petite maison sur les toits fermée avec une chaine, quand elle demande ce que c’est la réponse est : ”C’est la maison des morts“ selon une légende, plusieurs femmes se seraient pendues il y a longtemps. Les femmes du maître se nomment entre-elles par ”grande sœur“, ”petite sœur“…la hiérarchie selon l’arrivé dans la maison. 

Quand le Maître Chen rentre chez lui, il choisit celle qui aura le privilège de sa visite, les quatre épouses sur le bas de la porte de leurs appartements suivies de leurs servantes attendent de savoir celle qui sera choisie. Commence alors un long cérémonial, le majordome apparait et chante ”Allumez les lanternes dans la quatrième maison“ l’endroit ou vit l’épouse choisie se pare de couleurs rouge-orangé. Cette dernière est lavée et reçoit un massage sur la plante des pieds avec de petits marteaux aux bruits très significatif et ce massage devient une drogue pour certaines. Mais la jalousie s’installe dans le gynécée et certaines femmes entre elles se disputent les faveurs du maître.

Songlian et la seconde épouse
Songlian se lie d’amitié avec Zhuoyun la seconde épouse et se méfie de Meishan la troisième qui tente de la concurrencer dès son arrivée en feignant d’être malade. Même si, au début, elle est récalcitrante face au maître, elle voit l'avantage d'être la favorite. Les concubines rivalisent de calcul et de perversité dans leur lutte pour la préférence du maître et la conquête du pouvoir. Il faut se méfier de l’eau qui dort, la seconde épouse derrière sa gentillesse apparente et ses airs amicaux se révèle en fait être la plus perverse de toutes les épouses, elle essaiera d'envouter Songlian avec une poupée "vaudou", cette dernière se vengera en lui entaillant l’oreille avec des ciseaux.                                                                                    
Le massage des pieds
 Pour essayer de garder la préférence du Maître, elle décide de simuler une grossesse, mais sa servante qui a les faveurs du maître et est jalouse de sa maitresse dénonce le stratagème auprès de la seconde épouse. Après avoir été ausculté par le médecin Gao. Le subterfuge est éventé, Songlian est délaissée et ses lanternes sont occultées sous des housses noires.
la troisième épouse (He Saifei)

 Songlian est celle par qui le scandale arrive, elle a un secret mais elle le dévoilera par inadvertance le jour de son anniversaire. Dans sa solitude elle va trop boire et dévoiler que la troisième épouse avait une relation avec le docteur Gao. En punition de son adultère, Meishan est étranglée, elle est emmenée et portée par des serviteurs habillés en noir jusqu’à la maison des morts. 

La maison des morts
 Songlian suit la procession à distance. Une fois leurs tâches accomplis, les hommes s’éloigneront et pour son malheur, sa curiosité l’amènera à aller voir dans le maison. Image lointaine de la femme pénétrant dans le triste endroit, elle redescend les escaliers en hurlant. Plus tard, une cinquième épouse arrive dans ce monde clos et demande à sa servante qui est la jeune femme qui erre dans la cour, en uniforme d'écolière et la servante répondra que c’est Songlian la quatrième épouse qui a sombré dans la folie.

Les couleurs tamisées, le décor, la musique typique de l’opéra chinois qui se dégage dans ce drame uniquement féminin où l’homme n’a que le second rôle ; le maître Chen n’apparait jamais de face, uniquement de dos, de loin ou caché derrière la légère toile du lit. Les seuls hommes qui apparaissent ne seront que les serviteurs et le majordome. Un très beau film dont le titre original est : ”Da hongdenglong gaogao gua !(”Accrochez les lanternes rouges !“). Il y a d’autres intrigues dans le film mais je ne vais pas dévoiler toute l’histoire.

Zhang Yimou est un réalisateur qui tournera aussi des films comme Vivre !en 1994 et ”Qiu Ju, un femme chinoise“ en 1992, deux films déjà avec Qong Li.

Lion d’argent à la Mostra de Venise, une nomination à l’Oscar du meilleur film en langue étrangère, la beauté de Gong Li, un film qui éclairera votre lanterne sur une certaine image de la Chine.




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