Vie, mort, destin… Albert Camus avait philosophé sur le thème de l'absurdité d'un monde incompréhensible dans son essai le mythe de Sisyphe que je feuilletais hier… (les puristes me feront remarquer que Camus centre sa réflexion sur la pertinence du suicide face à un tel monde, à son chaos.) Le suicide n'est pas vraiment le sujet du jour jour, mais franchement, la mort d'un homme jeune fauché en plein envol n'est-elle pas d'une totale absurdité ?
Lars Vogt en 2011 |
Ce matin, j'apprends la disparition à 51 ans du pianiste et maestro
Lars Vogt. D'autant plus glaçant comme annonce que dans deux mois j'aurai vingt de
plus que ce musicien emporté par la maladie ! Et puis l'artiste avait mis
son talent, notamment par sa discographie, au service des romantiques parmi
les plus connus :
Beethoven,
Schumann
et par-dessus tout
Brahms. Ayant déjà écrit des chroniques sur les plus essentielles œuvres du trio
de génies précité pendant les onze années passés, il m'était difficile de
présenter une interprétation de Lars Vogt. J'ai évoqué il y a quelques semaines mon désir de vous faire découvrir
des versions alternatives de chefs-d'œuvre déjà commentés ; c'était le cas
il y a deux semaines avec la
symphonie Alpestre
de
Richard Strauss
dans l'enregistrement culte de
Karl Böhm. Fan des deux concertos pour piano
de
Brahms
déjà entendus sous les doigts de
Nelson Freire et
Claudio Arrau… (Index), cette triste actualité m'offre la possibilité que nous écoutions de
nouveau ces deux "monuments" tout en rendant hommage à
Lars…
51 ans ! Bon sang, ce n'est pas un âge pour disparaître en quelques
semaines à cause d'une saleté de cancer qui aurait mieux fait de
s'intéresser à quelques vieux dictateurs podagres. Désolé pour ce propos
rageur et si vain qui ne changera rien.
Lars Vogt
: une vie écourtée, et qui me rappelle celle du jeune chef
Yakov Kreizberg, accompagnateur fidèle de la violoniste et pianiste
Julia Fischer. Lui aussi nous a quitté en 2011 à l'âge de 51 ans, en cause la
même maladie satanique. À noter que les deux artistes interprétèrent en
février 2002 le
24ème concerto
de
Mozart
lors d'un concert de la
Philharmonie de Los Angeles.
En janvier 2013, Lars Vogt interpréta le 1er concerto de Beethoven accompagné par l'orchestre de Paris dirigé par Herbert Blomstedt, le chef danois-américain fêtait à l'époque ses 86 ans ; il poursuit sa carrière à 95 ans. Juste une petite chute en juin, mais rassurons-nous, il dirigera Schubert à Paris en avril 2023. Herbert Blomstedt est depuis des années le doyen des maestros en activité ! Comprend qui pourra. Avec le sourcil broussailleux, l'humour et les idées claires, on peut dire que ce musicien de talent entrera vraisemblablement dans le Guiness des records de longévité.
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Né à Düren en Allemagne du nord en 1970,
Lars Vogt
devient un virtuose apprécié et primé dès l'âge de 20 ans en 1990. Il
se produit dès lors avec les plus grands chefs, citons hormis
Herbert Blomstedt,
Claudio Abbado,
Mariss Jansons,
Simon Rattle
et donc les orchestres de renom :
symphonique de Londres, de
Chicago, les
philharmonies
de
Berlin
et de
Vienne.
Il poursuit également une carrière chambriste, principalement avec le
violoniste
Christian Teztlaff
avec qui il enregistre les trois sonates de…
Brahms… très logiquement pourrait-on dire.
Attiré par la carrière de chef d'orchestre, il prend en 2015 la direction de l'orchestre de chambre anglais Royal Northern Sinfonia. Il organisera une tournée de cet ensemble en Asie. Il est important d'ajouter que Lars Vogt interprétera les grands concertos classiques et romantiques à la fois comme soliste et chef d'orchestre. Si cette option n'est pas rare pour interpréter Mozart (Barenboïm, Uchida, Perahia, etc.), l'orchestration mozartienne conservant un effectif chambriste, ce qui n'est pas le cas pour ceux de Brahms. Diriger l'orchestre symphonique romantique au grand complet et jouer la partie de piano pendant 50 minutes et plus relèvent déjà plus de l'exploit.
Je propose d'écouter ces deux concertos interprétés par
Lars Vogt
et le
Royal Northern Sinfonia. Les deux exécutions ont été publiées par le label Ondine sur deux
albums complétés par diverses pièces de
Brahms. La critique professionnelle et les mélomanes ont accueilli avec
enthousiasme ces gravures au ton épique.
On trouvera dans Wikipédia une liste de ses autres enregistrements
marquants.
Adieu Lars, place à Brahms et Beethoven…
Dommage, la vidéo Beethoven de Lars Vogt et Herbert Blomstedt est bloquée. Voici un bel échange : le concerto N°3 de Beethoven. Lars Vogt est accompagné par l'orchestre de la radio de Francfort dirigée par la jeune cheffe américaine Karina Canellakis.
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