jeudi 27 novembre 2014

KEITH JARRETT : The KÖLN CONCERT - par Pat Slade







Keith Jarrett : la genèse



A la fin de mon adolescence, j’ai profité du temps que j’avais pour connaitre le vaste monde, de la Thaïlande a la Chine, de Bali à Bombay en passant par la Turquie et l’Irlande, j’ai longtemps posé mon sac en Allemagne  et surtout à Cologne, une ville ou le Rhin coule tel le Danube au travers de Budapest. Cologne et sa Kölner Dom haute de 157 mètres (la cathédrale), la Kolsh, sa bière digestible et son opéra où le 24 janvier 1975 Keith Jarrett donnera un concert qui restera célèbre.

Keith Jarrett, malgré son teint mat est un descendant d’immigrants écossais et Hongrois. Né en 1945, il commence le piano à 3 ans, un âge où d’autres commencent à peine à lire et, à 7 ans, il donnera son premier concert. Il faudra attendre ses 17 ans pour le voir donner un récital de ses propres compositions. Il refusera une bourse d’étude à Paris auprès de Nadia Boulanger le professeur aux 1200 élèves comme Daniel Baremboïm, George Gershwin, Pierre-Henry et autre Quincy Jones. Mais il acceptera celle de la Berklee School of Music de Boston, endroit où il formera son premier trio. Sa première trace discographique existante sera avec les Jazz Messengers d’Art Blakey le batteur de jazz qui jouera avec Miles Davis et Thelonious Monk.

C’est la même année après avoir intégré le groupe du saxophoniste Charles Lloyd qu’il devient la nouvelle révélation du piano. En 1970, il devient le pianiste de Miles Davis. I l enregistre son premier album solo en 1972 «Facing You». Sur sa carte de visite, il y a marqué «Keith Jarrett pianiste», pourtant le musicien est multi instrumentiste, il est tour à tour saxophoniste, flûtiste, percussionniste, organiste, calviniste et guitariste.




Keith Jarrett, un improvisateur hors-pair




Nous sommes à l’opéra de Cologne à quelques encablures du Rhin et, en ce soir du 24 janvier 1975, va être enregistré un des albums que tout pianiste et amateur de jazz qui se respecte doit posséder. Avec ces 3,5 millions d’album vendus, il est l’album de piano solo le plus vendu de tous les temps. Un album qui apportera la reconnaissance du grand public à Keith Jarrett. Cet album live à Cologne est l'une des œuvres les plus essentielles jamais enregistrées dans le genre en ce qui concerne le jazz et le piano. En comparaison cette œuvre serait sur un point de vue classique comparable aux variations Goldberg de Bach par Glenn Gould, ce qui en fait une référence culte de cet album.  

Un album et un concert qui n’auraient jamais du voir le jour, Keith Jarrett est un artiste très exigeant si ce n’est pas pour dire emmerdant ou chiant (Vulgairement parlant !). Il a failli annuler le concert. Il est capable d’arrêter un concert si un spectateur prenait une photo ou pire encore si une personne dans le public venait à tousser. Pour le cas du concert à Cologne, c’est le piano qui ne lui plaisait pas, d’ailleurs pendant tout le concert, il ne jouera que sur les notes graves, le aiguës ne sonnaient pas assez bien pour lui.>

C’est avec un mauvais état d’esprit, avec un manque de sommeil et un piano de mauvaise qualité (D’après lui !) que jusqu'à la dernière minute, il hésitera à jouer. Jusqu’au dernier moment assis sur son tabouret, il hésite ne sachant toujours pas quoi jouer. La sonnerie de l’opéra retenti pour annoncer le début du concert et puis, à la surprise générale, il commence par improviser avec les quatre premières notes de cette sonnerie. S’en suivra une pure improvisation de 66 minutes dont lui seul a le secret. Son génie explose de la première à la dernière minute. Keith Jarrett a toujours trouvé que l’improvisation est la seule façon d’être fidèle a soi-même. La musique pour lui c’est surtout créer un monde et voyager dans ce monde.

Le concert fut gravé dans la cire, et si ce disque était un mètre-étalon, il serait à sèvre. C’est pour vous dire l’importance et la réussite de cette galette dans la musique jazz.2 disques, 4 faces, un joyau, une référence que même les non initiés à la musique jazz aiment ou aimeront.  



5 commentaires:

  1. Clairement la claque monumentale ! C'est curieux d'ailleurs comme depuis il semble exécrer cet enregistrement pensant que c'est vraiment pas à la hauteur de son talent.

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  2. Sympa à écouter, quelques temps morts mais un touché de piano qui vaut le détour…

    C'est vrai qu'il a le melon le gars. Témoignage d'une copine pianiste de jazz qui se rend chaque année à un festival au pays du foie gras : "C'est sous chapiteau. Il avait exigé qu'il soit le seul musicien de la soirée. Il avait voulu faire évacuer le village pendant les répétitions… La préfecture n'a pas suivi :o)"

    En pianiste classique aussi on a eu nos "stars" capricieuses : Gould, son yamaha fétiche et sa chaise aux pieds sciés, Horowitz et sa mégalomanie, ou dans le genre "je lâche le piano au milieu du concert car un type tousse" : Arturo Benedetti Michelangeli qui lui aussi se baladait avec SON piano qu'il savait réparer lui-même.

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  3. Si nous devions faire une chronique sur les stars capricieuses, le Déblocnot changerait son nom en "Closer", "Voici" ou "France dimanche".

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    1. Heuu oui et non. Car si des grandes pointures de la musique sont un rien "caractériels" pour reprendre l'expression de Luc, ils nous apportent que du bonheur... "Ils leur sera beaucoup pardonné" de leurs extravagances...

      Enfin Pat !!!! "Closer", "Voici" ou "France dimanche", c'est pour donner des infos débiles sur des losers dont tout le monde se fout (enfin nos lecteurs je pense). Justin Bieber les fesses à l'air sur un yacht ; la huitième cure de désintox' de miss Groenland....

      C'est pas si bête un article sur les virtuoses fêlés....

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  4. Quand Keith Jarrett ne trouve pas le piano à son goût, il exiger peut du régisseur qu'on lui en livre deux autres, pour tester, comparer. Et pas des claviers Bontempi, des trucs à trois bâtons qu'on fait venir de l'autre bout du pays ! Et bien évidemment, souvent, il choisit de jouer sur le premier...

    C'est vrai, il est caractériel, a une très haute opinion de son art. Il exige le silence total. Pas le genre à jouer en club, au milieu de la fumée, des verres qui tintent, et des discussions de bar... Il faut dire que l'exercice de l'improvisation nécessite une concentration de tous les instants, pour mener à bien les développements, suivre le fil. C'est un numéro d'équilibriste ! Il est seul en scène, ne se repose pas sur une rythmique, ou d'autres solistes. Et s'il quitte la scène au moindre éternuement, on raconte aussi l'inverse. J'ai lu qu'il avait arrêté de jouer un jour (à Paris, je crois), au bout de 15 minutes. La salle s'attend à se faire engueuler... Il prend le micro, et annonce : "désolé, je n'y arrive pas, ça ne vient pas, j'ai pas d'idée, j'arrête là....". Et il part...

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