- J'entends une musique de circonstance en ce jour de vendredi saint
M'sieur Claude, c'est une messe ????
- Pas tout à fait Sonia, demain je vais parler de la Passion selon
Matthieu de Bach, c'est un oratorio chanté en allemand…
- Un opéra en somme ?
- Oui et non, seuls le Christ et l'évangéliste ont un rôle précis, un
oratorio s'appuie sur un livret inspiré du récit de la Passion dans
l'Évangile…
- Tiens… le chœur qui commence me dit quelque chose… Dans un film qui se
passe à Las Vegas je crois, bizarre comme rapprochement…
- Et oui Sonia, c'est le générique de Casino de Martin Scorsese, quand
Robert De Niro saute avec sa voiture dans un geyser de flamme, au
ralenti…
- La jaquette de l'album est effrayante, j'ai l'impression d'avoir déjà
vu ce tableau dans une revue d'art…
- C'est très possible ! Il s'agit d'un fragment du retable d’Issenheim du
peintre Matthias Grünewald, peint vers 1512. On pense à Jérôme Bosch,
glaçant, en effet…
Écrire sur un œuvre aussi importante pose de nombreux problèmes à votre
rédacteur, ne serait-ce que la peur de trahir l'esprit de la partition ou
les intentions des musiciens. Déjà, premier écueil, l'ouvrage de
Bach
dure près de 3 heures voire 4 heures dans des enregistrements anciens (Klemperer). Inutile de préciser que je ne peux qu'isoler et commenter quelques
extraits caractéristiques parmi les plus de 80 airs, récitatifs et chœurs
qui constituent ce que d'aucuns considèrent comme l'un des chefs-d'œuvre
absolus de l'humanité (option musique). Et puis les choses se compliquent
pour le choix d'un enregistrement tant l'ouvrage a été gravé par les plus
grands, soit par des ensembles modernes au début du XXème siècle,
soit,
à partir des années 60, par des ensembles baroques qui tournaient le dos à l'épaisseur romantique,
une révolution dans le style des interprétations permise par les recherches
de
Nikolaus Harnoncourt
et
Gustav Leonhardt. Et comme il fallait bien faire un choix, c'est justement le triple album
de 1989 du claveciniste et chef
d'orchestre
Gustav Leonhardt
que j'ai retenu parmi les 9 versions que je connais bien. Pour cette
occasion, le maestro dirige un ensemble baroque :
La Petite Bande
créé par en 1972 par
Sigiswald Kuijken.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Jean-Sébastien Bach
n'est pas un nouveau venu dans les articles "classique" du Deblocnot. Dans
l'index, on trouve déjà des articles sur : l'Art de la fugue (mon premier article…), les
variations Goldberg,
l'Oratorio de Noël
et les célèbres
suites pour violoncelle
(Clic). La biographie et les compositions les plus essentielles de ce grand
bonhomme ont donc déjà été bien esquissées. À l'époque baroque, les
compositeurs comme
Bach
naviguent de ville en ville au gré des propositions de postes plus ou
moins prestigieux. Par ailleurs, en cette Allemagne mi catholique, mi
reformée, chaque noble "protecteur" peut imposer à son "employé" la
création d'ouvrages suivant la liturgie latine ou luthérienne en langue
allemande. Je parle des œuvres chantées. D'où l'écriture de ces
passions
sur des livrets en allemand d'un côté, et la
Messe en si
de l'autre, quintessence d'une vie de travail et conforme à l'ordinaire de
la Messe catholique.
Les fonctions les plus marquantes occupées par
Bach
se situeront à Weimar de 1708 à 1717 et surtout à
Leipzig (Cantor de Leipzig) où il travaillera de
1723 jusqu'à sa mort en
1750. Ce quart de siècle
verra la naissance des plus grands chefs-d'œuvre du compositeur : les
concertos et œuvres pour orchestre joués dans le
Café Zimmermann (le café "Procope" de Leipzig),
300 cantates pour 5 ans de liturgie (un projet fou – 200 nous sont parvenus), et les
passions
(seules les
Saint-Jean
et
Saint Matthieu
ont été redécouvertes en entier par
Mendelssohn). Les dernières années de sa vie, gagné par la cécité,
Bach
se consacrera aux recherches sur le contrepoint, en lien avec la
numérologie, comme dans
l'Art de
la fugue
(clic) et
l'Offrande Musicale.
