- Alors ma p'tite dame, qu'est ce que je vous mets ?
- Ben, un truc de saison, vous avez ça ?
- De saison ? Y’a le dernier Woody Allen, il est très bien
- Vous dites ça tous les ans…
- Ben, un truc de saison, vous avez ça ?
- De saison ? Y’a le dernier Woody Allen, il est très bien
- Vous dites ça tous les ans…
- Ah
non, cette fois c’est vrai !
C’est
vrai qu’il est très bien ce dernier film de Woody Allen. Et BLUE JASMINE surprend
dès la première image parce que c’est filmé en scope (la première fois
je crois)... L’important n’est pas là, mais à ce qui arrive à Jasmine,
mariée à Hal, un homme d’affaire très riche, dont le modèle pourrait être
Bernard Madoff. L’empire financier de son mari s’effondre, Hal est arrêté, et
Jasmine n’a plus que ses yeux pour pleurer, et ce qu’il lui reste sur
elle : sa veste Channel, son sac Hermès et ses valises Vuitton. C’est
ainsi qu’elle s’exile à San Francisco, trouver refuge chez sa sœur Ginger.
Ginger est divorcée, vit avec ses deux gosses dans un petit meublé, avec son
nouveau mec, un mécano. La cohabitation est difficile…
Difficile,
car le personnage de Jasmine est confronté à plusieurs problèmes. D’abord c’est
une femme totalement déboussolée, psychologiquement instable, accro au Xanax.
Dans la première scène de l’avion, on la voit parler à sa voisine, parfois même
d’aspects intimes de sa vie. Deux amies en vadrouille, pense-t-on. Mais à
l’arrivée, cette voisine part de son côté, et dit à son mari : "elle
n’a pas arrêté de parler toute seule pendant le voyage"… Donc très vite, on sait
que Jasmine est instable, malade. C’est aussi une femme humiliée par le
comportement de son mari, un homme célèbre, sous les feux des médias. Par ses escroqueries financières qui laissent sans un sou des milliers de braves gens, mais aussi
par son infidélité. Le monde de Jasmine
s’écroule. Et enfin, Jasmine est une femme
déracinée. Socialement. Elle vient de New York où elle vivait dans le luxe.
Elle se retrouve avec une sœur caissière, à San Francisco, avec des types qui
ont du cambouis sur les mains, boivent de la bière en regardant la boxe à la
télé.
Le
scénario, de Woody Allen est assez exemplaire. Il y a l’histoire au présent, Jasmine
à San Francisco, et en flash-back, s'inscère de temps à autre la Jasmine d'avant, de New York, riche, frivole, puis suspicieuse... Il y a un double suspens : comment un couple s'est défait, et est-ce qu'un autre va naître. Et les deux s'entremèlent merveilleusement. La notion de classes sociales est
omniprésente, à travers les signes extérieurs : les vêtements et objets de
marque dont Jasmine ne se sépare pas, c’est son lien avec son ancienne vie.
Jasmine et Ginger (qui a été ruinée aussi après la chute de Hal, et divorça) n’ont pas eu le même parcours dans la vie, et Jasmine explique cela par la génétique ! C'est dire dans quelle bulle de médocs elle vit !
Et puis il y a comment Woody Allen organise son film, et les rencontres que fait Jasmine. Elle essaie de refaire surface, et on lui présente des hommes. Y’a d’abord un copain du mécano, puis un dentiste, puis un riche jeune veuf qui se prédestine à la politique. On monte d’un cran dans les classes sociales. Le rapport au corps est important aussi. Quand le pote du mécano lui dit bonjour,veut l’embrasser, Jasmine a un mouvement de recul assez violent. Le dentiste va un peu plus loin, une main qui frôle une hanche, mais quand il se fait plus entreprenant, elle le rejette (la scène est cocasse et tragique à la fois). Quand c’est l’apprenti ambassadeur qui l’embrasse, c’est différent, il lui dit : "on fait quoi maintenant ?", elle répond : "on recommence"…
Et puis il y a comment Woody Allen organise son film, et les rencontres que fait Jasmine. Elle essaie de refaire surface, et on lui présente des hommes. Y’a d’abord un copain du mécano, puis un dentiste, puis un riche jeune veuf qui se prédestine à la politique. On monte d’un cran dans les classes sociales. Le rapport au corps est important aussi. Quand le pote du mécano lui dit bonjour,veut l’embrasser, Jasmine a un mouvement de recul assez violent. Le dentiste va un peu plus loin, une main qui frôle une hanche, mais quand il se fait plus entreprenant, elle le rejette (la scène est cocasse et tragique à la fois). Quand c’est l’apprenti ambassadeur qui l’embrasse, c’est différent, il lui dit : "on fait quoi maintenant ?", elle répond : "on recommence"…
Ainsi Jasmine
semble revivre au contact de ses semblables. Elle cherche à rebâtir son univers
perdu, quitte à être odieuse avec ceux qui cherchent à la soutenir. Mais Woody
Allen ne s'apitoie pas, et équilibre son scénario en montrant aussi la vie affective de Ginger, dévastée à sa façon. Il y
a dans ce film toute une galerie de personnages qui cherchent l’amour, le
confort d’une relation, le respect. Il est clair que les relations humaines et
sentimentales échappent à toutes classes sociales, à l’aisance intellectuelle
ou financière. Finalement, Woody Allen a tourné un film marxiste !
