Mardi 2 janvier… Ambiance délire au Deblocnot… La rédaction a recruté les gars et les filles de la compta, de la gestion, de la com, des moyens généraux, de l'entretien, des achats, des archives, les agents de sécurité, la concierge… pour lancer une farandole endiablée sur cette musique dénichée par le Toon. Un chouette délire, la fête au village dans les couloirs et même les escaliers (pas prudent mais pas de pépin) … Juste la facture champagne pour arroser 2024 qui a fait monter la tension de Luc à 24 – 13 / 98. Merci à Bruno d'avoir prêté ses amplis… Marshall et ses enceintes… Rockster (pour du baroque ça le fait quand même, mais le faux plafond a des fissures 😊)
  - Dis Claude, et si pour cette première semaine on faisait un billet
        sur ce compositeur peu connu et sa musique festive …
- Super idée Sonia ! Comme d'hab', tu me cherches l'iconographie, je rédige, on prépare la maquette et j'intègre l'article sauce HTML…
         
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| Joseph Bodin de Boismortier | 
  Quand on s'appelle
    de Boismortier, on compose du solide ! Avec du bois et du mortier, forcément,
    voici de la musique qui aurait dû résister aux temps. Ben, pas tant que ça,
    j'ai découvert ce baroqueux tardif lors de mes pérégrinations dans YouTube,
    notamment en écrivant le billet pour Noël : la
    cantate H 416
        de
    Marc-Antoine Charpentier.
  Calembour mis à part (la signature du blog),
    Joseph Bodin de Boismortier
    est membre d'un groupe de 34 compositeurs appartenant au courant baroque
    français. Usuellement on situe cette période entre 1600 et
    1750 (mort de
    Bach), mais le
    tableau chronologique
    recensant ces messieurs dans l'article Wikipédia s'étend jusqu'en
    1795 ; clôturant la liste avec
    Antoine Dauvergne
    né en 1710 et donc décédé à l'âge canonique de 85 ans, une
    exceptionnelle longévité pour le XVIIIème siècle. Il n'a pas
    sombré dans l'oubli même si pratiquant un style paraissant désuet en ces
    temps où
    Mozart
    et
    Haydn
    (Sturm und Drang) préparent la
    révolution romantique beethovénienne de 1805… 
  La courte séquence "classique" de quelques décennies reste marquée en
    partie du sceau "Sturm und Drang" (tempête et passion), un concept qui s'oppose à la musique de
    divertissement et aux opéras nourris de mythologie ou de bouffonnerie, un
    courant intellectuel qui demeure une spécificité germanique. Le mouvement
    revendique une rupture avec le passé baroque, adopte l'influence des pensées
    libertaires du siècle des lumières, "Sturm und Drang" n'est autre que le titre d'une pièce de 1772 du dramaturge
    Klinger. Donc rien d'étonnant que le style baroque perdure plus
    longtemps en France. De toute façon
    de Boismortier
    cessera de composer en 1753 (la querelle des bouffons, encore une drôle d'histoire pour un autre papier…)
Parmi ces 34 musiciens la plupart des noms me sont connus, mais de là à vous expliciter l'historique de leurs carrières et à vous proposer des œuvres hors du commun… Nous avons parlé dans le blog de certains des plus essentiels (Index) : Couperin, Rameau, Campra, Charpentier, des personnalités aux styles originaux et à l'écriture inventive. Pour leurs camarades, une impression de déjà entendu est souvent patente à l'écoute, même si l'élégance de la composition tente de masquer la banalité. Aujourd'hui, assurons la session de repêchage de de Boismortier grâce à album pour le moins guilleret.
         
