mercredi 10 juin 2015

The DEAD DAISIES "Revolucion" (juin 2015), by Bruno



     Oh !? … Crénom, ça m'gonfle !
Ils avaient constitué une super bande de musicos, avec Jon Stevens ; un chanteur qui a de la personnalité et qui sait insuffler de la vie aux chansons qu'il interprète. Et voilà t'y pas que j'écoute les premières phrases de ce nouveau Dead Daisies tant attendu, et que je n'y retrouve plus son timbre de Néo-Zélandais éduqué aux valeurs du Rugby et aux douces saveurs de la bière. Inquiet, on consulte rapidement le livret (parce que sur le digipack, outre les titres, y'a que dalle) et, effectivement, plus de Jon Stevens !  [censuré]  ! 

     Font [chier] ! Y'en a marre des groupes à géométrie variable ! 
     C'est pourtant tellement plus sympathique un groupe dont les membres restent les même au fil du temps et des disques. D'autant plus que l'identité d'un groupe se forge sur le résultat de la rencontre de musiciens ayant chacun sa propre sensibilité et sa propre vision des choses. C'est une fusion. Changer de personnel altère forcément l'identité du groupe (La Palice n'aurait pas dit mieux... quoique... bref c'est un truisme). De plus, bien souvent, c'est le chanteur qui apporte le plus de caractère au collectif. On a d'ailleurs quelque fois pu voir des combos perdre leur équilibre, leur cohésion, après en avoir changé. Même quand cela a été fait au profit d'un plus performant et/ou technique.
Le noyau dur : Fortus & Lowy ? (photo K.Benzova pour Dead Daisies)

     Et perdre un gars du gabarit de Jon Stevens, ce n'est pas rien. Cela pourrait s'avérer mortel.
D'autant plus que « Mexico » (1), un rien conventionnel, n'a rien de transcendant. Pour un titre d'entrée en matière, qui, apparemment, a servi pour le premier clip promotionnel, et de présentation du nouveau line-up, c'est presqu'un comble. Sympathique et remuant, cherchant l'équilibre entre un Rock charnu de type AC/DCien, sleaze et mélodique, il ne peut néanmoins suivre la comparaison avec aucun des morceaux du précédent et premier disque.

     Et puis c'est qui ce nouveau chanteur ? John Corabi ? C'est qui celui-là ? Ha oui, celui qui avait remplacé Vince Neil au sein de Mötley Crüe de 1992 à 1997 (et donc sur les albums « Mötley Crüe » et « Quaternary »), qui avait pris aussi la guitare chez Ratt de 2000 à 2008, qui avait formé un quatuor de Glam-Metal-Rock, The Scream, avec Bruce Bouillet, que l'on retrouvait dans l'Eric Singer Project (en tant que guitariste, chanteur et, occasionnellement, bassiste), et, enfin, dans Union avec Bruce Kulick.
Un gars qui a de la bouteille... multi-instrumentiste de surcroît (chanteur, guitariste et bassiste), et chanteur de qualité, au timbre usé, rugueux, parfois proche de la fêlure. C'est indéniable. Mais ce n'est pas Jon Stevens ! 

Oui, mais voilà : ce combo est un repaire de filous qui savent comment appâter le poisson. En effet, ils la jouent fine en balançant en deuxième pièce d'artillerie, un brûlant  « Evil », de Willie Dixon. Oui mais attention, un « Evil » version Cactus ! Oui, celle figurant sur le troisième opus, « Restrictions ». Avec une guitare qui fuzze et part dans des larsens comme celle de Jim McCarthy, solo torturé avec "guitare hurlante face à l'ampli" y-compris (2). Quant à Corabi, et bien il suit la voie tortueuse ouverte par Rusty Day et parvient à ne pas finir au fond du ravin. Il gambade même sur cette passerelle vertigineuse. Bonne et agréable surprise. C'est le genre de reprise que l'on ne s'attend guère à retrouver aujourd'hui ; d'autant plus que le jeu de batterie complexe n'est pas à la portée du premier venu.
La suite avec "Looking for the One" tape dans le Classic-Rock qui ne déplace par des montagnes mais qui fait bien le job.
Là encore, The (new) Dead Daisies trouve la parade pour rebondir avec « Empty Heart » : du High-Octane Rock'n'Roll dont les racines plongent et aspirent l'essence des débuts de Jimmy Barnes (des 80's). Et pour cause, c'est une chanson du Monsieur. Cerise sur le gâteau : Jimmy himself apporte ici sa contribution. Du coup, on a là une, si ce n'est la, pièce maîtresse. Décidément, ce lascars de 59 ans tout frais (depuis le 28 avril dernier), tel le loup sur les abris de paille et de bois, envoie valdinguer de son puissant souffle tous les apprentis Rock'n'Roller (qui s'évertuent à se fracasser les cordes vocales, frôlant l'apoplexie, tout en oubliant l'essentiel : le feeling). Il propulse cette pièce dans une dimension supérieure, et Corabi s'en sort plus qu'honorablement face à ce monument du Rock Aussie. Avec cette pépite, Dead Daisies paraît avoir passé la cinquième à bord d'un bolide indestructible et inarrêtable.
G à D : Fortus, Corabi, Tichy, Mendoza, Reed et Lowy (pas un look à jouer du RnB)

