mardi 2 juillet 2024

RORY GALLAGHER : ”Live in Europe“ (1972) - par Pat Slade

 


Rory Gallagher et moi c’est très longue histoire, pas de vénération ni d’idolâtrie mais plutôt une affection bienveillante.



Le Blues de la Grosse Grenouille



Rory Gallagher et sa Fender Strato reconnaissable par l'usure de son vernis et le  micro usé par les ans qui donnaient un son unique que Rory trouva tellement original qu'il n'y toucha plus.  

La première fois que je verrai l’irlandais en live sera à Ris-Orangis dans la salle ”Le Plan“ La plus grande SMAC (Scène de Musiques Actuelles) d'Ile De France. Une salle où il passait souvent. En décembre 1994, il y donnera l'un des derniers concerts de sa carrière, quelques mois avant son décès. En hommage au guitariste irlandais, la rue dans laquelle se situe Le plan est rebaptisée rue Rory Gallagher. Avec ses yeux de cocker triste il reste l’un des meilleurs guitaristes au monde d’après Hendrix. L’anecdote est connue, celle du journaliste qui demanda au Voodoo Child ce que ça fait d’être le plus grand guitariste du monde ? Ce dernier répondra : ”Je ne sais pas, allez demander à Rory Gallagher“. Même si l’anecdote est séduisante, elle est complètement fausse. Rory n’a jamais rencontré Hendrix, il l’a vu deux fois sur scène et c’est tout. Seconde anecdote, selon les on-dit, au départ de Mick Taylor, Les Stones ont voulu l'engager (Lu dans la bio de Keith Richards), il semblerait aussi qu'il ait été approché pour remplacer Blackmore au sein du Deep Purple (Merci Luc pour l'info ! )

Mais l’irlandais sera un bluesman au feeling incroyable digne d’un Stevie Ray Vaughan ou d’un Albert Collins. Choisir un album à chroniquer n’est pas une chose facile. Il a déjà été fait une chronique sur ”Tattoo“ de 1973 et ”Irishman in New-York“ un live post-mortem de 2015 qui est un album non officiel. Mon premier choix était ”Photo-Finish“ de 1978 puis le live ”Irish Tour’74“ et en fin de compte, je me rabattrai sur le premier album que j’avais acheté de lui ”Live in Europe“, ce sera son troisième album mais son premier live.

Je sais qu’il y a beaucoup de lecteurs qui aiment le guitariste irlandais et je ne voudrais pas commettre un imper ni froisser personnes en parlant de lui. ”Live in Europe“ qui commence par une courte présentation pour attaquer avec ”Messin’With the Kid“ un titre de Mel London qu'il composera pour Muddy Waters et Howlin’ Wolf. Rory mettra un peu plus d’électricité dans sa version. ”Laudromat“ une intro au fil du rasoir, un son hard un peu brouillon pour ceux qui ne seraient pas familiers de la musique de l’irlandais, l’histoire d’un gars qui passe sa vie dans une laverie automatique. ”I Could've Had Religion“ Un bon gros blues comme on les aime avec l’harmonica et le bottleneck. Pistol Slapper Blues“, un petit passage par la guitare folk qu’il délaissera pour une mandoline dans ”Going to My Hometown“. ” In Your Town“, retour sur un blues électrique de sa composition toujours entrecoupé de solos meurtriers. ”Bullfrog Blues“, on ne pouvait pas y échapper, un véritable retour à l’électricité, Rory laisse l’occasion à ses musiciens de s’exprimer, il sait se mettre en retrait et ne pas projeter toute la lumière sur lui, il était un artiste généreux. Le tout donnera un final de folie.

Quand tu le voyais sur scène, même si tu ne connaissais pas son répertoire, tu ne pouvais pas t’empêcher de remuer la tête au rythme de sa musique tellement il transpirait le blues, pour l’anecdote La légende veut que la guitare fut abîmée notamment par sa sueur particulièrement acide à cause de ses problèmes de foie. Il n’a jamais été un grand chanteur mais il y avait toujours un feeling qui passait et dans un album live tout n’est pas parfait mais l’ensemble sonne quand même très authentique. Pour lui, enregistrer un album était une bonne occasion de repartir en tournée. Son dernier album ”Fresh Evidence“ datait de 1990 mais même si il n’avait rien de nouveau à proposer, la route était sa vie. Deux ans plus tard il sortira ”Irish Tour’74“ que beaucoup préfèreront.

10 commentaires:

  1. Je préfère Live in Europe à Irish Tour 74 dont les longueurs passent mal sur disque. Ceci dit son album que j'ai le plus écouté est Top Priority (et Stage Struck est à mon avis son meilleur live). Toujours la même distinction entre ceux qui, comme moi, préfèrent Rory Gallagher lorsqu'il privilégie sa tendance hard rock plutôt que sa tendance blues/folk.
    Depuis longtemps, je n'écoute plus tellement ni l'une ni l'autre, Gallagher n'a finalement jamais transformé l'essai et faute de compositions suffisament marquantes sera resté une excellente série B, comme les polars hollywoodiens qu'il adorait. De là à dire que c'était sa seule ambition, il n'y a qu'un pas que je franchis allégrement ))

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    1. 👍🏼 Merci.
      Voilà bien des années que j'ose (l'insolent) dire que "Stage Strucks" est son meilleur live. Avis tout de même partagé par d'autres amateurs, mais parfois... la discussion devient houleuse 😁
      Paradoxalement, "Top Priority" remporte plus facilement les suffrages.

      Par ailleurs, je ne saurai que trop conseiller une esgourde (ou deux) curieuse pour ses deux derniers : "Fresh Evidence" et "Defender".

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    2. Je les connais, Defender était quelconque et Fresh Evidence redressait la barre sans atteindre des sommets. Slumming angel dominait le disque mais l'ensemble manquait de cohésion. Il était déjà bien malade.

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    3. Shuffle Master.4/7/24 14:09

      D'accord sur quasiment tout. Pour moi, le seul encore écoutable est Calling Card. Le reste devient vite fatigant. L'imper froissé de la chronique: belle référence à Columbo.

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  2. J'aime bien (aussi) le "Irish Tour", pour la présence du clavier, qui permet de varier les solos, et dont le son me parait encore plus brut. Dans celui-ci, "Laudromat" et "Bullfrog blues" sont particulièrement fantastiques. Ok avec toi sur l'ambition de Gallagher qui n'était pas de monter sur la première marche du podium. Dans mes jeunes années, un disquaire m'avait dit la même chose à propos de Led Zep / Deep Purple. Les premiers, cornaqués par Peter Grant, n'avaient pour seule vocation qu'à être le plus grand groupe de rock du monde et de défoncer la concurrence, alors que les seconds, presque un groupe auto-produit, n'avaient pas franchement de plan de carrière, avec un lunatique Blackmore connu pour faire juste ce qu'il voulait quand il le voulait, et notamment faire chier le monde !

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    1. Oui "Bullfrog Blues" sur "Live in Europe", quel moment d'anthologie. On en vient à regretter que le fidèle Gerry McAvoy n'ait pas eu un peu plus de liberté.

      Rory Gallagher n'a probablement pas eu plus de succès parce qu'il était toujours resté ce gars simple et avenant, qui n'a jamais cherché à faire des frasques pour attiser l'intérêt de la presse. Jamais du genre à casser quelque chose (à l'exception de son foie) ou à se montrer grossier et insolent.
      D'un autre côté, c'est ce trait de caractère qui la valu les faveurs d'un public fidèle et aussi de journalistes qui n'ont jamais manqué de remarqué sa prévenance et sa courtoisie (était-ce donc si rare ?). On se rappelle que certains appréciaient aussi ce gars parce qu'il était habillé à la ville comme à la scène, longtemps fidèle aux chemises à carreaux ; il était fringué comme eux, comme nous, simplement, sans blingbling ou frusques hors de prix.

      Finalement, des années plus tard, et presque trente ans après son décès, Gallagher réussit l'exploit de rester dans les mémoires, de vendre encore des disques et même d'être connu et reconnu par les jeunes générations - y-compris celles nées après 1990.
      Cela me rappelle d'ailleurs une conversation avec deux jeunes irlandaises qui n'appréciaient pas particulièrement les Cranberries - pourtant alors au pic de leur gloire -, mais qui s'enthousiasmèrent dès que j'eus évoqué le nom de Gallagher. (et même Thin Lizzy d'ailleurs...)

      Gallagher For Ever 👍🏼

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    2. "une conversation avec deux jeunes irlandaises"... Ben voyons... ça s'est fini comment la soirée ?

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    3. Tranquillou... je les ais raccompagnées en tout bien tout honneur.
      Vrai de vrai, monsieur.
      Et j'avais intérêt, sinon il m'en aurait chèrement couté (et c'est rien de le dire 😁), puisque j'étais avec ma compagne. Très, très jalouse (... et un peu mazzera 🥴 si ,si)

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  3. J'ai fais l'Irlande en stop au début des annéees 80 et chaque fois que nous arrivions en ville (j'y étais avec mon meilleur ami), les mères de famille enfermait leurs filles à double tour. Les français ont une très mauuvaise réputation

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    1. ça a dû être une belle aventure 👍🏼
      (malheureusement, on apprend que les Français peuvent traîner une mauvaise réputation dans bien des pays 🥴)

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