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| David II Tenier - Fête de village - 1690 | 
| &nsbp; | 
  Hasard du calendrier, nous voilà tout juste sortis de la trêve des
    confiseurs. Or le papa de
    Joseph, Etienne Bodin après une carrière militaire terminée à Thionville
    tenait un commerce de confiserie à Metz. Les épousailles d'Etienne avec
    Lucie Gravet, sans profession a priori, ont lieu en
    1687. Joseph sera leur second enfant né en 1689.
  Joseph
    ne dédaignait sans doute pas piocher dans le stock de sucrerie de la
    boutique, mais reprendre la succession de son père n'est pas dans ses
    ambitions. On repère vite ses talents musicaux. Les témoignages sur
    l'apprentissage de son métier de musicien ne sont pas fiables, on présume
    néanmoins qu'il reçoit un enseignement auprès de
    Joseph Valette de Montigny
    (1665-1738). Rien de sûr, ce monsieur devrait être ajouté au tableau
    des 34, donc passons… Les musicologues officiels ont du pain sur la
    planche…
Ceci dit, cette formation a pu réellement avoir lieu, car de Montigny, originaire du Languedoc, se trouvait bien à Metz vers les années 1700. Par ailleurs, en 1713, Joseph suivra Montigny à Perpignan où il exercera en tant que receveur de la Régie Royale des Tabacs 😊. Autre indice, il épouse en 1720 Marie Valette, une nièce éloignée de de Montigny. Il fréquente du beau monde : le vicomte d'Andrezel futur ambassadeur du Roi à Constantinople, la Cour de la Duchesse du Maine, à Sceaux… une ascension bien gérée qui l'amène à Paris en 1724 obtenant du roi Louis XV un privilège pour imprimer ses œuvres. Il ne s'en privera pas… car cette situation exceptionnelle lui donne l'aisance matérielle nécessaire pour travailler sans dépendre des exigences d'un protecteur à l'image de ses confrères (un noble, un évêque…).
  
         
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| Musette du XVIIIème siècle | 
         
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| Vielle du XVIIIème siècle | 
- Dis Claude, c'est un papier musicologique ou les cancans de Gala, Image point de Vue, etc. ? hihi.
  - Délichieuse chette papilloche Chonia… Il n'y aura pas fraiment
        d'analiche de l'oeufre, alors che ragonte des tites ichtoires…
  Ne pas s'assujettir à un mécène exigeant comme durent le faire
    Bach
    ou
    Mozart
    jeune n'a pas que des avantages. Il faut impérativement vendre sa musique
    sans être boudé par un public friand de facilité et de frivolité. On
    reprochera à
    Joseph
    de Boismortier
    ces facilités d'écriture. Certes ses ballets et sérénades sont contemporains
    de l'Oratorio de Noël
    de
    Bach
    et que dire, à propos du même
    Bach
    du génialissime et intemporel
    Art de la Fugue
    de 1740 ? Boismortier produit des musiques de divertissement pour une époque où les
    Music-Hall chantés par
    Charles Trenet n'existent pas encore, ni le cinéma, et où la production musicale des
    confrères sert souvent la liturgie…
  Tant les ballets que les sérénades sont des musiques pétulantes et animées.
    Ô la thématique et la composition ne recourt pas au contrepoint ésotérique
    de
    Bach… Oui, et alors…
  Joseph
    de Boismortier
    a composé dans tous les genres avec un intérêt marqué pour la flûte
    traversière qui allait supplanter définitivement les flûtes à bec au cours
    du XVIIIème siècle.
  Les sonates pour flûte et clavecin ou pour une multitude de combinaisons
    instrumentales (bois, violoncelles, etc.) constituent une part non
    négligeable de son catalogue. On trouve aussi des curiosités comme ses
    six concertos
    pour cinq flûtes (enregistré par
    Hervé Niquet). 
  Musique facile ? Laissons le musicologue Serge Gregory s'exprimer :
    "…
    une plume prolixe, vive, inventive, jamais guettée par la lassitude,
        soucieuse de plaire certes, mais attentive au travail bien fait, qui
        s'égare parfois à croquer un mouvement d'une réelle profondeur
        expressive propre à toucher les vrais musiciens tout en distrayant les
        dilettantes.".
Côté musique orchestrale, j'ai le sentiment que de Boismortier s'amuse et souhaite nous amuser. À l'effectif instrumental traditionnel de l'époque baroque, il ajoutera dans ces Fêtes de village la vielle et la musette, instruments bucoliques par excellence.
  La symphonie ne connaîtra son essor qu'à partir de 1740.
    Concerto grosso,
    sinfonia,
    sérénade et autres divertissements sont
    les genres orchestraux qui brillent encore de leurs derniers feux. Le public
    est friand de badineries lors des
    soirées musicales. Dans l'album du jour, présenté comme un programme de
    concert, le dada bienvenu de
    Hervé Niquet, se mêlent quatre ballets d'une
    petite dizaine de minutes chacun, une grande
    sérénade comportant pas moins de 15
    mouvements et une courte "gentillesse"
    composée de trois mini airs, "gentillesse" : un titre de morceau propre à
    Boismortier
    a priori, qui n'affiche aucune ambiguïté quant à sa finalité mondaine et
    plus si affinité 😊 … 
         
