mercredi 6 avril 2016

SPIRITUAL BEGGARS "Sunrise to Sundown" (2016), by Bruno


     Toi, là ! Oui, toi, le vieux fan inconsolable de la perte de Ronnie James Dio ! Toi qui ne trouve plus de quoi rassasier ta soif  de cossues sensations électriques générées par les sorciers de Rainbow, du Deep-Purple Mark II et Mark III, du Black Sabbath, voire de Whitesnake, j'ai ce qu'il te faut : le dernier Spiritual Beggars. Mais attention ! Tu risque de te prendre une grosse baffe dans la chetron.
La noire magie des épîtres sacrés de "Rising", "Long Live Rock'n'Roll", "Burn", "Heaven & Hell", "Mob Rules", "Strangers in the Night", "Look At Yourself'", "Holy Diver", "Assault Attack" (lien/clic), resurgit à travers l'énergie de ce superbe "Sunrise to Sundown". Cette galette a arrêté le temps et procure la sensation de se sentir bien.
 

   Le précédent, "Earth Blues" (avec sa terrible pochette), affichait déjà une belle progression (probablement pas de l'avis de tout le monde) en matière de Hard-Rock. Mais là, ces Suédois ont fait encore mieux. Ce n'est plus une avancé mais carrément un bond prodigieux. Le long parcours de ce groupe, projet parallèle d'adeptes de musiques extrêmes, est parti d'un Stoner bien lourd pour évoluer progressivement vers un Hard-Rock enlevé, consistant, protéiforme et assez travaillé. En évitant soigneusement toutes parties égocentriques et démonstratives.

     Le Disque ?
      Le titre éponyme parvient immédiatement à faire taper du pied avec son riff binaire et entêtant, doublé à l'orgue, et appuyé par un batteur cognant comme un sourd. Le truc parfait pour les adeptes du headbanging. Le solo est fortement marqué par l'aura de Michael Schenker ; encore plus évident dans le second mouvement du solo, avec ce grain crémeux passé à travers une wah-wah engluée.
Si, tout au long de ce disque, de part et d'autres ont retrouvera des licks propres à Ritchie Blackmore, parfois aussi à Uli Jon Roth, c'est l'influence de Michael Schenker qui prédomine ; tant par une forme de lyrisme que par le son. D'ailleurs, avant d'être endossé par Dean, et d'avoir son propre modèle signature (la Dean Tyrant), le guitariste Michael Amott jouait sur Gibson Flying V ; tout comme Schenker qui, avec son frère Rudolf, relançant la carrière de ce modèle. Et aujourd'hui, l'axeman Allemand joue sur Dean...
Wouaahh... les premières notes à l'orgue de "Diamond Under Pressure" évoquent irrémédiablement "Might Just Take Your Life" ; même la rythmique et le chant évoquent ce bon vieux Deep-Purple. Il semblerait juste que l'on ait un peu mélangé quelques éléments pour éviter le plagiat.  Le petit break renvoie même à la reformation du Mark II, solo y-compris. Escrocs ? Plus probablement de malins fouineurs instruits. En tout les cas, ça le fait.

"Whats doesn't Kill You" reste dans la sphère Blackmorienne, notamment dans ce que Rainbow a fait de plus enlevé (on pense parfois à "Death Alley Driver" de l'album "Straight between the Eyes"), même pour l'acrobatique et périlleux solo. Certains passages montent d'un cran dans l'échelle "Heavy-Metal" penchant alors plutôt vers Iron Maiden.

"Hard Road" et "Still Hunter" sembleraient lorgner vers un Heavy-Rock pêchu et un soupçon mainstream (ça reste du velu), voire conformiste, tel que l'on peut le trouver chez le Whitesnake ère Doug Adlrich (celle du XXIème siècle), avec un petit quelque chose de Saxon. "Hard Road" pourrait bien être une confession de foi du batteur Ludwig Witt ("I never had nothing that made me feel so good. It lit up my mind just like I knew it would... On the hard road I ride... where I used to fly, it's a long way...") ; musique et paroles de son cru, il aborde fièrement tatoué sur les phalanges de ses deux pognes (tout comme le révérend Harry Powell dans "La nuit du chasseur") les lettres de "hard road".

