mercredi 21 janvier 2015

BIG BAD FAT MOON "13" (13/11/2014)


     Big Bad Fat Moon, un bon patronyme qui résonne à l'oreille comme l'héritage d'un Boogie-rock issu tant de Creedence que de ZZ-Top. Rien qu'en le prononçant, ça sonne Boogie, voire Blues-rock bien gras. Pourtant, ce trio de la région Parisienne (de Breuillet dans l'Essonne) oeuvre plutôt dans un Heavy-Metal flirtant avec un Rock Alternatif post-Grunge. En fait, l'origine de ce nom provient du Heavy-Metal-Boogie/Fat-Heavy-Blues-Rock "Big Bad Moon" de Joe Satriani. Ce dernier étant une influence majeure du fondateur Laurent Rousset.

G à D : Big Jo, Bad Lo & Fat Fred

     Ainsi ce trio pratique un Heavy-Metal d'un genre cinglant et tranchant qui se situerait au croisement d'un Heavy pro 80's et de ses jeunes enfants nés la décennie suivante, avec un son un rien plus métallique et agressif. Ainsi, si l'ombre des dinosaures du Heavy des années 80 plane sur ces puissants riffs de guitares, on retrouve dans l'offensive de la section rythmique un entrain propre aux énervés de la bande son metôl de ce siècle, voire Nü-Metal d'il y a quelques années. Et lorsque le trio se lâche, monte en tours, passant dans le rouge, on a la sensation de retrouver l'effervescence et l'engouement des Foo Fighters de Dave Grohl. Comparaison non fortuite puisque c'est justement une de leurs influences revendiquées. Le grunge de Nirvana semble avoir laissé également une trace lorsque l'on écoute "Elle y est". (Morceau que l'on pourrait également très bien rapprocher de Noir Désir ; groupe qui paraît avoir eu un ascendant sur l'identité musicale du trio).

     Surtout, comme tout bon trio de Rock qui se respecte, chaque musicien fait preuve d'une belle maîtrise de son instrument ; chacun apportant sa pierre à l'édifice, ou plutôt chacun jouant le rôle de clef de voûte à cette architecture métallique. Ces trois là ne sont pas là pour faire de l'à peu-près.
Il y a :
- Jonathan "Big Jo" Barthelemy qui fracasse ses fûts avec méthode et précision, avec une frappe lourde et énergique. On imagine aisément son kit vibrer de toutes parts sous ses coups de butoirs - Big Jo doit générer un gros budget baguettes et peaux -. On pourrait le comparer à Brian Tichy.
- Laurent "Bad Lo" Housset se complaît à exécuter des riffs agressifs, jamais répétitifs, puisant dans un riche terreau constitué à base de diverses essences de Hard-Rock et de Heavy-Metal. Il est d'ailleurs un peu étonnant que Bad Lo ait choisi, pour le groupe, un patronyme faisant référence à Joe Satriani, car ici les chorus échevelés et les soli vertigineux ont été mis au placard pour laisser la place libre aux riffs assassins. On pourrait même dire que Bad Lo se présente comme un maître-riffeur, un docteur ès-riff. Un esthète qui prend plaisir à faire évoluer ses riffs, à les casser pour les reconstruire en leur donnant une nouvelle forme, avant qu'ils ne retrouvent leur essence originale. Une manière d'opérer permettant de garder tout le jus et la puissance d'une composition, évitant de prendre le risque qu'elle ne s'étiole dans un solo. Une procédure que l'on peut retrouver, par exemple, dans certaines séquences chez Black Sabbath ou Iron Maiden. Malgré tout, on peut retrouver l'influence de Satch sur le solo qui suit le premier couplet de "L'étrangère".
- Frédéric "Fat Fred" Masson qui sait, au besoin, tant se caler sur la batterie puissante de Big Jo que sur les riffs de Bad Lo, sans jamais se faire prendre en défaut. Participant parfois à enrichir la mélodie comme sur le très bon "Pas Assez". Elle aurait même méritée d'être mixée un poil plus en avant ; du moins, par exemple, sur un titre comme "Tout ça" où elle se montre particulièrement véloce, donnant la sensation d'être un chouia acrobatique.
En aparté, en parlant de "Tout ça", il est juste d'élever cette pièce (aux faux airs de Trust) parmi les titres forts de l'album, ne serait-ce que pour le break (partie instrumentale) intronisé par le célébrissime discours de Martin Luther King. Longue pièce de 6 minutes où se côtoie des riffs Trustiens, une basse lourde et ferme, limite dominatrice, et une batterie "Caterpillar", ébranlés par un solo-"bruitage" à la Tom Morello.