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| Hervé Niquet | 
  Hervé Niquet
    avait été mis en compétition avec son homologue anglais
    Robert Hollingworth lors de la parution de deux albums en 2011/2012 et consacrés à la Messe à
    40 & 60 voix de
    Alessandro Striggio.
    (Clic)
    Un match nul au sommet. À l'époque, je ne m'étais pas étendu sur la carrière
    de ces artistes. J'avais apprécié le souci d'Hervé Niquet
    d'intercaler des prières a cappella entre celles de l'ordinaire liturgique
    pour atténuer l'austérité de cette majestueuse polyphonie de la Renaissance.
    La variété apportée à cette reconstitution d'un office de 1543 se
    retrouve dans la fantaisie des enchaînements du disque de ce jour.
    
  Hervé Niquet
    né en 1957 est l'une des figures importantes de la musique française
    et pas uniquement par son travail sur la période baroque. Le claveciniste et
    chef d'orchestre défend à juste titre que la musique de notre pays, voire
    occidentale, se conçoit comme une continuité, du moyen-Âge à nos jours. Il a
    également chanté comme ténor dans l'ensemble les
    Arts Florissants
    de
    William Christie
    entendu le jour de Noël. Il fonde en 1987 l'orchestre baroque
    Le concert Spirituel
    qu'il dirige toujours. La musique baroque à redécouvrir est la clé de voute
    de l'ensemble avec des concerts et gravures dédiés à
    André Campra,
    Jean Gilles,
    Joseph Bodin
    de
    Boismortier,
    Marc-Antoine Charpentier
    déjà cité plus avant. Comme tous les passionnés de ces musiques,
    Hervé Niquet
    assure un travail musicologique important pour obtenir les sons et la
    légèreté la plus authentique dans ses interprétations. Sa discographie est
    sidérale, y compris dans les répertoires contemporains de
    Debussy
    et
    Ravel, réalisation qui trouve sa logique dans la conception du maestro de
    l'histoire de la musique sans rupture stylistique franche.
  
         
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| Fête de village en Normandie (Jouhaux -1830) | 
         
       | 
    
| David Tenier | 
  Analyser ces ouvrages galants et primesautiers de manière savante n'a pas
    grand sens dans l'esprit du blog. À noter que Naxos, réputé pour la
    platitude de ses présentations (voir vidéo), propose cet enregistrement dans
    une édition à la jaquette bariolée et que livret ne comporte pas huit pages
    mais 62 ! Des détails pointus sur les modes de compositions sophistiqués de
    Boismortier
    sont passionnants.
Les orchestrations rassemblent : Violon I & II, 2 hautbois, 2 flûtes traversières, 2 flûtes à bec, 1 basson, 2 musettes, 2 vielles à roue, 2 violoncelles et 1 contrebasse, orgue positif et clavecin, Hervé Niquet dirige Le concert Spirituel et joue d'un second clavecin.
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          [0:00] Premier Ballet opus 52 
           
          [8:56] Cinquième gentillesse opus 45 
 
           
          [15:42] Deuxième Ballet  
           
          [24:39] Sérénade opus 39 
 
           
          [57:55] troisième Ballet opus 52 
           
          [1:05:41] Quatrième Ballet opus 52  | 
    
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         Écoute au casque ou avec des enceintes additionnelles plus que conseillée. Le son des PC, sauf exception, est vraiment une injure à la musique… 
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         INFO : Pour les vidéos ci-dessous, sous réserve d'une écoute directement sur la page web de la chronique… la lecture a lieu en continu sans publicité 😃 Cool. 
           A Gauche : La Fête de village (Rubens - 1638) 
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