Si le premier tâcheron du coin avait sorti ce film, on l’aurait salué comme une excellente surprise. Mais derrière la caméra il y a Bong Joon-ho. Ca change la donne. C’est le réalisateur du génial et multi-primé PARASITE, et avant cela de MEMORIES OF MURDER, THE HOST, SNOWPIERCER, MOTHER… Donc il faut remonter le curseur, être un peu plus exigeant.
Ce qui arrive souvent quand un metteur en scène, si reconnu soit-il, répond aux sirènes hollywoodiennes. On lui offre des moyens confortables, des stars, une certaine liberté d’action, et ici, presque le final cut. Presque, parce que contractuellement, les deux parties se sont brouillées. Les artistes et leurs grandes idées ça va deux secondes, un film c'est fait pour rapporter du pognon. Avec les franchises Marvel, au moins, on sait où on va. J’imagine le brainstorming des cranes d’œuf du marketing pour vendre cet objet au grand public. La Warner et son nouveau patron qui s’y connaît autant en cinoche que moi en sinus cosinus (le gus qui avait écarté le dernier Eastwood des salles pour le balancer en streaming) ont exigé des scènes supplémentaires, et refait le montage. Conclusion : c’est un bide, tièdement accueilli, et une catastrophe financière. J'apprends par mes sources à Hollywood que ça y est : le film a été retiré des salles aux US pour passer direct en streaming.
Au départ c’est un roman de Edward Ashton : MICKEY 7. Le Mickey du titre c’est Mickey Barnes. Sa fonction : remplaçant. Un type jetable, comme un kleenex, on l’utilise pour diverses missions, s’il meurt c’est pas grave, on le réimprime, on lui réinjecte sa mémoire, et hop, il repart au turbin. Il est sympa Mickey, un peu benêt, mais un vrai gentil. Robert Pattinson se sort très bien des deux rôles. Sur Terre, son projet de se lancer dans la vente de macarons (oui, les p’tits gâteaux aux amendes!) tombe à l’eau, il doit du fric à des mafieux, doit déguerpir, s’engage dans une colonie humaine en partance pour la planète Nilfheim. Quand il signe son contrat on lui dit bien : « Vous avez lu les petites lignes ? ». Heu, oui… Visiblement non. Boum, on le flingue, on le ressuscite, il devient donc un remplaçant.
Le film trouve un second souffle avec la naissance de Mickey 18. Misant sur la mort du précédent, on en a généré un nouveau, mais ça ne c’est
pas passé comme prévu. On se retrouve avec deux Mickey, on appelle ça des multiples, et c'est interdit. Verboten. Un des deux doit
disparaître. Sauf que la copine de Mickey, adepte du
kamasutra, voit bien quel profit tirer (sic) sexuellement de la
situation, et garder les deux dans son lit !
Cette partie centrale du film est très réussie, même si la confrontation entre 17 et 18 arrive un peu tard. Bong Joon-ho est dans son élément quand il filme ses personnages, avec ce ton décalé, qui verse clairement dans la farce, un peu grivoise. Ce n’est pas le registre habituel des blockbusters SF, on imagine la Warner gênée par cet humour grinçant, et réclamer plus d’actions, plus d’effets. D’où un final grandiloquant, qui se traine, un peu niais, avec l'idée du traducteur, du Cameron tout craché ! La (fausse) dernière scène qui semble être un rêve est juste inutile, à moins. Bref, le film peine à conclure.
MICKEY 17 est très bien filmé (directeur photo Darius Khondji), divertissant, il fourmille d'idées. Bien qu'un peu longuet et avec un p'tit goût d’inachevé. Est-ce vraiment le film que Bong Joon-ho voulait faire ? Pas sûr, il a publiquement renié ce montage hybride. Verra-t-on un jour sa version ? En tous cas, c'est loin d'être la catastrophe décrite ici ou là (comme le dernier Coppola injustement descendu en flamme), un film qu'on regardera sans doute différemment dans quelques années.
Des types tous pareils envoyés sur une planète avec des bestioles dangereuses, ça me fait penser à starship troopers, la série B assumée de Verhoeven ...
RépondreSupprimerDupliquer des mickey avec une imprimante, faut se méfier du résultat, par ici ça a donné Mickey 3D ...
Concernant Bong, le pluvieux Memories of a murder est excellent. peut-être bien son meilleur. "The host" et "parasite" sont très bien, même si j'avais préféré à "parasite" "une affaire de famille", sorti à peu près en même temps, assez cousin par son scénario, et surprenant par sa "légèreté" surtout venant de kore-eda
"Une affaire de famille" c'était très beau, comme souvent avec Kore-Eda, mais dans "Parasite" c'était une vraie famille, pas un groupe reconstitué dont on ne connait finalement pas les liens. Chez Bong Joon-ho il y a davantage un regard sarcastique, un discours politiques, il se moque souvent de ses personnages, les riches comme les plus pauvres. Au moment de la sortie, je me souviens qu'il citait Chabrol dans ses influences.
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