     Ceux qui pensent que Heavy-Metal et Hard-Rock ne peuvent que rimer avec la langue Anglo-saxonne, pourraient bien être réfractaire à Big Bad Foot Moon, pour la simple raison que le trio ait choisi de s'exprimer dans la langue de Molière. D'autant plus que le chant ne cherche pas, sauf en quelques occasions nécessaires, à suivre l'exemple d'un Bernie belliqueux, mordant et autoritaire. Ce serait plutôt du côté de Calogero et d'Axel Bauer qu'il faudrait aller chercher pour situer le timbre et le chant de Laurent Housset. Des noms qui pourraient faire hérisser le poil des Heavy-Metal addicts lambda.
Mais attention, si affiliation il y a, ce serait enrichi à l'ampli Marshall (ou EVH 5150, ou Engl Powerball, ou Hughes & Kettner Coreblade, ou Blackstar Serie One 100, voire Orange Dark Terror - du lourd et spécifique, quoi). Okay ? C'est pas d'la variét'française, heingue. Ni même de la "Pop-rock" franchouillarde, bon chic bon genre, adaptée pour les radios galvaudant ce genre.
 Il y a bien un pied dans la culture de la chanson française à textes, oui mais à consonance Rock marquée et manifeste. Donc ce n'est pas "fleur bleue" (j'insiste pour ceux qui seraient tentés de partir en courant à l'évocation des deux chanteurs français sus-nommés), on ne s'approche jamais (même de très loin) de la variété comme le chérissait tant ce cher Guy Lux. Au niveau des références françaises, ce serait le nom de Noir Désir qui reviendrait le plus souvent, voire, dans une moindre mesure donc, de Daran (quand il branche l'électrique), cependant avec une optique foncièrement Heavy, à l'héritage "Hard-Rock / Heavy-Metal / Nü-Metal" bien plus marqué et évident.

     Big Bad Foot Moon renoue avec la tradition de ces groupes français qui ont quelque chose à dire ; de ces groupes français qui, à travers leur musique, voulaient crier sur les toits leur sentiment d'injustice, d'incompréhension. Ce servant de la musique comme d'un vecteur pour faire passer des revendications, des messages, des faits qui leurs tiennent à cœur ou qui les émeuvent. C'est ainsi que de leurs paroles suinte des états sombres et amère, nés d'âmes torturées. D'âmes blessées par le chemin que prend le monde, la société, par l'absurdité que peut aujourd'hui prendre la vie des gens.
"Un esprit précis, un grand maniaque des lois, un élu très bien servi au détriment des rats, ..., ..., je suis une banale éponge, je me gonfle assez d'orgueil. Une terre assoiffée qui se ronge comme un trouble à moi seul. On espère avoir fait le bon choix. On espère qu'un jour on renaîtra"

"13" pour treize pièces, treize pour 13 novembre, treize pour nombre premier "porte-chance" ? Ou pour conjurer une triskaïdékaphobie ? ("13" comme le dernier Black Sabbath ?)

Le groupe a remporté en 2012 la quatrième édition du tremplin de Longpont sur Rock (de Longpont-sur-Orge)

Le site : http://www.bigbadfatmoon.com/big-bad-fat-moon


15 commentaires:

  1. J'ai lu ton article avant de regarder la vidéo. Pour le dire gentiment, il y a un hiatus...Musicalement c'est effectivement du sous-Noir Désir. Quant aux paroles, honnêtement, c'est du niveau d'un collégien de 3e: les rimes noir/espoir...etc. C'est consternant de niaiserie, entendu mille fois. C'est peut-être sévère, mais bon, il faut bien qu'on leur dise. C'est comme pour la littérature, on ne fait pas automatiquement de bonnes choses avec des bons sentiments, a fortiori exprimés avec les poncifs les plus fatigués. En France, personne ne semble plus capable d'écrire de vrais textes. Ça n'est pas vraiment étonnant. Tu t'es pas un peu enflammé, sur ce coup?

