lundi 4 avril 2011

CALVIN RUSSELL (31.10.1948 / 03.04.2011) RIP


Il y a comme ça des articles qu'on aimerait n'avoir jamais à écrire...En effet, c'est avec une profonde tristesse que nous venons d'apprendre le décès de Calvin Russell chez lui au Texas, à l'âge de 62 ans. Il est décédé hier matin, dimanche 3 avril à Garfield, près d'Austin, des suites d'un cancer du foie.
Quelques semaines après Gary Moore c'est une autre figure du blues qui nous quitte, sale temps....

Retour sur la vie mouvementée et la carrière de cet authentique et attachant songwriter qui avait trouvé en France une terre d'accueil.
Calvin Russell est né à Austin au cœur même du Texas, il a ouvert les yeux dans l'obscurité, quelques minutes après une éclipse totale du soleil, le 31 octobre 1948. Issu d'une famille pauvre et nombreuse, le jeune Calvin apprend la guitare à l'age de 12 ans et passe son adolescence livré à lui même, toujours sur le bord de la route de la légalité, « On savait qu'on filait un mauvais coton, confie-t-il, mais on aimait notre liberté. Je construisais des bolides et courais dans tous les coins du Texas tandis que les autres gamins en étaient encore au stade de la bicyclette ».

A 13 ans, il joue de la guitare dans un groupe local "The Cavemen" et à 15 ans, il fugue pour la Californie à San Francisco. A force de vivre vite et libre, sans vraiment se préoccuper de la loi, Calvin Russell fait quelques séjours dans des institutions pour mineurs et plus tard se retrouve bien vite sur les puciers des prisons d'Etat. A peine sorti, il enfourche sa Harley et part sur les "Highway" qui s'étirent entre Beaumont et El Paso. Sa vie nous rappelle celle d'un de ces "Vagabonds Solitaires" de Jack Kérouac. Toujours à la recherche de nouvelles sensations, il écrit, il chante, il traine ses santiags sur ces terres perdues et se laisse emporter par les visions et les rêves torrides de ce coin désertique de l'ouest américain.

 Après quelques années d'excés, d’errances et de vagabondages à dériver à travers le Texas, les Etats du Sud Ouest Américain et le Mexique, parsemées de séjours répétés en prison, entre geôles Mexicaines et cellules Texanes, le cow-boy rebelle se retrouve finalement à Austin en 1986. Il côtoie de nombreux musiciens, parmi lesquels le légendaire Townes Van Zandt, mais aussi Willie Nelson, Jimmy Dale Gilmore ou Leon Russell. Il tente sa chance dans les clubs de la ville, sans succès, jusqu'en 1989 où Patrick Mathé, le boss de New Rose, le découvre au Continental Club. Impressionné par le personnage à la tronche burinée par le soleil et les abus que la morale réprouve, le frenchie est tout de suite scotché par la voix sombre et rugueuse du hors là loi. Sa musique, à la lisière du rock à l'ancienne, de la country et du blues et les textes de ses chansons expriment parfaitement son caractère de rebelle solitaire en lutte perpétuelle contre le mode de vie rigide du système américain. Patrick Mathé lui propose de signer un contrat dans son label New Rose. La carrière de Calvin Russell est enfin lancée, il a 41 ans !!!!
En 1990, le premier album sort en France, "A Crack In Time", gros succès à la sortie de cet album aux influences rock/folk/country, décrit comme un « grand album aux couleurs du Lone Star State » . Ce 1er essai reussi permet à notre Texan préféré de participer à bon nombre de festivals en compagnie de pointures comme Little Village et The Kinks. Le deuxième album,"Sounds From The Fourth World" (1991), restera le meilleur album studio de Calvin Russell. On trouve le titre emblématique "Crossroads" qui va devenir la signature du Texan et d'autres chansons qui deviendront des incontournables : " One Meat Ball "et " Rockin' The Republicans". La critique sera unanime et le public se précipite à ses concerts. L'année suivante, Calvin Russell revient sur le devant de la scène avec "Soldier" . Dans le prolongement des deux albums précédents, il l’enregistre encore aux Studios Arlyn à Austin, mais la production est cette fois assurée par le légendaire Jim Dickinson, empereur du fameux Memphis Sound, qui a travaillé avec des légendes comme Ry Cooder ou les Stones.

