jeudi 21 novembre 2024

Padre SOLER – Sonates et Fandango pour clavecin – Rafael PUYANA (1967) vs Scott ROSS (1990) - par Claude Toon


- J'aime bien le clavecin Claude, sauf quand il ferraille, hihi ! Ce n'est pas le cas avec ce Monsieur Puyana jamais écouté dans le blog, tout comme le Padre Soler d'ailleurs… Un baroqueux je suppose, contemporain de Scarlatti ? Tu m'affranchis...

- Dans l'ordre Sonia… Rafael Puyana est l'un des grands clavecinistes du XXème siècle, peut-être moins célèbre que Scott Ross, mais bon… Padre Soler est d'une génération après Scarlatti, donc oui, le dernier compositeur de pièces pour clavecin disons baroques en ce début de l'époque classique, et avant que le piano forte ne supplante cet instrument…

- C'est bizarre, ce disque n'a jamais été réédité en CD, il y a des vinyles sur le marché des occasions certes, mais du coup on n'en profite guère…

- Acceptons notre époque Sonia, cette gravure a été remasterisée pour les plateforme dont YouTube… Très franchement, ayant entendu les pressages de 1967, je ne vais pas maudire pour une fois le principe… Je vais en reparler… Et proposer en complément un disque de Scott Ross qui fait voltiger le Fandango avec brio…

- Ok c'est parti……….

 

Antonio Soler jeune
 

Au siècle des lumières, l'Italie, l'Allemagne, l'Empire Austro-Hongrois et plus discrètement la France occupent la majeure partie de l'espace en terme de création musicale. En Angleterre, il y aura pénurie de grands compositeurs tels Vivaldi, Mozart ou Rameau, mais une multitude de petits maîtres qui n'ont guère accédé à la postérité. J'avais exposé une théorie à ce sujet dans l'article consacré à Thomas Arne (1710-1778) et un album de concertos pour orgue (Clic). Il faut bien admettre que l'allemand expatrié Haendel occupa sans partage ou presque les scènes londoniennes jusqu'en 1750.

En ce 21 novembre grisâtre, partons pour l'Espagne étudier, là aussi, la fort maigre production musicale en cette période de bouleversement intellectuel intense qui conduira au romantisme et même à la Révolution française.

En Europe, dans les pays cités, les monarchies commencent à perdre de leur influence dictatoriale et, même la toute puissante Église catholique se voit concurrencer par d'autres formes de pensée que la théologie du Vatican, entre autres : l'ésotérisme de la Franc-Maçonnerie 😊…

En Espagne, monarchie et catholicisme veillent encore farouchement au respect des dogmes dans tous les domaines, qu'ils soient philosophiques, littéraires ou artistiques. La censure est une activité plus qu'officielle et l'inquisition perdure avec détermination. Si celle-ci a pris fin en France vers 1700, les héritiers de Torquemada, fondateur impitoyable de la terrifiante inquisition espagnole, poursuivent leurs basses œuvres et les bûchers bruleront les supposés hérétiques jusqu'en 1834* ! Certes quelques écrits novateurs parviennent chez quelques érudits pourtant dévots, mais sont généreusement caviardés par les autorités monarchiques et ecclésiales. Quelques exemples : En 1756, le Saint Office interdit la diffusion de l'Esprit des Lois de Montesquieu considéré comme propice, à ses dires, à l'émergence d'hérésies. Dans le même esprit d'obscurantisme, en 1759, il entrave la diffusion de l’Encyclopédie… et en 1762, proscrit l’œuvre entière de Voltaire et de Rousseau !

En un mot pour conclure sur ces Lumières espagnoles peu brillantes : la chasse aux idées nouvelles fait donc rage et un Don Juan ou Une flûte enchantée d'un Mozart auraient conduit son ou ses auteurs dans un cachot pour une durée indéfinie… Et que penser du sort d'un Francesco Geminiani, musicien attitré de la loge maçonnique Philomusicae et Architecturae Societas Appolini créée à Londres en 1725 😐.

(*) Un film bouleversant à voir : les fantômes de Goya de Milos Forman avec une Natalie Portman martyrisée. Pas un grand Forman pour certains mais un procès assez fidèle des atrocités commises au nom du saint-office au début du XIXème siècle en Espagne. Film parfois décrié (Luc ?).

 

Padre Soler

Antonio Francisco Javier José Soler Ramos, connu sous le diminutif de Padre Soler est l'exemple même du compositeur qui, malgré un succès certain, écrira dans un style résolument baroque moyennant quelques entorses vers des techniques émergentes du classicisme. Il devra s'accommoder des règles spirituelles en vigueur. Né en 1729 en Catalogne, Antonio suivra ses études à l'abbaye bénédictine de Montserrat. Il prend l'habit de moine en 1752 dans un monastère situé près de Madrid. Il devrait, dans la logique de l'époque, se cloîtrer jusqu'au trépas, même si ses dons musicaux remarquables et remarqués le propulsent maître de chapelle des lieux.

 

À Madrid, Antonio bénéficie des conseils de Scarlatti, l'italien, qui œuvrera presque toute sa vie à la cour d'Espagne et composera ses célèbres 555 sonates pour clavecin. (Clic) L'influence de Scarlatti dans la production de Soler est incontestable. Ce dernier écrira plus de 200 sonates dans un style très similaire, apportant juste un peu plus de fantaisie dans la structure des pièces.

Antonio donne des concerts à Prado ou à Aranjuez, enseigne aux enfants du roi Charles III, s'échappe donc très, trop, souvent du monastère au goût du nouvel abbé (date inconnue). Il fait des jaloux et, vous connaissez le principe : où que l'on soit, immeuble, camp de camping, association, salle de cinéma, il y a toujours un ou des fâcheux pour faire ch**r !! Le nouveau supérieur Julian de Villegas, un religieux fanatique, interdit désormais à Antonio ces escapades musicales. Ah les arguments d'une grande subtilité empathique (bravo pour un chrétien), Villegas estime que Padre Soler a "la tête affaiblie par l'étude immodérée de la musique", Villegas ayant entendu de plus le surnom stupide donné au musicien "le diable en habit de moine", il doit penser que son moine sent le soufre 😊 ! Même Charles III ne pourra plaider la cause de son protéger, on ne se met pas un supérieur de couvent à dos dans cette Espagne rétrograde.

Et pour aggraver sa situation, Padre Soler avait commencé à trop s'intéresser à des musiques profanes telles l'opéra. Pourtant son librettiste favori, Pedro Calderon de la Barca, lui aussi prêtre, écrivait des drames teintés de théologie, du sens de l'honneur patriotique, de mythologie, etc. ; rien de très contestataire. Antonio finira ses jours au couvent en 1783 à 54 ans.

Padre Soler laisse un catalogue insuffisamment joué. Aux 200 sonates, on doit ajouter de la musique de chambre, quintettes et concertos pour orgue et des dizaines d'œuvres vocales religieuses.

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Dans l'univers restreint des clavecinistes marquants, Scott Ross, par son talent et sa personnalité, la tragédie de son trépas à 38 ans, victime d'un nouveau monstre nommé VIH, a porté le maitre vers le statut de légende.  Scott Ross : une popstar du clavier…

 

Je souhaiterais revenir sur la carrière d'un autre virtuose qui a permis au clavecin de ne pas finir aux encombrants car de Bach à Padre Soler en passant par Scarlatti, toutes leurs œuvres peuvent être interprétées sur un piano. Et pourtant le  timbre ne convient pas toujours à la vivacité acidulé des bons clavecins, juste un avis perso.

Né en 1931 à Bogota, Rafael Puyana connaîtra un destin musical hors norme. Il débute le clavier à six ans avec sa mère, elle-même musicienne. À seize ans, il est admis au New England Consevatory de Boston, un établissement prestigieux. Il sera également le dernier élève de sexe masculin de Wanda Landowska (1879-1959), artiste et compositrice polonaise à qui l'on doit la renaissance du clavecin… (Elle commandera des nouveaux clavecins à Pleyel, insatisfaite des antiquités mal préservées dont elle disposait.) Rafael Puyana suivra également des cours de composition avec Nadia Boulanger.

 

Sa carrière prendra un caractère international. Son répertoire immense s'étend de Bach au concerto de De Falla… sa discographie est à la hauteur de cette variété mais hélas tro dispersée chez divers labels qui ne rééditent guère ses meilleures gravures. Ainsi le disque du jour était paru en 1967 chez Philips dont le catalogue vendu à Decca n'est pas systématiquement réédité. Cela dit, la version numérique de cet album consacré au Padre Soler est tout à fait correcte.

Rafael Puyana fut le professeur de Christopher Hogwood, baroqueux mémorable qui nous a quittés il y a dix ans (Clic).

 

Avec une technique améliorée, je propose l'excellent disque de Scott Ross. Il n'y a pas de concurrence réelle. Les programmes sont différents. Je vous laisse apprécier le célèbre et un peu fou Fandango, la finesse métronomique et un soupçon humoristique de Scott Ross ou l'énergie latino enflammée de Rafael Puyana, plus incisif, agrémentant de coquetteries aux sonorités frivoles son interprétation.

 

Je ne reprends pas la biographie de Scott Rossqui a déjà participé au blog : des sonates de Scarlatti et une fabuleuse vision des Variations Goldberg de Bach (Index).

(Biographie)

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Rafael Puyana et Genoveva Gálvez (second clavecin) – (1967)

Scott Ross (1990)

Playlist  Vidéo 1

Playlist  Vidéo 2

1.         Sonate En Fa Dièse Majeur

2.         Sonate En Ut Dièse Mineur

3.         Fandango

4.         Sonate En Ré Majeur

5.         Sonate En Ré Bémol Majeur

6.         Sonate En Ré Mineur

7.         Sonate En Ut Mineur

8.        Concerto En Sol Majeur Pour 2 Clavecins (Andantino - Minué)

1.         Sonate N° 12 En Sol Majeur

2.         Sonate N° 15 Ré Mineur

3.         Sonate N° 49 Ré Mineur

4.         Sonate N° 54 Do Majeur

5.         Sonate N° 56 Fa Majeur

6.         Sonate N° 69 Fa Majeur

7.         Sonate N° 76 Fa Majeur

8.         Sonate N° 84 Ré Majeur

9.         Sonate N° 90 Fa Dièse Majeur

10.      Fandango Ré Mineur

 

Écoute au casque ou avec des enceintes additionnelles plus que conseillée.

Le son des PC, sauf exception, est vraiment une injure à la musique…


INFO : Pour les vidéos ci-dessous, sous réserve d'une écoute directement sur la page web de la chronique… la lecture a lieu en continu sans publicité 😃 Cool. 

 


mercredi 20 novembre 2024

Phil MOGG - MOGGS MOTEL " Moggs Motel " (2024), by Bruno



     Oh !? Mais que voilà une belle pochette bien pourrie, vraisemblablement élaborée par une IA dans laquelle on a jeté à la hâte et négligemment les mots clés suivants : voyage, hôtel, bagnoles américaines, vie nocturne et années 80. Un gruau de mots qui a donné une belle bouse, qu'on n'a même pas pris la peine d'essayer - un tant soit peu - d'améliorer, because si c'est l'IA qui pond ça, c'est que c'est forcément bien (pourtant, le concepteur a prouvé qu'il pouvait faire bien mieux, notamment pour UFO). Pour finir le tableau, il suffit de remarquer que derrière ça se loge un duo d'anciennes têtes connues du heavy-rock, qui ont largement passé l'âge de la retraite, et d'un troisième gars plus très frais (toutefois, presqu'un gamin en comparaison), pour se désintéresser définitivement de la galette. On n'oserait même pas y prêter une discrète esgourde. Surtout que cette année a son lot de disques de "poids lourds", poussés par une promo prématurée et encensés par la presse, qui se sont avérés plus ou moins décevants.