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    1. T'es dur, SM.
      Toutefois, je dois admettre que, généralement, tes remarques sont pertinentes, incitant à argumenter, cernant ainsi mieux le sujet. (SM nous a à l’œil, et y'a intérêt à ne pas raconter des cracks - tu ne serais pas censeur, ou en passe de le devenir ?-)
      Pour en revenir aux paroles de BBFM, je dois convenir qu'effectivement c'est loin d'être du Baudelaire ou du D'Ormesson. Toutefois, à mon sens, c'est tout de même un peu au-dessus du lot, au pire du tout venant. Certes, il y a des phrases à la rime facile, mais lorsque je compare les leurs (je ne sais pas qui est le parolier) à d'autres noms bien médiatisés, il me semble qu'ils s'en tirent assez bien. Ne serait-ce que si l'on prend, à titre de comparatif, les paroles de l'album "Grizzly" de Bertignac, pourtant signées Boris Bergman (pourtant il y a des moyens là) - ce qui ne m'empêche pas d'aimer ce disque-. J'en passe et des meilleurs (je ne citerai pas les débuts d'Indochine qui ont assez souffert avec ça). Sans parler des "hits" aux paroles de fatigué du bulbe ou aux aptitudes limitées.
      Quant aux paroles des groupes Anglo-saxons... notamment dans la sphère Heavy/Hard-rock, on est souvent consterné par leur platitude, leur futilité, voire leur absurdité (Heureusement, l'Anglais reste la langue qui se marie le mieux avec le genre).
      BBFM, au moins, tente d'écrire quelque chose ayant un sens ; quelque chose de différent (certains ne se gênent pas pour s'inspirer d'autres textes) des sempiternels chagrins d'amour, ou d'amour contrarié ou d'amour épanoui.

      Sinon, il y a Satan Jokers qui a réalisé trois CD dont les paroles ont été écrites par un psychiatre, spécialisé dans l'addictologie. sur le dernier opus, "Sex Opera", il y a une Brigitte Lahaie qui donne de sa personne. J'n'sais pas... paraîtrait qu'elle est connue ; femme d'esprit, source d'inspiration.


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    2. Quoi qu'il en soit, il est vrai qu'il paraît y avoir pénurie de "vrais textes". Mais ne serait-ce pas plutôt une défaillance (ou une volonté) de l'industrie musicale ?

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  2. Je reconnais que c'est un peu dur, mais je suis désolé par la platitude générales des textes, comparés à ceux de Lavilliers (en classe, je fais étudier Les aventures extraordinaires d'un billet de banque, ça marche bien) ou de Renaud par exemple. Bertignac, c'est pire, et lui il n'a pas d'excuses. Aubert, la dope lui a bouffé les neurones. Dans les groupes anglo-saxons, et particulièrement le rock sudiste, on touche aussi le fond: rodomontades de bourrins, God bless you à la pelle, apologies de la biture et de la bagarre...etc. Mais P..., on a la plus belle langue du monde, quel dommage de ne pas savoir/vouloir s'en servir.

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    1. Je n'avais osé aborder ceux du Southern-Rock. C'était trop facile... De mémoire, Screamin' Cheetah Wheelies sortait du lot.
      Oui, Lavilliers, quelques beaux textes. Renaud, cela dépend. Chez Aubert, l'inspiration semble être tarie depuis des lustres (j'exagère peut-être un peu). Il y a eu Higelin.
      Le problème avec le Français, c'est qu'il est difficile d'adapter ses intonations au Rock. Une des solutions est d'avaler des syllabes par ci par là (à la manière de Paul Personne). Sinon, bien souvent, lorsque la musique est adapter au Français, à sa tonalité, son énonciation, à sa prosodie, elle perd en fluidité (se rigidifie, prenant parfois un côté robotique). En ce sens, il n'est pas aisé de pondre des textes qui soient à la fois agréable à écouter (ou à lire) et qui se marient à la musique.
      A moins, qu'il y ait une déficience d'excellents chanteurs Français pour le Rock ? Qu'aurait pu donner Edith Piaf en mode Heavy ? (Nooonnn... rien de riengue !! Je ne regretteuh riengue ! Blam ! Blam ! Blim ! Ni le biiieeennnggue !!! Vlam ! Ni le Mââaaâllleuh !! Blim ! Blam ! Blam ! Tout ça m'es bien zégaallll - Solo - ) Ha, mais oui ! Il y a bien eu "L'homme à la moto" en reprise Rock.

