vendredi 29 décembre 2017

STAR WARS VIII de Rian Johnson (2017) par Luc B.



Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine, il y avait des rédacteurs de génériques français travaillant pour la plus grosse production de cinéma mondiale, Disney, qui ne connaissaient pas les règles élémentaires de l’orthographe… La Force peut beaucoup, mais visiblement ne sait pas accorder l’auxiliaire être… Ainsi, quand le texte jaune défile dans la perspective, comme au début de chaque épisode de la saga, peut-on lire : « La Résistance s’est livré... ». Comme dirait Yoda : Au féminin est le sujet, « ée » doit donc prendre le participe… Véridique !
Après cette cocasse mise en bouche, que vaut ce huitième épisode de la saga intergalactique ? Sur le plan scénaristique, ce VIII n’apporte pas grand-chose de neuf, un épisode pour rien. Aucun développement. On reprend les mêmes, et on recommence. A savoir les vaisseaux de la Résistance (en rade de carburant, y’avait un blocus routiers ?!!) pourchassés par ceux de l’Empire. Une nouvelle arme qui ne va pas tarder à décimer les gentils, sauf s’ils peuvent s’introduire dans le vaisseau amiral, et détruire un générateur ultra bien gardé, mais auquel on peut accéder (on le verra plus tard) avec une simple carte de crédit… Du déjà-vu. Cet opus manque cruellement de tension dramatique.
En parallèle, on retrouve Ray, l’héroïne du VII, qui rappelez-vous, avait retrouvé Luke Skywalker, dernier Jedi en activité, retraité, seul sur son île. Et qui ne veut en aucun cas revenir dans le jeu. Il en a soupé de ces histoires de bien et de mal, n’aspire qu’à mourir en solitaire,  pêcher de gros poissons (scène ridicule !) et qu’on lui foute la paix. Mais alors, pourquoi avait-il – dans l’épisode précédent – tout fait pour qu’on le retrouve, grâce à une carte Michelin numérique glissée dans un droïde à l’attention de la Résistance ?
Ce qui nous amène au principal défaut de ce film : la cohérence des personnages. Comment peut-on imaginer Luke Skywalker, qui a tant combattu, s’est tant sacrifié, qui avait traversé la galaxie pour libérer Han Solo et Leia des griffes de la grosse limace (épisode VI, et oui les limaces ont des griffes), bref, comment imaginer le héros de notre enfance rechigner à voler au secours de sa propre sœur, à contrecarrer les plans maléfiques de son neveu Kylo Ren, parricide de son ami Han Solo ? Parce qu’il a échoué dans l’apprentissage du petit ? C’est un peu court. Que l’acteur Mark Hamill n’ait que ce vieux ronchon de Skywalker à défendre, c’est triste.
Et Rey, dont tout le monde se demandait qui elle était réellement, elle qui avait semble-t-il la Force en elle ? On aura des réponses ? Non. Une simple fille de carrossiers… Et Finn, lui aussi héros de l’épisode VII, qui faisait équipe avec Rey, que vient-il faire ? De la figuration. Il doit retrouver un type capable de craquer les codes d’accès du vaisseau amiral. Une aventure parallèle qui aurait dû prendre 10 minutes à l’écran, mais qui s’éternise. Le scénariste lui a collé une fille dans les pattes, Rose, niaise et sentimentale, une petite employée lambda, qui va évidemment se révéler très forte en maniement de tout.
Du côté des méchants, c’est pareil. Kylo Ren n’a toujours pas le charisme de son grand père, Vador, et son projet de devenir calife à la place du calife se comprend mal, à ce stade. Pourquoi vouloir dézinguer Snoke, le suprême méchant successeur de l’Empereur, plutôt que de s’en servir habilement à ses propres fins ? Et Snoke justement… Une tête de Quasimodo version Anthony Quinn, pas terrifiant pour un sou, quand l’Empereur, sous sa capuche, dont on ne devinait que les petits yeux rouges perfides sur son teint blafard, nous foutait les jetons à chaque apparition. Snoke, donc, le plus puissant des Siths, qui s’introduit dans les pensées de tout le monde, et ne voit même pas arriver le coup bas de Kylo, pourtant à trois mètres de lui…
Certes, Georges Lucas n’est pas Ingmar Bergman, mais ses personnages avaient au moins une qualité. Ils luttaient contre leurs faiblesses, étaient tiraillés par leurs doutes, leurs peurs, étaient animés par leur soifs de vaincre les Forces du Mal. Il y avait, osons le dire, un aspect shakespearien dans l'affaire. Y compris dans la deuxième (et pas terrible) trilogie, avec un épisode III où le jeune Anakin (futur Vador) était écartelé entre l’amour de sa mère, son affection pour Obiwan, et les projets dictatoriaux de Palpatine, alias l’Empereur. Revus et corrigés par Disney (qui a racheté la franchise), les personnages sortent des rails, ils sont soit gentils, mais très gentils, soit méchants, mais pas très méchants. Mais n’ont plus rien d’ambigus. Ils sont nombreux, si bien que dans ce film, il n’y a pas franchement de premiers rôles, mais une ribambelle de seconds couteaux, qui apparaissent et disparaissent au gré des séquences.
Ainsi, Phasma réapparait, mais pour pas grand chose, juste le temps de crever. Ce plan avec cet œil, mais ça veut dire quoi ? Dameron (Oscar Isaac) est tête à claques, même profil, pas d'évolution. Le nouveau DJ, pourtant joué par Benicio Del Toro (envoyez le cacheton) joue le mercenaire cynique, comme Harrison Ford en son temps, mais ne s'impose pas vraiment. La trahison fait long feu.
Ce film a aussi un problème dans la narration. On passe sans cesse d’une action à une autre, sans réelle transition, autre que le ciseau du chef monteur. Ainsi, Rey, dont on nous dit qu’elle s’est échappée du repère de Snoke avec sa capsule de secours (ah bon ? si vous le dites… j’aurais préféré le voir), revient 10 minutes plus tard dans le film avec le vaisseau Millénium, participe à une bataille, mais redisparaît ensuite, pour revenir à la fin, alors qu’on est censé être en temps réel ! Question : elle a fait quoi pendant qu’on ne la voyait pas ?  
Alors oui, sur la forme, le film est spectaculaire, les effets spéciaux sont évidemment réussis, certains décors aussi, comme l’antre de Snoke, tout en rouge vermillon, ou cette planète où se situe le dernier combat au sol, un sol blanc, justement, comme de la neige, qui recouvre une terre rouge sang, du plus bel effet. Grosse allusion à l’épisode V (mon préféré) avec assaut des dromadaires mécaniques. Mais encore une incohérence… Comment une arme qualifiée d’Etoile de la Mort miniature, censée détruire des planètes entières, ne peut-elle pas venir à bout d’une douzaine de résistants planqués dans une grotte ?! Les méchants sont vraiment crétins. Faut pas effrayer les mômes.
Le film est le plus long de la saga : 2h30. Beaucoup trop long pour le peu d’intrigues, il n’y a ni hauts ni bas, ni rebondissements ni climax, une succession ininterrompue et plate de duels, poursuites, mais aucune scène qui ne sort vraiment du lot. Du souffle ? Une simple brise, et encore. De la mise en scène ? Non, de la mise en image, nuance. Et cette idée qui germe… et si les nouveaux propriétaires de la marque avaient voulu, eux, décimer les derniers Jedi ?
Car finalement, le réalisateur-scénariste Rian Johnson a fait beaucoup plus de dégâts que l’Etoile Noire, l’Empereur, Snoke et Vador réunis !

STAR WARS 8 (Rian Johnson, 2017)
couleurs  -  2h30  -  scope 2:40 (et 3D)

2 commentaires:

  1. Mhmmm...Je souhaitais le voir en VO, puis j'ai chopé la crève...Finalement j'irai pas..Pas de regret.
    L'épisode V, c'est L'Empire contre-attaque, au cours duquel Luke fait son apprentissage avec Yoda? C'est le meilleur, en effet!
    As tu vu Blade Runner 2049? (comme tu avais adoré Blade Runner...)
    Bonne fêtes Lucio!

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  2. Non pas vu le Blade... 2h50, pfff.... Merci Juan, bonne année à toi aussi

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