Oh cape de diou ! Crénom !! Diantre ! Ventre bleu ! Foutrebleu ! Malepeste !
C'est-y pas oune surprise, ça, mon gaillard ?? Putain, mon con, ben ouais ! Pour sûr ! Je veux !
Et dire que pendant ce temps, y'en a qui nous pourrissent l'air avec des télé-crochet et des concours d'euro-mormoil' noeud.
Et pourtant ... mon disquaire m'avait prévenu. "Le dernier Bjorn Berge est une tuerie !"
"Mouais ... bouah ... c'est un bon, mais c'est acoustique. Et j'suis dans une période électrique. J'passe. Merci quand même"
Mais, hola, hola. J'suis d'une nature curieuse. Avec tous les risques que cela comporte. J'pars à la recherche de quelques extraits et ... mais qu'est-ce-que c'est que donc ??? Heingue ? Qu'ouïs-je ?
Mais, mais, mais, le sieur Berge ... le garnement. Il a troqué sa vieille gratte acoustique contre une bonne électrique. Et en plus, il envoie du lourd !?!
"Allo ? Ouais, c'est moué ... tu me mets illico presto le dernier Bjorn Berge de côté. Sans faute ! Sinon, j'change de crémerie, ou j'envoie mimine. Ou mon chat. Oui, le psychopathe à quatre pattes !!"
Voilà bien des années que le Norvégien arpentait sans relâche les routes d'Europe et au-delà avec ses douze-cordes, gagnant graduellement le respect de ses congénères et du public. Et puis, finalement, il eut besoin de se ressourcer, de faire le point avec lui-même, et prit un congé bien mérité.
Il partit, seul, pour un voyage initiatique qui l'amena à se perdre physiquement dans quelques contrées perdues, inexplorées et inhospitalières de la Scandinavie. Guidé par on ne sait quelles entités interdimensionnelles, il découvrit, dans un dédale de granite et de glace, une antique salle creusée profondément à même la roche. Là, un savoir antédiluvien était caché au profane, ainsi que divers objets de tous les âges (passé, présent et futur) qui s'offraient à lui. Il se souvient d'une cape d'invisibilité, d'une lance au métal bruni par les âges avec un clou fiché en son milieu et serti de fil d'or, un navire constitué en partie d'ongles, diverses épées frappées de runes, un anneau d'or, des statues, des chaudrons, une photo dédicacée de Ragnarr (Berge ne porte-t'il pas le prénom du premier de ses fils ?), une autre de Loptr avec Manu M. N'ayant pu déplacer d'un pouce un lourd marteau qui lui avait tapé dans l'oeil, il avança machinalement la main vers un objet incongru : une guitare. Dans un état second, il prit le chemin du retour, et, après quelques jours de marche, il se réveilla de sa transe, gêné par une charge qui déséquilibrait son sac-à-dos. A son grand étonnement, il y découvrit avec stupeur, enveloppée dans une fourrure, une Telecaster (avec la garantie !). C'était un présent des dieux.
Il avait reçu un message : désormais, il devait électrifier sa musique.
Le résultat ne se fait pas attendre. Bjorn dégotte un bassiste pour épaissir sa musique et lui donner du groove. Et pour les batteurs, il passe par moins de trois forgerons. Dont Odin Staveland ... no comment (2). Et dans une fièvre créatrice, accouche d'un brûlot électrique, "Who Else ?".
Et ça débute dans une atmosphère sulfureuse. Sa six-cordes a pris du poids ; enfin, surtout lorsqu'il joue en slide. Difficile de faire plus gras sans tomber dans le Stoner ou le Doom, ou prendre du cholestérol. "Monkey Ship" est un souffle chaud sorti des forges de Weiland. Parallèlement, ça sentirait également la gomme des pneus laissées sur l'asphalte par la Ford Falcon V8 Interceptor, avec au volant, un gars déterminé et sans état d'âme. Le contraste avec la batterie sèche comme un coup de trique, pleinement boisée, est saisissant. Tout comme cette profusion de cymbales sur le refrain. Plus encore, le solo crunchy, presque clean, un poil jazzy, qui se détache de la rythmique rugissante. Un must. Grand. Malin, c'est la pièce maîtresse qui entame les festivités. Cependant, la suite a de quoi mettre de l'ambiance à Asgard.
"Lost Pearl" quitte le bitume pour s'épanouir dans une contrée Funky, avec une rythmique sautillante. Le refrain s'embrase dans une chaude bouffée d'entrain et d'enthousiasme grâce au renfort d'une choriste. Une elfe envoyée autant pour tempérer le Blues rugueux, viril et brûlant de l'Ours que pour l'enflammer d'une force féminine galvanisante et fédérante.