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    2. Lavilliers oui, mais aussi Souchon... Ce n'est pas rien Souchon quand tu y prêtes vraiment attention. Nougaro aussi, du ciselé, Higelin et son papa Trenet, sans ressortir les Brassens and Cie... Certains textes de Roda-Gil pour Julien Clair n'étaient pas mal. Daho, c'est bien foutu, mais je ne comprends rien... trop de références. Cabrel a craché quelques bons textes, je me souviens d'une chanson sur la corrida chantée du point de vue du taureau qui était bien.

      Mais je crains que les textes soient comme les musiques, les mixages, les productions, et même les voix... on formate, on égalise, pas un poil qui ne dépasse, pour ne surtout pas heurter le consommateur, qui ne doit pas faire de différence entre tel et untel... Toutes les chanteuses genre Tina Arena, Chimène Badi, Natasha St Pier, non seulement elles chantent pareil, mais ce qu'on leur écrit se ressemble. Pour avoir du succès, on doit reproduire ce qui marche. Et puis on s'adresse à des gamins de 12 ans qui téléchargent, donc ça nivelle légèrement... (les textes de surf-music, c'était pas du Cohen, du Randy Newman, ou du Dylan non plus...).

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    3. Oui, "La Corrida" de Cabrel. J'adore cette chanson (paroles et musique). Il en a écrit quelques belles.
      On en parle guère, mais Daran et Gildas Arzel ont écrit aussi quelques textes sympathiques (du moins à mon sens)

      Dans le Thrash, Grindcore, Black-metal, Death, ça "chante" bien souvent pareil, et les textes - pour bon nombre - sont... euuuhhh... disons.... (vas-y toi Shuffle)

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  3. Possible aussi, en effet, que ça participe de l'entreprise d'abrutissement généralisé de la population.

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  4. Et les textes d' ANGE, vous vous essuyez le cul avec ?

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  5. Ange? On est complètement de l'autre côté, dans le symbolico-ésotérico-abstruso-hermético allusif et ampoulé. Est-ce que c'est mieux? Rien n'est moins sûr. Je me souviens avec peine (surtout pour lui) de l'époque (vers 76) ou Christian Descamps jouait au prof de poésie dans Best.....Le meilleur texte d'Ange, c'est Brel (Ces gens-là). Après, on va dire que je suis contre tout. Ce qui n'est pas faux.

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  6. héhé...
    Il me répond le père siffleur du deblocnot'.
    Il est à l'aise pour parler de la monnaie fiduciaire papier comme du Southern Rock.
    Vient sur mon blog, il y a plein de niaiseries, tu vas te délecter.

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  7. Il y a quelques années, un journal (lequel ?) avait sélectionné des textes de chansons françaises, pour les soumettre, anonymement, à des profs de français. Qui ont du les corriger, à la manière d'une rédac de troisième... Il y en avait une dizaine, je crois, je ne me souviens que du premier et du dernier : Gainsbourg, 17/20, Jean Louis Aubert : 04/20... Il faudrait retrouver le palmarès complet, mais ça date d'une bonne vingtaine d'année...

    Le texte de "Merde in France" de Jacques Dutronc, il est très bien.

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    1. Ouch ! Ho pu...rée de [censuré] ! La claque !!
      Ce serait bien de retrouver cet article. Le sujet mériterait un livre.

      Du côté Anglo-saxon, j'avais été sidéré par la simplicité excessive des paroles de Scorpions (notamment des disques Lovedrive et Blackout).

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    2. C'est fait, enfin presque.
      www.hardmaisrock.com

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