vendredi 28 juin 2013

R.I.P. BOBBY "BLUE" BLAND 1930- 2013

Robert Calvin Bland dit Bobby "Blue" Bland s'est éteint à l'age de 83 ans à Memphis, et avec lui c'est un des derniers pionniers du blues qui disparait. Un bluesman dans la pure tradition, puisque le jeune Robert a ramassé le coton dans les champs, très jeune, pour aider financièrement la famille qui avait du mal à boucler les fins de mois.

Ce natif du Tennessee (Rosemark) s'exile à Memphis en 1947, où il commence à chanter avec les groupes de Delta Blues du cru, comme Billy "Red" Love et dans des chorales de gospel. Il puis fréquente la fameuse Beale Street, la rue des clubs de blues, et dés 1951 il enregistre sous son nom. En 1952, il doit mettre en retrait sa carrière débutante pour cause de service militaire. A cette époque il servira de chauffeur et de valet à BB King lui même, ainsi qu'à Rosco Gordon. Fortement influencé par le style de BB (jusqu'à l'imitation selon certains) il tourne avec Johnny Ace, Ike Turner ou Junior Parker, et place un premier hit dans les charts R'n'B avec "It's my life baby" dès 1955. Il se taille de jolis succès, principalement dans des slow blues langoureux, comme "Pity the fool" (1960). Car la caractéristique de ce chanteur, par rapport à ces collègues, c'est une voix de velours, à faire fondre de joie n'importe quel public féminin. Le Bobby en jouait et surjouait parfois... Cette voix veloutée de crooner fait merveille, dans un style mixant soul, blues, gospel et Rhythm'n'Blues, il est alors une vraie coqueluche de la gent féminine noire. Il sait aussi accélérer de tempo, comme dans "Turn on your lovelight" qui résonne très Wilson Pickett (genre "Land of 1000 dances"), et sera repris par Grateful Dead, dans des versions évidemment rallongées de deux bonnes heures !!

Hormis BB King, ses autres grandes influences sont Nat King Cole et Franck Sinatra qu'il imite parfois sur scène. On le surnommera d'ailleurs parfois "le Sinatra du blues"... Bobby Blues Bland établit des passerelles entre les genres, comme Ray Charles, ou Sam Cooke, en injectant du gospel ou de la soul dans un Rythm'n'Blues rustique et brutal. Il obtient son 1er numéro 1 en 1957 avec le classique "Further on up the road", un titre qui sera maintes fois repris par la suite, notamment par Roy Buchanan, Eric Clapton ou Gary Moore, Joe Cocker and The Englishmen, et plus récemment Steve Miller ou Johnny Winter... Bobby Blue Bland chantait généralement en voix de tête, voilée, surtout les morceaux lents, mais sa tessiture était large, il pouvait aussi, d'un coup, descendre dans les graves, dans un registre plus caverneux. Et puis il avait un gimmick particulier, une sorte de ronflement sec, de grognement porcin, qui ponctuait ses phrases (avait-il les cloisons nasales défoncées à la coke ?) un peu surprenant au premier abord... Exemple à 1'23 sur la vidéo avec BB King.

Il enregistrera une dizaine d'albums jusqu'en 1969 pour le label "Duke". Le succès s’essoufflant, Bobby Bland connaitra en cette fin des sixties des problèmes d'alcool et de dépression, rendant les collaborations difficiles. Le milieu des années 70 est aussi une période où le Blues est moins en vue, la révolution punk et disco menace. Bobby Blue Bland décide alors d'unir ses forces avec un autre vétéran, BB King, et ensemble ils sillonneront les routes pendant plus de 10 ans, deux albums live venant démontrer un  théorème : un BB c'est bien, un BBB c'est bien aussi, mais BB+BBB c'est énorme !! Un lien vous permettra de revenir sur des articles parus à propos de ces deux disques absolument somptueux. Le label Duke sera racheté en 1973 par le géant ABC et la carrière de Bobby va rebondir, avec toutefois des hauts et des bas, des business men le faisant parfois verser dans le disco, la variété ou la soupe langoureuse chargée d'arrangements douteux, rêvant sans doute d'avoir leur Barry White à eux... A noter deux hits en 1974 avec "I wouldn't treat a dog" et surtout "Ain't no love in the heart of the city" (album "Dreamer"), oui, vous ne rêvez pas, repris en 1978 par David Coverdale et ses rockers chevelus de Whitesnake... Et ce n'est pas manquer de respect à Bobby que d'avouer que la version de Coverdale se tient beaucoup mieux, l'original se perdant dans des arrangements funky/disco (qui peuvent rappeler le Albert King de la même époque), et surtout un tempo légèrement rapide à mon goût.  

La suite se sera avec avec  MCA puis Malaco, des disques réguliers, une trentaine d'albums au total dont le dernier en 2003 "Blues at midnight", et surtout des tournées, car Bobby Blue Bland fait partie de ces artistes qui vivent pour la scène, et s'y produisent jusqu'à leur dernier souffle. On ne s'étonnera pas que Nick Hucknall, le chanteur de Simply Red (autre crooner qui fait fondre les filles un peu trop facilement à mon goût) ait consacré un album entier à son idole "Tribute to Bobby" et qui je crois a très bien marché. Pour ma part, j'ai découvert Bobby Blue Bland en 1989, puisqu'il avait participé à une tournée, la "Rythm'n'Blues Revue" qui avait fait halte à l'Olympia de Paris. Il y partageait l'affiche avec Mosley & Johnson, Denise Lasalle et Johnnie Taylor. Mais je n'y étais pas... Par contre, cela avait été diffusé à la télé (eh oui!) et j'ai tout sur une vieille VHS !!

disques conseillés

- "Two steps from the blues" (compil de ses titres 56-60)
- "Dreamer" (1974)
- "His california album" (1973)
-  Les live avec BB King (74 et 76)  lien pour : BOBBY BLUE BLAND ET BB KING LIVE
- "Portrait of the blues"  (1991)

Son premier n°1, et pièce maîtresse de la musique pop du XXème siècle ! (vous remarquerez les deux orthographes pour ce titre...)


On écoute Bobby et BB King, égrainant à la cool des standards de blues, un show télé, bien rôdé, à l'américaine. C'est sublime de voir ces deux géants s'amuser comme ça. Chez nous, à la télé, y'avait des duos Sacha Distel / Carlos, ou  Sardou / Sheila. Chacun sa croix...  

2 commentaires:

  1. Encore un grand qui s'en mais à un age respectable il est vrai. Punaise le coup de bambou derrière la tête que j'ai reçu en voyant la vidéo de Bobby Blues avec BB King en comparaison de nos duos mythique made in france : c'est plus une croix mais toute la misère de ce bas monde qu'il me semble falloir porter.
    A noter que le titre "I wouldn't treat a dog" a été repris de fort belle manière dans leur dernier album respectif par Bernard Allison et par notre excellent Fred Chapellier (enfin on peut pousser un cocorico..)

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  2. Et oui, Guy, chacun son Guy Lux !!! Je viens de mettre une autre vidéo de Bobby Blue Bland sur YT... un régal...

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