     Ce que semble confirmer "Make it the Best of it" qui se complet dans un Heavy-rock bluesy frais, limite réjouissant, entre Whitesnake et le Bad Co d'avec Robert Hart. Et "Something I said" hésitant entre une ballade Bluesy à la Quireboys et une heavy, nettement appuyée, façon Guns'n'Roses, avec un soupçon de Nazareth.
"Get up, Get ready" est agrémenté de quelques épices Funky (guitares crunchy qui swinguent, parfum Fender façon Kotzen) que l'on retrouve encore sur "With you and I" et sa rythmique relativement lourde (que l'on pourrait soupçonnée d'avoir été inspiré par "American Woman" de Guess Who et ressuscité par Kravitz) doublée par une talk-box en retrait. La frappe puissante du batteur évoque ici celle de feu-John Bonham. Ce qui n'est guère surprenant de la part de Brian Tichy. Néanmoins, ce n'est plus ce dernier qui tient les baguettes, car, apparemment, il a toujours la bougeotte et n'est présent que sur "Evil" et "Midnight Moses" (les deux reprises). Le petit nouveau est un certain Jackie Barnes... Oui, le fils de Jimmy Barnes (que l'on a déjà pu voir prendre la place derrière les fûts pour accompagner le paternel, et même, occasionnellement, prendre le micro). Ce jeune gaillard a de la ressource.

Petit slow fantomatique de John Corabi, entre  les Wings  et Alice Cooper, qui permet d'entendre un peu plus Dizzie Reed qui souffre depuis le début, bousculé par les deux gratteux. Il s'en donne à cœur joie et varie les plaisirs entre un piano à queue et un bastringue. On s'attendrait à ce que des violons viennent étoffer tout ça sur les dernières mesures. A la place, on a droit à la chorale... des A.A.A qui s'octroie un relâchement (ou plutôt une rechute).

De crainte que l'auditeur ne soit pris de torpeur, ces chevelus envoient un "My Time" qui n'est pas sans rappeler Tesla (d'ailleurs, Corabi a bien quelques intonations à la Jeff Keith), si ce n'est que Dizzie plaque quelques accords vibrants sur son Hammond (Gregg Rolie du temps de Santana).
Fortus & Corabi (photo K.Benzova pour Dead Daisies)

Avec "Midnight Moses" le sextet fait une fois de plus preuve de bon goût et d'intelligence dans le choix de leur reprise en allant dépoussiérer ici une pièce du Sensational Alex Harvey Band. Plus précisément, il s'agit d'une chanson d'Alex Harvey enregistrée initialement en 1969 sur son "Roman Wall Blues", qu'il repris en 1972 pour "Framed", le premier disque du groupe. John Corabi amène le morceau un peu plus loin que l'original en ayant plus de force et de morgue qu'Harvey. C'est comme si ce titre, pourtant ancien, avait été conçu pour lui.

