mercredi 30 avril 2014

NO SINNER "Boo Hoo Hoo" (janvier 2014) by Bruno


     Bien que No Sinner soit canadien, et plus exactement de Vancouver, il n'a aucun lien de parenté avec le rock droit et concis des Bryan Adams ou Heart. On le jurerait originaire de Detroit, tant son Blues, garanti sans gras et sans couenne, aux effluves d'un bon Rock et
de Soul, tout deux bruts, binaires et pleins de morgue, rappelle la démarche de nombre de combos de cette ville. Ainsi, s'il fallait faire un rapide raccourci, il faudrait mentionner le garage band, spécialisé dans les covers obscures des 60's jouées avec une énergie proche du Punk-rock, The Detroit Cobras.


     D'ailleurs, la chanteuse, Colleen Rennison, possède un joli timbre proche de celui de Rachel Nagy, la 
chanteuse vénéneuse de ces mêmes Cobras.
Toutefois, à l'exception du titre d'ouverture, qui fait également office de tube, « Boo Hoo Hoo », au parfum rock garage début 60's, le terrain de prédilection de No Sinner est plutôt un Blues-rock et un Rhythm'n'blues sensuel et encanaillé qui pourrait prendre naissance dans les clubs chargés de relents de bière fraîche, de moisissures et de salpêtre, cachés au fond de coursives sombres aux murs décrépis et aux trottoirs fracassés.

   Leur Rock'n'Roll prend des allures de Glam 70's haut-de-gamme ("Runnin'"), leur Blues bave de fuzz rugueuse 
(la cover massue de "Work Song" – popularisée par Nina Simone - qui finit sur un tempo totalement stoogien), plonge même tête la première dans le Heavy ("Devil on my Back"), tandis que leur Soul ronronne d'un instinct félin et enjôleur ("Love is a Madness") ou s'enveloppe d'un spleen pluvieux et fébrile ("That'd be the Day"), juste soutenu par une guitare crunchie saturée de réverbe sur-électrifiée ; leur Rythmn'n'blues s'habille de regrets blessants et d'espoir quasi-religieux ("Rise Up") ou de mélancolie moite percée de quelques rayons de soleil déclinant ("September Moon").

     L'attraction principale de ce No Sinner est la voix chaude, raw, forte et habitée, sensuelle et âpre, de la jeune chanteuse Colleen Rennison (également actrice depuis l'âge de 6 ans, grâce à sa mère productrice, elle a reçu à deux reprises le Prix Gemini - récompense Canadienne réservée aux productions de la télévision - dont un à 13 ans, ce qui fait d'elle la plus jeune récompensée). Elle procure toute sa sève et sa vitalité à ce « Boo Hoo Hoo ». Comparée hâtivement à Janis Joplin (même si cette dernière fait partie de ses héroïnes, aux côtés de Bessie Smith et de Nina SimoneColleen serait plutôt la rencontre de Rachel Nagy, d'Etta James, de Big Mama Thornton et de Dana Fuchs, avec l'appoint et l'engagement d'une Tina Tuner. Et il n'y a rien de précipité dans ses comparaisons tant la jeune dame de 25 ans chante avec conviction et abnégation , se donnant et se laissant emporter entièrement par la musique, tout en sachant rester dans le ton. Elle présente ainsi une maîtrise digne d'une routarde qui aurait été forgée par la scène (et non par un "coach" de la "télé-réalité"). Pour preuve, sur "That'd be the Day" où l'orchestration se limite à la guitare fuzzy d'Eric Campbell, sa voix toute en sentiment et sensualité fait sensation.

   Elle avance d'ailleurs qu'elle a toujours chanté, que c'était sa priorité. De plus, elle a du caractère : signée une première fois par un label New-Yorkais, elle s'en sépare sans rien enregistrer pour raison de divergences musicales. Bon, aussi, en signant avec
Shady Records, un label spécialisé dans le Rap et le Hip-Hop, fondé par Eminem, il fallait s'attendre à ce qu'il y ait quelques problèmes de compréhensions communes, et de futurs désaccords.

    Suite à la défection de leur premier bassiste, P. Bossley, pendant l'enregistrement du disque, on retrouve Matt Camirand, le bassiste des Black Mountains, qui est venu prêter main forte sur "Work Song" et "Devil on my Back" sur lequel il a participé à l'écriture.

     No Sinner, c'est du dirty Blues-Soul-Rock séminal qui envoie un grand coup de pied dans la musique aseptisée et formatée américaine. Primitif par bien des côtés, mais bien interprété et surtout inspiré et habité. De la musique qui ne recherche qu'à revenir aux fondamentaux, à l'essentiel, comme celle que dispensaient les James Carr, Otis Redding, Mitch Ryder et Bob Seger, en y ajoutant une dose de Rock sans filet des White-Stripes, la naïveté d'un Brownsville Station, les instants Soul et Rythm'n'Blues des BellRays, et le revival des Detroit Cobras. Voire même de la collaboration "Beth Hart – Joe Bonamassa", les soli de haute volée en moins.

"The Music is a medium beetween us and the spiritual world" dixit Colleen Rennison.

     No Sinner pourrait très vite être le digne représentant du Revival d'un Rock bluesy fortement imprégné d'une Soul crue et directe, se livrant sans fard dans une interprétation sans chichis flirtant avec un Rock garage et/ou un Punk-rock instruit. Retenez bien ce nom. Il risque d'être sur toutes les lèvres d'ici quelques temps. Sauf en France, peut-être...

     Et pourquoi No Sinner ? Parce que Rennison, le nom de Colleen, à l'envers donne Nosinner.







Autre article, l'album suivant (clic/lien) : "Old Habits Die Hard" (2016)

2 commentaires:

  1. ... L'a pas froid aux yeux la cocotte !

    J'ignore ou tu l'as encore dégoté ce groupe; C'est en tout cas vachement bien. La zic comme la fille. Donc je prends.

    ps: La pochette ne serait-elle pas un clin d’œil a Springsteen ?

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    1. Hmmm.... non, je ne pense pas. C'est toujours du Levi's mais en nettement plus sexy. Et puis, il manque la casquette, et un drapeau.
      Sans compter que Springsteen ne semble pas faire parti de ses influences. Mais bon, c'est possible.
      Par contre, en aparté, on la vu s'afficher avec un tee-shirt de Rod Stewart.

      "Froid aux yeux" ? Mais non, tout ça c'est spirituel...

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