Voilà
un duo quelque peu improbable composé de l'harmoniciste Jason Ricci et
du guitariste JJ Appleton, également à la production, duo qui se mue
parfois en trio avec l'apport d'un bassiste (Tim Lefebvre ou Neal Heidler selon
les titres). Appleton fut le guitariste chanteur du groupe pop/rock new-yorkais
les Grasshoppers qui connut son heure de gloire dans les années 90. Il a
aussi composé pour le cinéma, la télé et la pub, et c'est un musicien de
sessions réputé (Gov't mule, Tedeshi Trucks Band, Black Crowes, Lenny
Kravitz..) ainsi qu'un producteur et songwriter très demandé, parfois loin du
blues (Darius Rucker, Black eyed peas, Farrad..).
Plus
connu dans le milieu du blues Jason Ricci (41 ans) est un virtuose qui ne
laisse pas indifférent. Il a commencé par chanter dans des groupes punk avant
de découvrir le blues et se mettre à l'harmonica, il a ensuite écumé les
juke-joints du Mississippi avec les fils Burnside et Kimbrough, connu l'enfer
de la drogue, la prison et la désintox et révélé son homosexualité ce qui lui a
valu d'autres déboires ("Quand j'ai fait
mon coming out, en tant qu'homme blanc issu d'une famille aisé, je me suis
exposé non seulement en tant que gay mais également comme un blanc et comme un
mec qui aime le punk et qui ne venait pas de la pauvreté totale, et qui n'avait
rien en commun avec toutes ces choses associées au blues") . Un
parcours pas vraiment facile qui lui a forgé le caractère et inspiré ses
textes, depuis 1995 il a sorti une dizaine d'albums et cite comme modèles Paul
Butterfield, Alan Wilson (Canned Heat), Sugar Blue, Sonny Boy Williamson,
Little Walter, John Popper (Blues Travelers) ou Pat Ramsey.
Cette
association entre les deux musiciens n'est pas sans rappeler la fameuse team Sonny
Terry/ Brownie McGhee ou le duo John Cephas/ Phil Wiggins. Nous
avons affaire à un blues acoustique très roots, dépouillé, dans le style
"Piedmont blues", illuminé par l'harmo de Ricci qui n'est pas avare
de solos dantesques, comme sur le bien nommé "Jason
solo". Plus sobre Appleton place la bonne note quand il faut et
quelques envolées nous rappellent qu'il est fan de Stevie Ray Vaughan, Albert
King et Johnny Winter. Sur les 11 titres Appleton en signe 5, Ricci 3, les 3
autres sont des reprises: de Blind Willie Johnson d'abord avec "Nobody's fault but mine" (adapté par Led
Zeppelin sur "Présence" en 1976), des Stones ensuite avec leur "Black limousine" ("Tattoo you",
1981) et enfin "It ain't no use"
chanté la première fois par ZZ Hill (1971, écrit par Jerry Williams, Don
Hollinger et Gary US Bonds.
Fan
de blues acoustique dynamique et d'harmonica ayant pactisé avec le devil ce
disque est pour vous !
ROCKIN-JL
Article parue également dans BCR la Revue, meilleure revue de blues in the world
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