"Mr Bones", d'une slide riche en cambouis, mouline un Blues solitaire, gras, poisseux. Proche de l'univers du Canadien Steve Hill tel qu'il l'a développé dans sa configuration "one mand band".
"Just Ain't So" retrouve la voix énergique, pleine d'entrain, de la choriste, poussant un peu plus ce morceau vers des espaces baignés de Soleil. En parallèle, on apprécie l'interaction entre les trois belligérants. La rythmique hoquetante de la guitare, entre Funk et Blues, la basse souple, "en caoutchouc", et la batterie jouant un poil hors du temps (à moins que cela soit le fait des deux autres lascars). Du grand Art. Et toujours cette choriste qui incite ici à fricoter avec le Southern-rock et la Pop.
"Bitter Sweet" fait dans la ballade sentimentale. Cette accalmie permet de constater combien le timbre de Berge peut être proche de celui de Brad Roberts (Crash Test Dummies), - avec également un peu de Chris Réa - et aussi combien il peut mettre d'émotion et de sensibilité quand il le veut.
Après l'instant détente et introspectif, Bjorn monte Sleipnir (1) pour franchir le Bïfrost et traverser les rudes espaces d'Hel en brandissant et en faisant des moulinets menaçants avec sa Telecaster. "Speed of Light", loin de faire dans le Speed-metal, sonnerait plutôt comme un titre enlevé des Kamchatka, Samsara Blues Experiment, Black Elephant et autres Crypt Trip.
"The Calling" paraît plus anodin. Sorte de slow-blues blême et lancinant à la Snowy White, qui ne parvient jamais à s'extirper totalement de sa torpeur. Seule l'elfe, d'une voix claire et mesurée pour l'occasion, presque cristalline, y réussirait presque.
En fait le Norvégien rechargeait les accus pour offrir sur un Boogie viril, un hymne à la bibine. "Ginger Brandy Wine" fête les ambiances festives, et passablement éméchées. Un boogie taillé pour accueillir confortablement ZZ-Top à venir taper le boeuf. Même si le refrain met un pied dans un trip psyché-pop vaguement 60's. C'est l'occasion de sortir une wah-wah grave qui fusionne à la slide.
Final en toute décontraction sur "The Sun's Going Down" qui incite au relâchement et à la danse. Entre Blues louisianais des jours de fête et B.52's.
Entre sa voix profonde et sombre comme les fonds des fjords, sa guitare qui, dorénavant, l'est tout autant, la basse qui donne encore plus de profondeur, combinés avec le contraste que procure la batterie sèche et boisée, accentué par la choriste et des parties de guitares lead qui prennent le contre-pied en choisissant de jouer avec des sons tranchants, crunchy ou clean, Bjorn Berge semble avoir trouvé une formule qui lui va comme un gant. Une formule qui pourrait amener à le présenter comme un artiste de tout premier plan. Désormais, avec sa longue tignasse tombant jusqu'au milieu du dos, il a pris l'apparence qui pourrait être celle d'un frère de Michael Katon (4). Sa musique suit la comparaison, bien que d'un tempo généralement moins élevé que celui de l'Américain, mais avec un timbre de voix proche.
"Who Else ?" est simplement le meilleur album de Bjorn Berge, à ce jour. Et un des meilleurs du mois. Un disque certes court (32 minutes et des poussières) mais intense, apte à faire fondre les glaces du Jötunheim.
(1) Cheval à la robe grise et à huit pattes utilisé par Odin.
(2) En fait, il s'agit du batteur de Vamp, groupe norvégien d'Haugesund, ville de pêcheurs. C'est son association avec ce groupe qui l'a obligée à mettre sa carrière personnelle entre parenthèse pendant plus de deux ans. Période pendant laquelle deux disques sortirent ("Populas" en 2015, et "La La La" en 2017). Odin est également chanteur et a essayé ses talents en tant qu'artiste solo. Il fait actuellement partie de l'Electric band de Berge, avec la seconde moitié de la section rythmique de Vamp, le bassiste Ketji Ulland.
(3) Ours, en norvégien Bjorn.
(3) Non pas l'acteur, mais le spécialiste d'un viril boogie-rock bluesy de Hell (Michigan).
🎶⚘☙✨
👉 Bjorn Berge - avant la transformation - : "Blackwood" (2011) ⇐ lien / clic
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