vendredi 30 septembre 2011

MICHEL PETRUCCIANI de Michael Radford (2011) par Luc B.

Michael Radford a commencé sa carrière de réalisateur par un documentaire sur Van Morrison. Il s’est fait connaître en 1984 pour avoir adapté à l’écran 1984 (d’après Georges Orwell), puis SUR LA ROUTE DE NAIROBI (avec Greta Scacchi ), et son gros succès LE FACTEUR (1994, avec Philippe Noiret). On lui doit aussi LE MARCHAND DE VENISE avec Al Pacino. Il s’attèle aujourd’hui à un autre documentaire, consacré au pianiste de jazz français, Michel Petrucciani.

Michel Petrucciani est né en 1962, et les médecins lui détectent une ostéogénèse, malformation osseuse. Les conséquences sont doubles : trouble de la croissance (Petrucciani mesurera 1,02m) et fragilité extrême des os. Il ne pourra pratiquement pas marcher, n’ira pas à l’école, et suivra donc des cours par correspondance. Les cassettes qu’il reçoit, il les efface, pour réenregistrer dessus de la musique ! Car la musique sera sa grande passion, transmise notamment par son père, Tony, guitariste, qui joue dans un trio jazz. Après avoir vu Duke Ellington à la télé, il réclame un piano, et ses parents lui en achètent un petit, un jouet. Mais Petrucciani le casse. Il en veut un vrai ! Ce sera chose faite quelques mois plus tard, et l’étude intensive peut commencer. N’allant, pas en classe, ne pouvant sortir, Michel Petrucciani peut faire ses gammes 12 heures par jour, il se noie dans les exercices, et dès l’âge de 6 ou 7 ans il éblouit ceux qui viennent l’entendre. La légende veut (mais les témoignages divergent) qu’on l’ait fait monter sur scène au côté du trompettiste Clark Terry, alors que ce dernier était en rade de pianiste. Terry a commencé à jouer des comptines pensant avoir à faire à un enfant, et Petrucciani lui faisant clairement comprendre qu’il n’était pas là pour faire de la figuration, ni épater le public, mais bel et bien pour jouer du jazz !

dans les bras du batteur Aldo Romano
Vers 20 ans, Michel Petrucciani part pour Los Angeles, à Big Sur, où il rencontre le saxophoniste Charles Llyod, qui remonte un groupe, et tourne pendant 5 ou 6 ans avec le pianiste français. Le succès est immédiat, Petruccini se produit alors avec les plus grands (Freddie Hubbard, Wayne Shorter) et sera le premier musicien européen a signé chez Blue Note. On ne cesse de s’extasier sur la virtuosité de sa main droite, quand ce n’est pas de sa main gauche… A cause de la fragilité de ses os, Petrucciani à du développer une technique bien à lui, faite de dextérité, de rapidité de mouvement. Il s’installe ensuite à New-York, bien décidé à jouir pleinement de la vie. Petrucciani le sait, sa maladie ne lui donne pas une espérence de vie très longue, et il compte bien en profiter, de la vie, de goûter à tous les plaisirs qu'elle peut offrir. Cela passera notamment par la drogue, que Petrucciani, pas toujours bien entouré, consomme de plus en plus. Il passera ses dernières années entre les Etats Unis et Paris, signe chez Dreyffus, enchaine les concerts, les disques. Chaque concert lui demande des efforts quasi insurmontables. Pour jouer dans les aigus, ses bras étant trop courts, il est contraint de se pencher sur la droite, presque à l’horizontal, en se retenant de la main gauche pour ne pas tomber, avant de se relancer d’un coup pour retrouver sa position initiale. Ses amis racontent qu’il n’est pas rare que Petrucciani se casse un os des doigts, en concert, se démette l’épaule, il s’est même fendu l’ischion (sous le coccyx), sans pour autant s’arrêter de jouer, ni quitter la scène. Son père lui fabrique un pédalier surélevé (plus tard, le fabriquant de piano Steinway lui en offrira un du même modèle, sur mesure, gravé à son nom).

Le film de Michael Radford s’intéresse presque davantage à l’homme qu’au musicien. C’est sans doute ce que je lui reproche. Il y a certaine redite, notamment concernant le tempérament de Petrucciani, marié quatre fois, de nombreuses maîtresses… Bref, un queutard de première… Mais l’entend-t-on vraiment parler de sa musique, de son style, de ses influences ? Il est intéressant de l’entendre déclarer qu’il est parfaitement heureux, conscient de ses handicaps, mais qu’il mène la vie dont il a rêvé. Mais s’il vit comme n’importe qui, raison de plus pour s’attacher à ce qui fait sa différence : son talent. Il y aura donc assez peu d’extraits de concerts, ou trop courts. Par manque de document ? Je ne crois pas. Le film privilégie les témoignages des proches, que l’on aurait pu entendre davantage en voix off. Et puis un truc qui m’agace : aucun sous-titre, on ne sait pas qui sont ces gens ! Certes, on reconnait quelques musiciens célèbres, mais quid des autres ? Au moins, les amis ne passent pas leur temps à le saluer, mais envoient quelques piques parfois, comme la propenssion méridionnale de Petrucciani a exagéré, embellir la réalité ! Ses épouses parlent aussi ouvertement de ses dépendances, de son caractère, et sa frivolité. Pour tout dire, ce film n’est pas très cinématographique, mais simplement un montage d’archives entrecoupé d’interview. La seule idée, et de montrer une pendule, comme pour mieux nous faire comprendre que le temps passe plus vite pour Petrucciani (vieillissement prématuré), que le trépas approche… Pas de très bon goût, à mon sens, parfaitement inutile, d’autant que le pianiste n’aimait rien d’autre que la vie, la fête, les repas, l’alcool, les femmes. Assombrir le récit par cet artifice ne me semble pas le bienvenu.

Ce film permet en tout cas de (re) découvrir cet artiste exceptionnel, mondialement reconnu et respecté, un type bourré d’humour. Qu’il soit parti d’ici, pour en arriver là, force le respect. Michel Petrucciani, en ménage, surveillé de près, choyé, résiste mal aux tentations. De passage à New York, en plein hiver, fatigué, grippé, usé par les 220 concerts qu’il vient de donner cette année-là, s’échappe faire la fête, renoue avec d’obscures relations. Il meurt le 6 janvier 1999, à l’âge de 36 ans.

A mon sens, un film intéressant, mais trop sage, trop académique, trop bavard, qui ne se hisse pas (si je puis dire...) à la hauteur de son personnage principal.     





Ecoutons Michel Petrucciani, époustouflant, dans un de ses morceaux fétiches, "Caravan" une composition de Duke Ellington.



