Après 43 ans de bons et loyaux
services au service de la bande dessinée pour adultes, Fluide Glacial n’a
jamais jeté un froid sur ce qu’il contient.
Gotlib le grand !
Ancien
transfuge de Pilote et de L’Écho des Savanes, Gotlib
va publier son propre journal, Fluide Glacial, le 1er avril 1975 avec Jacques Diament, un ami
d’enfance. Il va débaucher pratiquement tout ses potes des autres publications
pour les faire venir bosser avec lui. Dès le N°1, apparaitront Alexis et Claire Bretecher
et, au fil du temps, de nouveaux acteurs intègreront le journal. Tout en étant le
boss, Gotlib continue tout de même à dessiner et à créer des personnages
tout en améliorant ceux qu’il avait déjà fait naitre de son pinceau, comme Gai-Luron qui réapparaitra dans une
série d’albums. Il va dessiner des personnages plus acides et plus mordants les
uns que les autres comme Pervers Pépère,
Momo le Morbaque, Hamster Jovial et ses louveteaux et surtout le super-héros national Superdupont (Il ne dessinera qu’un épisode qui apparaitra dans Pilote : «Superdupont au secours de la nouille française», le
dessin sera repris plus tard dans Fluide Glacial par Alexis
et ensuite par Solé à la mort de ce dernier).
Frémion-Gotlib-Léandri |
Deux
personnages aussi fous que loufoques marqueront de leurs empreintes la
publication, ce sera l’écrivain humoriste Bruno Léandri
et son compère Yves Frémion, l’homme aux 15 pseudos.
Et puis tout ceux qui vont remplir les cases blanches du mensuel, années après
années, de Cabanes à Binet,
de boucq à Buzzelli,
de Loup à Edika, de
F’Murr à Franquin
sans oublier Gossens, Coyote,
Hugot, Gimenez, Goetzinger (Qui
vient de nous quitter), Kurtzman, Maëster, Mandryka, Schlingo, Tardi, Willem pour ne citer qu’une infime partie de tous les
artistes qui ont noirci les pages pour le plaisir des lecteurs. Mais aussi
beaucoup d’auteurs viendront, en toute amitié, mettre dans les colonnes du
journal un petit mot ou une grosse bêtise (Fond
de commerce de Fluide), Pierre Desproges, Christophe Alévêque, Laurent Baffie, Cavanna,
Benoit Delépine jusqu’aux Monty Python. Mais aussi des artistes : Tom
Novembre et son frangin Charlélie Couture,
Maxime le Forestier, Didier
Lockwood ou Marcel Dadi
le pote à Gotlib.
En résumé,
Fluide
Glacial sera un tremplin pour beaucoup de dessinateurs et un vivier pour
beaucoup de nouveaux personnages, de la folie de ceux d’Edika,
de Kador et des Bidochon de Binet, beaucoup
marqueront par leurs images et leurs scénarios sortant des sentiers battus,
comme «Paracuellos»
de Carlos Giménez, une bande dessinée
autobiographique sur un orphelinat en Espagne sous le régime franquiste. Une
histoire magnifiquement triste. Il y aura les génies comme Daniel Goossens et son humour absurde à la Mad
Magazine scientifique et froid comme l’iceberg du Titanic, un dessinateur qui
est un cérébral et un universitaire, en parallèle de sa carrière de dessinateur,
ce dernier est chercheur en intelligence artificielle. Il enseigne à Paris VIII
avec un statut de maître de conférences, son histoire la plus connue reste «La vie d’Albert
Einstein». Je pourrais énumérer tous les dessinateurs et leurs œuvres,
mais cela reviendrait à faire une chroniques sur l’intégral des opéras de Richard Wagner. Donc je vais revenir sur le patron
avec qui tout à commencé, le grand Marcel.
Gotlib profitera de la notoriété de sa publication pour
publier des albums aux histoires flirtant entre le porno, le scato, le gore
et le non respect de la religion, avec un humour mordant à la limite de
la censure. Le pipi-caca de «Rhaa Lovely» et «Rhâ-Gnagna» sera une porte ouverte
à toutes les fenêtres. Dans «Rhaa Lovely» Tome 2, il fera une
représentation de tout les dieux connus (God’s
Club) qui vont boire, regarder des
films pornos et faire un raffut de tout les diables, mais il représentera Allah
(Ce qui est quand même un grade au dessus
de Mahomet) et jamais il n’aura de problèmes avec des mouvements intégristes.
Ce qui
faisait le petit plus de Fluide Glacial, en dehors de son humour décalé,
et ce que l’on ne trouvait pas dans les autres publications, c’était des
dessins qui souvent n’avaient pas de cadres et des crobars dans les marges. De
la genèse du mensuel, beaucoup de ses piliers sont partis vers d’autres
aventures, ont pris leurs retraites ou sont partis tout court. Mais l’aventure
continue, Sœur Marie-Thérèse des
Batignolles de Maëster est toujours aussi
irrévérencieuse, Edika, le chat Clark Gaybeul, et ses personnages féminins
sont toujours habillées tellement court qu’elles frisent l’exhibitionnisme et
toute la nouvelle génération rajoute années après années une nouvelle pierre à
l’édifice et Gotlib, sur son nuage, doit être
content que son œuvre n’ait pas périclité.
J’ai
arrêté de le lire quand le boss a pris sa retraite, mais il m’arrivait quand
même, quelquefois, de racheter un numéro de temps à autre pour voir comment
celui-ci avait évolué et je fus quand même un peu déçu. Je n’achetais plus
que les numéros anniversaires ou spéciaux, mais la quantité de Fluide Glacial
que j’ai engrangé avec les années me prend une place considérable. Avec les
premiers numéros qui valent un bras auprès des collectionneurs, je pourrais
passer une semaine au soleil sur une île du pacifique, mais jamais au grand
jamais je ne me séparerai de mon adolescence, je préfère les relire sous le
soleil absent de la région parisienne.
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