Les temps sont durs et la protection sociale inexistante en
1750, même pour les
Bach.
Anna Magdalena, sa seconde épouse qui recopiait les partitions, et lui avait donné 13
enfants, lui survivra dix ans de manière précaire. Une légende prétend
qu'elle mendiait sur le parvis de l'église Saint-Thomas. La passion
d'Anna Magdalena…
Comme pour nombre d'ouvrages essentiels de
Bach, cette
Passion
est auréolée de mystères divers.
Bach
a dû achever la composition vers
1727. Il ne semble pas que le
maître ait reçu une commande précise pour cet oratorio qui sera créé le 11 avril 1727, sans doute le
vendredi saint, dans l'église
Saint-Thomas de Leipzig. Elle
sera rejouée plusieurs fois, mais fort mal accueillie par un public
luthérien intégriste qui accepte mal cette théâtralité de la composition
en regard du respect absolu dû aux textes sacrés. Cela explique qu'après
la mort de
Bach, en 1750, la partition
finira au fond d'un placard jusqu'en
1829, date à laquelle le
jeune
Felix Mendelssohn
redécouvre, émerveillé, le chef d'œuvre et permet sa renaissance à travers
des adaptations données en concert. Le jeune compositeur sera très
influencé par la structure de la partition lors de l'écrire de ses propres
oratorios :
Paulus
et
Elias.

Le livret alterne les textes de l'Évangile, à savoir les récitatifs du
narrateur (l'évangéliste) et les paroles du Christ,
avec des airs et des chœurs qui traduisent de manière plus lyrique les
interventions de la
foule pendant le chemin de
croix, et les prières des
croyants. Lors de la
rédaction de l'article sur
l'art de la fugue, j’avais insisté sur l'intérêt que portait
Bach
à la numérologie et à la géométrie à travers ses compositions. La
Passion selon Sant Matthieu
est organisée… disons comme un arbre de décision ou encore comme les
branches d'un organigramme d'entreprise (1 chef, 2 sous-chefs, 4
sous-sous-chefs… etc.). Il y a une symétrie rigoureuse dans la répartition
arborescente des récitatifs, airs et chœurs et dans le choix des
tonalités. Il en résulte une très grande variété dans les enchaînements et
une perfection de l’architecture "en arche" ; et on ne peut nier que
Bach
pensait à une tragédie grecque face à son écritoire.
Bach
ne pouvait pas proposer au courant
piétiste de Leipzig une œuvre
théâtrale avec mise en scène, personnages et figurants. On s'en doute. Il
contourne le problème en faisant chanter les textes par au moins 6
solistes différents, deux chœurs (adultes et garçons) et fait jouer deux
orchestres. Pendant près de trois heures on ne s'ennuie pas une seconde
(enfin si on aime…) grâce à ces idées de génie.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Il n'est pas interdit de penser qu'en cette année 1989 Gustav Leonhardt
ait médité et mûri depuis près de quarante ans cet enregistrement sur
instruments d'époque. Un projet qui respecterait aussi les règles
d'authenticité vocale. Un travail ardu destiné à nous faire redécouvrir la
Passion
telle qu'on pouvait l'entendre à
Leipzig
260 ans plus tôt. Lors de sa disparition en 2012,
j'avais déjà dressé un portait de cet immense musicien, claveciniste,
organiste, chef d'orchestre, et complice de
Nikolaus Harnoncourt
et du jeune
Philippe Herreweghe
dans la redécouverte du style baroque (CLIC).
Gustav Leonhardt
avait participé à la gravure de l'intégrale des cantates de
Bach
en compagnie de ces pionniers dans les décennies précédentes.
Pour cet enregistrement, Gustav Leonhardt
revient aux fondamentaux les plus radicaux du XVIIème siècle :
la distribution vocale est exclusivement masculine. Ce n'est en
aucun cas de la misogynie mais de la musicologie, un retour aux sources
avec des timbres vocaux en vigueur à l'époque. Les
sopranos ne sont pas des
femmes mais des garçons choisis parmi les meilleurs petits chanteurs du
Tölzer Knabenchor, et l'un des altos solistes,
David Cordier, est un jeune chanteur du
King's College
de
Cambridge
(il fait actuellement une carrière internationale de contre-ténor).
Pour les deux rôles principaux,
Leonhardt
fait appel à deux spécialistes qui ont déjà chanté et enregistré un nombre
incalculable de fois la
Passion selon Saint-Matthieu. La basse néerlandaise
Max Van Egmond
dans le rôle du Christ et le
ténor allemand
Christoph Prégardien
pour camper l'évangéliste.
Dans la distribution, on rencontre également le
contre-ténor
René Jacobs. Bref, n'en jetez plus…
Nota
: pour rassurer les ultras de la lutte contre le sexisme, je précise que
de nombreuses instrumentistes du beau sexe sont présentes dans l'orchestre
la Petite Bande, bien évidement.
Leonhardt
recourt à un effectif choral et instrumental très équilibré (40-50
exécutants max). C'est un juste milieu entre les versions anciennes
romantiques mais parfois boursouflées, et les exécutions chiches avec une
poignée de chanteurs… On sait que Bach
se plaignait de ne pas disposer d'un nombre suffisant de musiciens.
Dire que cette parution discographique était attendue par les mélomanes
fans de cette
Passion est un euphémisme. Ils ne furent pas déçus ! Le mieux est d'écouter et
d'apprécier quelques extraits. Les N° correspondent au découpage sur
Deezer puis aux plages sur les 3 CD.
N° 1 Chœur - Plage 1 CD 1:
"Kommt…"
:
L'ouverture, haletante, oppressante, nous invite d'emblée à partager le
tourment de la passion. Le rythme imposé par
Leonhardt
est régulier, un cœur bat dans cette ouverture. La respiration inquiète
simulée par les cordes et le chant des bois naturels ne suggèrent ni
détresse, ni angoisse désespérée. La conception de
Gustav
Leonhardt
sera emplie de lumière. L'orgue positif apporte ses rayons de clarté
sonore. Clarté pertinente, même si
le texte est une lamentation
; et d'ailleurs le chef fait articuler presque avec allégresse ses
chanteurs. Il souligne ainsi que le chemin de croix et la mort du Christ,
dans l'esprit de
Bach, doivent avoir lieu pour que "s'accomplissent les écritures" et
que la rédemption nous atteigne. Le musicien n'apporte aucune fioriture
mais propose un flot d'une belle musicalité et les voix sont d'une rare
expressivité. Le chant des gamins est très audibles… bref, la
perfection.
N° 6 Air pour Alto – Plage 6 CD 1 :
"Du lieber heiland du" :
Cet air évoque le récit du versement d'un parfum rare sur la tête du
Christ par une femme.
René Jacobs
chante avec douceur et sérénité ce passage de louange, l'un des derniers
airs radieux alors que le drame se profile. La voix est souple, les
ornementations discrètes, le continuo avec la flûte solo aérienne
accompagne d'un bel éclat le chant du contre-ténor. (René Jacobs vient d'enregistrer sa propre vision de la passion ; je ne la connais
pas, une réussite majeure d'après la presse.)
N° 8 Air pour soprano – Plage 8 CD 1
: "Blutt Mur" :
Cet air commente la trahison de Jésus par Judas pour 30 deniers. Il est chanté par un jeune soprano du chœur
d'enfants. J'ai toujours des craintes quant à la justesse de la ligne de
chant avec les gosses. Cet air est un miracle. Avec un tempo vif, la ligne
mélodique déploie un sentiment de colère. Le jeune chanteur rythme avec
vigueur et vaillance son chant. Ses aigus séraphiques, sans écueils ni
saturation, accentue l’indignation du propos. Le continuo ne couvre jamais
la voix. En dirigeant ainsi le jeune soprano, Gustav
Leonhardt
gagne un pari réputé impossible.
N° 27a Duo pour soprano et alto + Choeur – Plage 27 CD 1
: "So ist mein Jesus…" :
Une des pages les plus surprenantes de l'ouvrage. Ce passage intervient
pour commenter l'arrestation du Christ. Il débute par un duo
soprano-contralto (René Jacobs) et s'achèvent par un chœur rageur sensé illustrer la colère des
disciples opposés à l'arrestation. Le discours musical est de fait assez
complexe, voire chargé.
Gustav
Leonhardt
assure une belle lisibilité entre les voix des solistes puis celles du
chœur. Les traits violents de l'orchestre évitent tout pathos. Ce qui fait
toujours merveille dans cette gravure est l'équilibre entre les voix et le
ou les orchestres, l'absence de confusion, la présence discrète mais nette
de l'orgue…
N° 41a Air pour alto – Plage 10 CD 2
: "Erbarme dich…"
:
Cet air commente le reniement de Pierre. Il commence par une mélopée des
cordes avec un émouvant solo du violon.
René jacobs
est, comme dans la plupart des airs pour alto qu'il assume, au sommet de
son art. Il s'affranchit de la tristesse affectée que l'on entend parfois.
Il chante un Pierre regrettant amèrement, moins son reniement, que son
manque de courage et de fidélité. Dans ce très bel air, le contralto
apporte une sincérité réelle à cette confession nostalgique.
Avant d'écrire ces quelques mots sur l'air N° 41, j'ai laissé de côté
une diversité inouïe d'airs et récitatifs pour basse, ténors, etc… sans
compter des combinaisons entre le chœur et les solistes. Dans cet
enregistrement, le phrasé des chanteurs est toujours excellent. Le ton
expressif et délié correspond bien à l'esprit du texte. Je m'aperçois
que je n'ai encore rien dit sur les rôles principaux.
Christoph Prégardien
donne une vie intense et habitée à l'évangéliste. Tous ses récitatifs
sont très articulés et animés. Le Christ de
Max van Egmond
répond au double impératif de la résignation face au sacrifice et de
l'humanité. La voix est chaleureuse et ne trahit jamais une dérive vers
l'affectation possible pour un personnage d'essence divine. À noter la
délicatesse de l'air
N° 49 (20-CD2) pour soprano
accompagné d'un jeu subtil du basson, du hautbois et d'une flûte à
bec…
N° 65 Air pour Basse – Plage 13 CD 3
: "Mache dich"
C'est l'un des plus beaux et des plus longs airs pour basse. Ici la voix
est accompagnée par une profusion orchestrale que l'on retrouve dans les
concertos les plus riches de
Bach. Curieusement, c'est musicalement plus vivant et coloré que dans bien
des ouvrages religieux ultérieurs, de
Mozart à
Brahms...
N°67 & 68 : récitatif de quatre solistes et chœur, puis chœur
conclusif plage 15 et 16 CD 3
:
Encore une trouvaille tout à fait inhabituelle : quatre solistes (Basse,
Ténor, Alto, soprano – tessiture descendante) chante un à un et en
alternance avec une réponse du chœur un ultime verset d'adieu au Sauveur.
Aucun chanteur ne fait preuve d'hédonisme, nous ne sommes pas dans un
opéra mais dans l'un des passages les plus intimes, un passage qui conduit
au célèbre chœur final (entendu par Sonia dans Casino). Fidèle à
son souci de grande simplicité,
Gustav
Leonhardt
conduit son ensemble de deux chœurs, de la maîtrise et de deux orchestres
avec une stricte rigueur, dans une priante douceur, en ciselant chaque
phrase.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Il serait inepte de tenter d'établir une discographie définitive de la
passion selon Saint Matthieu
de
Bach. On y rencontre souvent l'excellence et quelques petits points faibles
inévitables dans un ouvrage aussi ambitieux qui réunit 6-7 solistes et
plus, deux chœurs et deux orchestres, sans compter la variété de
conceptions imaginables de la part des chefs. Certaines versions anciennes
(1930-40) ont souvent mal vieilli par leur lourdeur romantique (Mengelberg et même
Furtwängler…).
En 1962,
Otto klemperer, d'origine juive, mais s'étant converti au catholicisme pour entrer dans
l'univers de
Bach, réunit le plateau de chanteurs du siècle :
Peter Pears
en évangéliste et
Dietrich
Fischer Dieskau
en Jésus Christ. À leurs cotés,
Elisabeth Schwarzkopf,
Christa Ludwig,
Nicolai Gedda
et
Walter Berry. Un enregistrement avec le
Philharmonia
qui reste une légende pour les amateurs de grandes voix. Hélas, le
vieux maître, en étirant le discours pendant près de 4 heures avec une
direction sulpicienne, passe à coté du thème du sacrifice et de la
rédemption, et nous inflige une céleste tragédie wagnérienne qui lorgne
vers
Parsifal. (EMI – 4,5/6).
Avec un plateau de chanteurs aussi investi et le
Concertgebouw d'Amsterdam,
Eugen
Jochum
apporte plus de ferveur et de majesté à son enregistrement pour
Philips en
1965. Spirituellement sublime
(pas surprenant), mais les 3 CD sont difficiles à trouver et le son un peu
feutré (Philips – 5/6).
À mon humble avis, la gravure mono de
1950 d'Hermann Scherchen
à Vienne reste le modèle de
la transition entre les versions à l'ancienne et celles de l'école
baroque. J'avais déjà parlé de ce chef qui comprenait plus qu'un autre la
magie, la numérologie, et les secrets de la polyphonie de
Bach. Avec des effectifs réduits et les chanteurs géniaux de cette époque,
Scherchen
redécouvre les tensions poignantes et métaphysiques oubliées et prépare
ainsi l'arrivée des baroqueux. Le son mono remasterisé est parfait. Les rééditions sont hélas chaotiques (Millennium Classics
- 6+/6).
Curiosité
: en 1992,
Christoph Spering
a enregistré la version établie par
Mendelssohn
et jouée en 1841 avec des coupures. C'est réservé aux passionnés de
l'œuvre dans mon genre. Je vous ai épargné la jaquette qui représente… un
fauteuil style Ikea ?!?!?!?! (Naïve
- 4/6). Oh et puis si, je craque pour détendre le propos... Quelqu’un
peut-il m'expliquer le rapport avec le sujet ?
Autre merveille (il y a un consensus), l'entreprise de
Paul McCreesh
en 2003 consiste, à partir de
travaux des musicologues Joshua Rifkin et
Andrew Parrott, à recourir à des effectifs minimalistes. Chaque chœur est chanté par un
quatuor de voix, une par tessiture. Les airs sont chantés par six
chanteurs, solistes un à un, mais aussi éléments du double chœur réduit
ainsi à 2x4 chanteurs. La conséquence : une intelligibilité du texte
remarquable. Les tempos sont rapides. Le jeu entre les instruments
surprend par l'intimisme douloureux qui se dégage. Déroutant au départ,
Paul McCreesh
offre une relecture où le moindre risque d'emphase mystique a totalement
disparu ! Un thriller liturgique magnifié par le
Gabrielli Consort et 8 chanteurs d'exception dont
Magdalena Kozena (Archiv - 6+/6).
Je ne peux faire l'impasse sur les deux enregistrements de
Philippe Herreweghe, grand chef de chœur (formé à l'école de
Harnoncourt
et
Leonhardt) et chef scrupuleux. Le second enregistrement de
1999 surpasse à mon sens le
premier par sa ferveur dramatique et une lisibilité des voix excellente.