Si vous aimez les documentaires musicaux, rendez-vous à notre rubrique CINEMA/documentaire, où vous trouverez notamment le formidable (mais dans un autre genre) film consacré à Dr Feelgood.

jeudi 29 septembre 2011

JACQUES HIGELIN EN CONCERT A BAGNEUX

Dimanche 25 septembre, 16h00.  Un coup de fil : « Luc, y’a Higelin qui va commencer à chanter, au stade de Bagneux ! » «  Hein, quoi, qu’ouis-je ? Faites-le patienter, j’arrive ». 5 minutes plus tard, ma Harley cadenassée aux grilles du stade Maurice Thorez (Bagneux est un bastion communiste au milieu du "9-2"), je me retrouve sur une pelouse de foot, avec des dizaines de tables, des gens en train de manger, boire, des expos photos, terrain balisé pour les gamins, parcours de miroirs déformants, et au-dessus de nos têtes un soleil radieux. Le festival « La rue des vendanges / La tête dans les étoiles » s’achève par un concert gratuit de Jacques Higelin, dont nous avions la veille entendu au loin les répétitions (ce qui m’avait mis la puce à l’oreille…). Le grand Jacques est ravi d’être là, la coiffure ébouriffée, la voix plus écorchée que jamais. Un « Poil dans la main » ouvre les hostilités, et il y aura « Monalisa Klaxon », "La fille au coeur d'acier" et un « Paris New-York – New York Paris » survolté (asphyxie !), avec une accélération progressive du tempo sur la fin, Higelin exhortant son (jeune) batteur à mettre les bouchées double ("accèlère !!!"). Entre chaque chanson, nous avons droit aux délires du grand homme, qui apostrophe des spectateurs armés d’appareil photos : « t’as vu l’angle de ta prise de vue, tu me photographies les couilles ou quoi ?  bon, chacun prend son pieds comme il veut, mais j’aimerais que les photos ne se retrouvent pas dans les journaux ! ». A une autre fan, bien rousse, il s’interroge : « t’es une rousse teinte en rousse ? », et de partir sur les petites manies de ces dames dans un salon de coiffure… 
à g. Jean Michel Basquette, le funambule et à d. No Yon Kwon avec Higelin
Higelin passe du micro à la guitare, au piano, d’où il chantera « Champagne » seulement accompagné de son percussionniste. Sur « Crocodile » c’est une marionnette géante de croco qui va fendre la foule. Il calme le jeu avec « La gare de Nantes ». Puis montent sur scène d’étranges personnages, peints de la tête au pied, la troupe Les gens de couleur qui prennent des pauses statufiées, énigmatiques, puis ensuite la fanfare des Traines-Savattes, histoire de booster de rasades de cuivre les titres à venir. Et une cinquantaine de choristes, des gamins, issus d’une école du coin, qui reprendront « Poil dans la main », « Tête en l’air » , « Tombé du ciel » (faux départ, les gamins ont démarré trop tôt !). Higelin est radieux, mais peste contre lui-même : « je me suis niqué la voix aux répétitions, hier, et aujourd’hui, je suis en dessous de tout, je n’arrive à rien ».
Plusieurs fois il se tourne vers son groupe, faisant le geste de se couper la gorge. Ou il s'assoit, l'oeil triste, profitant de chaque seconde pour récupérer, et se gargariser la gorge avec "un infâme breuvage qu'on veut lui faire avaler" ! Mais l’envie est là, l’envie de tout donner, de bien faire, il n’hésite pas à stopper son groupe quand il le faut : « non,  ce n’est pas le tempo, c’est trop mou, on s’endort, mettez la gomme ! un deux trois quatre ! ». La soprano No Yon Kwon viendra aussi rejoindre la troupe, et pendant son titre, tous les regards sont tournés vers le ciel : le funambule Didier Basquette glisse sur un câble, à 20 mètres de haut. Le concert s’achève sur une longue version de « Pars » avec présentation de tous les protagonistes, dont la chorale des « bagnolais bagnolaise… ». Non, Jacques, les habitants de Bagneux sont les balnéolais !  2h30 de spectacle musical et visuel, pour un type qui prétendait ne pas avoir de voix, ce n’est pas mal ! Un Jacques Higelin fidèle à sa réputation, généreux, engagé, lunaire, drôle, qui a illuminé de son talent et de son humour notre fin de week end.
Les photos qui illustrent cet article sont de Jean-Michel Rocknblues, vous pouvez voir son reportage photo complet sur cette belle aprés midi de fête sur son site, ici: rocknbluesnbike/ Higelin à Bagneux Merci à lui. Et la vidéo, trouvée sur youtube, est de Michelleblues1 (décidément, "Blues" est un patronyme répandu vers Bagneux !). Merci à elle !



Si vous aimez Jacques Higelin, connaissez-vous le groupe ANGE, avec  l'album "Vu d'un chien"
et l'album "Moteur" précédemment chroniqués dans le Déblocnot ?

THE ROLLING STONES - "Out Of Our Heads" - (1965) par Luc B.


OUT OF OUR HEADS est le … euh, quatrième, ou cinquième, ou troisième album des Rolling Stones… On s’y perd. C’est que ma bonne dame, en ce temps là, le format 33 tours n’était pas un support très prisé. On ne jurait que par les singles, les 45 tours, un hit tous les deux mois, et quand on avait suffisamment de chansons, on les mettait bout à bout sur une grande galette. Sauf que les chansons ne marchaient pas de la même façon en Angleterre, en France, ou aux USA. Donc il y avait des 33 tours différents qui étaient pressés. Il faudra attendre Bob Dylan, puis les BeatlesSergent Pepper ») pour que le format LP soit considéré comme une entité à part entière, pensée, construite. Avec les albums des Stones, il faut jongler entre les éditions, voire des disques exclusivement sortis dans tel ou tel pays. Raison pour laquelle la production d’un 33 tours n’était pas homogène, les titres pouvant avoir été enregistrés dans différents studios, à différentes époques, comme le confirme le son de ce OUT OF OUR HEADS.

Ce disque là est sorti aux USA (puisque nous parlons de cette version) en septembre 1965. Après un « Mercy Mercy » groovy impeccable, et un « Hitch Hike » assez gentillet, on arrive sur le gros tube « The last time », et composition du duo Jagger-Richards, qui bossait depuis des mois pour pondre des chansons, sans oser les faire écouter au reste du groupe. Sauf celle-ci, qu’ils jugèrent apte à passer l’examen. Elle a été enregistré en janvier 1965, seuls les auteurs étaient présents en studio, et c’est Phil Spector (arrangeur, producteur) qui tient la basse, et Jack Nitzsche (producteur) les claviers. Une ballade qui a cartonné, suivie de la magnifique « That’s how strong my love is » (et un son beaucoup plus clair) superbe complainte soul écrite par Overton Vertis Wrigh, et chanté auparavant par Otis Redding. Mick Jagger y fait des merveilles. D’ailleurs ce qui frappe dans cet album, c’est la maturité du chant de Jagger. Et dire qu'il chante encore comme ça 45 ans après, ça laisse pantois sur les dons de ce garçon ! Il s’excite bien sur « I’m alright » qui est un prise live, une espèce de transe soul, Jagger s’époumone pour nous dire qu’il se sent bien, et les filles du public hurlent comme des dingues ! Je pense que le seul intérêt de cette chanson est justement un message lancée aux filles, genre, z’avez vu l’ambiance, venez encore plus nombreuses, et passez nous voir dans les coulisses à la fin du show…

Titre n°7 : la terre tremble. C’est quoi ce truc ? Ce ras de marée ? C’est « Satisfaction » qui déboule, et dénote complètement par son énergie, sa violence, son tempo. Il essaie, il essaie d’être satisfait, il n’en peut plus d’essayer mais y’a rien à faire ! Vous imaginez les gamins qui en 65 écoutent un truc pareil ? C’est comme le « My génération » des Who. Pile poil taillé sur mesure pour une jeunesse qui commence à ruer, à se demander si on ne serait pas en train de se foutre de leur gueule. Dans son livre de souvenir, Keith Richards raconte que cette chanson lui est venue une nuit. Il se lève un matin, vérifie son petit magnéto à cassette sur la table de nuit, voit que la cassette est pleine, il réécoute, et voilà. « Satisfaction » a d’abord été enregistré acoustique, chez Chess Records à Chicago, puis électrique à Los Angeles, avec cette fameuse pédale fuzz branchée sur la guitare de Keith Richards, parce qu’il souhaitait retrouver dans le son, l’effet d’une section de cuivres de chez Stax. Ce ne sont pas les chiffres des ventes qui ont convaincu les Stones que ce titre était une grande chanson, mais les reprises enregistrées par Otis Redding, Aretha Franklin, Manfred Mann... 

A partir de là, les titres s’enchainent, tous impeccables, « Cry to me », une ballade encore, un harmonica virevoltant sur le bluesy « The under assistant », puis ce petit chef d’œuvre de « Play with fire » (Phil Spector à la basse, Nitszche au clavecin), repris par les Pretty Things, et même Little Bob. Créditée à un certain Nanker Phelge, il s’agit bien d’une composition des Stones, planqués sous ce pseudo. Et que dire du génial « The spider and the fly », un blues langoureux, le chant fatigué de Jagger, sa diction (tout cela me fait penser à "The spy" ou "Carhiss by the window" des Doors)  puis le rapide « One more try » et son riff très Chicago blues au début, alors que le chant s’approche davantage de la pop. C’est ce qui frappe à l’écoute de cet album. On y retrouve la patte "Beatles", la référence ultime de ces années là en matière de hit-pop, tout en ayant une inspiration très soul, de Stax, ou Chigago blues, et puis ce titre Rock, Stones pur-jus, « Satisfaction » que le groupe a mis un moment à jouer sur scène, ne voyant le potentiel de cette chanson à priori jugée ordinaire… Tout le monde peut se tromper ! Pas mal de chanson enregistrées à cette époque, se retrouveront l'année suivante sur l'album AFTERMATH, le première chef d’œuvre du groupe. 

OUT OF OUR HEADS n'est pas qu'un simple petit album de jeunesse. C'est un grand disque, tout simplement !

L’édition anglaise n’a que six titres en commun avec l’américaine, « Satisfaction » n’y est pas, mais on y trouve « I’m free ».

Mercy, Mercy (Don Covay/Ronnie Miller) – 2:45
Hitch Hike (Marvin Gaye/William Stevenson/Clarence Paul) – 2:25
The Last Time (Mick Jagger/Keith Richards) – 3:41
That's How Strong My Love Is (Roosevelt Jamison) – 2:25
Good Times (Sam Cooke) – 1:58
I'm Alright (Ellas McDaniel) – 2:23
I Can't Get No Satisfaction (Mick Jagger/Keith Richards) – 3:43
Cry to Me (Bert Russell) – 3:09
The Under Assistant West Coast Promotion Man (Nanker Phelge) – 3:07
Play with Fire (Nanker Phelge) – 2:14
The Spider and the Fly (Mick Jagger/Keith Richards) – 3:38
One More Try (Mick Jagger/Keith Richards) – 1:58





Hein ? C'est quoi ce scandale ? On n'a pas droit à "Satisfaction" ???
Ben non, justement, autant vous en faire découvrir d'autres, et ce p'tit blues "The Spider and the fly" absolument craquant. (un peu long à charger ? écoutez le second titre en attendant !)



"Mercy mercy" en live, avec les filles qui ont l'air d'apprécier (pas la musique, elles s'en foutent, mais le minois du chanteur...) ATTENTION : à 1'50 Charlie Watts sourit ! ! !



Si vous souhaitez davantage d'éléments biographiques sur les Rolling Stones, reportez-vous sur notre chronique consacrée à la bio de Keith Richards

mercredi 28 septembre 2011

WAYSTED - "The Good, The Bad The Waysted" - (1985) par Bruno


     Pete Way est un des fondateurs du groupe U.F.O. Ce groupe anglais fleuron d'un Heavy-rock mélodique qui permet au jeune Michael Schenker (après l'avoir débauché d'un Scorpions qui peinait alors à décoller) de s'affirmer en qualité de guitar-hero. Ce groupe va influencer tout une génération d'apprentis rockers. Compositeur, arrangeur, doué d'une présence scénique incontournable, et d'un don pour allier riff en béton et trame lyrique, Pete est une pierre angulaire de l'édifice.
Malheureusement, il plonge dans les excès propres à la vie de musicien perpétuellement sur la route.


   Suite aux dissensions croissantes, souvent musclées, avec le chanteur Phil Mogg, Way claque la porte d'UFO en 1982. C'est alors qu'une rencontre avec Fast Eddie Clarke, également en rupture de son groupe (Motörhead), se concrétise autour d'un projet commun : FASTWAY. Seulement Way, les neurones fatigués par l'alcool et/ou par cupidité, s'éclipse sans prévenir pour rejoindre Ozzy Osbourne en tournée, en intérimaire. 


