Claire Bretécher ou l’Humour Change de Sexe
Il y a
peu de femmes dans la bande dessinée Celles-ci ne représentent que 12% des
auteurs, mais certaines ont laissées leurs empreintes. Citons Chantal Montellier qui fera partie de l’aventure «Charlie Mensuel»,
«Métal
Hurlant» avec un dessin qui rappelle Jacques
Tardi ou Crépax. La Franco-iranienne Marjane Satrapi avec ses quatre volumes «Persepolis»
qu’elle adaptera en un long métrage d’animation qui décrochera le prix du jury
au festival de Cannes en 2007. Virginie Augustin
qui en dehors de faire de la BD collaborera avec les studios Disney dans
l’animation de «Tarzan»
et «Hercule».
Mais la première qui a ouvert la brèche dans ce milieu d’homme pas machiste a
été Claire
Bretécher
(Prononcé Breutéché).
Un regard bleu, des cheveux
blonds coupés courts, un visage un peut émacié, un look rebelle, un faux air de Françoise Sagan en plus jolie, cette Nantaises
abandonnera vite les Beaux-Arts parce que la bande dessinée n’y est pas
reconnue. Elle enseignera le dessin pendant un temps tout en livrant ses illustrations
dans différents journaux. Fuyant le
milieu bourgeois dans lequel elle a été élevée, elle monte sur la capitale. Au
début des années 60, elle va croiser la route de René
Goscinny et va illustrer l'une de
ses histoires pour le journal de Pierre Dac «L’Os à Moelle».
Elle va ensuite collaborer au journal «Tintin» ou elle créera quelques séries. «Spirou»
lui ouvre ses portes et elle va illustrer des textes de Raoul Cauvin et d’Yvan Delporte. Mais,
c’est en 1969, en arrivant chez «Pilote»
que l’histoire avec un grand B (Comme Bretécher)
va commencer. Elle va créer le personnage de Cellulite (Ce qui n’aura rien à
voir avec des illustrations pour WeightWatchers). L’histoire d’une princesse
médiévale féministe avant l’heure. Elle fera aussi ses «Salades de saison» qui seront une préface au futur «Les Frustrés».
En 1972 avec ses deux grands amis Marcel
Gotlib et Nikita Mandryka, elle participera à la création de «L’Echo des
Savanes» où ses histoires vont se faire plus acides. Elle va
tirer à boulets rouges sur certaines catégories de la société à l’instar d’un
Reiser ou d’un Siné.
Un regard satirique sur le conflit des générations, les revendications féministes et la
recherche de l'émancipation, le soixante-huitard sur le retour, les
bourgeois bobos (même si le terme n’existait
pas à l’époque), les cadres supérieurs, le laxisme parental et la société qui
partait en eau de boudin. «Les Frustrés» : une série de 5 tomes en 5 ans.
Claire Bretécher collaborera pour la presse avec
le journal écologiste «Le Sauvage» et avec «Le Nouvel Observateur» où elle
continuera à livrer un planche par semaine «La Page des Frustrés». Elle éditera beaucoup d’albums
sortant des sentiers battus : «La Vie Passionnée de Thérèse d’Avila» lui
apportera quelques problèmes auprès des lecteurs d’obédience catholique. De
tous les albums qu’elle a illustrés, j’ai
une tendresse pour «Les Mères», véritable hommage à celles qui nous
ont donné la vie face à l’incompréhension des hommes.
Arrivera ensuite «Agrippine»,
la caricature des adolescents de notre époque. Agrippine
est une ado en pleine crise face à des parents plutôt réacs avec toutes les
questions que l'héroïne peut se poser : la vie, les garçons, le sexe, les
copines. Agrippine est une adolescente pourrie
gâtée faisant partie de la petite bourgeoisie parisienne et qui recherche surtout
à paraître et à séduire. Beaucoup de personnages gravitent autour d’elle : ses
parents, son frère, sa grand-mère, son arrière grand-mère et toute une cohorte
d’ami(e)s. Comme toute ado, elle a son langage, Abattoir : Maison de Retraite,
Laisser Bouygues : Laisser tomber (à
cause du verlan «Laisser béton»),
feunique : drôle (de l’anglais «fun»)…
Une série d’animation en 26
épisodes sortira à la télévision en 2001.
Hormis
le dessin, Claire
Bretécher sait se diversifier avec un certain talent : entre les pochettes de disques comme pour l'album "Joe Can’t Reel» du groupe breton Gwendal et la peinture avec des portraits de ses
proches ou des autoportraits. Elle sortira trois livres regroupant ses toiles.
Ses peintures ont été exposées au Centre Pompidou en novembre 2015 avec nombre de ses planches originales. Claude Toon y est allé... mdr !
Trois
prix à Angoulême, scénario en 1976, grand prix spécial en 1982 et l’Alph-Art humour
en 1999, Claire Bretécher est depuis
longtemps reconnue par ses pairs.
Et pour l’anecdote, l’astéroïde 236463
découvert en 2006 à été baptisé Bretécher
en hommage à la dessinatrice.
Une femme de caractère ! Charmante de surcroît. Une femme qui a marqué et ébranlé le monde de la BD avec pourtant un trait d'un simplissime poussé.
RépondreSupprimerCrénom ! Je n'avais pas fait cas que Cellulite était aussi "vieille" (la BD pas la damoiselle !). BD que je dévorais lorsque je piquais avec avidité les Pilotes des aînés (mais dont je ne devais probablement pas comprendre l'intégrité).