vendredi 13 novembre 2015

LOLO de Julie Delpy (2015) par Luc B.



Julie Delpy tient une place à part dans le cinéma français. Elle a étudié, vit et travaille aux Etats Unis. Avec aussi une carrière française, comme actrice, estampillée « cinéma d’auteur ». Elle débute avec Godard, et prête son teint diaphane et sa blondeur angélique à Léos Carax, Tavernier, le polonais Kieslowski, le finlandais Kaurismäki, l’espagnol Carlos Saura, les américains Richard Linklater, Alan Rudolph, ou Jim Jarmusch.
Mais comme réalisatrice, c’est un tout autre genre. Elle débute avec LOOKING FOR JIMMY en 2002, et mis à part un drame gothique, LA COMTESSE, elle privilégie la comédie. Avec notamment les délirants TWO DAYS IN PARIS (2007) suivi de TWO DAYS IN NEW YORK (2012), où avec son père l’épatant Albert Delpy, elle brosse un portrait corrosif et hilarant de la famille, et des différences culturelles entre français et américains, sujet qu’elle connait bien. Il y aura eu aussi LE SKYLAB en 2011, dont on avait dit ici que du bien [clic vers l'article].
Julie Delpy revient cette fois avec LOLO, une comédie disons…  plus mainstream dans sa forme. Son cinéma faisait avant penser à celui du Woody Allen des 80’s, très dialogué, en appartement, petits moyens, caméra libre dans la rue, avec une crudité de propos rappelant Bertrand Blier. La mise en scène de LOLO est plus léchée, on a sorti les rails de travelling. Mais l’esprit est toujours là, piquant, grivois, à l’image de la première scène où Karin Viard vante les massages de la chatte dans les piscines à jets ! Chez Julie Delpy, quand on parle de cul, ce qui arrive souvent, c’est sans filtre ! Il suivra juste après une apologie du cunnilingus, dans un train, avec une voisine de voyage offusquée !
Dans ce même train, la voisine se plaint d’une conversation téléphonique entre Delpy et son fils. Karin Viard intervient, conciliante : « laissez-la, c’est son fils, il est tétraplégique ». L’autre affiche une mine désolée, mais écoutant la discussion, a soudain des doutes : « bah, comment ça du parapente ? j’croyais que son fils était tétraplégique ? ». « Et puis ? z’avez pas vu Intouchable ? Maintenant ils font tous ça ! ».
Dans LOLO, Julie Delpy joue Violette, 45 ans, seule avec son fils Eloi (dit Lolo). Elle bosse dans la mode et le fiston de 19 ans est artiste peintre. Ils frayent avec du beau linge. Elle rencontre Jean René, de Biarritz, informaticien. Qui ne va pas tarder à s’installer chez elle, au grand regret de Lolo, qui va tout mettre en œuvre pour se débarrasser de l’intrus, en l'humiliant un peu plus chaque jour...

Les différences de milieu social créent souvent des situations drôles, voire caricaturales, et c’est ici complètement assumé. Comme le : « oh, il fait vraiment un temps de merde », « c’est la province… ». Y’a des vannes assez parisiennes, comme celles sur Beaugrenelle (quartier du XVè arrondissement, datant des années 70's et totalement hideux aujourd'hui...) où Jean René a acheté un appart donnant sur la Tour Eiffel.
Le rythme ne faiblit pas, les répliques fusent, les situations sont vraiment drôles (le bras dans le plâtre, le médecin, le rendez-vous au Crédit Rural de France), c’est gentiment trash juste ce qu’il faut, Violette et sa copine déversent des tonneaux d’horreur sur leurs très grands ados, qui vivent aux crochets de leurs mères.
Et puis la bonne idée du film, c’est Dany Boon. Acteur populaire par excellence, il joue le provincial en chaussettes dans ses sandales. Évidemment que le trait est grossi, c’est une comédie. Les parisiens s’en prennent aussi copieusement dans la tronche. Il est ici vraiment dirigé, cadré, sobre, sans ses tics énervants et sa voix naze. Mais garde le sens du mouvement et du tempo propre aux acteurs comiques. Double intérêt, la présence de Dany Boon permet à Julie Delpy d’élargir son public, LOLO réalise plus d’entrées en une semaine que le film de Rappeneau en deux.
Face à lui, Vincent Lacoste joue dans un registre qu’il maitrise bien, la limace, artiste conceptuel auto-proclamé, blasé, tête à claques. Et Karin Viard est comme d’hab’ impeccable, vive, naturelle, elle ose tout !
LOLO est vraiment très drôle. Si la situation de départ n'est pas spécialement originale (le couple à priori non assorti) c'est l'écriture de Julie Delpy qui fait la différence, le ton, et le rythme du film. Il fait parfois penser à un TANGUY à l’envers, l’esprit du Chatillez de LE BONHEUR EST DANS LE PRE n’est pas loin aussi, mais Julie Delpy reste vraiment dans son univers, peinture acide des relations familiales, de couples, plus subtile qu’il n’y parait.