      A la fin de son C.D.D., il repart à zéro et reforme un groupe autour d'un chanteur écossais, Ian Muir, surnommé Fin. Véritable révélation, bien loin des hurleurs ou des sirènes en vogue à cette époque, Fin est de l'école des Peter French (Atomic Rooster, Cactus, LeafHound, Randy Pie), Dan MacCafferty (Nazareth), Rod Stewart, Jim Dandy (Black Oak Arkansas), Jimmy Barnes & Noddy Holder (Slade), dans le style « je m'explose les cordes vocales sans économies , au point de les rendre abrasives. Je m'engage à fond, mais toujours avec justesse et sensibilité». Notez que dans les chanteurs mentionnés, il y a trois écossais, comme Fin justement. Serait-ce le whisky du pays qui façonnerait ainsi des cordes vocales aussi éraillées ? Steve Harris, Joe Elliott et Ozzy n'ont pas tari d'éloges à son encontre.
 
Formation / Vices

   Ce combo est complété avec le batteur Frank Noon (Def Leppard, Lionheart, Bernie Tormé, Di Anno), et d'une jeune recrue au poste de guitariste lead, Ron. E. Kayfield, ainsi que de l'expérimenté Paul Raymond (Chicken Shack, Savoy-Brown, UFO, MSG) aux claviers et guitares. Grâce à la signature sur une major, le premier album, « Vices » sort en profitant d'une belle promotion (à l'époque, tout ce qui tournait autour du Hard-Rock avait le vent en poupe). La reprise de Jefferson Airplane, « Somebody to Love », et surtout « Love Loaded » (bénéficiant d'un clip vidéo largement diffusé) font une très belle percé et par la même occasion de l'ombre à l'UFO déserté. Pourtant l'album cumule plusieurs défauts.    La production est pauvre, entre une démo et un (bon) bootleg avec une batterie placée trop en avant. Kayfield balance des plans de tapping merdeux et massacre ses notes au vibrato en guise de solo. Et les compositions auraient mérité d'être un peu plus travaillées, certaines manquant cruellement de consistance. Seul Love Loaded a réellement de beaux atouts, et indéniablement les ventes fort honorables de l'album ont bénéficié de la fréquence des passages télévisés du clip de ce titre. Pourtant on sent que le groupe a largement les capacités de bien mieux faire.

     D'un succès trop rapide et des démons persistants de Way (ceux qui se cachent dans les fonds de bouteille) naissent rapidement des dissensions. Le groupe éclate et Chrysalis, lassé par les problèmes internes du groupe le met à la porte. A la rue, WAYSTED éclate.

     Pas désespérés, Pete et Fin recollent les morceaux, et recrutent encore un dissident d'U.F.O., Paul « Tonka » Chapman (qui remplaça Gary Moore après son départ de Skid Row, et sauva du crash UFO après la défection de Schenker) récupéré du vaisseau en perdition de Phil Moog.    La formation est désormais réduite à un quartet, Raymond n'étant ni rappelé ni remplacé.

   L'engagement de
Paul Chapman est une aubaine. Voilà un guitariste qui n'est pas aveuglé par son ego. Son jeu est avant tout au service de la chanson (ce qui n'est malheureusement pas toujours une règle dans ce milieu obnubilé par le star-system), sachant allier puissance et mélodie avec une retenue naturelle, presque nonchalante. Il n'a pas besoin de mettre les potards de l'ampli sur onze, ou de brancher en parallèle une disto, une overdrive et une Metal-Zone pour sonner Hard ou Loud. Nul besoin non plus de descentes masturbatoires du manche, d'acharnement névrosé sur le vibrato ou d'appogiatures maladroites, (trop courant à cette époque), pour jouer un solo de guitare.

     WAYSTED signe sur un jeune label indépendant, Music For Nations. Une maison anglaise spécialisée dans le gros Hard qui tâche et le Metal. Comme d'autres labels indépendants tels que Neat et Zebra, elle donna la possibilité à de nombreux groupes d'être enregistrés et distribués. Ainsi, Metallica, Tank, Legs Diamond, Loudness, Manowar, Anthrax, Battle Axe, Q5, Savatage, The Rods, Rogue Male, WASP, Tyketto, Exodus, Megadeth, Paradise Lost, etc..., firent parti de cette écurie.

   Un Ep éponyme sort rapidement avant que les braises de « Vices » ne soient totalement refroidies. Une sorte de hors-d'oeuvre présentant la nouvelle direction. Pas un virage à 360°, mais plutôt la confirmation d'un choix ; celui de suivre la voix ouverte par Love Loaded. Soit celle d'un Heavy-rock carré et pêchu, prolétaire, incitant à la fête et la bière. Désormais, WAYSTED met de côté le mascara et les paillettes. Cet Ep, produit par Leo Lyons (qui avait déjà produit UFO) est loin de faire l'unanimité parmi les critiques, pourtant, avec le recul, il paraît plus sincère que « Vices ».


     En 1985, « The Good, The Bad & The Waysted » met tout le monde d'accord.
Le titre évidemment, est un clin d'œil à « The Good, The Bad and the Ugly » de Sergio Leone. Ici, en l'occurrence, les rôles se répartissent respectivement entre Chapman, Fin et Way. Une prise de conscience pour ce dernier qui, à 34 ans, doit se demander si effectivement, alors qu'il a frôlé les étoiles, il n'a pas maintes fois tout gâché avec son irrésistiblement penchant pour les soirées - et plus - arrosées.
   N'ayant pas de batteur attitré au moment de l'enregistrement, Way se retrouve obligé d'appeler à la rescousse l'ex d'Humble Pie, Jerry Shirley. Ce dernier, toujours avec Fastway, ne garde apparemment pas rancune au bassiste. Il les accompagnera même en tournée, bien qu'il ne fasse pas partie officiellement du groupe. Auparavant, il y avait Andy Parker (oui le batteur d'UFO - Pete aime bien débaucher chez son précédent groupe), mais fatigué, il préfère prendre quelques années sabbathiques pour se reposer. 
 

   Le ramponeau du riff et les coups de boutoir de Shirley annonce d'entrée le nouveau WAYSTED qui fonde sa musique principalement sur la puissance de frappe d'un Hard Blues rugueux et la vivacité d'un Heavy-Rock'n'roll fier et sûr de lui. Une entrée en matière qui laisse présager un Heavy-Rock classique, non dénué d'intérêts mais un peu pataud. Avec le second plat on franchit un palier avec une trame mélodique dépouillée et limpide (telles que déjà développée dans U.F.O).
   Le côté mélodique est prégnant sur le troisième ; cette bande de flibustiers sait aussi faire preuve de sensibilité avec « Heaven Tonight". Une des plus belles chansons de Heavy-rock mélodique jamais composées. Elle est d'ailleurs réenregistrée sur l'album suivant, et, grâce à son clip vidéo, devient rapidement un hit.
   Sur la seconde face, retour en force d'un Heavy-rock radical avec le fanfaron "Dead on Your Legs", l'entêtant "Rolling out the Dice" et le menaçant et sombre "Crazy 'bout the Stuff". « Rock is a passion, Heavy decibels are playing on my guitar. We got vibrations coming up from the floor».
   Final sur une reprise endiablée de "Around And Around" de Chuck Berry ; histoire de rappeler et de rendre hommage aux racines.