   Par contre "No Man's Land" s'aventure avec aplomb dans un Heavy-Rock progressif faisant le lien avec le Rainbow de Dio et Porcupine Tree. (si, c'est vrai !). Le break, surprenant, est une porte ouverte sur une nouvelle dimension ; précisément celle d'Alice Cooper et son univers développée avec l'aide de Bob Ezrin pour "Welcome to my Nightmare".
Toujours dans l'inspiration Heavy-Prog, il y a aussi "Southern Star" qui jonglerait avec le King Crimson 1er opus (le fameux) et (encore) le Rainbow de Dio (du genre de la chanson "Gates of Babylon").
La curiosité de l'album se présente sous la forme de "I Turn to Stone" avec son pattern de batterie, ce roulement en cascade, placée en avant, à la limite d'ébranler l'équilibre du morceau qui navigue dans un spleen profond.

"Lonely Freedom" est la rencontre de deux mondes : celui d'un Heavy-Rock progressif tel que décrit plus haut (plus porté par les claviers) et celui d'un Stoner, un tantinet boogie, à la Samsara Blues Experiment avec un riff au timbre rond, renforcé par une fuzz canalisée, bien dans les graves (sans être abyssaux...), avec un "deep" prononcé. Franche réussite. Michael Amott n'usurpe pas sa réputation d'être un des meilleurs gratteux de Heavy-Metal.

     Pas chiens, les loustics offrent en bonus un second CD. Avec deux reprises de choix passées à la moulinette Stoner (mais pas trop). "Thumbsucker" de Mountain (guère étonnant puisque ce titre, et bien d'autres du groupe de Leslie West et de Félix Pappalardi, peuvent être légitimement considéré comme du proto-Stoner, sinon au moins une source d'inspiration évidente) et un "Stoned Woman" de Ten Years After plus surprenant et, pour le coup, copieusement épaissie (avec une basse restant dans la dynamique d'un Pappalardi). Ce n'est pas de la reprise bâclée, de remplissage forcée. Surtout que "Stone Woman" n'est pas une pièce facile. Elles auraient toutes deux bien pu être insérées dans le 1er CD, et s'y fondre. sans dénaturer l'ensemble.
Et pour finir, un extrait de concert (ou est-ce l'intégralité du set ?), du festival Roadburn (Hollande) du 21 avril 2013. Cinq titres prouvant que le quintet ne se cache pas derrière des artifices pour faire parler la poudre. Ça envoie du bois tant en concert qu'en studio.
Cinq titres issus de "Earth Blues" dont le "Wise as a Serpent" qui pourrait être un Lenny Kravitz mutant irradié et frénétique, les doigts dans la prise, interprétant son fameux "Are You Gonna my Way" en mode Godzilla.
Au niveau des claviers de Per Wiberg, si l'ombre de Jon Lord est toujours présente, on retrouve aussi celle de Ken Hensley (qui est d'ailleurs très apprécié en Scandinavie). Si l'intro de "Kingmaker" (ici bien plus appuyé qu'en studio) est du pur Jon Lord, le titre, lui, semble sortir de "Very 'eavy... Very 'umble" (lien/clic). Pour mémoire, "Return to Zero" (le bien nommé), le premier opus avec le nouveau chanteur (soit depuis 2010), Apollo Papathanasio, offrait une excellent reprise du "Time to Live" (d'Uriah-Heep - "Salisbury").  On découvre aussi avec plaisir que le groupe n'est pas figé sur ses compositions à l'image de la longue intro de "One Man's Curse" presque funk (entre Mother's Finest et Deep-Purple) ; à l'origine la mise en bouche de Per Wiberg dure une petite poigne de secondes alors que là il s'en donne à cœur joie.

     Ce dernier Spiritual Beggars est un heureux brouet de Heavy-Rock né du travail des Deep-Purple, Black Sabbath, Rainbow, Uriah-Heep, MSG, Dio, Scorpions ère Roth, Mountain, U.F.O., Gillan, Electric Sun, voire Whitesnake. 
Une musique qui sait se montrer relativement agressive, sans pour autant fracasser les tympans (de la même façon que "Rising" de Rainbow, justement). Le quintet, bien qu'ayant déjà à son actif, de sacrés brûlots, semble avoir atteint un acmé de leur art.
A mon sens, ce "Sunrise to Sundown" devrait faire date. La claque "Heavy" du mois.


Mention spéciale pour le package de qualité, avec un artwork soigné et travaillé. Du bel ouvrage qui devrait faire la différence avec le téléchargement... (espérons).

     Spiritual Beggars c'est avant tout le groupe de Michael Amott, le guitariste Suédois qui s'est fait un nom à travers divers groupes de Death-Metal (ouch !), comme Carnage, Carcass, Arch Enemy (lien/clic) et Candlemass; Parallèlement, en 1992, pour explorer d'autres contrées, il fonde un groupe de Stoner : Spiritual Beggars. Progressivement le groupe Suédois évolue. D'abord trio, il devient quatuor lorsque Per Wiberg, débarqué de Death Organ, (Mojobone, futur claviériste d'Opeth, collaborateur occasionnel pour Arch Enemy et Kamchatka), puis quintet lorsque suite au départ de Christian "Spice" Sjöstrand (bassiste chanteur), le combo embauche distinctement un bassiste, Sharlee D'angelo (Mercyful Fate, Witchery, Arch Enemy, Night Flight Orchestra), et Aπόστολος Παπαθανασίου (traductionApollo Papathanasio) au chant. Ce dernier, évidemment, n'est pas scandinave, mais grec. Il est connu par les amateurs de Metôl pour officier dans le groupe Firewind de 2006 à 2013 ; formation dans laquelle on retrouve un certain Gus G, dernier guitariste en date d'Ozzy (en live et sur l'album "Scream" - lien/clic -).
Les divers membres jouant parallèlement dans d'autres formations, Spiritual Beggars a en conséquence une carrière assez décousue.
Le batteur Ludwig Witt officie aussi dans Grand Magus (lien /clic), et un temps avec Shining et Firebird.
     Le fait de pouvoir voir ailleurs, de n'être pas attaché corps et âme à une seule formation, a pu éviter les sempiternels conflits d'égo et de divergences musicales qui apparaissent généralement au bout de quelques années. On peut subodorer que c'est ce qui a permis au quintet de garder toute sa fraîcheur. On pourrait même avancer que l'incorporation de Papathanasio a donné un nouveau souffle, une nouvelle jeunesse, à un groupe dont la première galette est sortie en 1994. Même si certains pisse-froid diront que cette musique a été faite sur les cendres de groupes désormais désuets, et que par conséquent, il n'y a là rien de nouveau, le plaisir, lui, est franc et réel. Ce genre de propos arrêtés n'étant finalement pas très différents de ceux des amateurs de boys-bands et de marionnettes préfabriqués. Qu'ils aillent se faire s[censuré] r par des ours. La bonne musique n'a pas d'âge !







à mon sens, un des titres les moins bons

7 commentaires:

  1. Effectivement, "Diamond under pressure" est comme qui dirait... une soeur jumelle de "Might just take your life" ! C'est osé. Ont-ils écrit dans les crédits "inspired by" ou ont-ils vraiment un bon avocat ?!!

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    1. Les crédits mentionnent Per Wiberg pour la musique et Amott pour les paroles... et rien d'autre ... Sœur jumelle peut-être pas, mais de la même famille c'est plus qu'évident. A moins que Wiberg ne soit tombé petit dans un carton rempli de disques du Pourpre Profond (et d'Uriah-Heep, et de Rainbow, et de, et de...)

