jeudi 23 janvier 2014

LA BALLADE DE LILA K - de Blandine Le Callet (2010) par Foxy Lady




« La ballade de Lila K » fait partie de ces livres rares, ces petites pépites que l'on découvre par hasard, et qu'on lit, le cœur battant, en se disant qu'il se passe quelque chose d'unique, un petit miracle comme on en connaît peu, et qui va nous marquer pour très longtemps.

L'histoire du roman : L'action se passe en 2100.
 Alors qu'elle n'est encore qu'une enfant, Lila est arrachée des bras de sa mère par des hommes cagoulés qui la conduisent dans un Centre, mi-pensionnat, mi-prison.
Là-bas, elle réapprend à parler, à manger, à marcher malgré le dégoût et la peur que lui inspirent les autres. Totalement asociale, polytraumatisée, craintive et fragile, elle passe pour une demeurée, alors qu'elle est  surdouée. Au bout de quelques mois, le Directeur du Centre, Monsieur Kauffmann, devient son tuteur. Avec lui, elle découvre la confiance, l'amitié et surtout  le pouvoir des livres.
Car dans ce futur plus inquiétant qu'il n'y paraît, les livres sont devenus rares car dangereux, à la limite de l'interdit (l'encre et le papier seraient nocifs à la santé), les individus sont épiés du matin au soir par un système de vidéo-surveillance, les grossesses sont contrôlées, les animaux génétiquement modifiés, des chimères sont engagées dans des travaux subalternes, et personne n'ose se révolter contre l'ordre établi de peur d'être emprisonné...
Vous l'avez compris, nous sommes dans une société sécuritaire et totalitaire qui n'est pas sans rappeler « 1984 » de Georges Orwell ou « Fahrenheit 451 » de Ray Bradbury.
Ainsi donc, Lila (le narrateur de l'histoire) va peu à peu se faire docile dans le but de  sortir du Centre à sa majorité afin de retrouver sa mère et sa mémoire perdue. Pour se faire, elle va tout mettre en œuvre pour ne pas éveiller les soupçons de ceux qui l'observent  et qu'elle nomme, à l'instar de Monsieur Kauffmann, « les étroits ». Au cours de sa quête, elle croisera de nombreuses personnes qui l'aideront à se reconstruire et la mèneront vers la vérité : Fernand son 2ème tuteur et son épouse Lucienne, Justinien appelé « Scarface », qui travaille avec elle à la bibliothèque, et surtout Milo Templeton, qui sera bien plus pour elle qu'un simple patron.
Dans cet univers dystopique, il y a l'Intra-muros et l'Extra-muros, appelé « la Zone »,  lieu de toutes les pauvretés et siège des rébellions et du terrorisme.
C'est précisément dans cette « Zone » que Lila devra retourner pour faire la lumière sur son enfance perdue et essayer de retrouver la trace de cette mère qu'elle n'a jamais oubliée, seule lumière dans son existence qui lui permet de ne pas sombrer.

Il est difficile de parler d'un roman comme celui-ci, étrange hybride littéraire, car aucun mot, aussi élogieux soit-il, ne peut décrire ce qu'on ressent à la lecture de ces pages.
Avec « La ballade de Lila K », Blandine Le Callet, essayiste et romancière française née en 1969,  nous coupe littéralement le souffle. Son roman est  intense, troublant, à fleur de peau, et nous fait nous interroger sur les dérives d'une société totalitaire, le lien indéfectible mère-enfant, la maltraitance, la possibilité de survivre dans un monde hostile où il n'y a pas de place pour les faibles, mais surtout la force du  pardon.

Toute la puissance du livre réside dans cet amour qui dépasse tout, transcende l'ignominie auquel il est soumis et se relève sans jamais verser dans le larmoyant.
Lila K aurait pu détester l'humanité pour toutes les souffrances connues, mais son intelligence lui montre une autre voie, celle de la liberté.

Une très belle lecture, simplement bouleversante.


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