     Un Heavy-rock viril, pur et dur, direct sans fioritures, sans fards ni paillettes ou autres subterfuges. Justes quelques lignes piano placées parcimonieusement et à bon escient. Des compositions relativement simples mais efficaces. Le son est brut, sec, rêche (un peu dans le style des deux premiers Aerosmith), et foncièrement « live ». Une prépondérance pour l'efficacité : solos courts et concis, et rythmiques en béton. A l'image de la pochette, il y a autant un côté sombre, voire mélancolique, qu'un côté canaille/voyou.

     Avec Chapman et surtout Way, on retrouve inévitablement une empreinte d'UFO. Cependant la voix rocailleuse de Fin, la gratte râpeuse de Chapman (BC Rich Bich ou Gibson LesPaul) ont érodé le lustre de l'Objet Volant pour mieux laisser transparaître le caractère purement Rock. A l'instar de Fastway, WAYSTED se démarque complètement de la NWOBHM en renouant avec un passé glorieux tout en préfigurant d'une certaine façon un Heavy-rock US musclé et mélodique et ce que l'on nommera le Sleaze-rock.
de G à D : Chapman, Fin et Way 

     Malheureusement, malgré l'indéniable qualité de ce disque, cela ne démarre pas. Music For Nations est en plein développement mais n'a pas encore la structure qu'il acquerra quelques années plus tard, et cet album bien que très largement supérieur au premier, n'a pas d'appuis médiatiques. C'est la débandade, après une valse de musiciens (qui comprend le passage de Phil "Animal" Taylor) le groupe split à nouveau.



     Grâce au support de quelques aficionados - dont Steve Harris d'Iron Maiden - Pete Way, une fois de plus, reforme le groupe. Cette fois-ci, seul Paul Chapman est rappelé. Deux américains sont embauchés : John Dittedoro (Britny Fox, Doro, Mariah) à la batterie et Danny Vaughn au chant (Tyketto et Vaughn). 

Le groupe signe avec EMI (merci Harris) et sort « Save Your Prayer »en 1986. Cet important label permet une belle promotion dans la presse et surtout la réalisation d'un clip qui tourne en boucle sur MTV. Un investissement payant car le disque octroie un petit succès outre-atlantique, notamment donc grâce au hit « Heaven Tonight ».

   Toutefois, si cet album a d'indéniable qualité, WAYSTED a désormais gommé son côté canaille, mauvais garçon au profit d'un Heavy-rock policé proche d'un Rock US FM. WAYSTED a troqué sa tenue de mauvais garçon romantique pour se fondre dans un Heavy-rock FM sans grande personnalité.

   Il faudra attendre la reformation de 2003, avec le retour de Fin Muir, pour retrouver ce qui avait fait le charme de cet Heavy-Rock racé aux allures de margoulin.

  1. Hang 'Em High - 5:23
  2. Hi Ho My Baby - 3:33
  3. Heaven Tonight - 4:33
  4. Manuel - 5:18
  5. Dead On Your Legs - 4:42
  6. Rolling Out the Dice - 3:39
  7. Land That's Lost the Love - 4:40
  8. Crazy 'bout the Stuff - 5:27
  9. Around and Around - 3:13




"Rolling Out The Dice" suivit de "Heaven Tonight"



mardi 27 septembre 2011

"ABLAYE NDIAYE THIOSSANE" (2011) par Rockin-jl


Dans ce monde musical pourri et parasité de poufs siliconées et de minets formatés (ou l’inverse) il arrive parfois de petits miracles, sous la forme d’authentiques artistes à qui après toute une vie consacrée à la musique on propose enfin de graver leur art pour l’éternité ( ou presque) sous forme d’un disque . Dans ce genre de découvertes tardives viennent à l’esprit des gens comme les artistes du Buena Vista Social Club, sortis de Cuba par le doc de Wim Wenders ou des bluesmen comme Charles Caldwell ou Tomcat Courtney, et bien sur Ablaye Ndiaye Thiossane, objet de ce papier.
C’est donc à l’age respectable de 75 ans –il est né en 1936- que le « vieux sage » sénégalais Thiossane sort son premier album ; pour autant il ne s’agit ni d’un débutant ni d’un inconnu, du moins sur le continent africain.
Issu d’une famille de griots, il chante dès 1952 sous l’influence des disques familiaux, afro- cubain, jazz , Harry Belafonte ou…Tino Rossi (et 60 ans plus tard le petit Papa Noël arrive enfin pour l’enregistrer..) . Parallèlement il fait l’ENA, pas celle de nos chers cols blancs qui nous mènent à la ruine, mais l’Ecole Nationale des Arts et se distingue aussi par ses peintures et participe à de nombreuses expositions renommées, il sera aussi peintre-cartonnier à la manufacture de tapis de Thiès; un artiste complet donc.
une de ses toiles

Il aura son heure de gloire en 1966, en chantant l’hymne du Festival Mondial des Arts Nègres de Dakar ,initié par le président /poète Léopold Sédar Senghor, « Talene Lempe Yi » qui aura un gros succès.
Thiossane continuera son bonhomme de chemin, se partageant entre peinture et musique, avec son orchestre le Thiossane Club ou l’Orchestre National du Sénégal, jusqu’à ce que le producteur Ibrahima Sylla le pousse vers les studios en 2010.
Il en sortira avec cet album sous le bras, heureux avec cet enfant qu’il n’attendait plus. Et franchement ça valait le coup d’attendre car c’est un réel bonheur, une bouffée de fraîcheur et de jeunesse ; hé oui comme le chantait un autre griot, Brassens, le temps ne fait rien à l’affaire, on a bien des jeunes qui chantent des trucs pour maison de retraite (hein Gregoire ?..)


Ce disque, avec François Bréant aux manettes et des invités prestigieux comme la chanteuse Khar Mbaye Madiga, Bella Sidibé, Medoune Diallo, Souleymane Faye, Doudou Seck ou Assane Mboup (chanteur de l’orchestre Baobab) commence par le formidable Aminata Ndiaye, une chanson sur un amour difficile qu'il composa en 1963 et qu'a déjà interprété  Youssou N’dour, titre au potentiel tubesque digne de Chan Chan(Compay Segundo) ou Silencio (Ibrahim Ferrer). Et ce n’est pas par hasard que je cite les 2 papis cubains car la musique de Thiossane est imprégnée de rythmes afros/cubains, et possède la même chaleur immédiate et la même faculté de nous faire voyager, la même universalité aussi. Sax jazzy, guitare légère, rythme chaloupé, accordéon discret, accompagnent le chant du griot, patiné par les ans, qui parle dans ses chansons des traditions séculaires, de l’histoire de son pays et de son peuple, de ses ancêtres, de contes et de légendes, par exemple dans « Siket » et l’histoire de son pays et de son peuple comme dans "Lat Dior", l’histoire de ce roi de Cayor qui s’opposa aux colonisateurs  français. Thiossane y reprend également son titre "Talene Lampe Yi" déjà évoqué . "Arawane Ndiaye" est également irrésistible, complainte africaine, matinée de calypso.

