mardi 3 avril 2012

l'interview de MIKE RIMBAUD - par Rockin-JL



 Le Deblocnot s'internationalise puisque aujourd'hui nous allons nous rendre à New York City (je t'envoie la note de frais Luc..) à la rencontre de Mike Rimbaud. Un artiste américain qui a vécu en France quelques années et y a même publié plusieurs disques. Peintre, poète, rocker, le garçon a plusieurs cordes à son arc.

 Son dernier album en date "Coney Island Wave" (ci contre) est sorti il y a quelques mois et montre un homme en colère  et inquiet de la situation dans son pays, au même titre que le dernier Springsteen dont nous parlait Luc il y a peu ( wrecking ball). Cet homme a des choses intéressantes à dire alors sans plus attendre, donnons lui la parole.




1) Bonjour Mike, tu as vécu plusieurs années à Paris, quel souvenir en gardes tu?
J'ai vécu 2 ans et demi à Paris dans les années 90. Mes meilleurs souvenirs? Traîner dans Pigalle avec des amis jusqu'au petit jour. De bons amis qui faisaient partie de la scène parisienne  underground/alternative des arts, squats etc…J'ai beaucoup d'anecdotes, un jour j'écrirai un livre là dessus

2) Quelle est selon toi la principale différence entre le mode de vie en France et dans ton pays?
Les français ont une meilleure appréciation des bonnes choses de la vie, ils font plus attention à leur qualité de vie, comme la santé, les vacances en famille, les conversations à table.. Les américains sont plus matérialistes et superficiels. Le mode de vie américain a besoin de s'améliorer et je voudrais l'y aider.

3) "Rimbaud" ; tu n'as pas choisi ce nom par hasard je suppose; qu'évoque ce poète français pour toi, t'es tu intéressé à ses oeuvres et a t'il influence  ta façon d'écrire?
IL était rock'n'roll avant le rock'n'roll. Il ne m'a pas vraiment inspiré par ses mots mais l'histoire de sa vie m'a inspiré.

4) Venons en à ton dernier album " Coney Island Wave", beaucoup de tes chansons sont "engagées" , pour toi c'est une évidence de faire passer tes indignations dans tes chansons ?
Oui, parce que je n'entends pas d'autres voix parler de ces problèmes en chanson, mais toutes mes chansons ne sont pas politisées, j'écris sur l'amour également. “Saving Up to Go Bankrupt”  et  “Don’t You Love This City?” parlent de notre économie qui souffre et du combat quotidien de l'américain moyen pour survivre , alors que “Unicorn” et  “Mamma Say Something Nice" sont des chansons d'amour.


5) Tu dresses un tableau très sombre de l'Amérique, la situation est elle si grave? le "rêve américain " est il mort?
Oui la situation est sérieuse.  Un américain sur six vit sous le seuil de pauvreté, les salaires stagnent pendant que le coût de la vie augmente, le taux de chômage est élevé et n'oublions pas les 50 millions d'américains qui n'ont pas les moyens d'avoir une assurance santé. Les riches sont de plus en plus riches et il y a un manque d'opportunités de réussir aux Etats-Unis aujourd'hui, cette inégalité de revenus est une honte. La culture de l'avidité de Wall Street n'a pas changé depuis le renflouage du gouvernement, les politiciens Républicains qui sont eux même millionnaires parlent de couper les financements  pour l'éducation des enfants et le coût des collèges et universités atteint des sommets.

Il faut être en train de dormir pour croire au rêve américain aujourd'hui.


6) Une question que l'on se pose souvent  vu de l'exterieur : les choses ont elles un peu changé depuis l'arrivée d'Obama? 
C'est une meilleure image de l'Amérique que Bush mais la corruption dans notre système politique fait que c'est très difficile pour lui pour faire de profonds changements. Je le soutiens et j'ai voté pour lui.  Les grosses sociétés et Wall Street ont trop d'influence sur notre système et ils "achètent" des politiciens à Washington pour leur faire faire ce qu'ils veulent.

7) Tu as participé au CD " Occupy this album - Music for Occupy Wall Street" , je suppose que tu soutiens ce mouvement ?
 Absolument. J'ai une chanson sur cet album qui sortira en Mai. Ce mouvement est inspiré par la colère que causent les inégalités de revenus et le manque d'opportunités.

8) Beaucoup d'américains partagent ils ton point de vue ou est ce juste une petite minorité?
Le pays est divisé, peut être du 50/50, il y a beaucoup de désinformation et de propagande et les gens peu informés se laissent avoir. Beaucoup sont de mon avis, mais les médias grand public ne donnent pas la parole  aux voix discordantes comme la mienne et on entend rarement des voix qui mettent en cause le système à la télé, à la radio ou les journaux grand public. 

