Pour ma part j'ai un penchant pour "Damn right, I got the blues" (1991) et ses premières faces pour Chess. Il n'en reste pas beaucoup encore de ce monde des survivants de l'age d'or du blues, citons James Cotton, BB King, Chuck Berry et donc notre Buddy, 78 ans, né en 1936 (le front populaire, Léon Blum, les JO de Berlin, Jesse Owens, ça nous rajeunit pas tout ça...). On peut légitimement se poser la question suivante : qu'à t-il encore à dire et à prouver Buddy ? Déjà, le blues est toute sa vie et il jouera sans doute jusqu'à son dernier souffle, ensuite les bluesmen ont sans doute moins de revenus que Lady Gogo ou Justin Bibeurre et il faut bien manger et payer ses impôts. Mais je pense que la première motivation est bien le plaisir de jouer et de faire vivre le blues. Il faut avoir présent ces données à l'esprit avant d'écouter l'album d'un vétéran tel Buddy et éviter le piège de la comparaison avec les chefs d’œuvre passés évoqués ci dessus. Pour cet album on retrouve Tom Hambridge à la production (comme pour ses 3 derniers, ou encore le dernier James Cotton) et aux textes qu'il cosigne, celui-ci s'asseyant aussi derrière la batterie. Les autres musiciens sont à la basse Michael Rhodes et Tommy McDonald, aux guitares David Grissom et Rob McNeely et aux claviers, piano et B3, Reese Wynans et Kevin McKendree, plus des cuivres et des choristes.
source photos:buddyguy.net |
Ceci étant dit, on prend le premier CD ("Rhythm") et d'entrée on est rassurés avec "Best in town", la maison de retraite attendra, il a de beaux restes le père Buddy ! Gros son, voix assurée, éclairs de guitares, wah-wah en avant, cuivres, et un beat funky pas sans rappeler feu Albert King, on n'attendait pas forcément Buddy Guy dans ce registre mais c'est plutôt réussi pour ce titre autobio sur son arrivée à Chicago et sa première rencontre avec Muddy Waters. Même veine pour "Justifyn'", une "hard-soul" survitaminée, puis "I go by feel" ballade soul avec un gros final où Guy fait chauffer sa Fender.
On en arrive à "Messin with the kid", succés de Junior Wells (signé Mel London) qui a fait les belles heures du duo, ici arrive le premier invité, le bien nommé Kid Rock, pour une version modernisée mais trop chargée en chœurs, pas si mal, même si elle n'égale pas les anciennes, quant au Kid en question il n'apporte pas grand chose au schmilblick en fait...
La suite de ce premier CD apporte du bon comme la reprise de "Well I done got over", encore un standard du blues (Guitar Slim) et "What you gonna do about me", un beau blues en duo avec la chanteuse Beth Hart dont la voix rauque et puissante à la Koko Taylor surfe sur la guitare de Buddy, soutenue par des cuivres, c'est mon titre favori de cette première galette. Mais aussi du moyen comme la ballade country "One day away" avec Keith Urban (un chanteur de country australien, inconnu en France mais gros vendeur aux States... et époux de Nicole Kidman pour le coté people) ou encore "What'up with that woman" où on peut entendre... des scratchs, puis 2 ou 3 morceaux pas impérissables. Impression mitigée donc même si le bon l'emporte.
Voyons ce que le second CD, le "Blues" nous réserve.
Comme sur le premier, une grosse entame, " Meet me in Chicago", solide blues rock funkysant avec des chœurs dans lequel Buddy nous fait visiter son cher Chicago et ses lieux marquants, puis "To damn bad" un Chicago blues de derrière les fagots avec le piano "barrelhouse" de Reese Wynans et "Evil town" un mid tempo puissant, urbain, à la "West side sound" dont Buddy fut un des créateurs, avec en invités 3 "Aérosmith": Steven Tyler (chant) Joe Perry (guitare) et Brad Whitford (guitare), sans conteste un des temps forts de ce double CD de 21 titres. Aérosmith a déjà prouvé son attachement au blues, notamment par son album "Honkin on bobo" (2004). Après l'émouvant en partie acoustique "I could die happy" (le plus tard possible stp Buddy!) la suite fera la part belle au chicago blues (le superbe "All that make me happy is the blues", "My mama loved me", l'enlevé "Blues don't care" avec Gary Clark JR, "I came up hard" ) plus le blues rock "Never gonna change" et pour finir un classique du duo Leiber/Stoller "Poison ivy", dans une version rhytm'n'blues cuivrée.
Au final , il ressort de tout cela que Buddy garde une sacrée énergie, le blues doit lui servir de fontaine de jouvence ! Si le premier CD est inégal il contient de très bons moments, quant au second il est globalement plus solide, et les 2 sont truffés de solos qui décoiffent. Bon, à mon sens, un CD simple plus resserré aurait sans doute suffit. Si un tel disque était l’œuvre d'un jeunot on crierait au nouveau génie , à "l'avenir du blues"; Buddy, son avenir est derrière lui mais sa soif de jouer intacte et communicative, pour notre plus grand plaisir. Ce n'est sans doute pas le disque que je conseillerai à un novice souhaitant découvrir Buddy Guy, mais il reste tout à fait conseillé.
ROCKIN-JL
(article paru dans la revue BCR N°34)
Là je te suis à 100% Rockin' ! Même si c'est pas son meilleur disque, c'est quand sacrément bon à écouter ! Une telle énergie à cet âge! Lu beaucoup de critiques comme quoi il se serait éloigné de ses racines de Chicago.....On serait bien emmerdé s'il nous faisait inlassablement le même disque depuis plusieurs décennies! Je ne me lasse pas de le voir sur scène, comme au dernier "Crossroad". Le morceau avec Keith Urban est pas désagréable et puis c'est si souvent qu'un bluesman de cette envergure daigne se frotter à la country-music! Le contraire est plus fréquent (Steve Earle) . La prestation de Urban au dernier Crossroad est plutôt sympa!
RépondreSupprimerJ'avais vu Buddy Guy sur scène, pour la tournée "Sweet tea", dans une petite salle parisienne. Un show assez millimétré, 1h30 top chrono, mais quel déchainement ! Jovialité, complicité avec le public, chorus dans la salle (un peu cabot quand même...), et un numéro de parodie, d'imitation de ses confrères (hooker, BB King...) hilarante, tant sur les mimiques, la voix que je jeu de guitare. En première partie, je crois me souvenir que c'était Lucky Peterson.
RépondreSupprimer