dimanche 16 octobre 2011

LES MENHIRS "LIVE AT ST EVARZEC" (2011) par Roquine Jielle


Vous connaissez l'histoire de David Vincent, celui qui cherchait un raccourci ? Qu'il n'a jamais trouvé... Et bien voilà... Ce week-end, c'était mézigue qui était de garde au Déblocnot. Du temps de Sonia, notre secrétaire intérimaire, c'était plutôt agréable de rester toute la nuit dans les locaux. Mais elle n'est plus là et il faut s'occuper. Je traine, j'erre, je vagabonde. Je vérifie les serveurs, les liaisons Facebook, je trie quelques papiers, m'acquitte de deux ou trois factures, ramasse les canettes sur la moquette du bureau de Philou, et par curiosité, je regarde ce que les autres Déblocnoteurs préparent pour les jours à venir... Me voilà dans le bureau de Rockin'Jl. Une pile de disques, des photos dédicacées ("pour Gisèle, ton Rockin' adoré" ; "pour Gishlaine, ton Rockin' adoré" ; "pour Robert, ton Rockin' adoré"...) bref, rien de surprenant. Du quotidien. Mais placé sous une pile de dossier, je vois un dossier classé "top secret : chronique béton". Ça concerne un disque du groupe : Les Menhirs. Kézako ? Un truc local, comme il aime bien. Je lis. Et j'en tombe de ma chaise. Le Rockin' il nous fait des cachotteries. Garder cela pour lui, quel dommage ! Ce serait pêcher! Qu'est ce qu'on a pour dimanche ? Rien ? Et bien maintenant, on a ça : la chronique "béton" du Live des Menhirs, que le Rockin' voulait garder pour lui. Et c'est du gratiné...    


Les Menhirs font partis de mes coups de cœur, depuis toujours, ces groupes locaux qui n’ont pas de grosses maisons de disques et des copains à Canal + pour assurer leur promotion. Ils sont pourtant célèbres, et sans aucun passage télé ou radio, ils en sont à leur 15ème album studio. Je ne compte pas les live, ou les DVD, au nombre de quatre déjà ! Mais bon, je ne vais pas m’énerver sur le sujet encore une fois, mais ça fout les boules quand même… heureusement, il y a Internet, et le Déblocnot' pour faire passer de la bonne zic !

Carhaix a accueilli les Menhirs en 2008
Les Menhirs sont formés de neuf musiciens, cousins et cousines, originaires de Ploumoulouc. Je les ai découverts lors d’un festival blues celtique, y'a plus de 10 ans, à Douarnenez. Ils ont déjà une sacrée expérience de la scène, se produisent depuis plus de trois décennies, et pas seulement en France, mais aussi en Angleterre, en Irlande, au Québec, même en Argentine, pour la dernière tournée de cette année. L’influence musicale du groupe est clairement à chercher du côté des bluesmen des racines comme Bobby Blue Blackwell, Flyod Council, Blind Willie Mc Tell, mais aussi du revival psychédélique des années 60, comme les premiers Love, Canned Heat, Pacific Gaz… le tout mixé bien sûr à leurs propres racines celtes (dans la lignée des Denez Prigent, Carré Manchot, Kern, Ar Re Yaouank, Annie Ebrel…) et saupoudré de folklore russe (Kremlinski, Petrov Petrov, Red Place'band) mâtiné d'un esprit orientalo-japonisant (référence à Sushimaki évidente) qui se marie très bien à l'esprit berbère et yiddish (Yol-Yolman, Halla Meq, City Brahim...) alors que remontent aussi à l'écoute de certains titres des effluves catalanes (Papaélà, Pedrito, Buena-Bueno, Porfavor...) et que transpire leur passion pour la musique aborigène (Tââdujju, les Pamas and Mapas, Pyjjâmmà, les Märijoahnà...) marquée par l'utilisation récurrente d'un didgeridoo électrique. Sans oublier l'influence majeure des chants apaches (Imatùmi, Bison Fut-Fut...) et sa branche germanique (Besstagen Keschtâtt). Bref, un musique riche, un blues fusion incantatoire, teinté de gospel et de progressif psychédélique folklorique urbano-ethnico-rural. Le groupe est célèbre pour ses titres assez longs (pas le genre formatage radio FM) avec joutes oratoires des leaders vocaux (Gwilherm, Elouan, Gwenaëlle) et longs solos instrumentaux, électrisants, mettant la mélodie au premier plan.