 Après trois albums studio, il est temps en ce début d'année 1994 de sortir un Live, c'est chose faite avec "Le Voyageur", un brulant témoignage des concerts donnés à l’Olympia, l’Elysée-Montmartre, l’Exo7 à Rouen, le Zig-Zag à Orléans ....etc....les souvenirs inoubliables gravés sur CD d’une tournée marathon pendant laquelle Calvin Russell et son groupe auront donné ....180 concerts en Europe en une seule année !!! En 1995, sort le très bon " Dream Of The Dog", un disque avec de nouveaux musiciens (Jon Dee Graham, ex- True Believers) et un nouveau producteur (Mike Stewart). "Dream of A Dog" est une ancienne légende indienne. La pochette, qui représente les motifs d’une couverture indienne, est un clin d'oeil aux origines comanches de Calvin certains des symboles étant originaires de la tribu de son arrière grand-mère.Cet album contient notamment le superbe titre autobiographique "Trouble" où Calvin raconte ses errances passées ("I was born in a word of trouble, trouble is my first name, I used to drink 'til I was seein' double, but lately I've been changin' my ways").

L'homme au Stetson crasseux, retouve en 1997, son vieux pote Jim Dickinson mais part enregistrer à Memphis ce qui restera certainement l 'une de ses plus belles réalisations, un album tout simplement baptisé "Calvin Russel". Aidé par le talentueux Chuck Prophet (ex-Green On Red) aux guitares et la légendaire section rythmique David Hood à la basse et Roger Hawkins à la batterie, Calvin nous décoche quelques histoires et portraits typiques de l' Ouest sauvage dont il a le secret. "This Is My Life" une p'tite compil' pour souffler un peu, parait en 1998... avec quand même trois nouveaux titres : "Forever Young", "Texas Song" et "It’s All Over Now". Pendant que " This Is My Life", arrive dans les bacs, Calvin s'arrête dans une station-service au Texas et son passé le rattrape soudainement. Un shérif du coin, lors d'un contrôle de routine découvre de la marijuana dans sa voiture. Son passeport est immédiatement confisqué, et cette "petite chose sans importance" risque d’entraîner l’annulation de tous ses sursis et même de le ramener très rapidement vers la case prison. Heureusement les choses s’arrangent, avec une mise en liberté semi-surveillée sous réhabilitation : il a l'obligation de se rendre chaque matin dans une clinique afin d' uriner dans un bocal pour prouver qu'il ne prend pas de substances illicites, il doit également écouter régulièrement la bonne parole et promettre d’être enfin un "Good Ol' Boy". Ouf ! Calvin peut retourner tranquillement en studio pour l'album suivant "Sam" qui parait en 1999. La machine tourne en roue libre, c'est bien foutu, mais ça décolle pas vraiment.... "Crossroads" (2000) ou Calvin tout seul avec sa guitare en live qui offre à ses fans français les plus beaux titres de son répertoire avec une voix somptueuse et profonde dans des versions "Unplugged". L' album est ici restitué brut de décoffrage, sans overdubs, un disque majeur plutôt sombre, roots, dépouillé, d'un authentique songwriter, un pur et dur qui n'oublie pas de se siffler une p'tite gorgée de Jack Daniels entre chaque titres....