Si la bande annonce et la présence de Dany Boon, et Vincent Lacoste, semblent vouloir draguer le jeune public, le contenu réel du film ne leur est pas spécialement destiné...

couleurs  -  1h40  -  scope 2:35   


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5 commentaires:

  1. Ouiii Luc ! Content que tu es parlé de cette comédie très bien troussée. J'ai également beaucoup aimé et, comme tu le dis, Dany Boon est formidable dans son rôle comme dans son jeu. Une première ! Vincent Lacoste est une magnifique tête a claque et Julie comme Karine sont toutes les deux également très bien.
    Un point m'a quand même (un poil) chagriné: L'épisode de "la chatte" justement. La foune, le minou de ces dames (et leurs petites contrariétés) est LE sujet qui revient trop systématiquement dans les conversations de nanas. Dans toutes les dernières comédies écrites par des femmes ces dernières années, c'est le truc systématiquement mis en avant a chaque fois. Et sans beaucoup d'élégance ou pudeur. Je suis pas bégueule, mais a la longue, on dirait qu'elle n'ont trouvées que cet angle là pour faire de l'humour.
    Quant a l'affiche, il est dommage qu'elle soit aussi anodine et quelconque.

    Mais franchement j'ai quand même aimé au delà même de mes attentes. Bonne pioche.

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  2. Pour l'affiche, je suis d'accord, on dirait un film de Danièle Thomson !!
    Pour le reste... c'est pas faux, d'autant que Julie Delpy commence par ces deux scènes, comme si elle voulait s'en débarrasser avant de passer à autre chose. Son cinéma a toujours été très cru (un peu à la manière des comédies américaines de Jude Apatow) , mais c'est dit avec tellement de classe par Karin Viard !! Et puis c'est un peu le sujet du film, des femmes de 45 ans, encore très désirables, bien installées, enfants élevés, sans homme dans leur vie... Donc elles parlent de quoi ?...
    Et puis au moins, ça change des films de mecs (d'ados) qui parlent cul uniquement sous l'aspect masculin !!! L'égalité des sexes, c'est aussi ça : ce qui est un peu lourdingue chez les mecs, l'est aussi chez les dames ! (aurions-nous les mêmes préoccupations ?...)

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  3. Le truc c'est qu'a chaque fois, dans ces comédies en tout cas, ces donzelles semblent ne mettre en avant que leur simple désir de retrouver un homme, dont le seul intérêt serait de leur faire mordre leur polochon. Hier elles nous traitaient de cochons et/ou d'obsédés sexuelles, aujourd'hui serions-nous passés pour nombre d'entre elles a l'état de simple accessoire pour Dames ?
    Et puis passé la quarantaine, les femmes seraient-elles a ce point proche de la nymphomanie ? Désireuses de bai*** a tout va, et surtout a tout prix. Quelle époque !

    Tant de questions restant en... suspend.

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    1. Pas d'accord !!! Le personnage de Julie Delpy a le désir de retrouver un homme, mais pour vivre avec, sur le long terme. Ce que refuse son fils. Ca commence effectivement par un élan physique - et tu remarqueras que jamais on ne le voit, elle le raconte à sa copine. Mais quand on commence une relation, généralement, ça passe pas le pieu (sic) avant de s'épanouir autrement, ou en rester là. C'est une femme à mi-parcours, elle a réussi dans son métier, elle a élevé un enfant, et elle estime avoir encore beaucoup à vivre.

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  4. Dans le cas du personnage jouée par Julie, c'est quand même vrai... Ce que tu dis.

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