Joseph Losey |
Au
mitan des 70’s, Alain Delon n’est pas encore la vedette populaire des innombrables et ersatz d'Eastwood de FLICS…
QU’ON NE REVEILLE PAS, PAROLE DE… POUR LA PEAU DE… mais a mis sa notoriété au
service de metteurs en scène comme Visconti, Melville, Clément. Car le mec était cinéphile, vrai passionné de cinéma et savait reconnaitre le talent. Mais curieusement et contrairement
à Belmondo, il n’a pas flirté avec la Nouvelle Vague, ne croisant les plateaux
de Jean Luc Godard qu’en 1990 pour NOUVELLE VAGUE. Il produit MONSIEUR KLEIN, afin d’être certain que Losey puisse
faire le film dans les meilleurs conditions financières. Deux grands noms à l’affiche
et un film magistral ne font pas pour autant un succès (ça se saurait !).
Le public n’a pas adhéré à ce drame parano sous l’Occupation. 30 ans après la
fin de la guerre, la croix de David sur l'affiche avec la tête de Delon n'a pas franchement aidé, le sujet était sans doute encore trop sensible.
Joseph
Losey y va franco dès la première scène : une femme nue, auscultée comme
une jument par un médecin pour déterminer si elle est juive ou non. « Race
sémite, un cas douteux » conclut-il. Losey enchaine avec Robert Klein dans
son fastueux appartement qui fait affaire avec un homme. Il marchande un
tableau pour la moitié de sa valeur. Au moment de remplir le bon d’achat, Klein
demande : « adresse ? ». L’autre (Jean Bouise) répond,
penaud : « pas d’adresse… ». Klein lui lance un regard entendu :
l’homme est juif.
Robert
Klein fait des affaires. Et elles sont plus simples et rapides avec les juifs, qui
discutent rarement les prix et disparaissent après la transaction. Aucun
problème moral pour Klein, il ne fait que son boulot, et après tout, c’est lui
qu’on vient trouver. Souvenez-vous de cet homme qu’on retrouvera dans l’ultime
et terrible plan du film.
Cette
vie bien rangée va se fissurer lorsque Robert Klein trouve un journal sur son
paillasson. Une revue juive à laquelle il n’est pas abonné. Comme on dit :
ça craint. Il s’en plaint auprès du journal, cherche à comprendre le quiproquo,
et apprend qu’habite à Paris un autre Robert Klein, homonyme et juif. S’en suit
une double enquête : retrouver l’autre Klein, afin d’être certain de ne
pas être confondu une nouvelle fois, et rechercher ses propres origines.
Ce
film est glaçant. A l’image de sa superbe photographie, froide et bleuté, où
Alain Delon en costume cintré sur mesure ou peignoir en soie traine son visage livide
et blafard. Il impressionne, comme un spectre sorti du SAMOURAÏ de JP Melville.
Robert Klein se confie à son ami et avocat, Pierre, qui l’aide dans sa quête d’identité pour lui dénicher un acte de naissance. Mais plus Klein cherche à prouver son
innocence auprès des autorités, plus il devient suspect : « Quelqu’un
se montre pour mieux se cacher » lui dit-on. Robert interroge son père
(Louis Seigner) qui le rassure d’un tonitruant « Nous sommes français et
catholiques depuis Louis XIV ! ».
Beaucoup
d’images, de plans, sont fameux dans ce film. Les longs travellings de Losey (descente du train),
cette soirée dans un salon guindé où apparait Jeanne Moreau, que l’on reverra
en peignoir rouge descendre un escalier teinté de lumière bleue, comme une
Dracula, les feux de cheminées qui tracent des ombres menaçantes aux murs. Les
décors sont d’Alexandre Trauner, nourri au réalisme poétique de Marcel Carné, scène des voitures au Grand Palais. Losey
emprunte au cinéma fantastique, les pizzicati de violons oppressants en rajoutent une couche, on pense à Roman Polanski (LE
LOCATAIRE, sorti la même année). D’autres plans tiennent du Film Noir, la
descente du train, les contre-plongées, éclairages contrastés.