     Bref, sans l'article élogieux de monsieur Hugo Spanky (👉  lien ), ce premier album solo du septuagénaire n'aurait même pas fait l'objet d'une écoute sur le net. Et pourtant, si cet album est loin de révolutionner quoi que ce soit, il n'en demeure pas moins une bonne surprise. Aurait-il donc fallu que Phil Mogg, tout de même 76 ans au compteur, lâche son vieux vaisseau non identifié, maintes fois customisé, - et pas nécessairement  pour le mieux -, pour réaliser à nouveau un bon album ? C'est qu'il faudrait remonter jusqu'en 2006, avec "The Monkey Puzzle", pour avoir droit à un belle image de l'UFO. Certains remonteront plutôt à "Walk on Water", marquant le retour de Michael Schenker, quand pour d'autres, pour les plus radicaux, l'UFO n'est plus que l'ombre de lui-même depuis le milieu des années 80. 


   Mais qu'est-ce qui a pris ce vieux baroudeur au long cours ? Pourquoi prendre le risque de repartir (presque) à zéro ? Estime t-il que l'UFO ayant accumulé trop de déceptions, de coups durs, il devait être définitivement sabordé, et repartir avec un nouvel engin ? L'espace exploré avec cette nouvelle entité reste pourtant quasiment le même.

     Le vieux capitaine avait déjà annoncé en 2019, que ce serait le dernier vol de l'UFO. Une longue tournée d'adieux tristement entachée par le décès du vieux compagnon de route, Paul Raymond, terrassé par une crise cardiaque. L'année suivante, il apprend le décès prématuré de Paul "Tonka" Chapman, qui fut un autre compagnon de voyage (de 1979 à 1984).  Deux mois plus tard, c'est l'ancien lieutenant et ancien co-fondateur d'UFO, Pete Way, qui tire sa révérence. Et Mogg lui-même a senti le souffle fétide de la faucheuse lorsqu'il fait une crise cardiaque en août 2022. Il était probablement temps d'arrêter...

     Cependant, pour les artistes, la retraite n'est généralement qu'une étape passagère, un repos mérité avant de reprendre plus sereinement la route, plus tranquillement et sans le poids de la pression commerciale. Difficile de se contenter des choses simples de la vie, lorsqu'on a goûté à l'ivresse que procurent l'enthousiasme et l'ovation du public. Certains avanceront que c'est plutôt le besoin de renflouer des caisses rapidement vidées par un train de vie onéreux (ou par une piètre gestion des biens), qui force à reprendre du service - ce qui se révèle parfois être le cas. D'ailleurs, en aparté, d'après Michael Schenker - qui semble être une sacrée mauvaise langue, alors que son ego, lui, ne désenfle pas -, Phil Mogg l'avait quasiment supplié de remonter UFO avec lui. Le pauvre Mogg, au bord des larmes, lui aurait dit qu'il était ruiné et que ne sachant rien faire d'autre que de la musique, il était dans la panade (pour ne pas dire autre chose). Ce serait donc par générosité que Schenker aurait consenti à relancer l'UFO. A la même période, le petit Michael était au creux de la vague (et même sous la dite vague), ses albums n'ayant plus vraiment la faveur du public, et ses maigres productions récentes encore moins... Tout ça pour dire que les propos de Michael Schenker sont à prendre avec des pincettes. A ce titre, depuis quelques années, son frère Rudolf est le sujet de reproches acrimonieux. Comme quoi son frère, Rudolf, l'aurait copieusement copié jusqu'à reprendre sa guitare et le look de celle-ci. Rudolf, encore, serait un tyran pouvant s'avérer violent (ce qu'aucun membre actuel ou passé n'a jamais dit ou ressenti à son encontre). Scorpions l'aurait aussi spolié, ne mentionnant pas son implication dans la composition. Par contre, il tait les fois où son aîné s'est investi pour essayer de le sortir de ses addictions (las, après maintes infructueuses tentatives, il finit par lâcher l'affaire) et pour payer ses dettes (y-compris de studio)...

     Enfin, bref, ce nouveau projet est certainement le moyen de reprendre la route sans le poids considérable d'un vieil UFO plus aussi rutilant ; d'autant que les membres d'origine disponibles se font rares.

     Pour ce "périple inter-motels", Phil a convié le multi-instrumentiste Neil Carter, qui, après l'essai avec Wild Horses, avait déjà rejoint l'UFO en 1981 pour trois années consécutives. Il est appelé à la rescousse en 2019, en remplacement de Paul Raymond. Ainsi que le bassiste Tony Newton (également producteur de l'album), qui s'est déjà illustré au sein de Voodoo Six et de KK's Priest, que Phil a connu lorsqu'il ouvrait pour UFO avec Dirty Deeds. Pour tenter de rajeunir la moyenne d'âge, Newton a embarqué à sa suite deux anciens collaborateurs de Voodoo Six : le batteur Joe Lazarus et le guitariste Tommy Gentry.

     Alors, bien sûr, l'album ne fait pas dans l'extravagance, à l'exception du court interlude "Harry's Place", où Carter nous montre ses talents à la flûte traversière (dommage qu'il ne renouvelle pas l'expérience), œuvrant dans un solide heavy-rock - qu'on peut tout aussi bien nommer classic-rock ou hard-rock old school -, assez ramassé, porté par des guitares certes saturées, mais non pesantes et encore moins stridentes. Une douce saturation typique d'humbucker caressé par de la disto assez épaisse et veloutée. Ce qui se marie bien avec la voix de Mogg, forcément plus patinée et graisseuse qu'auparavant. Car si Mogg a toujours préservé sa voix en évitant de monter dans les notes aigües et en évitant les hurlements d'électrocutés, l'horloge du temps a posé un lourd voile sur ses cordes vocales. 

Ainsi, parfois, sa voix semble faiblir, au bord de l'essoufflement. Néanmoins, cette petite défaillance est utilisée avec élégance, pour un cachet quelque peu bluesy. Elle crée aussi un beau contraste lorsqu'elle est couplée ou secondée par la voie claire et puissante de la choriste "rock'n'roll", Zoe Delvin Love. Une pointe de féminité opportune - dans ce monde de brutes 😁 - et rafraichissante. Le meilleur exemple est l'euphorisant sans doute "Sunny Side of Heaven", où Zoe serait presque à armes égales avec Mogg ; ce qui fait un peu regretter que la damoiselle ne soit pas plus sollicitée.

    Tandis que Neil Carter - lui qui dut longtemps rester dans l'ombre de Paul Chapman et de Gary Moore -, se révèle être un soliste assez expressif. Certes, il évite soigneusement de tomber dans les plans véloces et autres dérapages du manche qui avaient permis à l'Irlandais balafré de briller, laissant pour cela la place au jeune Tommy Gentry - ce dernier apportant une touche de modernité, plus métôl. Carter, lui, se singularise en donnant à ses soli force et caractère avec peu de notes. Accommodant ses chorus de savoureux plans de double-stops massue et de bend en mode Carterpillar sans se départir d'un certain lyrisme. Ce n'est pas sans raison si ce filiforme blondinet (oui, aujourd'hui, se serait plutôt du blanc décati 😄) est resté pendant près de vingt ans un accompagnateur de marque que s'arrachaient les poids lourds du heavy-rock - son égale aisance aux claviers ne faisant que renforcer l'intérêt qu'on lui portait.

     Dans l'ensemble, et bien que les chansons soient écrites avec l'aide de Newton ou Carter - ou les deux -, le quintet navigue dans des espaces où les couleurs propres à l'UFO d'antan ressurgissent de part et d'autre. Et plus particulièrement celles de l'OVNI de l'après Schenker. La période ayant pour membres d'équipages donc Paul Chapman et, surtout, celle avec un certain Neil Carter. Neil qui monte une première fois à bord de l'engin et qui participe activement aux compositions - à partir de "Mechanix" -. Cependant, la tonalité est plus en phase avec les normes actuelles, en étant simplement plus musclée, "bodybuildée".

P.S. : Bien que généralement présenté comme l'album solo de mister Phil Mogg, il semblerait que cela soit plus l'album d'un collectif, tant Neil Carter et plus encore Tony Newton sont impliqués.


