jeudi 17 mai 2012

D'OU VIENS-TU VRAIMENT ROCKIN ? par Luc "Mireille Dumas" B.



Nous avons dans notre équipe, un chroniqueur de talent, qui n'aurait pu être que chroniqueur de talent (ce qui est déjà pas mal, vous en conviendrez) s'il n'avait pas été en plus le troisième rejeton d'une famille de musiciens exceptionnels. Ce chroniqueur en question a toujours tu ce passé glorieux, par modestie, pour se protéger des jaloux, des envieux, des groupies, voire de quelques maris cocufiés... Comme il n'aurait jamais raconté son histoire lui-même, il fallait bien qu'un autre s'y colle...

On connait mal la raison pour laquelle John Lee Allman ne participe pas à l’aventure des ALLMAN’S BROTHERS, alors qu’il est aussi un brillant guitariste, suivant ainsi les traces de ses deux frères, Duane et Gregg (qui avait d'abord choisi la guitare avant d'assurer les claviers).

Mais John Lee a toujours été un enfant différent, et sa vie le démontrera, avec plusieurs revirements de situations parfois cocasses. A Nashville, où il grandit, John Lee n’a pas beaucoup d’ami, voire aucun, si ce n’est Tron-Tron, son arbre préféré, avec qui il passe de longues journées… Sans doute l'influence du livre "Le baron perché" d'Italo Calvino. Le contact entre le corps encore tendre du jeune homme et l’écorce rugueuse de Tron-Tron, enflamme ses sens, exacerbe déjà sa future personnalité… Et cette proximité avec la grimpette lui sera bien utile dans quelques années…

Mademoiselle Joplain, sa maitresse d’école, est très contente de lui, bien qu’un peu surprise de voir le jeune John Lee refuser d’apprendre à compter au-delà de douze, sous prétexte qu’il n’y a pas de treizième mesure dans un blues… Observez (plus haut) la blondeur angélique de ses cheveux… Au départ, John Lee était brun, et frisé, mais il se prend de passion pour Lana Turner, Marylin Monroe, Veronica Lake, et très jeune, par mimétisme avec ces stars platines, il adopte leurs couleurs de mèches. Et décide dans la foulée de changer de sexe. Il n'a que 8 ans, c'est dire la maturité du gamin... Son frère Gregg rendra plus tard un hommage à son benjamin, sur la pochette d’un de leurs célèbres disques. Au recto on reconnait John Lee, au verso, Janet Lili, comme il, se fera appeler quelques mois, avant de changer d’avis et retrouver son aspect initial.
Comme tous les étudiants américains, John Lee pratique le football, intensément. On le voit ici en plein entrainement, avec la mascotte de l’équipe. Très vite, l’entraineur lui confie le poste de… de… Faute de documentation et témoignages probants, passons à la suite…
Les années passent, ses frères Gregg et Duane forment les ALLMAN’S BROTHERS, mais John Lee Allman préfère suivre sa propre voie. Il voyage, rencontre John Mayall en Californie, en 1968, et sera l’un des instigateurs de l’album BLUES FROM LAUREL CANYON, mais sans participer  à l’enregistrement, qui se fera à Londres. C’est le jeune Mick Taylor qui officiera à la guitare sur l’album du pape du British Blues. L’année suivante, lorsque John Mayall revient aux Etas Unis, et enregistre à New York THE TURNING POINT, John Lee rate encore l’occasion de jouer avec son idole. Sa petite amie de l’époque doit le conduire en voiture jusqu’au studio de répétition, mais la voiture sort de route sur une plaque de verglas. Las d’attendre, Mayall engagera finalement Jon Mark.

