Puis autre séquence qui a pour
personnage principal une maison. Une belle maison de bois rouge,
celle de la famille Borg. Qui en a vu passer des générations, et
là encore, la mise en scène parvient à nous faire entendre le coeur
de cette bâtisse, la mémoire du passé, par des plans
vides, des travellings qui serpentent dans les pièces, quelques
flash-back. La mère de Nora, et de sa sœur Agnès, vient de mourir.
Les proches se réunissent dans la maison familiale. On attend fébrilement le père : Gustav Borg. Séparé de son épouse de longue date, qui a
refait sa vie en Suède, c’était un grand réalisateur de
cinéma.La maison comme coffre à souvenirs (la scène du vase), le passé qui ressurgit, les relations compliquées entre le père et ses filles, le théâtre, le cinéma, le double, la création… Thèmes bergmaniens par excellence. Gustav Borg annonce travailler à un nouveau film, il souhaite que sa fille Nora joue le premier rôle. Elle refuse. Elle n’a toujours pas pardonné à son père d’avoir quitté le domicile. Alors qu’on célèbre sa carrière au festival de Deauville, Gustav croise Rachel Kemp (jouée par Elle Fanning), une vedette américaine en mal de cinéma d'auteur, à qui il propose le rôle écrit pour sa fille. Rachel accepte.
Tout ce qui tourne autour de la préparation du film est très intéressant. Gustav, qui réfléchit déjà en termes de plans séquence, renoue avec son vieux chef op’, presque grabataire, qui à la lecture du scénario recommande plutôt des plans fixes. Sous les sourires gênés on lit dans le regard de Gustav « ça ne pas pas le faire... ».
A une conférence de presse, on lui demande : « Votre film sera produit par Netflix, sortira-t-il en salle ? ». Gustav interloqué répond : « Bah, où voulez-vous qu’il sorte ? ». Sourires (encore) gênés du producteur… Gustav Borg est d'un autre temps, un maitre qu'on ne célèbre plus qu'en cinémathèques, qu'on soupçonne de capitaliser sur la célébrité de sa fille pour boucler son budget. Mais on sent aussi qu'il a le cinéma dans la peau.
Pendant les séances de lectures, l’actrice cherche des réponses, à comprendre le rôle, Gustav esquive malicieusement à chaque fois : « d’après toi ? ». Il embobine, séduit, finit par imposer Rachel Kemp à sa famille (il tourne dans la maison). Pour susciter la jalousie de ses filles ? L’actrice n’est pas dupe du manège de Gustav, qui lui fait teindre les cheveux en brun, comme Nora, et commence elle-même à douter.
On comprend que le trac maladif dont souffre Nora dans la première séquence, illustre sa peur de s’engager dans la vie, à faire le premier pas pour renouer avec son père. On attend leur face à face, qui n’arrivera pas. On reste sur la touche. C’est sa sœur qui lui fera finalement lire le scénario de son père : « Tout ce que tu attends qu’il te dise, et écrit là dedans ».
Alors oui, la fin est splendide, mise en abîme qui parvient à nous surprendre. Mais il faut attendre plus de deux heures. Je ne suis pas certain qu’un sujet pareil nécessitait autant de temps, de scènes qui se suivent et se ressemblent. Joachim Trier qui avait su si bien capter l’essence du personnage de Renate Reinsve dans JULIE, semble échouer ici.
C’est un beau film, mais il ne m’a pas touché.






Ce film sentirait le Bergman à plein nez ?
RépondreSupprimerJe valide sans l'avoir vu. Le vieux patriarche Borg est un réalisateur de cinéma ? Tiens, dans Les fraises sauvages, où le vieux toubib s'appelle Borg, et où il est joué par Victor Sjostrom, antique réalisateur et père du cinéma nordique ... y'a des fois où y'a tellement de hasards que ce n'est plus du hasard ...
Je n'avais pas fait le rapprochement avec "Borg", effectivement, une case de plus de cochée !
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