lundi 9 mai 2011

CALVIN RUSSELL - " A Crack In Time" (1990) par Philou


Un Texan à Paris...

Le cowboy d'Austin est mort il y a un mois, paix à son âme, mais sa musique demeure.
Il nous laisse un énorme vide que l'on essaiera de combler en réécoutant inlassablement ses disques. Retour sur son début de carrière, avec sa première œuvre "A Crack In Time".

Calvin Russell est né à Austin, la ville des frères Vaughan (Stevie Ray et Jimmy), en plein milieu de l'état du Texas. Sa naissance, quelques minutes après une éclipse totale du soleil, le 31 octobre 1948, augurera certainement de futures aventures plutôt sombres. 
Issu d'une famille nombreuse et modeste, le jeune Calvin apprend la guitare à l'age de 12 ans et passe son adolescence livré à lui même, toujours sur le bord de la route de la légalité. 
A 13 ans, il joue de la guitare dans un groupe local "The Cavemen", à 15 ans, il fugue en direction de la Californie, traverse le Golden Bridge et traine ses santiags pendant quelques temps à San Francisco.
A force de vivre vite et libre, sans vraiment se préoccuper des lois américaines, Calvin Russell se retrouve dans des institutions pour mineurs délinquants et plus tard, fait plusieurs séjours derrière les barreaux des prisons d'État où il commence à gaspiller sa jeunesse.
Après quelques années d'excès, d’errances et de vagabondages à dériver à travers l'ouest américain, il se retrouve finalement à Austin en 1986 où il côtoie le légendaire Townes Van Zandt.
Il tente sa chance dans les clubs de la ville, sans succès, jusqu'en 1989 où Patrick Mathé, le boss de New Rose, le découvre un soir au Continental Club.
Impressionné par le cow-boy à la tronche burinée par le soleil et les abus que la morale réprouve, le frenchie est tout de suite scotché par la voix sombre et rugueuse du hors la loi. 
Patrick Mathé ne veut pas le lâcher et lui propose de signer un contrat sur son label New Rose . La carrière de Calvin Russell est enfin lancée,  mais c'est déjà un vétéran, il a 41 ans !!!!
  Mais Calvin veut sortir son album sous le nom de The Characters,le groupe avec lequel il a sorti en 1989, un disque sur un label local allemand, intitulé " Act I " qui s'est écoulé à six cent exemplaires... et qui n'a même pas été publié aux USA.
Patrick Mathé n'est pas d'accord,  il veut que l'album sorte sous le nom de Calvin Russell mais tout en conservant les musiciens du groupe.

" J’avais déjà cette gueule - se rappelle Calvin - ce qui a sans doute motivé son intérêt pour moi. Je me battais depuis l’âge de 18 ans pour devenir songwriter, vivre de mes chansons et faire un disque. J'avais connu des hauts et des bas, j'étais allé trois fois en taule et j’étais sur le point de me dire : t'as trente ans et maintenant c’est la fin. Nous avons discuté, il a trouvé mon histoire intéressante et a pensé que je devais enregistrer un album. Or cet album, je l'avais dans ma poche sous la forme d'une cassette démo ! Je lui ai donnée sur le champ. Il m'a rappelé le lendemain. Ce mec venu de France me dit : on va faire un disque, et ça a été ma chance. Ma vie a changé. Nous avons enregistré, et la presse a commencé à apprécier ".

Calvin Russell au Continental Club (Austin, TX) 
En 1990, le premier album de Calvin Russell sort en France,  "A Crack In Time", ce n'est pas un raz de marée,  mais un succès conséquent tout de même, car 100.000 exemplaires de l'album seront vendus en un an. A la sortie de cet album aux influences rock/folk/country/blues, la presse spécialisée le décrit comme un "grand album aux couleurs du Lone Star State". 
Dans cet album, Calvin raconte au fils de ses chansons la vie, sa vie, "This Is My Life","My Way" et n'oublie pas de d'honorer  Town Van Zandt sur "Nothin".
Le Texan au regard perçant et profondément humain, nous conte les joies simples et les moments tragiques qu'il a connu lors de son parcours hors du commun, la route, la solitude, les terres perdues et se laisse emporter par les visions et les rêves torrides de ce coin désertique de l'ouest américain.
Tempo lent et appuyé, basse lourde, guitares saturées, le tout est solidement soutenu par une voix qui vient de loin, façonnée au pur malt et aux volutes de fumée aromatisée, une voix reconnaissable entre toute, dès les premières paroles.
Pourtant malgré quelques très bons titres comme "Behind The 8 Ball","I Should Have Been Home", "Wagon To The Stars" et surtout "Living At The Edge Of The Gun" qui nous rappelle les 3 barbus de ZZ TOP (époque Degüello), l'énergie s'évapore petit à petit, au fil des morceaux. On attend toujours que ça envoie du bois mais....ça ne démarre pas vraiment, d'où une certaine frustration qui s'installe à l'écoute de cette galette. Pourtant on sent bien qu'avec des types comme les deux frangins Waddell (Leland à la batterie et David à la basse) deux espèces de psychopathes de la rythmique, aussi teigneux derrière leurs instruments que dans la vie et de l’incroyable guitariste Gary Craft, un grand olibrius hargneux, les enceintes de la sono devraient exploser !!! Il n'y a vraiment que sur "I Should Have Been Home" que le groupe lâche les chevaux et encore on en redemande...

Calvin avec Gary Craft

Ce 1er essai assez réussi quand même,  permet à notre Texan préféré de visiter l'hexagone et de participer à bon nombre de festivals en compagnie de  pointures comme Little Village et The Kinks.

Évidemment c'est sur scène que Calvin, le Stetson crasseux vissé sur la tête, donnera tout ce qu'il a dans le ventre et sans réserve lors de bons nombres de concerts survoltés remplis d'énergie, ce qui surprendra tout ceux qui s’attendaient à entendre un songwriter/troubadour plutôt serein et intimiste. Il confiera sa devise aux journalistes :  "Essayer de jouer, toujours mieux. Pour partager le bon feeling et créer à chaque fois la magie qui rallie la confiance du public". 

 Malheureusement, le  vieux voyageur fatigué, usé par les trop nombreux excès d’un parcours aux frontières de l’enfer dont il était revenu après bien des galères, ne remportera pas son dernier combat contre la maladie qui le rongeait depuis de nombreux mois.
Ses yeux clairs qui tranchaient sur sa mine de desperado déglingué, se sont définitivement fermés, le dimanche 3 avril 2011.

The Band Plays Rock 'n' Roll  ou Gary Craft qui se lâche enfin sur "I Should Have Been Home With You" !!!

2 commentaires:

  1. Si je me souviens, alors que toutes las paroles ont été retranscrites, on ne retrouve par celles d'une chanson autobiographique.

    RépondreSupprimer
  2. De Calvin Russel, je retiendrais surtout ses deux premiers disques studio et les live "Le voyageur" et "Trabendo". Ses prestations sur scène étaient toujours jouissives, un grand bonhomme!

    RépondreSupprimer