Serait-ce
le plus célèbre guitariste de Blues pas connu ? Pas pour les amateurs du genre,
en tout cas, pour qui Mike Bloomfield est un héros. Mais pas un guitar-héro, parce que
ce n’était pas dans le tempérament du monsieur, loin de là, gêné qu’il était, lui le petit bourgeois
juif de parents new yorkais, de se frotter au Blues des Noirs américains.
Ses parents l'inscrivent dans une école privée pour parfaire son éducation, mais Mike Bloomfield découvre au même moment la culture beatnick... et y'a pas photo ! Au début des 60's, il monte son propre
club, le Fickle Pickel, où il invite des musiciens de folk ou de bluegrass, n'hésitant pas à les rejoindre sur scène à l'occasion. Parmi les spectateurs, deux blancs-becs de ses amis : Nick Gravenites et Charlie Musselwhite. Le premier sera plus tard compagnon de route de Janis Joplin, le
second harmoniste dans le Muddy Waters Band.
avec le Paul Butterfield Blues Band |
Mike
Bloomfield ne reste pas longtemps avec Paul Butterfield, le temps de publier trois
albums qui font dates dans l’Histoire, pendants américains des premiers albums
de John Mayall en Angleterre. Bloomfield y croise le manche avec Elvin Bishop,
autre guitariste de blues, blanc, et leurs solos virtuoses épatent tout le
monde. Le style est tranchant, concis, à l’économie, voir la version explosive
du « I got my mojo working » de Muddy Waters, ou « Born in Chicago » et s’aventure
parfois vers la musique modale, dans de longues plages qui préfigurent le Rock
Psychédélique qui pointe son nez du côté de San Francisco, dans le « East
West » de 13 minutes. Le jazz n’est pas loin avec la reprise du standard
de Nat Adderley « Work Song » (repris en français par Claude
Nougaro). Avec THE PAUL BUTTERFIELD BLUES BAND, Bloomfield acquiert une sacrée
réputation, qui arrivera aux oreilles de Bob Dylan. Le héraut folkeux tourne la
page de l’acoustique, électrifie sa musique, et cherche des accompagnateurs pour
le festival de Newport, et sa bombe atomique « Highway 61 revisited ».
avec Bob Dylan |
Il
se lance dans un projet de super-groupe, réunissant autour de lui son pote et
chanteur Nick Gravenites, le batteur de soul Buddy Miles (qui jouera ensuite
pour Jimi Hendrix), le bassiste de folk Harvey Brooks, l’organiste Barry
Golberg, et une section de cuivres. Le groupe se baptise THE ELECTRIC FLAG, et
Bloomfield y a comme projet de réunir l’ensemble des composantes de la musique
américaine. Les cuivres donneront une couleur jazzy à certains titres, un
peu de folk, du rock, beaucoup de soul, des effets progressifs et
psychédéliques (le clavecin sur « She should have just », les
dérapages du long « Another country ») et bien sûr du Blues.
THE ELECTRIC FLAG sera du festival de Monterey en 1967. Le premier album qui sort en mai 1968 « Long time comin’ » débute par une version survoltée de « Killing Floor » de Howling Wolf, où Bloomfield se prend trois grilles de chorus, vlan, prends ça dans les dents. J’adore le « Groovin’ easy » ou « Wine » un shuffle festif est swinguant à souhait, un blues qui vient des tripes « Texas ». Un bon album, varié, énergique, mais parfois grandiloquent, Gravenites au micro n’y allant pas de main morte !
THE ELECTRIC FLAG sera du festival de Monterey en 1967. Le premier album qui sort en mai 1968 « Long time comin’ » débute par une version survoltée de « Killing Floor » de Howling Wolf, où Bloomfield se prend trois grilles de chorus, vlan, prends ça dans les dents. J’adore le « Groovin’ easy » ou « Wine » un shuffle festif est swinguant à souhait, un blues qui vient des tripes « Texas ». Un bon album, varié, énergique, mais parfois grandiloquent, Gravenites au micro n’y allant pas de main morte !
The Electric Flag |
Le disque est un succès incroyable, Bloomfield en passe de devenir une idole, au même titre qu’Eric Clapton avec Cream. La suite, on en a parlé ici même [ on clique ici ] sera « The Live Adventures of Mike Bloomfield et Al Kooper », enregistré live au Fillmore West, au cours de quatre soirées, où les musiciens improvisent sur des reprises bluesy. Elvin Bishop et le jeune Carlos Santana sont de la partie, lorsque Bloomfield, trop éreinté par le manque de sommeil et la dope, ne peut monter sur scène.
Al Kooper, Mike et Stephen Stills, la "Super Sessions" |
Aucun projet n’aboutit réellement dans ce début des années 70. Son album solo « It’s not killing me » dans lequel on retrouve de belles pièces blues, jazzy ou folk, est un échec, alors qu’il est dans la lignée des Kooper/Bloomfield. Suivra « Trumvirate » enregistré en 1973 avec Dr John au piano et John Hammond Jr à la guitare, un magma progressif curieux et limite prétentieux, qui ne m’a pas convaincu. Il va refaire une apparition dans le groupe THE ELECTRIC FLAG en 1974, et participer au groupe KGB, avec Ray Kennedy au chant, Barry Golberg à l’orgue et Carmin Appice à la batterie.
son dernier album en 1981 |
Mike
Bloomfield n’aura finalement eu qu’une période activité intense assez courte, et toujours en collaboration avec d'autres musiciens, de 1965 à
1970. Mais 5 années qui ont sacrément compté, entre la période Paul
Butterfield, la période Dylan, Kooper, et le disque « Super
sessions » que beaucoup ont rangé sur l’étagère « culte ». Le jeu de Bloomfield puise aux racines du
Chicago Blues, il a été un des premiers (le premier ?) guitaristes blancs
à s’y frotter, à percer, à être reconnu par ses pairs. Son caractère
introverti, sa méfiance du succès, son addiction à la drogue l’ont empêché
d’accéder au statut qu’il méritait largement. Lui s’en
foutait, et nous aussi !
L’important c’est son jeu, sa vitalité, l’émotion qu’il distillait dans chaque note. Il a certainement été, pour moi, celui qui m’a fait découvrir et aimer le blues, au même titre que Clapton, et avant même de découvrir les maîtres de la guitare Noirs, comme Albert Collins, Freddy King, ou Buddy Guy. Le best-of « Bloomfield, a retrospective » (photo en intro de l'article) paru en 1983, donne a très bon aperçu du monsieur.
Très peu (aucun ?) document vidéo digne de ce nom en stock, à part celui-ci, dont on se contentera, avec Electric Flag "Wine".
Un extrait d'un documentaire, disponible en entier sur le web, mais sans sous-titre.
L’important c’est son jeu, sa vitalité, l’émotion qu’il distillait dans chaque note. Il a certainement été, pour moi, celui qui m’a fait découvrir et aimer le blues, au même titre que Clapton, et avant même de découvrir les maîtres de la guitare Noirs, comme Albert Collins, Freddy King, ou Buddy Guy. Le best-of « Bloomfield, a retrospective » (photo en intro de l'article) paru en 1983, donne a très bon aperçu du monsieur.
Très peu (aucun ?) document vidéo digne de ce nom en stock, à part celui-ci, dont on se contentera, avec Electric Flag "Wine".
Un extrait d'un documentaire, disponible en entier sur le web, mais sans sous-titre.
Grand artiste!
RépondreSupprimerUne excellente compilation retraçant l'ensemble de sa carrière est sortit en 2014 : "From His Head To His Heart To His Hands"
Au début de la Story, ce n'est pas Charlie Musselwhite au lieu de Charles Musselwhite?
Charlie, effectivement... Arrrgh, j'étais pas loin !
RépondreSupprimerMerci de ton passage.