La malchance le poursuit, puisqu’en 1971, son frère Duane décède d’un accident de moto, à Macon, Géorgie. C’est une perte incommensurable et John Lee décide alors de quitter les Etats Unis, pour venir s’installer en France. En hommage à son frère ainé, il s’installe à Mâcon, en Saône et Loire.
Bien décidé à faire connaitre la musique Blues dans le Mâconnais, John Lee Allman monte plusieurs formations, et c’est avec les DERRICK AND THE ROBINOES qu’il se produit notamment trois mois de suite au SPOT, qui est à Mâcon ce que le CBGB est à New York. Avec le succès, viennent les excès d’une vie tumultueuse, que John Lee n’arrive pas à maîtriser.
Son addiction pour le Pouilly-Fuissé fera les choux-gras de la presse locale. Ses frasques à répétition, particulièrement arrosées, avec la femme du député-maire, avec laquelle il s’exhibe lors de la fête paroissiale, achève de détruire sa réputation. Banni, chassé, répudié, honnis, il sombre un peu plus, abandonne la musique, quitte la région, et disparaît de la circulation.

On retrouve John Lee près de Rosporden, en Bretagne, quelques années plus tard, où il lance le premier fromage local : le Ti Pavez. Il monte aussi sa petite affaire de bons de cretonnes. Ces quelques années au calme, à faire les marchés et vivre de sa production, le remettent sur pieds. Il voyage en Angleterre, en Irlande, et croise le guitariste Rory Gallagher, qui le convainc de reprendre la musique.

Fort des conseils de son mentor, John Lee Allman remonte un groupe, se produit, et enregistre son premier album EAT THE ARTICHOKE. Le public adhère, les critiques s’enflamment. Mais conscient de surfer sur le succès du groupe de son frère Gregg, John Lee prend une orientation plus rock pour l’album suivant, délaisse son patronyme, et rebaptise son groupe ROCKIN’ JOHN LEE BROTHERS AND SISTERS AND UNCLES BAND.



Une des rares photos de Rockin’ John Lee atteste de son jeu de guitare tout à fait stupéfiant. Mais ses démons se réveillent, il abuse du Chouchen, et une période noire s’abat de nouveau sur John Lee, qui se fait réopérer et s’inscrit au concours des Miss. Il sera même qualifié pour représenter sa région. Pris d’un doute soudain en croisant la tronche de madame de Fontenay, il change d’avis.  Contractuellement, on a droit à 7 jours, le chirurgien est tenu de conserver tous les éléments de la reconstruction pénienne dans un compartiment glaçon, à -18°C. Hélas, comme la vie de notre héros du jour ne ressemble à personne, il fallait bien qu'un nouveau drame survienne. Le fameux freezer contenait aussi des radis surgelées Picard en attente d'être transférés au domicile du chirurgien. Et dans la précipitation, une tragique erreur fut commise... L'histoire ne dit pas de quelle couleur était les radis... Et les quelques témoignages de groupies que j'ai pu réunir ne sont pas très objectifs, ou sujets à caution vu les ravages de l'âge sur les dames en question...





Rose ou noir, c'est en tout cas à cette époque que John Lee se lance dans une nouvelle aventure : le Rap. L’album FUCKING THE FUCKERS IN A FUCKING WAY publié sous le nom de Z-RO atterrit dans les bacs, et y reste bien calé. C’est un échec commercial, malgré des textes poétiques que n’aurait pas reniés Gérard Manset. Le mieux est d’écouter un extrait :



Déjà, au sein de cette chanson, on palpe l’ambivalence entre Z-RO et John Lee, ce changement profond, autant artistique que psychologique, à l’instar d’un Ziggy Stardust et d’un Thin White Duke. Cette double personnalité reste une énigme pour beaucoup. Petit à petit, Z-RO s’effacera au profit de JL. Ne trouvant pas de partenaire à sa hauteur, Z-RO s’autoproduit, et vend 16 exemplaires de son disque. Enfin… Il est tellement dans son trip gangsta-rap, qu’il rackette des mômes à l’envers : il les oblige à accepter son fric pour qu’ils achètent  son disque. Pour ce contre-exploit, inédit dans le showbiz, il entrera au Guiness Book des records…
Mais des parents portent plainte, et Z-RO est envoyé en maison de redressement, à la campagne, en Touraine, vers Château-Renault. Grâce à son agilité, son habilité à grimper aux arbres, aux poteaux (rappelez-vous son doudou Tron-Tron) il s’évade. Curieusement, aucun mandat n’est lancé contre lui, pas de plan-épervier, au rouge-gorge, ou moineau, pas même moucheron, rien de rien… et d’après le directeur de la prison, c’est avec soulagement qu’on le laissa partir… Ce passage par le Rap et la prison, sera comme un déclic, une renaissance. Beaucoup de chercheurs qui travaillent sur son cas, estiment d'ailleurs que c'est ici qu'est né le véritable JL, tel qu'on le connait aujourd'hui. L'actuel maire de Château-Renault s'est lancé dans une demande de jumelage avec Nashville, les deux communes souhaitant s'unir dans un même hommage au grand homme. 