Un très bel album, coloré, lumineux comme un coucher de soleil sur les dunes, et un voyage en Afrique et à Cuba pour pas cher avec pour guide un authentique conteur, que demande le peuple !? Cet album sort la semaine prochaine (le 3.10) sur le label Discograph ( discograph.com) , et Thiossane sera en tournée en France bientôt (dont le 3.11 au New Morning) ; à ne pas manquer !

9 titres 49mn





"Aminata Ndiaye" en version acoustique , sax, guitare , voix: 

lundi 26 septembre 2011

RED HOT CHILI PEPPERS - " I'm With You " (2011) - par Philou


Les Red Hot Chili Pépères ???

Soyons bien clair d'entrée de jeu : aucun album ne se hissera jamais au niveau de "Blood Sugar Sex Magik" paru le 23 septembre 1991.... il y a vingt ans déjà. Cet album est, et restera à jamais le chef d’œuvre du groupe de L.A. Ce disque sera le premier produit par Rick Rubin (Run-D.M.C, LL Cool J, Slayer, Beastie Boys, Public Enemy...etc...) et sera acclamé dès sa sortie par le public et les critiques de tous poils, un album intemporel, que le chanteur Antony Kiedis a lui-même qualifié d’ "œuvre sincère, belle et forte". 
La tournée qui suivra sera un véritable triomphe, mais sonnera la fin d’une époque. En 1992, les RED HOT CHILI PEPPERS assisteront au départ de leur guitariste, le génial John Frusciante, qui s'adonnera à son passe temps favori, la défonce à l’héroïne et au crack pendant plusieurs années.  Après avoir touché le fond, il revient par miracle à la vie et retrouve les RHCP en 1999, pour l’album du renouveau, le très bon "Californication".

 Dans les années 2000, les  RED HOT CHILI PEPPERS ont choisi de carburer en mode U2 : du rock de stadium, calibré grand public, avec un album tous les trois ans et une tournée mondiale pour remplir les caisses. En décembre 2009, John Frusciante lassé de tout ce cirque Rock'n' Roll, quitte le groupe, ne voulant pas sacrifier ses envies créatrices et sa carrière solo contre un compte en Suisse. Comme il le déclare lui même, il n'avait pas le choix. "Je n'ai jamais fait de l'art avec un sentiment de devoir. C'est quelque chose que je fais parce que c'est marrant, excitant et intéressant".

John Frusciante est parti, mais les piliers fondateurs des RHCP restent : Flea et Anthony Kiedis, les deux amis d'enfance, qui gardent l’esprit RED HOT CHILI PEPPERS....enfin qui essayent !!!

Flea & Antony Kiedis
Le  nouveau guitariste des RHCP n'est autre que Josh Klinghoffer, connu pour ses collaborations aux albums solo de Frusciante et pour sa participation en temps que 2ème guitariste sur le "Stadium Arcadium Tour".
A propos de Josh Klinghoffer, Flea explique que ce n'est pas un guitariste qui vous en met plein la vue (ou plutôt plein les oreilles !), mais un musicien très subtil  : "Ce n'est pas le genre à gros riffs, plutôt quelqu'un à jouer sur les textures, il apporte à ce nouvel album un feeling différent, un genre de feeling poétique et liquide".
Un grand nombre de fans (dont moi) regrettent cruellement l'absence de John Frusciante dont l'exceptionnelle virtuosité a joué un rôle crucial pendant la période faste des RED HOT CHILI PEPPERS. Avec Josh Klinghoffer, la  présence de la guitare sur ce nouvel album est  beaucoup plus discrète et reste en retrait derrière la basse de Flea et la batterie de Chad Smith. Par ailleurs, Flea s'est inscrit à l'université pour suivre des cours en musicologie, délaissant sa basse, il s'est mis à composer au piano pour la première fois ...aïe, aïe, aïe !!!

De plus, l’évolution capillaire d’Anthony Kiedis est la preuve irréfutable que les RED HOT CHILI PEPPERS ont délaissé petit à petit la fusion hard/funk/rap du début, pour se rapprocher au fil des albums, d'un univers pop/rock beaucoup plus édulcoré.

La production est une nouvelle fois confiée à Rick Rubin pour ce 10ème album des californiens qui est officiellement sorti il y a tout juste un mois, le 30 aout dernier. Quatorze titres au menu, pas de remplissage comme sur l’ambitieux et raté "Stadium Arcadium" que j'ai du écouter 2 fois en cinq ans, mais une déception à la 1ère écoute : l'ensemble est varié mais parait bien mou. Où est passée la fougue et l'énergie qui caractérisait jusque là le groupe ???
En insistant, au bout de 5 ou 6 écoutes, on arrive à apprécier petit à petit les chansons. 
L'album débute avec "Monarchy of Roses", dynamique et accrocheur, ce titre décolle bien, mais la voix d'Anthony Kiedis semble écrasée par tous les instruments, la mélodie est pourtant parfaite, mais je reste quand même sur ma faim. Ensuite, la basse profonde et groovante de Flea annonce "Factory Of Faith" et donne le rythme nerveux de la chanson. La guitare reste au second plan, mais je suis rassuré : ça c'est du tout bon RHCP !! Déjà une ballade et on est qu'au 3ème morceau... "Brendan’s Death Song" est un hommage  à leur vieux pote Brendan Mullen, décédé le premier jour d'enregistrement du nouvel album. C'est émouvant mais pas renversant, en plus ça traine en longueur sur la fin. C'est encore la basse omniprésente de Flea qui anime le morceau suivant, "Ethiopia" inspiré par un voyage en Éthiopie avec Josh Klinghoffer. Les fans purs et durs devraient arriver à se consoler en écoutant les slaps de Flea. Le pur style Red Hot semble revenir sur "Annie Wants a Baby", malheureusement, le morceau ne décolle pas vraiment et hésite entre ballade ennuyeuse et compo recherchée. Avec "Look Around" , on se dit que les RHCP retrouvent la pêche sur ce titre aux accents rap/funk ...mais lorsque Anthony Kiedis nous refait le coup de "Skin that flick She's such a little DJ..." qu'il nous balançait dans "By The Way", on est un peu surpris, mais ça fonctionne à merveille !!!

Le titre suivant "The Adventures Of Raindance Maggie", a été choisi comme single de l'album et on le comprend bien en écoutant ce morceau pêchu et mélodieux avec un petit parfum à la Beatles. Cette chanson marque un tournant dans l'écoute de l'album, en effet, à partir de là, le groupe va nous proposer une bonne série de titres avec le jazzy/latino "Did I Let Know ", le très puissant et énergique "Goodbye Hooray", qui nous rappelle la grande époque de "Californication", mention spéciale également à "Happiness Love Company " bien que très pop, ce titre est particulièrement convaincant. Petite baisse de régime sur "Police Station", une ballade pop mièvre un peu "Old School" . Heureusement que "Even You Brutus" arrive à temps pour rattraper le coup. Le piano et la basse s’associent parfaitement sur cette chanson extrêmement rythmée, qui ressemble un peu à un mix Eminem/ Maroon 5 boosté aux amphétamines. Retour au calme avec l'avant dernier titre "Meet Me On The Corner", une ballade un peu poussive, qui, malgré de lointains relents jazzy, n'arrive pas à vraiment captiver mon attention. L'album se termine joyeusement avec le très festif "Dance, Dance, Dance", cette chanson devrait faire bondir de joie les spectateurs de leurs deux futurs concerts (complets) au Palais Omnisports de Paris Bercy, les 18 et 19 octobre prochains.


Chad, Flea, Anthony & Josh

Fidèles à leurs habitudes (depuis une bonne dizaine d'années), les RED HOT CHILI PEPPERS appliquent (presque) les mêmes recettes et nous proposent un album sans grandes surprises, mais bien foutu. Son contenu devrait surtout ravir les fans qui les ont découverts à partir de l'album "Californication".
Les fans de la première heure crieront sans doute à la trahison. Ce ne sera pas la première fois … ni la dernière.

PS : Force est de constater que l'énergie qui ne transparait pas sur disque est bien présente en live et toute façon sur scène les RED HOT restent les RED HOT !!!! La preuve ci-dessous.










"Look Around" Live en Allemagne à Cologne


"Factory Of Faith" Live en Allemagne à Cologne

dimanche 25 septembre 2011

UNE BREVE HISTOIRE DU ROCK "PROGRESSIF" , par Christian Selmogue

 "in the court of the Crimson King"

Officiellement le rock progressif est né avec la sortie du 1er album du groupe King Crimson: "In the court of the Crimson King" en 1969. Ce rock d'un nouveau genre descend en droite ligne du rock psychédélique anglais dont les plus beaux fleurons se nomment: Pink Floyd, Tomorow, Gong ou encore Soft Machine.



A l'origine du prog des musiciens voulaient sortir du format "pop-rock" et de la chanson de 2.30mn en introduisant dans leur musiques des sons et des ambiances venant de divers horizons. Musique Indienne, Africaine, Jazz, Classique, Folk ont ainsi fait leur apparitions dans les compostions de ces musiciens.
"Sergent Pepper"


Ce sont les Beatles et l'album "Sergent Peppers Lonely Hearts Club Band" (1967) qui ont allumé la 1ere mèche. Ce disque contient tous les ingrédients du rock progressif à venir. A la même époque les américains "The Beach Boys" et la chanson "Good Vibrations" entrent dans le registre progressif. Parmi les groupes proto-prog ont peu citer: Procol Harum avec "A Wither Shade of Pale", the Moody Blues avec "Night in White Satin", Pink Floyd avec "Astronomy Domine", sans oublier le plus célèbre des groupes inconnus: "Bachdenkel". Mais, comme noté plus haut, c'est l'album de King Crimson "In the court….." qui signe l'acte de naissance officiel du rock progressif. Ce terme est dû à un chroniqueur anglais qui ne savait pas comment définir la musique de King Crimson. Les définitions existantes n'étant pas satisfaisantes. Il est vrai que cet album de "Crimson" contient tous les ingrédients qui feront le succès du genre. 
Backdenkel - "lemmings"

Chansons aux développements musicaux sophistiqués, aux divers genres présents (hard rock, jazz, musique contemporaine, ballades folky, musique classique), longues plages instrumentales. Sans oublier un sens mélodique évident. Les musiciens sont hyper compétents. La plupart ont suivi des cours de solfège, savent lire et écrire la musique. De plus l'apparition du prog coïncide avec la création de nouvelles technologies: Stéréophonie, magnétophones multipistes, sonorisation, amplification performante. Et bientôt on allait voir apparaitre un nouvel instrument qui allait bouleverser la musique moderne: Le synthétiseur, instrument électronique dont Rick Wakeman, futur Yes, est pionnier. 

Camel -"Mirage"


A partir de là les choses vont aller très vite. Des dizaines de groupes vont naitre à cette musique aux horizons autrement plus lointains que ceux de la pop traditionnelle. Les plus célèbres seront, en Angleterre: Yes, Emerson Lake and Palmer ( ELP), Genesis , Soft Machine (jusqu'à "Third"), Camel, Caravan, Gong, King Crimson, Van Der Graaf Generator, Gentle Giant, Jethro Tull. 



L'Europe entière succombe sous le charme, surtout :
Ange -"au dela du délire"


En France avec: Ange, Pulsar, Atoll, Mona Lisa, Carpe Diem, Sandrose, Martin Circus, (Acte II) Wapassou, Catharsis, Tai Phong, Clearlight, Terpandre, Nyl. Magma n'entre pas dans la catégorie prog, la bande à Vander ayant créé la sienne propre, appelée "Musique Zeuhl" et qui regroupe des formations telles que: Art Zoyd, Rialzu, Présent, Aqsak Maboul, COS, Univers Zéro, Zao, Eskaton.




En Allemagne avec Birth Control, Jane, Eloy,Guru Guru, Grobsshnit, Amon Düüll 2, Popol Vuh, Agitation Free; ainsi que Can, Faust, Neu. Sans oublier les pionniers de la vague planante: Tangerine Dream, Klaus Schulze, Conrad Schnitzler, Ash Ra Tempel, Kraftwerk.
Locanda Della Fate


En Italie, avec de merveilleux groupes tels que: PFM, Locanda della fate, Le Orme, Il Balletto di bronzo, Equipe 84, La formula tre, Area, Osanna et les chanteurs Fabrizio de Andre ou Mia Martini pour certains de leurs disques.

Bizarrement les USA ne produiront que peu groupes majeurs, le plus connu étant Kansas. Noublions cependant pas: Happy The Man, Dixie Dregs, Klaatu, Starcastle . Ce dernier étant un clone quasi parfait de Yes.