Les
femmes sont habillées de fourrures et boivent du Champagne, les tables de restaurant respirent l’opulence,
la France bourgeoise et insouciante vit bien sous l’Occupation, mais Robert
Klein s’amuse de moins en moins. Il sent le piège se refermer sur lui. Il
recherche l’autre Klein, trouve son réseau d’amis, trouve son appartement, y
pénètre, s’identifie, se substitue presque. Les deux Klein semblent se fondre
en un seul. Alerté, l’autre cherche aussi à le joindre. Coup de téléphone :
« - Allo, Robert Klein ? - Oui, qui est à l’appareil ? – Robert Klein… ». Énorme !
Le
film culmine avec la rafle du Vel d’Hiv à l’organisation froide et méthodique. Petit
matin brumeux, silencieux, Gestapo, police française, tractions avant, et tous
ces gens résignés, empaquetés dans des bus. Les deux Klein sont du voyage. Magnifique
plan des bus entrant dans le stade suivis en travelling latéral. Pierre l’avocat
qui depuis les tribunes montre à son ami les certificats de naissance enfin retrouvés. Les haut-parleurs appellent
: « Robert Klein ! ». Pour Klein/Delon c’est enfin le moment de
la rencontre avec son double, donc la fin du cauchemar. C’est sans compter un mouvement de foule. La
fin du film interpelle, chacun y verra ce qu’il veut, identification,
rédemption, faute à pas de chance… C’est un des épilogues les plus crispants et
déroutants qui soit.
Cette
mécanique mortifère et implacable est axée sur l’acteur Alain Delon, mais le
reste de la distribution est juste incroyable : Jeanne Moreau, Suzanne
Flon, Juliet Berto, Jean Bouise, Michael Lonsdale, Louis Seigner, Pierre
Vernier, Etienne Chicot, Michel Aumont et même le jeune Gérard Jugnot. Joseph
Losey nous prend à la gorge dès la première scène et ne nous lâche plus, le
film est oppressant autant que passionnant, sans éclat de bravoure ni discours moralisant,
froid, clinique, juste les faits, les actes, qui décrit droit dans les yeux cette
période abominable de lâcheté et de petites compromissions.
Il
fallait l’exigence et le talent d’un Losey, il fallait le charisme et l’engagement d’un
Delon pour y arriver. C’est chose faite. César du meilleur film/réalisateur en
1977, boudé par le public, MONSIEUR KLEIN reste une des meilleures performances
de l’acteur-producteur Delon. Il vous en prie…
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Le menu de la semaine prochaine ?
(tout le monde peut jouer et proposer des titres. En cadeau un masque FFP2 porté par C3PO).
Les indices :
(tout le monde peut jouer et proposer des titres. En cadeau un masque FFP2 porté par C3PO).
Les indices :
- un long périple dans les sables chauds de l'Utah jusqu'aux neiges du Wyoming.
- même un borgne apprécierait la beauté crépusculaire de ce film.
- né la même année que mézigue, le dernier grand film d'un Maître.
- "On a retrouvé la 7ème compagnie" ?
- Non Sonia, essaie encore...
- "On a retrouvé la 7ème compagnie" ?
- Non Sonia, essaie encore...
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couleur - 2h00 - format 1:1.77
Oui, bien! Vu au cinoche à sa sortie, avec toute ma classe de seconde au Lycée!
RépondreSupprimerDelon bien dirigé, il est grandiose! Quel gâchis toutes ces merdes qu'il a réalisé/produit...
Sinon pour le Quizz, je sèche. C'est qui qu'a la même année que toi, le film ou le réalisateur?
Allez, j'envoie: Thelma et Louise...Badlands...Dead Man...
Le réalisateur a cassé sa pipe depuis un moment. C'est le film et moi qui partageons la même date. Allez... c'est un western, son dernier western. Il en avait tourné beaucoup...
RépondreSupprimerje tente ma chance, "les cheyennes" de John Ford? ah non tu es plus jeune que moi je crois, donc pas possible..je séche..
RépondreSupprimerTu gagnes un inédit de Junior Wells, que je t'apporterai personnellement... ah non... donc je le garde pour moi ! (je suis plus jeune de quelques mois...)
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