Oui, c'est la véritable naissance de John Lee, c’est à cette époque qu’il prend réellement conscience de sa destinée : le Blues. Il remise ses frusques de rappeur, remonte un groupe, dont il resserre le nom une première fois en ROCKIN’ JOHN LEE BAND, puis (un soir de pleine lune racontent les anciens, le soir, après quatre tournées de Godinette [apéro du cru : eau de vie + Muscadet + sucre + fraise... gloups !]) dans un élan créatif hors du commun, une fulgurance inédite, il contracte encore pour adopter le nom de ROCKIN’JL. C’est en concert qu’il enregistre son chef d’œuvre, le fameux AT SALLE MUNICIPALE DE L’EST, la référence absolue en matière de blues.

Conscient de ne pouvoir proposer à son public plus belle prestation, par crainte de décevoir, certain d’avoir posé l’ultime pierre à l’édifice bluezy, il arrête de nouveau la musique, mais ne s’en éloigne pas tout à fait, en devenant chroniqueur du célèbre DEBLOCNOT. Peu connaissent son histoire. Son dossier transmis à la DRH était caviardé, mais, j’ai pu tout de même retrouver quelques éléments biographiques. Notre mission, notre sacerdoce, vous le savez : informer le lecteur, toujours plus, toujours mieux. Il était de mon devoir de rendre hommage à Rockin’JL, en ce 17 mai, jour de son anniversaire.


John Lee n'a pas totalement coupé les ponts avec sa famille, et le groupe THE ALLMAN BROTHERS BAND joue régulièrement un titre en hommage au benjamin de la famille, sobrement intitulé "Rockin", comme le prouve la pochette de ce disque live, datant de 2004. La chanson est une composition de Warren Haynes, pour Gov't Mule, 1995, appelée à l'origine "Rockin' Horse" mais reprise par Gregg, depuis. 

Hein ? 17 mai de quelle année ? Aaaahhh… comme tous les grands bluesmen, c’est une information dont personne n’est sûre… mais ce jour-là de cette année-là le premier titre du journal radiodiffusé concernait l’explosion dans le puits n°1 de la mine de Tonypandy, au Pays de Galles, qui a causé la mort de 28 mineurs…  Vous avouerez que ce genre de faits divers ne nous rajeunit pas…

5 commentaires:

  1. Que dire, à part.... BRAVO ;-) ^_^

    RépondreSupprimer
  2. pat slade17/5/12 11:05

    Quelle vie !!! Et une tournée de Godinette pour l'auteur !!!yec'hed mat !!

    RépondreSupprimer
  3. En voyant un tel CV j'ai vraiment l'impression d'avoir raté ma vie pourtant j'adore aussi le Pouilly-Fuissé

    RépondreSupprimer
  4. voila tout un passé que je croyais oublié... merci Luc pour cette enquête, le prix Pulitzer t'attends!(à moins que ce ne soit plutôt une belle chambre à St Anne..)
    allez hop, fais péter la tournée de Godinette!

    RépondreSupprimer
  5. You're welcome folk ! Pour ma Godinette, je la prends sans sucre et sans fraise... Je préfère... C'est plus léger...

    RépondreSupprimer