Ce ne sont que des classiques que l’on retrouve sur ce CD (avec un inédit le jovial « C'hwezhañ war mi zizi karantez » sur le CD 2), enregistrés en concert, devant une foule de 40 000 personnes. Ça commence avec « Ramèn Takez » (12’53) qui remue comme ce n’est pas croyable, entame idéale pour un concert, un titre issu de leur premier album PEN A JUIRHO' CU en 1973, avec un solo de vielle à roue absolument dantesque, hendrixien sur les bords. Car les Menhirs jouent aussi bien sur des guitares électriques, batteries, que sur des instruments folkloriques. Elouan prend la voix solo dans « Deroù pett an heo sitraer » (19’34), puis leur tube « Lar da Mamm parpilhotoù » (15’35) que le public surchauffé reprend en chœur, aussitôt enchainé à « Prenañ caddi an defotachoù ti Edouard » (27’12), sans doute mon préféré, un morceau a capella où se mêlent les élans gospel et la transe celtique, avec les vibratos de la glotte de Gwenaëlle, qui arrive à moduler son chant en faisant tourner ses seins tantôt vers la droite ou vers la gauche, selon l’effet acoustique recherché. Les attributs mammaires de la chanteuse serviront aussi dans le titre suivant, puisqu’elle s’en sert pour taper ses percussions (c’est toujours un des grands moments du show) donnant une sonorité particulière, plus sourde et veloutée, aux peaux tendues des tambours.


Encore une belle découverte du Déblocnot'... 

1. Ramèn Takez (fais voir ta galette) -12’53
2. Deroù pett an heo sitraer (le soleil dans mon cidre) – 19’34
3. Lar da Mamm parpilhotoù (les bigoudis de ma mère) – 15’35
4. Prenañ caddi defotachoù ti Edouard (je vais faire mes courses chez Leclerc) – 27’12
5. Pen artichaod kac'hat en e slippoù (mon artichaut dans ta culotte) – 38’47
6. C'hwezhañ war mi zizi karantez (souffle dans l’biniou chérie) – 57’41

Après le concert de Morzy Lacouèn, la semaine dernière, j'ai réussi à aller voir les musiciens, et ils m'ont accordé quelques minutes de leurs temps. Je les en remercie. Gwenaëlle a accepté de répondre à quelques questions :

- Salut Gwenaëlle
- Salut Roquine... attention tu me marches sur la miche...
- Oh pardon ! Tiens justement, comment est venue l'idée de jouer avec tes seins ?
- Parce que tu ne joues pas avec ceux de ta femme, toi ? (rire)
- Euh si... mais, sans lire une partition !
- En fait, un jour, en entrant sur scène, j'ai dérapé, et me suis effondrée sur mes percussions, ça a produit une sonorité particulière, intéressante, que nous avons essayé de reproduire.
- Mais, comment dire... avec le temps qui passe, qui s'allonge...
- Mes seins s'allongent aussi ! C'est vrai que par rapport à il y a 10 ans, je peux me tenir plus éloignée des tambours... et puis, si je joue avec le droit, paf, avec le gauche je peux envoyer un coup sur les cymbales de Kerz, à l'autre bout de la scène. Parfois je m'amuse à jouer depuis les coulisses. 
- Cela a rendu le groupe célèbre ?
- Forcément au début c'était l'attraction, mais le public a bien compris qu'il s'agissait avant tout d'une démarche artistique, comme lorsque que Kerz fait son solo de batterie avec sa bite. Tu veux qu'il te montre ?
- Non non ! Je te crois sur parole ! Vous avez des contacts avec d'autres formations ou artistes ?
- Oui, et ma petite spécialité commence à être connue. C'est moi qui fait la grosse caisse sur le dernier Lenny Kravitz...
- Trente ans de métier, une quinzaine d'albums, mais pas une seule télé... ça fout pas un peu les boules ?
- C'est le lot de beaucoup de groupes locaux, mais cela ne nous empêche pas de composer, de nous produire, et de vivre de notre musique. Et puis le public est là, et c'est ce qui compte. Et puis y'a des gens comme toi, Roquine, et le Déblocnot qui parlent de nous ! 
- Tu écoutes quoi en ce moment ?
- Les Witch Doctors, un trio bluesy, trop fort. J'adore ces mecs. Je ne veux pas dire qu'ils nous ont tout piqué, mais bon... On n'est pas peu fier de les avoir influencé. 
- Tu les connais d'où ?
- C'est surtout Olive que j'ai un peu fréquenté, c'est leur batteur, et un jour où il avait oublié ses baguettes, comme j'étais là... il a... enfin... je lui ai proposé un substitut de baguettes...
- Tu veux dire qu'il a joué son concert en te tenant les...
- Ouais, et du coup, bah tu vois, ça rapproche...
- Je vois, oui, je vois très bien... Merci Gwenaëlle, et bonne chance à vous... A bientôt !
- Aïe ! ! !
- Oh pardon, zut !
- Tu m'as marché sur le gauche, ça porte bonheur !

Et merci encore au groupe, qui a accepté que je filme une partie des répétitions, pour vous donnez un aperçu de leur savoir faire. C'est un extrait de « Pen artichaod kac'hat en e vragoù » autre morceau a capella. Un morceau sur un tempo plus lent, comme vous le verrez, mais où la passion se dispute à l’énergie brute des corps, une transe qui emporte tout sur son passage, comme une Mahalia Jackson élevée au chouchen, qui donne envie de bouger, danser, s'éclater, et je l’espère pour vous, de découvrir ce groupe phénoménal, qui pourrait en remontrer à certains… 




LES MENHIRS Live at Saint Evarzec (2011), 6 titres, 2h52 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire