Nema et Sonia
sont chez elles (elles sont en colocation depuis déjà plusieurs mois). Nema
passe l’aspirateur en chantant à tue-tête :
- Poubelle la
vie ! Tralala, tralala ! J’aime jeter, laver, récurer, aspirer !
- Nema !
Arrête ou je me casse !...
Paolo Teobaldi |
Tizio et Lia se séparent. C’est triste. Ils ont
juste passé la cinquantaine. Les deux grands garçons sont déjà partis
construire leurs propres vies avec femmes et enfants. Tizio se retrouve soudain seul dans l’appartement, dans cette
résidence en copropriété (300 copropriétaires, vous voyez le genre), grande
barre de béton avec une « immense galerie qui court longitudinalement sous les
pilotis du rez-de-chaussée avec 300 garages parallèles en demi-arête de poisson
».
Natalia (Lia) est une Trecca, grande famille qui a bien réussi dans le commerce (de
bouche, de meubles…). Il y a des valeurs dans cette famille. Bon, plutôt des
valeurs marchandes et un goût certain pour l’argent mais c’est comme ça. Lia et Tizio se sont rencontrés très jeunes, se sont mariés et ont eu deux
enfants. Ah, cette première rencontre, touchante admiration d’un adolescent
pour une jeune fille dont la peau fleure bon la calycanthe
(allez-voir sur internet et demandez à votre fleuriste : personnellement je
n’en ai jamais vu mais l’imagination peut faire le reste quant à la fragrance
de ladite plante….). Tizio n’est pas
dans le commerce, Tizio ne réussit
pas, Tizio a une vie professionnelle
très particulière où la précarité de ses différents postes vont le faire
basculer de contractuel à surnuméraire, et de surnuméraire à « fongible », puis
à accepter un poste pour lequel cet ancien professeur n’était pas a priori
destiné, mais finalement vous verrez combien il va s’en trouver rédempté.
Imaginez un instant une pendule murale en plastique
représentant une bouche grande ouverte avec toutes les dents et dégageant une
odeur de désinfectant dentaire : ce magnifique objet publicitaire, don d’un
beau-frère dentiste, est retrouvé dans le fond du garage. Cet objet insolite
vous montre un peu toute la fantaisie de l’histoire.
fleur de calycanthe |
La conduite de gros camions à ordures lui fera
découvrir la vieille décharge, au Roncaccio, lieu magique un peu à l’écart de la
ville heureusement, où tout est empilé, concassé, brûlé, ou bien se transforme
en un distillat pestilentiel. Ensuite viendra l’aventure de la nouvelle
décharge, plus organisée, plus scientifique et surtout moins débordante. Voir de
la poésie dans un tel lieu peut paraître curieux, mais si, finalement, tous ces
objets, ces restes des années précédentes, empilements des trop-pleins de la
société de consommation seront dignes d’une exposition. On ne s’attend pas du
tout à la fin de l’histoire : c’est charmant, je n’en dirai pas plus.
Paolo
Teobaldi est né à Pesaro, ville de bord de mer dans la
province d’Urbino. Ce professeur d’italien anime un atelier d’écriture à
l’université et nous plonge avec ce premier roman dans une atmosphère très
italienne : travail oui, mais aussi «combinazione», des hommes fiers et des
femmes bavardes et tapageuses, beaucoup d’humour et de gouaille. Un roman à la
construction rigoureuse et au vocabulaire riche comme le BHV.
Un grand merci à la traductrice Monique Baccelli qui nous permet
d’enrichir considérablement notre français sans que l’on perde le côté
pétillant de l’histoire.
Bonne lecture (pas forcément à côté d’une poubelle) !
Éditeur Denoël - 316 pages
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