La prise de son est splendide. C'est une alternative à la conception
exclusivement "masculine" de
Leonhardt. Le chef belge adopte avec le
chœur (mixte)
et l'orchestre du Collegium Vocale
un staccato et une articulation qui éclaircit le flot sonore. Point noir :
le Jésus par trop prophétique
et outré de la basse
Franz-Josef Selig. On aurait préféré
Peter Kooy, complice habituel de
Herreweghe dans les cantates. (Harmonia Mundi
- 5/6).
Il faudrait citer
Harnoncourt
chez
Teldec,
Rilling,
Richter… Comme l'écrivait un critique : rarement un nouvel enregistrement se
révèle inutile. Il complète le patrimoine…
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
4 Vidéos
: les deux parties de la
Passion selon Saint-Matthieu dans l'enregistrement
d'Hermann Scherchen
de 1950.
Bach
au tournant de l'ère romantique et de la révolution baroque. Cette vidéo a
été réalisée avec le plus de soins possibles à partir de vinyles… ; soyez
indulgent. (Le report en numérique sur CD est lui, miraculeux.) Un concert
de Gustav Leonhardt. Puis un concert de
Philippe Herreweghe
à Cologne avec le
Collegium Vocale de Gent.
Christophe Prégardien
chante l'Évangéliste.
Un modeste apport venu du fond des alpages chablaisiens
RépondreSupprimerClaude TOON semble ne pas connaître une version récente
et à mon avis remarquable
par René JACOBS
avec le RIAS KAMERCHOR
et l'académie für Alte musik Berlin
chez Harmonia Mundi
Mais bien sur Gustav Leonhardt reste la réincarnation de BACH
et pas seulement au cinéma (le BACH film)
Bon, je retourne brouter l'herbe encore rare
signé : BIDULE (mouton de Bernex)
Cher Bidule !
RépondreSupprimerLisez avec plus d'attention mais articles fort complet. J'ai écrit à la fin du paragraphe consacré à l'air d'alto (N°6) :
"(René Jacobs vient d'enregistrer sa propre vision de la passion ; je ne la connais pas, une réussite majeure d'après la presse.)"
Hors, j'avais écrit la semaine passée cette chronique, et un ami m'a prêté samedi ce disque Jacobs.
En deux mots :
- Prise de son magnifique, pour moi, c'est important...
- Couleurs de l'orchestre idem, Théorbe bien venu
- Soprano qui, hélas, chante ses airs comme dans une opérette du XIXème siècle !?!? Jolie voix cela dit.
- Esprit général qui fait penser à l'oratorio de Noël. Après tout, pourquoi pas, joie et espoir de la résurrection et de la rédemption sont des leitmotiv. Mias c'est quand même une "Passion" à l'origine :o)
En résumé : comme j'ai également écrit : aucune version n'est inutile, cette version Jacobs en particulier qui tourne définitivement le dos à des affres sulpiciens d'avant Vatican II.... (heuuu, c'est vrai que c'est une œuvre luthérienne, mais on comprendra...) Note perso : 5/6
Merci à toi cher génie des alpages
béee !!!
SupprimerIl semble bien que la Passion selon Saint Matthieu ait été donnée pour la 1ere fois en 1727, et non pas 1729. Dans deux ans, ce sera d'ailleurs le tricentenaire de sa création. Depuis 2014 et la publication de cet article bien intéressant pour un passionné de cette œuvre, et aussi de la Passion selon Saint Jean qui est différente, mais qui n'a rien à lui envier d'un point de vue qualitatif, bien des versions de cette sublime Passion ont été enregistrées, ce qui fait qu'aujourd'hui, le choix des bonnes versions est assez vaste.
SupprimerUn coup de cœur pour moi, la version de l’Ensemble Pygmalion et son chef Raphaël Pichon.
Juste sublime!
Oui en effet, le 11 avril 1727 d'après un site Web. Je vais modifier le texte...
SupprimerMerci pour ce commentaire... J'en profite pour mettre à jour les vidéos et tenter la version de Raphaël Pichon.