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  2. Ça fait un bail que je me tâte pour acquérir une bonne fois pour toute un album des SB. Il faut dire qu'a chaque fois qu'ils sortent un nouvel album, c'est l'engouement chez les critiques et la presse hard et Metal. Cette fois, je crois que je vais une bonne fois pour toute franchir le pas.
    En évoquant Grand Magus (dont j'avais dit ici le plus grand bien) dans ton article, il me reviens en mémoire que son chanteur JB avait lui aussi officié un temps chez les Spiritual Beggars.

    Quant au Michael Amott en question, on peut dire que le guitariste est particulièrement prolifique et particulièrement éclectique en matière de Hard et de Metal. Parce qu'entre le vintage de Spiritual Beggars et l'extrême de son Metal chez les enragés de Arch Enemy, il y a un sacré faussé. Et puis c'est aussi sans compter sur un autre projet très porté sur l'A.O.R (pour Adult Oriented Rock) du nom de Swing Orchestra me semble-t-il ou quelque chose comme ça. 2 albums sont ainsi paru et les amateurs de Journey et autres Toto devraient également pouvoir apprécier.

    Boulimique ce gratteux ?

    PS: J'ignorai que ce dernier avait également côtoyé cette autre formation suédoise qu'est le groupe Candlemass. Voilà qui tombe vraiment a pic pour le coup. Allez savoir pourquoi ? ;-)

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    1. Oui JB est sur l'album "Demons" (qui mérite le détour).

      Michael Amott est étonnant. En dépit de son bagage Death, Trash et autres trucs-core-Metôl extrême, il reste toujours dans le ton, autant ses rythmiques que ses soli. Sa personnalité semble autre avec Spiritual Beggars. Et on peut dire qu'il sait tricoter (enfin, avec sa guitare ; façon d'parler). Un gars bluffant.

      En tout cas, ce skeud passe en boucle depuis la semaine dernière (même au boulot ! vouaille ! Je baisse un peu le son quand il y a du monde...).

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  3. http://www.hardmaisrock.com/search/label/Spiritual%20Beggars

    ( Déjà en 2014….bla bla bla… bla Bla Bla… )

    Bon je n'avais pas trouvé un cadeau de Noel à mon associé SerpenS AlbuS.

    Il faut dire que comme à mon habitude je me réveille à la dernière minute pour les cadeaux.

    Je me gratte le cuir chevelu, je ferme les yeux, je tente de faire un effort pour contrôler mon cerveau et me dire ; tu vas avoir le déclic de génie. Mais rin ! rin de rin !

    J'ai pris une page blanche, je l'ai divisé en deux en traçant une ligne au centre, d'un coté ce qu'il aime, de l'autre ce qu'il aime pas, cela commence par UMP à gauche et PS à droite, PSG à droite OM à gauche...Soda à droite, bière à gauche...

    Puis mon stylo se figea.
    Deep Purple à gauche... AcDC à droite...
    Deep Purple... Bin oui mais c'est bien sur !

    Le problème c'est qu'il a tout de ce groupe, les Lp, Cd, Dvd, Vhs, slips, Godemichet pourpre...etc

    Donc, le seul cadeau que je puisse lui offrir est un ersatz !

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    1. Hum .... cela me semble un peu sévère et bien réducteur de réduire Spiritual Beggars à un ersatz de Deep-Purple. Certes l'orgue de Per Wiberg oblige le rapprochement et parfois le chant de Appolo se fait Coverdalien, et très occasionnellement Gillanien. Et pour être objectif, Amott semble emprunter quelques licks à Blackmore (mais peut-être est-ce plus inspiré d'Uli Jon Roth ?). Mais cela n'enlève rien à la qualité et la pertinence des compositions de ce groupe. Des compositions qui paraissent avoir gagné progressivement, au fil des albums, en feeling.

      En aparté, comment alors devrait-on considérer un groupe tel que Airborne ?

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