Heavy-sleaze-Rock'n'Roll avec le tonitruant "Devil out of Time" qui cultive le style "pas d'quartier". Ça sent la gomme des pneus sur l'asphalte après un démarrage au frein-à-main, la bière renversée, le cuir tanné. (Izzy Stradlin n'est pas loin)
Pour le final, "Critical" trompe son monde en débutant sur un mode de Rock éthéré avant d'exploser. Non loin du Rock singulier des Danois de D.A.D. (celui de leurs opus du XXIème siècle) qui se plait à alterner entre différentes ambiances, pouvant aller d'un Rock froid et clinique, et mélodique à la fois, à de furieuses déflagrations Heavy plus Rock'n'Roll.
Finalement, John Corabi s'avère être un bon choix pour effectuer un remplacement aussi difficile que celui de Jon Stevens. (même si l'on peut regretter ce dernier).




Y'a plus de Stevens, Y'a plus d'Soul. Enfin presque.
     Ainsi, avec "Revolucion", The Dead Daisies perd complètement cette pertinente couleur (pastelle) Soul qui pouvait se faufiler entre ce duo de guitares mordantes et affamées. Avec pour conséquence, une musique qui peut paraître moins riche qu'auparavant. D'autant plus que les références résurgentes aux Faces, Cheap-Trick ou autres Temperance Movement et Noiseworks, présentes sur le précédent, semblent avoir été proscrites (mais peut-être perdues si l'on se réfère aux reprises que cette bande se plait encore à interpréter sur scène).
Désormais, le sextet s'est recentré sur un Rock un tantinet plus conventionnel mais qui a toujours ce discernement de ne pas se perdre dans des démonstrations techniques (ou pseudo-techniques) inadéquates et stériles.
Dorénavant, le côté Sleaze et Heavy-rock est bien plus mis en avant. Ce qui devrait satisfaire les adeptes d'un Rock sans concessions, sans fioritures et sans faux-cols, et qui se passeraient bien des colorations Blues et Soul.
Toutefois, l'excellent "Something I said" retrouve cette coloration Soul qui hisse cette pièce au sommet de l'album.

     Sans contexte, un bon album de Heavy-Rock qui donne l'impression d'être insensible aux affres du temps, et qui risque fort de faire de l'ombre a tous ceux qui sont déjà sortis cette année. Néanmoins, à mon sens, il se présente moins fort que le premier. Sachant qu'il doit être difficile de l'égaler tant ce premier essai était une réussite.

1 - Mexico [04:40] - S
2 - Evil [03:14] - Willie Dixon
3 - Looking for the One [04:01] - C
4 - Empty Heart [03:45] - J. Barnes / Tommy Boyce
5 - Make the Best of It [04:06] - S
6 - Something I Said [05:17] - S
7 - Get Up, Get Ready [05:17] - C
8 - With You and I [04:37] - C
9 - Sleep [04:40] - John Corabi / Mathew Lee Farley
10 - My Time [04:57] - C
11 - Midnight Moses [04:30] - Alex Harvey
12 - Devil out of Time [03:17] - C
13 - Critical [04:16] - S


Compositions par Lowy, Mendoza, Fortus & Reed, plus Jon Stevens (= S) ou Corabi (= C)


Le titre de l'album n'a rien à voir les sujets abordés, c'est seulement parce que le groupe a enregistré la majorité du matériel à Cuba, et qu'il s'est plus ou moins immergé dans la population locale.







     Toujours la valse des batteurs ? Ou bien est-ce Jackie Barnes a été uniquement sollicité pour un travail en studio (cette année, il y a déjà joué sur deux autres albums), ou encore n'a-t'il pas souhaité partir pour l'Europe ? Car pour cette tournée débutée en mai dernier, c'est Tommy Clufetos (ex-Black Sabbath et Ozzy) qui s'y colle.
Pour de récents concerts, le collectif s'est offert les services de Bernard Fowler en choriste de luxe (Rolling Stones, Stevie Salas, Nicklebag). Y'a pire comme choix.
(1) Ville où Marco Mendoza vécut une longue période de sa jeunesse- bien que né en Californie, à San Diego -
(2) On peut déjà lire de nombreuses p'tites chroniques mentionnant ce titre comme une reprise de Dixon (ce qui est juste) mais qui omettent d'évoquer la version de Cactus. M'enfin ?! Personne ne connait Cactus ? Il y a pourtant un gouffre entre l'original et cette version à la nitroglycérine. 
Sur l'enregistrement original, de 1954, il y avait Hubert Sumlin ; musicien qui fit considérablement évoluer la guitare Blues en sortant des sentiers battus.





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