9)  comment se porte le marché du disque aux USA ? Un artiste "underground" comme toi trouve t'il un label? un public?
Je dois répondre non à ce moment de ma vie. Oui on peut trouver un petit public sur internet et jouer dans de petits clubs, mais c'est très dur d'aller au-delà ou de concurrencer la musique commerciale. La majorité des 40 hits que tu entends en Amérique n'ont pas de réels musiciens qui jouent dedans et c'est un petit groupe de producteurs et de programmeurs qui fait toutes ces chansons sur ce modèle. C'est un monde fermé où quelqu'un comme moi est perçu comme un alien.  Ils cherchent simplement à vendre un maximum d'albums et à ne pas donner aux gens de la musique avec une âme ou de la poésie qui pourrait les faire réfléchir. C'est vraiment triste, le public est privé depuis des années de musique sincère qui parle d'eux et de leur époque  et de musique qui pourrait les élever  et les inspirer, particulièrement en ces temps de crise et de guerre.


10) dans ton disque de reprises "Can't judge a song by it's cover"  tu reprends 8 artistes ou groupes, certains sont évidents comme Dylan, Springsteen, Phil Ochs Marley d'autres plus surprenants (Beatles, Stones, CarlosJobim, Paul Desmond )  , pourquoi ces choix?
J'aime tous les genres de musique et j'espère enregistrer bientôt un autre album de reprises , car il y a plusieurs grands titres que j'aimerais essayer de chanter . Jobim est un grand compositeur brésilien , ma version de "Wave" est la plus rock jamais enregistrée. J'aimerais reprendre des titres d' Otis Redding et James Brown parmi d'autres

11) En plus des artistes cités ci dessus, quels sont ceux qui t'ont le plus influencé? Ecoutes tu des bluesmen , lesquels?
J'aime le blues, j'en écoutais beaucoup à la fac, de Willie Dixon à John Lee Hooker ou Muddy Waters. Je joue de la slide sur ma reprise des Beatles "Baby Your A Rich Man" (disponible sur i-tunes en single). Little Walter est le meilleur à l'harmonica, étonnant, je joue un peu d'harmonica aussi. Howling Wolf a la plus grande voix de tous, il a toujours été une inspiration. Tom Waits m'a longtemps inspiré en tant que songwriter.

12) Tu as écrit une chanson sur Facebook et ses dérives ( Put your facebook on the shelf ) mais toi aussi tu te sers de Facebook (sans Facebook on n'aurait pas pu faire cette interview..), alors the "social network" , positif ou négatif ?
Les gens devraient faire très attention en donnant des informations personnelles sur ce réseau social, c'est un problème de vie-privée. Dans 10 à 20 ans les gens auront toute leur vie personnelle sur internet, ils devraient être prudents .  Le mot "ami" n'a plus le même sens, c'est dangereux On ne peut avoir que quelques "vrais" amis.

13) Plusieurs titres sont sur l'amour, la paternité etc, est ce inspiré de ton vécu? Finalement sous tes dehors de révolté es tu un romantique ?
 Oui, j'ai des enfants, je suis un père célibataire, c'est une part importante de ma vie (écoutez "Everyone Needs a Daddy".). J'en sais un peu sur l'amour et comment il passe, j'ai été marié. Je conserve une vue romantique de la vie, un artiste doit garder cela en lui.


Merci beaucoup Mike ! Et peut être à bientôt en France...

D'ailleurs à ce sujet Mike m'a confié qu'il aimerait bien refaire un petit tour par chez nous, 4/5 concerts sur une dizaine de jours, alors si un  programmateur me lit...

Contact et plus d'infos sur son site: mikerimbaud.com
et la chronique  de son album Rainbow tonight(2013)Rainbow tonight

 "Saving up to the bankrupt" ( Live, Mars 2012, at New York's Sidewalk cafe in the East Village):