🎶🏨🚗
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mardi 19 novembre 2024

COLETTE RENARD La douce libertine - par Pat Slade



Pour les plus jeunes, elle est connue pour un titre, pour les plus anciens elle restera ”Irma la Douce




Chansons Française et Libertinage



Irma la Douce
Elle aurait eu cent ans le premier novembre dernier. Fille d’un menuisier et d’une couturière, très tôt la musique fait partie de son univers et elle fera ses études musicales en apprenant le violoncelle ; mais elle abandonnera suite à une intervention chirurgicale. Elle vivra de petits métiers et, poussée par un de ses employeurs,  elle participe à un radio crochet et le gagne. Pendant deux années elle va essayer de s'imposer à la radio et dans la chanson, mais sans succès et elle retournera dans la vie active comme sténodactylographe. Elle devient la secrétaire de Raymond Legrand qui fut le successeur de Ray Ventura et qui lui fera reprendre la chanson. En 1956 elle interprète le rôle d’Irma dans la comédie musicale ”Irma la Douce“ de Marguerite Monnot qu’elle jouera jusqu’en 1967. 

Colette Renard s'impose dans la chanson réaliste d’après-guerre, par sa voix particulière, mais aussi pour son audace unique pour l’époque, elle est une des seules artistes à avoir enregistré huit albums de chansons gaillardes, libertines et polissonnes. En 1963, l'artiste chante ”Les Nuits d'une Demoiselle“, un titre entièrement consacré aux plaisirs du coït, côté féminin. C'est lors d'un dîner avec l'écrivain et producteur Guy Breton que Colette Renard et son mari de l'époque, le compositeur Raymond Legrand, prennent le pari d'enregistrer ce morceau et une dizaine d'autres aux paroles plus que suggestives… "À la fin de la soirée, ils étaient tellement pressants que j'ai fini par céder. Je leur ai dit : 'Bon, je veux bien enregistrer, mais il faut que ça reste entre nous, c'est juste pour rigoler'", s'est-elle souvenue. Les morceaux auraient pu ne jamais être découverts par le grand public, oui, mais… Un jour, l'un d'eux est diffusé à la radio, à la grande surprise de Colette Renard, qui décide de tenter le tout pour le tout et de chanter en public toutes les "chansons libertines" qu'elle a enregistrées. Un courage qui a été payant ! Elle passera plusieurs fois à l’Olympia et à Bobino et elle partagera la scène avec Georges Brassens.

Même si elle reste connue pour ses enregistrements libertins, elle gravera dans la cire des chansons typiquement parigotes comme dans l’album ”Paris-Montmartre “ en 1969 qui rassemble un panel des grandes chansons parisiennes comme ”Un gamin de Paris“, ”La Complainte de  la Butte“, ”Padam Padam“ou ”Sous le ciel de Paris“. Le timbre de sa voix et sa diction la rendait reconnaissable dès le début d’une chanson. Elle était éclectique, la chanson, le cinéma, le théâtre, la télévision (Sa dernière apparition sera dans la série ”Plus belle la vie). Elle enregistrera son dernier album en 2002 : ”Ceux qui s’aiment“ suivi d’un récital au Théâtre Déjazet qui sera son adieu à la scène.  

Une importante discographie, un tombereau de 45 Tours dont le fameux ”Les nuits d'une demoiselle“ en 1963 qui reste sa chanson la plus connue, une chanson paillarde qui comprend sept couplets évoquant diverses pratiques sexuelles uniquement par des périphrases et des métaphores. Guy Breton le journaliste, écrivain et auteur des paroles aura l’audace et le tour de force de parler de l’onanisme et de l’orgasme féminin sans avoir recours ni à des mots argotiques ou grossiers, ni à des formulations vulgaires.

Hospitalisée, elle meurt d’un  cancer du cerveau en 2010 à l’âge de 85 ans.

Colette Renard reste dans la lignée des chanteuses à textes comme Cora Vaucaire, Lucienne Boyer ou Colette Deréal, mais ce sont des noms que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaitre.