Pour beaucoup, le perfecto clouté et bardé d’épingles
à nourrice et la crête iroquoise étaient rangés au fond des placards, et le temps
du pogo et du «No Futur» remisé comme mouvement has-been. Je n’ai jamais
été punk et sa culture musicale n’a jamais flatté mes oreilles. A l’époque où
tournaient des groupes comme : La Souris Déglinguée, Gogol
Premier et autre Ludwig
Von 88, j’avais plutôt tendance à écouter Les Negresses
Verte, la Mano Négra et Pigalle.
Mais pourtant, certains, comme les ramoneurs de Menhirs feront
de la résistance en adaptant le style des Sex
Pistols avec celui des sœurs
Goadec...
LORAN BERU |
Les ramoneurs de Menhirs, qui
fêteront leurs dix années d’existence en 2016, ne sont pas des
perdreaux de l’année. Dix ans déjà qu’ils tournent avec leur musique punk
celtique ou les distorsions de la guitare se mélangent au son du Biniou et de la
bombarde. Un groupe mené par Loran Béru
(une figure connue de la scène punk et alternative dans les années 80 pour avoir été
l’un des membres fondateur des Bérurier Noir ; Groupe
que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître), un groupe qui se
démarquera par sa position radicalement anarchiste, antifasciste, antiraciste et
sa dénonciation du prix prohibitif des billets de concerts.
Les Bérurier auront
même un hit radio avec «L’empereur Tomato Ketchup».
Ils gagneront aussi le bus d’acier (Grand prix du rock français qui
hélas N’existe plus !) qu’ils refuseront en faisant
un doigt d’honneur au jury. Mais leur état d’ébriété avancé et le fait d'avoir fumé
des cigarettes "qui font rirent" étaient en cause. Après la fin officielle
du groupe en 2006, Loran rejoindra le duo de sonneurs Eric
Gorce et Richard Bévillon, Maurice
Jouanno dit «Momo»
au chant, un professeur de langue bretonne qu’ils débaucheront pour partir
ramoner les menhirs sur les routes d’Armorique, de France et d’Europe.
Louise Ebrel et Loran |
Pour la majorité des gens, la définition, ou plutôt le concept du rock celtique
était le quatuor guitare électrique, basse, batterie
et chanteur auxquels on allouait des instruments traditionnels comme la
cornemuse et la bombarde, ajouts qui ne servaient qu’à enjoliver les morceaux pour en garder la
structure celtique. Avec les Ramoneurs,
la guitare sera remisée au second plan à une simple fonction rythmique pour
laisser la part belle à la bombarde et au biniou. Même si les morceaux sonnent
très «hard punk», la teinte celtique reste très prononcée, à la
différence des Suédois de Sir Reg ou les Toulousains de Booze
Brothers qui font un punk traditionnel Irlandais qui
rappellerait plutôt les Pogues.
Créé en 2006, les Ramoneurs de Menhirs choisissent ce nom pour faire voir leurs état d’esprit de rébellion, ramoner un menhir :
c’est se battre contre l’église qui s’est acharné à vouloir détruire la culture
bretonne. Leur premier album «Dañs an Diaoul» (La
danse du diable) sort en 2007. Même si la majorité de l’album
est constituée de reprises à la sauce ramoneur, on peut aussi y trouver quelques
compositions originales comme «Nomades»
ou «Captain Kirk». Ils
inviteront Louise Ebrel la
fille d’Eugénie Goadec
«Tanie» une des trois sœurs
Goadec. Amie avec les deux sonneurs du groupe, elle apparaîtra
sur les trois albums produits où elle chantera deux ou trois titres. Elle
les accompagnera aussi en concert et dans certains festivals où certains la
surnomment « Louise Attaque» parce qu’elle «Envoie de
l’air». Ce premier opus celto-punk sera un succès et se vendra à 20.000
exemplaires. C’est le début des tournées en Europe et des festivals comme
l’Interceltique de Lorient et les Vieilles Charrues de Carhaix.
En 2010, ils sortent «Amzer
An Dispac’h» (Le temps de la révolte). Un
brûlot où le groupe se fait porte-parole des minorités quelques soient leurs
cultures régionales. Toujours des reprises comme «La
Blanche Hermine» de Gilles
Servat ou «If the Kids Are United»
du groupe punk anglais des années 80 Sham 69.
Les ramoneurs savent aussi surprendre : «Marijanig»,
un pamphlet en faveur de la dépénalisation du cannabis qui commence avec un
fond sonore façon reggae avec ensuite un duo entre Maurice
Jouanno et Louise Ebrel qui
va en envoyer grave et toujours une guitare rageuse qui donne
envie de pogoter sur un An-dro. Un album irréprochable où l’enthousiasme
musical du groupe ne laisse pas indifférent.
Il faudra attendre 2014 pour les
revoir avec un nouvel enregistrement. La composition du groupe a légèrement
changé, Maurice Jouanno et
sa voix monocorde et irritante a laissé sa place au micro à Gwenaël
Kere et la différence va se faire sentir. «Tan
Ar Bobl» (Le feu du peuple) et
ses 11 titres avec la voix de Gwenäel prennent un air plus bretonnant,
comme si le Kan Ha Diskan entrait dans la culture punk. Une petite surprise
dans ce disque, deux reprises des Bérurier Noir : «Makhnovtchina»
et «Ibrahim».
Et toujours à 82 ans la présence d’une «Mamie», Louise Ebrel qui
pète la forme. Un très bon album qui en plus se pare d’une magnifique
pochette.
Les ramoneurs de Menhirs, le live
Vendredi 18 mars, retour dans la petite salle du
Rack’ Am ou j’avais pu voir 5 mois auparavant Radio
Elvis. Ce soir à l’affiche : Begarsound, groupe
de punk-rock formé en 2002 et qui, après avoir tourné énormément,
publiera deux albums «Attendre c’est mourir»
en 2008 et «Ailleurs et Maintenant»
en 2011, à découvrir ! Et les Celtes du soir Les
ramoneurs de Menhirs,
la soirée va être chaude.
Le public est très hétéroclite. Ça va du jeune punk
de 15-20 ans, au plus âgé qui portait une crête dans les années 80, au fan des Bérurier
Noir en passant par le curieux (Comme moi) et même jusqu’à des jeunes enfants (Il y avait une gamine d’à peu près 5 ans).
Photo Cécile |
Les
essonniens de Begarsound
entre en scène et donne le ton, tout de suite, tu comprends qu’il ne faut pas
rester devant la scène et rester le plus loin du centre de la foule qui, dès le
premier power chord (Un accord qui donne
le ton et la distorsion) te prévient qu’il va y avoir du pogo et que de
raser les murs est plus sûr pour ta santé.
Les Begarsound
qui feront un set d’une heure sans fausse note et qui chaufferont bien la salle
pour les vedettes de la soirée. Entracte et passage par la boutique de
merchandising, une affiche, des stickers et un tee-shirt… classique quoi !
Photo Cécile |
Loran arrive, avec sa Gibson SG et
commence à parler avec un public venu en masse, une salle pleine comme un œuf
où les relents de sueurs et de bières te rappellent bien que dans cet endroit il est inutile de chercher de l’air frais. Pour plus de sécurité, le
groupe fera monter les plus jeunes sur le bord de la scène en backstage et
feront même de l’animation en brandissant des gwen a du (Drapeau Breton) et des drapeaux noirs. Dès le premier titres, le
pogo fait rage et après avoir pris deux trois gars sur le râble et pour ma part
écrasé deux trois pieds et distribué quelques coups de coudes bien placés, je
préfère faire retraite vers un endroit moins exposé (La peur n’évite pas le danger, le courage non plus…) pour pouvoir profiter des décibels en plus ou
moins toute tranquillité.
Les Ramoneurs de Menhirs dégagent
une musique puissante, festive et bourrée d’énergie. Entre les binious, la
guitare et la voix de Gwenäel, le Kan Ha Diskan celto-punk peut être dérangeant pour les puristes,
mais ça passe comme une lettre à la poste. Entre les titres, Loran va haranguer les foules avec des discours crypto anarchiste et
anticapitaliste fidèles à ses convictions.
Photo Cécile |
Un concert de musique punk
sans Slam (Se jeter de la scène et se
faire porter par le public et se
déplacer au dessus de lui) ne serait pas un concert et quelques personnes
vont flotter au dessus de nos têtes pour sitôt atterrir. Elles repartiront en devant
de scène. Après plus d’une heure de concert échevelée, Les Ramoneurs de Menhirs vont nous créditer
d’un quart d’heure de morceaux des Bérurier Noir à la grande joie des «Anciens».
Un Loran qui avec ses 52 ans s’éclate toujours autant sur scène (Ses Camarades de jeux aussi d’ailleurs)
et refuse de la quitter. Il joue tellement fort que même son ampli Marshall ira jusqu’à cramer ! 2h40 de sueur et de rock costaud plus tard, arrive le dernier
titre : une reprise multi-vitaminée de «La Blanche Hermine» de Gille
Servat. Salutations et distribution des bières du groupe qui était sur scène. Loran descend parmi ses fans et se prête aux jeux des selfies avec un mot
sympa pour chacun, une signature ou un kiss pour les dames. Un gars sympa et
accessible à la différence de certains que je ne nommerai pas.
Même si je n’ai jamais aimé la musique punk, il
fallait quand même que je goutte à cette chose étrange venue d’Angleterre en 1977. Les Ramoneurs de Menhirs ?
Une Bretagne qui se découvre une nouvelle forme de musique que les jeunes
aiment… et les plus vieux aussi !
Merci Pat! Génial! Mon sang breton entre en ébullition à l'écoute de "Marijanig", la voix de Louise Ebrel sur fond de Gibson SG ça dépote ! Serais curieux de savoir ce qu'en pense Tanie là d'où elle nous regarde au paradis des chanteuses de Kan Ha Diskan ! Elle serais peut-être pas plus choquée que cela apres tout, elle qui chanta à l'Olympia au milieu des chevelus de l'époque!
RépondreSupprimerOui tu as raison, le parallèle entre Louise et Les ramoneurs avec Tanie et ses soeurs à Bobino (Pas à l'Olympia) ou au Kertalg en 1972 avec Alan Stivell est exactement la même chose sauf que la guitare de Loran est plus puissante que celle de Dan an Bras !! :D
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