Délaissant momentanément le bon vieux rock qui déménage qui a fait son succès, Calvin Russell sort en 2001 "Rebel Radio" un album de reprises et de compositions personnelles. Calvin a composé "Country Boy", "Freight Train Blues" et "Nothin' Is". L'album se ballade tranquillement entre la country, le blues et le folk. Au fil des chansons, on rencontre ses héros de toujours Willie Nelson, Townes Van Zandt, la nouvelle star de la country Gillian Welch et même les Stones sur une reprise countrysante de "No Expectations" . Une petite récréation sympathique mais pas vraiment indispensable pour les fans qui attendent impatiemment son retour sur scène. En ce début de millénaire, le texan tatoué accuse le coup de toutes ces années passées "On The Road" et semble être en panne d'inspiration. Il reste radicalement inconnu aux Etats-Unis, seule l'Europe et plus spécialement la France, l'accueille les bras ouverts. Sa maison de disque fait patienter les aficionados du cow-boy crooner d' Austin en publiant une autre compilation "A Man In Full" le 2 avril 2004 et il faut attendre le 21 mars de l'année suivante pour pouvoir enfin écouter son nouvel album "In Spite Of It All". Calvin est bel et bien de retour et l'histoire continue .... il vous suffit juste de poser le disque sur la platine et de pousser la porte du"Grand Ouest Américain", de traverser la "Voodoo River" et les mirages se concrétiseront dès que vous ouvrirez les yeux et les oreilles ...

Calvin Russell poursuit sa carrière européenne avec "Unrepentant" (2007), son 13e album studio et "Dawg Eat Dawg" (2009). Son blues/rockailleux bien pimenté à l'ancienne, teinté de country, est surtout à déguster sur scène, et sans modération..... la preuve avec les albums :
- "Live at The Kremlin" (Bicêtre), le QG de New Rose à l’époque, datant de 1990, ce disque n'est sorti qu'en 2006. Le groupe est composé des frangins Waddell , deux psychopathes de la rythmique, aussi teigneux derrière leurs instruments que dans la vie et de l’incroyable guitariste Gary Craft, tout en riff hargneux.
-"Contrabendo" un autre live enregistré et filmé le 05/12/2007 au Trabendo à Paris qui sortira finalement en 2011, remettant par la même occasion les pendules à l'heure pour ceux qui pouvaient encore douter de la stature de ce vieux briscard de Calvin sur scène. Un vrai, un pur....sincère et honnête. Mais, Calvin Russell vieillit et se fait de plus en plus rare, mais à chaque fois qu'il revient c'est pour combler ses fans et se donner sans compter sur scène, malheureusement notre cow-boy au grand cœur en octobre 2009 a dû subir une lourde intervention chirurgicale d'urgence à l'hôpital d'Austin. Si Calvin semblait avoir largué ses démons intérieurs, un autre mal venait de le rattraper, pour finalement l'emporter quelques mois plus tard.

Calvin Russell restera un des bluesmen préférés de l'hexagone et il était un véritable cow-boy du Texas, un authentique conteur musical qui transformait les sons en images et les paroles en émotions... Avec ce visage cabossé par le temps et les épreuves d’une vie atypique ou se mêlait, grands espaces, prisons, alcool, drogue et country-rock/blues fiévreux, il se décrivait lui-même comme "Un rocker hors la loi qui lutte contre la mélancolie des temps modernes, un rebelle qui se bat contre les lois inutiles, celles qui empêchent la poursuite du bonheur".

RIP CALVIN, thanks for all.

En hommage à Calvin, l'émouvante chanson "Soldier"



5 commentaires:

  1. Très mauvaise période pour la musique. Une grande voix s'éteint. Un sacré personnage, sincère, avec une gueule de vieux baroudeur revenant de l'Enfer, géniteur de chansons intemporelles.

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  2. Salut Calvin,
    Salut et merci pour tes notes, tes mots et ta voix ... putain, quelle voix !
    Tu as été le compagnon de bien des misères
    alors bon vent l'ami et repose en paix, pas dans l'oubli, juste assez loin de la tourmente.

    Phil39

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  3. Personnage authentique, avec cette voix martelée et ce visage cabossé digne de son Texas natal. L' homme simple au grand coeur marquera à jamais son passage dans ce bas monde. Il s' en est allé comme il a vécu. SIMPLEMENT.

    Respect, Monsieur Calvin Russell.

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  4. je viens d'apprendre le départ de calvin je t'ai vu et applaudi à mérignac au krakatoa il faisait chaud en juin mais tu en as rajouté c'est un beau souvenir trop vite passé
    je me repasse tes DVD et CD . ON NE T'OUBLIE PAS

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  5. fais les rêver là haut!!

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