The BellRays are not dead ! Pourtant, on aurait pu croire que l'industrie musicale avait fini par avoir raison de ces trublions. Et plus particulièrement du couple Vennum-Kekaula, qui a toujours fait le choix de ne pas répondre aux sirènes envoûtantes des majors par crainte de perdre sa liberté. Même si sans leur appui (quand elles daignent bien le donner), l'accès à certaines salles, tournées et médias s'avèrent des plus difficiles. Voire carrément fermé. Qu'importe ! Même si la route a été jonchée d'obstacles et de chausse-trappes, le couple est tout de même parvenu à vivre de sa musique. A vivre, ou survivre, à travers leur musique. A s'épanouir grâce à elle. Par le facteur « The BellRays », mais aussi par quelques occasionnels projets parallèles. Comme les rares tournées en duo, en acoustique, ou encore avec Lisa & The Lips, une fusion avec un très bon groupe ibérique, ou encore la tournée avec Wayne Kramer pour une mouture scénique de son MC50.
Il s'en est passé des choses depuis cette année, en 1990, lorsque ce couple sincèrement passionné de musique populaire – particulièrement celle des 60's et des 70's -, a décidé de prêcher la bonne parole en commençant par leur « petite » ville de Riverside, avant de descendre sur un Los Angeles nettement plus fourni en salles. Lisa Kekaula et Bob Vennum ont même réussi à traverser l'Atlantique et à se faire accepter sur le vieux continent. Certes, pour un succès modeste mais néanmoins pérenne. Cependant, le silence discographique de près de six ans donnait à croire qu'ils avaient renoncé. Du moins à composer et enregistrer. Jusqu'à ce « Heavy Steady Go ! », dont la pochette naïve – guère engageante si on ne connaît pas déjà le groupe -, annonce la couleur : « On met les gaz !! ».
Rien de nouveau sous le soleil, ce qui va donner du grain à moudre aux grincheux. Ces derniers devant tristement et en permanence rechercher des sons et des rythmes nouveaux pour satisfaire leurs esgourdes apparemment en perpétuelle mutation. En est-il de même pour leurs goûts culinaires, leurs relations ? Chacun fait ce qu'il lui plaît (plaît, plaît). Une bonne affaire pour le commerce... Et puis, ce n'est pas après trente-quatre ans de carrière, qu'on va demander aux BellRays de changer leur fusil d'épaule, même s'ils nous ont déjà surpris plus d'une fois.
Là, toutefois, l'orientation générale se place dans une forme garage-rock heavy et low-fi. Un low-fi surprenant après la série d'albums dotée d'une production au cordeau qui faisait honneur à l'énergie et la musicalité du combo. Alors que là, on pourrait croire à un budget restreint impliquant un enregistrement dans l'urgence et forçant l'économie sur le mixage. C'est comme si la production suffoquait sous une chaleur des plus torrides, croulait sous une chappe de plomb. Dommage. Néanmoins, malgré tout, cette cylindrée (on dirait une inspiration d'une vieille Indian - entre une antique Indian Chief et une Matchless 60's) parvient rapidement à se révéler addictive.
Ca démarre pourtant calmement. Sans se presser. Comme si les surineurs étaient suffisamment sûrs d'eux pour se sentir invulnérables et aller déambuler dans les rues grouillantes d'anonymes, accaparés par leur dure et pénible petite vie - et essayant d'y échapper à l'aide de leur précieux et zombiefiant portable. Bien que sombre, "I Fall Down" se veut être une lueur d'espoir à laquelle se raccrocher au milieu d'une société nécrophage.
"Hard Driver" redresse la tête et retrousse les dents, préfère frapper là où ça fait mal. Du rock simple, quasi binaire et teigneux - on regrettera par contre le "solo" chaotique, cacophonique, des plus brouillons. "Snakes" suit le même chemin mais avec un surplus de swing (reptilien). "One More Night" retrouve la verve d'un MC5, et Lisa prouve, une fois de plus, qu'elle aurait été probablement la meilleure option pour prendre la place du regretté Rob Tyner.
La pièce la plus longue du skeud, avec ses quatre minutes trente, "California", marque avec ses réminiscences acides sixties et ses volutes d'encens et d'herbes du maquis, une brusque chute d'intensité. Mais le bref et hâtif "Come On" surgit pour faire oublier cet écart de conduite. Un jet d'énergie dans le style longtemps prisé par Rick "la casquette" Nielsen, notamment avec ses "Hello There" ou autre "Auf Wiedershen". Dans un sifflement de larsen, Vennum dégaine sa fuzz la plus crade et souffreteuse (entre Zvex et Beetronics, ou une Big Muff antique aux connexions en sursis) pour développer avec "Wolf's Sun", un boogie primal, hypnotique et halluciné aux lointaines réminiscences d'un autre loup (et du costaud), Chester Burnett.
Plus classique, "Down on my Knees" résonnerait presque comme un bon rock carré à la Creedence Clearwater Revival, avec en sus une Lisa qui chante comme si elle parlait d'elle, de ses déboires, de ses doutes, et de son besoin de lutter, de se relever ; indéfiniment. Franchement punk-rock, "All the Rage" ne fait pas de détail et rue dans les brancards avec une Lisa plus tigresse que jamais. Un final plus surprenant avec un "Whatever Turns You On" très funky. Dégoulinant de fuzz crépitante, de basse volumineuse et de wah-wah de bouffon, pour un heavy-funk dans la lignée de Funkadelic. Final festif, foutraque, où surgit un kazoo siphonné.
A n'en pas douter, ce dernier morceau donnera de l'eau au moulin des détracteurs, des "pisse-vinaigre" qui trouvent toujours à redire ; qui se lamentent devant une absence de nouveauté, de créativité, et qui sont souvent les premiers à dégainer la sulfateuse dès qu'on sort des clous. Oui, car depuis des années les BellRays essuient les plâtres. "Pas - ou plus - assez punks", "trop hard-rock", "des sauvages osant incorporer la sacro-sainte Soul à du rock - pire, du heavy-rock",... Mais Lisa Kekaula et Bob Vennum n'en ont cure, ils s'en battent le flanc et se marrent. Pour eux, il n'y a pas de frontières. Juste des nuances, des inflexions, des personnalités différentes. Le reste, c'est du marketing. Ils continueront à faire leur truc, contre vents et marées.
Par contre, quel dommage de ne pas avoir inclus la belle ballade "True Love Travels on a Gravel", aux chaleureux échos de Soul des studios Stax, sur le disque, uniquement disponible en digital.
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L'intro de Down on my Knees, c'est effectivement du Creedence pur jus. Je pensais à Sweet hitchhiker, mais il y a une autre quasiment identique que je ne trouve pas.
RépondreSupprimerça me faisait penser à "Rockin' All Over the World"...
Supprimerça , c'est une année 2025 qui commence bien. Un nouveau Bellrays inespéré ! Que demander de mieux si, en plus, au vu de sa pochette, il vrombit comme d'habitude... Ah, si , je sais ce que je pourrais demander en plus, un nouveau Kitty Daisy & Lewis et un nouveau Southern Avenue
RépondreSupprimerSouthern Avenue ! Ils sont bons ceux-là 👍🏼, Load Trsh 😉
SupprimerEt justement, un alboume est prévu pour début 2025, sur Alligator Records.
Un bon disque, bien agréable, carré, sans chichi, comme on aime. Sur "Down on my Knees" je retrouve dans l'intonation du chant un je ne sais quoi du Rod Stewart de la grande époque (le timbre enroué y est aussi pour quelque chose), voire Tina Turner quand elle reprenait du... CCR. Quelle voix !
RépondreSupprimerEffectivement, Lisa a été très (très) souvent comparée à Tina Turner.
SupprimerMais, à mon sens, il faudrait également mentionner Rob Tyner - plus rarement (jamais ?) cité, il me semble pourtant que l'affiliation est des plus évidentes.