Ne pas oublier les Québécois Harmonium ("L'Heptade") ainsi que le duo Dionne/Brégent ("Et le 3eme jour"; Les Belges avec Machiavel;  Les Suédois avec Kaipa; Ainsi que
La Hollande avec Ekseption, Kayak, Focus, et  La Suisse avec Mainhorse Airlines (le groupe de Patrick Moraz, futur Yes).
YES "tales from topographic ocean"


L'Art work est aussi une composante fondamentale du rock progressif. Le dessinateur Roger Dean (Yes) et L'agence Hypgnosis (Pink floyd) en étant les plus fameux illustrateurs.


L'âge d'or du prog se situe entre 1969 et 1975 avec des albums majeurs et quelques chefs d'œuvre, tels que:


"Fragile"," Close to the Edge"," Tales From Topographic Ocean", "Relayer" de Yes

"FoxTrot"," Selling England by the Pound"," The Lamb Lies Down on Broadway", "A Trick of the Tail", de Genesis 

Genesis "Foxtrot"


"Tarkus", "Picture at an Exhibition", "Trilogy", "Brain Salad Surgery "de ELP

"Aqualung", "Thick as a Brick", "A Passion Play", de Jethro tull"

"Camembert Electrique", "You" de Gong

"Au-delà du Délire" d'Ange

"Halloween "de Pulsar

"In the Court of the Crimson King"," Red" de King Crimson

"666" de Aphrodite's Child

"I","II", "Third" de Soft Machine 

Gong "camembert electrique"

"In the Land of Grey and Pink" de Caravan

"Mirage", "Moonmadness","The Snow Goose' de Camel

"Atom Heart Mother", "Meddle", "Dark Side of the Moon" , de Pink Floyd

"Acte II" de Martin Circus

"Good bluf"," Pawn hearts" de Van der Graaf Generator.


D'autres formations non estampillées prog s'approchent parfois du genre, telles que: Queen, Rush, Uriah Heep, Blue Oyster Cult, Led Zeppelin,Todd Rundgren, Curved Air, Simple Minds, Kate Bush, Manfred Mann Earth Band, Barclay James Harvest , Supertramp, Family, Frank Zappa, Hawkwind, Journey, Toto, Renaissance, Styx, Illusion ou encore The Moves qui, plus tard, donnera naissance au lamentable Electric Light Orchestra

Curved Air "2nd album"

Sans oublier deux groupes courant officiellement dans la catégorie jazz rock: Return to Forever et Weather Report. Et ainsi que les Français Jean Michel Jarre , Christophe , René Joly, Gérard Manset et Barbara (L'Aigle Noir). Le folk est lui aussi influencé par le prog avec des artistes tels que: Alan Stivell, Malicorne, Magna carta ou Gryphon.


A partir de 1975, le prog s'essouffle. Les musiciens vont vers une inflation d'instruments, une surenchère sonore et musicale rendant la musique boursoufflée, prétentieuse, mégalomane. ELP en étant le principal prototype, ainsi que Rick Wakeman . Bref si de bons disques sortent toujours ( "Going for the one" de Yes, "Still life" de Van der Graaf Generator," Animals", "The Wall" de Pink Floyd, "Danger Money" de UK, "L'heptade "d'Harmonium, "Windows" de Tai Phong , "Leftoverture" et "Point of Know Return" de Kansas, "Songs from the Wood" et "Heavy Horses" de Jethro Tull ou encore "Et le 3eme Jour" de Dionne /Brégent) on sent que le prog a besoin d'une pause pour se renouveler. 
Harmonium "L'heptade"

Ce sera fait et de façon radicale avec l'explosion du mouvement punk. A la poubelle le prog. King Crimson, Yes, Ange, Van der Graaf, Gong, Soft Machine etc. finiront par se séparer avant de revenir pour certains d'entre d'eux. Bref, à la fin des années 70 tout le monde pense que le prog est définitivement mort. Que nenni. En 1983 Yes fait son grand retour et obtient un hit mondial avec la chanson "Owner of Lonely Heart", tirée de l'album"90125". A peu près au même moment Asia, un super groupe selon la norme, cartonne avec son 1er opus et le hit "Heat of the Moment". Certes on ne peut plus appeler cette musique "Rock Progressif" bien que tous les ingrédients du genre soient toujours présents. Les morceaux sont raccourcis, plus directs et plus pop pour un passage radio. Commerciaux quoi, ce qui n'a rien de péjoratif. Encore plus radical, le virage de Genesis lui fera perdre ses fans historiques. Là encore le succès commercial est au rendez-vous, de façon plus colossale et durable que Yes et Asia. 

Pendragon "Not of this world"

 A la même époque de jeunes groupes anglais relancent et rénovent le prog. Ils ont pour nom: Marilion, IQ, Pallas, Twelfth Night. Suivront Pendragon, Arena et dans le reste du monde: Saga, Spock's Beard, Glass Hammer, Anekdoten, The Flowers Kings, RPWL, Mostly Autumn, Arrakeen, Drama. Sans oublier une scène japonaise particulièrement dynamique avec: Ars Nova, Gerard, Bellaphon, Ce revival prend le nom de néo prog.


On ne donne pas cher de l'avenir de ces groupes et pourtant le public répond présent, bien que de manière moindre qu'au bon vieux temps. Ainsi le rock progressif continue son petit bonhomme de chemin et a même donné naissance à une nouvelle branche: "le Métal Prog" dont le chef de file, Dream Theater, connait un succès colossal et jamais démenti. A ses côtés on peut citer: Shadow Gallery, Magellan, Savatage, Fates Warning, Nightwish, Queensryche, Orenda, Van den Plaas. Simphony X, Lana Lane, Ayreon.
Magellan "Hundred year flood"


On peut dire que le prog , genre si décrié s'il en est a parfaitement réussi sa mue en intégrant ou étant intégré par différents genres musicaux représentés par des groupes tels que Porcupine Tree, Radiohead, Goldfrapp, Royskopp, Sigur Ros, Arcade Fire, Mars Volta, Opeth, Pain of Salvation, Muse, 30 Seconds to Mars qui connaissent un grand succès commercial.



Enfin trois groupes sont en train de totalement rénover le genre ce sont: Phideaux, Lazuli et Seven Reizh

Seven Reizh"Strinkadenn'Ys"



Bref même s'il n'est plus en tête de gondole le prog se porte bien a encore de bien belles choses à nous proposer et est actif dans le monde entier comme Israël avec Amaseffer, Cuba ou Anima Mundi , par exemple. De nombreux sites internet et livres lui sont consacrés. Preuves de sa santé éclatante.




PS - Comme il est évident que j'ai omis de citer quelques milliers d'albums et de groupes, que les oubliés et (surtout) leurs fans me pardonnent. Ce n'est absolument pas volontaire. Merci ..

King Crimson "In the court of the Crimson King"