Alors
ça, coco, c’est du film à oscars ! « D’après une histoire vraie »
qui disent, ça peut rapporter des points. Et c’est vrai, que reprocher à ce
film ? Une belle paire de charentaises confortable, on s’y glisse et on
laisse rouler pendant deux heures. Rouler, parce que ce film s’apparente au
road-movie, deux types en voiture qui tracent la route. A ceci près qu’on est
en 1962, dans les états du sud, que la Cadillac est conduite par l’italo-américain
Tony Lip (de son vrai nom Tony Vallelonga) et que le passager est un Noir. Et
un artiste, en plus : Don Shirley.
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Don
Shirley fait passer des entretiens pour trouver un chauffeur/assistant en vue d’une
tournée dans les états du sud, accompagné d’un violoncelliste et d’un
contrebassiste. Tony Lip lui inspire confiance, il aura le job. Pourtant, ce
type mal dégrossi qui travaillait comme videur dans une boite de nuit de New
York, a quelques à priori sur les Noirs. Dans une scène, on le voit jeter à la poubelle,
dégoûté, deux verres dans lesquels avaient bu deux ouvriers Noirs venus bosser
chez lui.
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Ce
qui nous vaudra une scène humoristique, où Tony Lip apprend à Don Shirley à
bouffer son poulet KFC avec les doigts, parce que c’est comme ça que c’est meilleur !
En fait, l’opposition entre les personnages tient moins - à mon sens - à leur couleur de peau (et non pas "race" car les humains sont tous de la même race...) qu’à leur classe sociale. Don Shirley est éduqué, cultivé, maniéré, le
costard toujours impeccable, comme sa diction, son vocabulaire. Tony Lip est
brut de décoffrage, honnête, on le paie il fait le boulot, et s’empiffre à longueurs
de scènes (Viggo Mortensen a pris 30 kg ?!!), il gagne le concours de plus
gros mangeur de hot-dog, 26 en une heure.
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La
BO du film est une petite merveille, du R’n’B 60’s, ce qui invariablement nous fait penser au cinéma de Martin
Scorsese, patchwork musical et italo-américains… La comparaison s’arrête là,
car question mise en scène, Peter Farrelly la joue très académique, c’est propre,
joliment photographié, reconstitution impeccable, mais ça manque un peu de
personnalité. Est-ce parce que Nick Vallelonga (le vrai fils de Tony) est co
scénariste et co-producteur, qu’on a un film finalement assez lisse, sans
aspérités ?
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On
ne ressent pas d’animosité entre le maître et son chauffeur. Quand Don Shirley est coincé par la police
dans des douches publiques, à poils avec un jeune blanc-bec... Tony lui dit, blasé :
« Dans mon boulot - les boites newyorkaises - j’en ai vu d’autres… ».
Et c'est tout ? Cet aspect n'est pas développé, alors pourquoi le balancer comme ça entre deux portes ?
Ce
qui fait le plaisir du film, ce sont les deux acteurs, Viggo Mortensen (un
danois qui joue un italien !!) impressionnant, imposant, le mec quand il
menace de cogner, on obtempère ! Et Mahershala Karim-Ali au maintien
impeccable, rigide et fragile à la fois, son personnage est en réalité très
seul, qui noie son blues dans une bouteille de Cutty Sark contractuellement
déposée dans sa chambre tous les soirs. On aurait aimé que Farrelly développe
un peu de ce côté-là, ce pianiste virtuose sans cesse humilié par sa couleur de
peau, mais qui peut avoir Bobby Kennedy au téléphone en pleine nuit en cas d’arrestation
frauduleuse par des flics racistes.
On
remarquera deux scènes où les flics arrêtent la voiture, dans le Sud ça se
termine en taule, en chemin vers New York, c’est le flic qui aide à changer une
roue crevée. Un peu schématique ?
GREEN
BOOK est un joli film, qui suit un schéma narratif convenu et ne fouille sans
doute pas assez les caractères, mais qui ne se dresse pas en étendard de la
cause (comme le BLACKKKLANSMAN de Spike Lee), préférant les chemins de
traverses, dire les choses simplement, humblement, ce qui au final, s’avère
tout aussi efficace.
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