 AND NOW, BONUS TRACK:  THE INTERVIEW IN ENGLISH

1 – Hi Mike, You spent a few years in Paris, didn't you ? What are your best memories of this period ?
I lived 2 and a half years in Paris during the 1990’s.  My best memories? hanging out in Pigale with friends until dawn.  Great friends who were part of the Parisian underground/alternative scene involved in the arts, the squats etc.., I have lots of stories, one day I’ll write a book about it
2 – According to you, what is the main difference between the French and the American way of life ?
The French have a better appreciation of the good things in life, quality of life issues matter more, like health care, family vacation time, diner table conversation, etc...  Americans are more materialistic and superficial.  The American way of life needs improvement and I want to help with this.
3 – « Rimbaud » : I guess you didn't choose this name at random. What does this french poet mean to you ? How did you get interested in his work and did he influence your way of writing ?
He was rock n roll before rock n roll.  He didn’t really influence my writing in his words but his life story did inspire me.
4 – Let's talk about your new album « Coney Island Wave ». Many songs are politically committed. Is it necessary for you to voice your revolt in your music ?
Yes, because I’m not hearing others voice these issues in songs, but not all of my songs are political, I write about love too.  “Saving Up to Go Bankrupt”  and “Don’t You Love This City?” speaks to our hurting economy and the average American’s daily struggle to survive, while “Unicorn” and “Mamma Say Something Nice” are love songs.
5 – You draw a dark and pessimistic portrait of the USA. Do you think the situation is that serious? Is the American Dream really dead ?
Yes, the situation is serious. 
One in six Americans live below the poverty line, wages are stagnant while the cost of living keeps rising, the unemployment levels are high and let's not forget the 50 million Americans who can't afford health insurance. The rich keep getting richer and there is a complete lack of opportunity to succeed in the US today, this income inequality is a disgrace. The Wall Street culture of greed has not changed since the government bailout. Republican politicians who are millionaires themselves talk about cutting funding for children’s educations and the cost of college and universities has gone through the roof.
You must be sleeping to believe in the American dream these days.

6 – When you're not American, you often wonder if things have changed since Obama became President ?
He’s been a much better image for America than Bush, but the corruption in our political system has made it very difficult for him to make strong changes.  I support him and I voted for him too. Large corporations and Wall street have too much influence on our system and they “buy” politicians in Washington to do their bidding.

7 – You participated in the making of the CD « Occupy this album – Music for Occupy Wall Street », so I guess you support this movement, don't you ?
Absolutely.  I have a song on the album that should be released in May.  This movement is inspired by the anger that exists because of the income inequality and lack of opportunity.
8 – Do many Americans agree with you or only a small minority ?
The country is divided maybe 50/50, there is a lot of misinformation and propaganda that many uninformed people succumb to.  Many agree with me, but the mainstream media doesn’t recognize controversial voices like mine and you rarely hear voices who question the system on mainstream television, radio or Newspapers. 
9 – What about the music industry in the USA ? It is  possible for an underground artist like you to find a label, and a public ?
I would have to say no at this point in my life.  Yes one can find a small public on the internet now and performing in small clubs, but it’s very hard to go beyond that or compete with mainstream corporate made music.  Many of the top 40 “Hits” you hear from America have no real musicians playing on them and it’s a small group of producers and programmers who make all those songs in that formula.  It’s a closed world where someone like me would be perceived as an alien.  They want only to sell the maximum number of records and not give the people any music with soul or poetry that could make them think.  It’s sad, really, the public has been robbed now for many years of having genuine songs that speak to them and their times and music that can elevate and inspire them too.  Especially in a time of crisis and war.
10 – On your  CD "Can't Judge a Song By It's Cover", you take up the songs of 8 different artists or bands. Some of your choices are quite obvious, for example when you choose Dylan, Springsteen or Phil Ochs and Bob Marley, but ot In youhers are more surprising (the Beatles, the Rolling Stones, Carlos Jobim and Paul Desmond). Can you explain these choice ?
I love all kinds of music and I hope to record another album of covers soon, since there are many great songs I would like to try.  Jobim is a great Brazilian composer, my version of “Wave” is the most rockin’ version anyone’s recorded.  I would like to cover songs by Otis Redding and James Brown among many others…
11 – In addition to the artists already mentioned above, who influenced you most ? Do you often listen to bluesmen, and which ones ?
I love the blues, I used to listen a lot in college to Willie Dixon and John Lee Hooker and Muddy Waters.  I play slide guitar on my new cover of the Beatles “Baby Your A Rich Man” (available on i-tunes as a single. ) Little Walter is the greatest on harmonica, amazing, I play a little harmonica too. Howling Wolf has the greatest voice of them all, he’s always been an inspiration.  Tom Waits has inspired me for a long time as a songwriter.
12 – You wrote a song about Facebook and its excess (Put your Facebook on the shelf) but you also use it (without Facebook, we couldn't have been able to have this interview) so what do you really think of using social networks ? Is it positive or negative, according to you ?
People should be very careful giving out their information on these social networks, privacy is at issue.  In 10-20 years people will have their whole personal lives on the internet, they should be very careful.  The word “Friend” doesn’t have the same meaning anymore, that’s dangerous.  You can only have a few “real” friends.
13 – Several songs are about love, fatherhood, etc. Are they taken from your own experience ? Under your rebellions exterior, are you a true romantic ?
Yes, I have children, I’m a single father, it’s an important part of my life(Listen to "Everyone Needs a Daddy".)  I know a little about love and how it goes, I was married once. I do maintain a romantic outlook on life, an artist should maintain that.  

Thank you Mike,  maybe see you in France someday


"Dance with a mermaid" :





Additif du 17.06 , le dernier clip de Mike : "Robin hood in reverse": 



(Merci à Sam Pierre pour l'idée, et à Bruno et Madame Bruno pour leur concours)

3 commentaires:

  1. Christian Larcheron18/6/13 11:59

    Je profite de ton intéressant texte Jl pour réagir à propos des problèmes que posent Facebook.

    Comme vous au Déblocnot j'ai envisagé un moment de mettre mon site sur Facebook (c'est sûr que ça ramène automatiquement une grande quantité de lecteurs) mais je me suis ravisé car je trouve Facebook assez peu démocratique, et suspect quant au devenir de ce qui est publié.

    Il ne faut pas oublier que la principale raison qui vous a décidé, vous les chroniqueurs du Déblocnot (comme pour moi d'ailleurs), de partir d'Amazon était leur système de controle de plus en plus kafkaïen et hypocrite (où les textes publiés devenaient sans raison la propriété du site, ce qui expliquait qu'ils pouvaient les gérer selon leurs désirs : censures diverses, chroniques retirées sans raison, et utilisations des textes sur d'autres sites sans l'accord des auteurs).

    Hélas les amis j'ai bien peur qu'avec votre lien Facebook vous soyez dans la même situation que sur Amazon jadis car ils ont apparemment les mêmes méthodes : vos textes (et photos persos éventuelles) ne vous appartiennent plus ! Voici la mise en garde que j'ai trouvée sur un forum et venant d'une utilisatrice de Facebook :

    "Facebook nous arnaque !
    Posted on Lundi 16 février 2009 by Audrey
    Facebook nous arnaque.

    Effectivement, on a “découvert” que dans les termes & conditions (que personne ne lit, même lorsqu’il achète une voiture, alors imaginez lorsqu’il s’inscrit sur Facebook!), il y avait une close faisant mention du fait que Facebook détient les droits sur tout ce que vous uploadez sur votre page. Ce qu’il faut comprendre entre les lignes, c’est que légalement, ils détiennent les droits sur tout ce que vous écrivez, sur toutes les photos que vous mettez en ligne et probablement même sur tous les articles de votre blog que vous republiez là-bas, même après que vous ayez fermé votre profil.

    En clair, cela signifie que si vous mettez votre binette partout sur Facebook, ils ont légalement le droit de prendre une de vos photos et de la vendre si ça leur chante, même si c’est pour faire une pub de lubrifiant. Vous commencez à voir où ça coince? "

    Aviez-vous pensé à ça Luc, JL, et les autres ?

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  2. Salut Christian,

    Je ne connaissais pas ses clauses très particulières... Mais, concernant les photos, nous ne faisons que reprendre celles des autres, donc, c'est un prêté pour un rendu ! Et concernant nos textes, j'ai bien peur que quelque soit le média, tout le monde puisse puiser ici ou là sans notre permission. La propriété intellectuelle (concept purement français !) est une notion de plus en plus vague, c'est un risque à prendre, peut être, sans doute, mais que cela ne nous empêche pas d'écrire, de critiquer, d'échanger et de nous amuser !
    Merci de ta mise en garde, à+ (Luc)

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  3. bonne remarque Christian, oui j'ai déjà réfléchi au problème...Nous ne mettons sur facebook que nos articles et rien de nos vies privées, les photos comme dit Luc, elles ne sont pas de nous , ni même prises par nous alors...quant à nos articles, au moins ils sont un peu diffusés comme ça, j'ai bien peur que sans Facebook nous ne soyons restés dans l'anonymat total, alors c'est le risque à prendre. De plus Facebook nous a permis de rencontrer des tas d'artistes, de créer des contacts , faire des interviews; ça bouillonne pas mal sur Facebook , de nombreux artistes peu médiatisés l'utilisent pour se faire connaitre, c'est le bon coté de la chose. Mais sur le fond je suis d'accord avec toi, c'est un Big Brother bien inquiétant. Il parait que la première chose que font les recruteurs maintenant c'est de taper le nom des candidats sur Facebook, ils y trouvent une photo de toi faisant la fête et tu es grillé! Sans parler des salariés qui se sont fait virer pour avoir lors d'une conversation privée sur facebook dit du mal de leur entreprise, tout cela est grave, très grave.
    J'ajouterai que de toute façon on est fichés partout, et de plus en plus avec le net en général et qu'à moins de se retirer comme ermite dans les Monts d'Arée, il devient difficile d’échapper à ce flicage; ouai ça fout les jetons.
    Bof, comme disait Desproges, vivons heureux en attendant la mort..
    A+ Christian
    Jl

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