LUMIERE, L’AVENTURE CONTINUE est une compilation de 120 vues réalisées par Louis Lumière et ses opérateurs. Des vues, puisque tel était le nom donné à ces mini métrages de 50 secondes, réalisées pour la plupart vers 1895-96. Une première centaine de films avait fait l’objet du premier documentaire de Thierry Frémaux en 2016**, certains y apparaissent deux fois.
La restauration de ces vues est incroyable, d'autant que la vitesse a été corrigée. Pourquoi lorsqu’on regarde un vieux Charlot tout est accéléré ? Parce qu'à l'époque les caméras à manivelle tournaient entre 16 et 20 images par secondes, mais la vitesse de projection aujourd’hui est de 24 images secondes. Donc la bande passe plus vite, le mouvement est accéléré. C’est le même principe avec un téléphone portable dernier cri. Si vous réglez l’appareil sur 60 ou 120 images seconde, ou plus, lorsque vous regardez le résultat, ce sera du ralenti.
LUMIERE, L’AVENTURE CONTINUE permet de nous voir il y a 130 ans. Quel patrimoine ! Epoque où les Champs Elysées n’étaient pas goudronnées, où tout le monde portait des chapeaux, y compris les gamins qui avaient sur la tête des espèces de bérets plus larges qu’un parasol ! Passants, charrettes et omnibus se partageaient la voie routière, où sillonnaient aussi quelques tramways. Les scènes de bain sont toujours rigolotes avec ces femmes en jupon triple épaisseur ! Un film tourné au Japon montre des agriculteurs travaillant dans les rizières, une famille de Kyoto qui déjeune, on voit les rues d’Alger peuplées de costumes trois pièces et de djellabas, des danses rituelles en Afrique.
Il y a ce
formidable mouvement de cavaliers qui foncent au galop vers la caméra, ou plus
extraordinaire encore, cette vue de militaires descendant d’une
montagne, au loin, et venir au tout premier plan s’allonger en position de tir.
La construction du plan est stupéfiante (comme très souvent, le cadre était très travaillé, il fallait trouver le bon angle pour la caméra, dès le premier essai) mais surtout on se rend compte de la précision de la profondeur de champ, y'a toujours un p'tit détail à voir tout au loin. Tout est net, Lumière jouait beaucoup sur la profondeur, les diagonales, pour que l'image soit plus impressionnante.
Ce documentaire est entièrement illustré musicalement par des œuvres de Gabriel Fauré, contemporain des Lumière.
Bon exemple : lorsque
Lumière filme ses charpentiers, Frémaux indique que l’ouvrier est en chemise
blanche et cravate. Indication à priori crétine puisqu'on la voit, la chemise. Mais ça révèle que le brave homme s'était mis sur son 31, avait lustré sa
moustache, parce qu'il savait qu'on venait le filmer. Et donc que ces scénettes étaient très travaillées, composées, scénarisées. Parfois le bras du metteur en scène apparait dans le champ de la caméra, pour dire à tel ou tel de presser le pas, se ranger à droite...
Quitte à commenter les films, j’aurais préféré quelques détails techniques comme : pourquoi des films limités à 50 secondes ? En quoi la durée était-elle un souci, les Lumière ont-ils utilisé des bobines plus longues ensuite ? Pourquoi pas trois ou quatre films de 50 secondes mis bout à bout ? Pourquoi les caméras ne pivotaient pas sur un axe, de manière à faire des panoramiques ? Avait-on le moyen à l’époque de couper, monter un film, raccorder deux plans avec des axes de vue différents, montrer d'une avenue le trottoir de droite, puis de gauche ? Beaucoup d'éléments qui font le cinéma contemporain, l'esthétique, la mise en scène, les cadres, étaient déjà présents à la création. Sauf un : le montage. Cette grammaire, agencement et durée de plans, viendra avec Griffith.
Finalement, c’est davantage l’aspect sonore de ces films muets qui parfois dérange, je ne suis pas certain que Frémaux fût la meilleure personne pour commenter son propre documentaire (Podalydès ou Dussolier n’étaient pas libres ?!), le gars est trop bavard, comme les commentaires intempestifs et redondants dans une soirée diapos !
** le premier volet est disponible, en ce moment, sur la plateforme replay de France TV.
Il y aurait donc encore des soirées diapos? Mais quelle catégorie socio-professionnelle fréquentes-tu donc? Mets ça sur pellicule et dans moins d'un siècle, c'est toi qui seras à l'affiche.
RépondreSupprimerAh Non ! Il y a méprise... s'il m'est arrivé, dans ma prime jeunesse d'assister à des cérémonies diapos avec commentaires intempestifs, et l'inévitable et gênant incident "ah zut pardon, elle est à l'envers, ca ne prendra qu'une minute, attendez..." je n'ai jamais organisé moi même ce genre de projections. Que ce soit dit.
SupprimerC'est le genre de film (?) qui relève de l'ésotérique ...
RépondreSupprimerIl y a un dress code pour rentrer, galure d'époque, lavallière, moustache en guidon de vélo, veston et montre à gousset ?
Des films de 50 secondes ? En fait les Lumière Bros, c'était des tiktokeurs, ils avaient beaucoup de followers ?
Tiktokeurs ou instagrameurs de l'époque, c'est pas bête ! Pas de dress code pour rentrer, on laisse juste son cheval à l'extérieur, mais j'avoue que la moyenne d'âge était légèrement supérieure à la moyenne...
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