BLUE
JASMINE n’est pas une comédie, mais aurait pu l’être. On est sur le fil. On
sait que la frontière entre les deux genres est souvent ténue. Il y a des moments plus légers
(le superbe face à face avec les gamins dans la caféteria, sa relation avec le dentiste) mais si on sourit, c'est un sourire jaune. Derrière chaque réplique, il y a la douleur qui pointe. C’est
un film différent des Woody Allen classiques, dans la lignée de MATCH POINT ou
LE REVE DE CASSANDRE au sens où on n'y retrouve pas les ingrédients habituels : Woody ne joue pas dedans, le milieu social et
géographique est différent, et le ton est noir. Au sens Film Noir, car je suis sûr que ce scénario pouvait basculer facilement en drame criminel. Il s'en faut de peu.
Et c’est un film qui bénéficie surtout d’une actrice absolument prodigieuse : Cate Blanchett. Elle est… elle est… plus que ça encore ! Elle possède la grâce et la sensibilité d’une Gena Rowlands dans UNE FEMME SOUS INFLUENCE de Cassavetes (les deux films ont un lien). N’oublions pas tous les autres comédiens, impeccables aussi, mais Cate Blanchett illumine tous les plans où elle apparaît.
Et c’est un film qui bénéficie surtout d’une actrice absolument prodigieuse : Cate Blanchett. Elle est… elle est… plus que ça encore ! Elle possède la grâce et la sensibilité d’une Gena Rowlands dans UNE FEMME SOUS INFLUENCE de Cassavetes (les deux films ont un lien). N’oublions pas tous les autres comédiens, impeccables aussi, mais Cate Blanchett illumine tous les plans où elle apparaît.
On a
dit : c’est un grand cru ! Le meilleur depuis MATCH POINT ! J’avais adoré WHATEVER WORK et le pétillant MINUIT A PARIS, mais c’est vrai que VICKY
BARCELONA, TO ROME WITH LOVE, paraissaient tournés en rond, et SCOOP était une aimable petite récréation. BLUE
JASMINE est un magnifique portrait de femme, et encore une fois avec un film de Woody Allen, il laisse au
spectateur l'impression que faire un très bon film semble facile… C'est la
marque des grands !!
Et on se retrouve dimanche pour une autre actu-ciné, plus rigolote celle-là...
- Z'avez été voir La Vie d'Adèle ?
- Rigolo, j'ai dit, Sonia, rigolo...
Et on se retrouve dimanche pour une autre actu-ciné, plus rigolote celle-là...
- Z'avez été voir La Vie d'Adèle ?
- Rigolo, j'ai dit, Sonia, rigolo...
Je l'ai aussi, personnellement, beaucoup aimé. Quels portraits corrosifs et quels superbe brochette d' acteurs il y a là. Un film que je me ferai un plaisir de me procurer en DVD dès sa sortie. Je pense en effet qu'il peut être appréhender de plusieurs façons et sous plusieurs angles.
RépondreSupprimerJ'ai également beaucoup aimé...
RépondreSupprimerCate Blanchett est une actrice que j'admire. Je ne me souviens pas l'avoir vue dans une daube. Ou alors elle sauvait le film du naufrage.
Et talent oblige, malgré cette admiration, je n'ai pas réussi à trouver son personnage de Jasmine sympathique à un seul moment. Pathétique, oui, souvent notamment quand par orgueil et vanité, elle fout en l'air ce qui aurait pu être une nouvelle idylle... Croire aimer et (se) mentir en même temps... pas bon comme plan.