- C'est la première fois que tu nous parles des quatuors de Brahms, le quatuor est un genre autant à la mode que la symphonie, il me semble. Tu en as parlé pour Haydn, Mozart, Schubert, Beethoven, Mendelssohn, Dvořák, pour les compositeurs archis connus, mais aussi Chostakovitch, Debussy et son pote Ravel, Dutilleux et même le pittoresque Georges Crumb… les quatuors de Brahms ont poireauté douze ans… Ils sont moyens voire pire…
- Pratique l'index Sonia… Hein… Je suis influencé par un évident dédain pour les trois quatuors de Brahms qui ne le méritent vraiment pas. Il faut dire qu'il en aurait écrit une quinzaine et détruit douze ! Il n'en a pas fait la promotion…
- J'écoute là… ils ne sont en rien hermétiques, mais poétiques et animés…
- Ben oui, mais c'est toujours la même histoire avec Brahms, il se
flagellait, musicalement parlant, s'autocritiquait sous un œil de Caïn
imaginaire nommé Beethoven…
Brahms en 1873 |
Ah sacrée Sonia… les lecteurs de la première heure se rappellent-ils
de son arrivée comme secrétaire intérimaire pendant l'été 2011 ?
Rockin' l'avait entraînée dans une chasse au trésor dans mon bureau
pour essayer de découvrir si, en cachette, je n'écoutais pas des bouses
musicales, au casque, évidemment très discrètement, pour que le délit
intellectuel ne s'ébruite pas et ne nuise pas à ma réputation de musicologue
averti 😊. Bingo avec la découverte du disque
La Danse des canards.
(Clic)
puis
(Clic)
et quelques autres artefacts débiles qui faillirent me coûter ma liberté
éditoriale. Douze ans après ces enfantillages, elle s'est passionnée pour
les chroniques de tous les rédacteurs et notamment ceux de musique
classique. Ainsi ma cervelle ravagée* par l'usure du temps trouve en cette
jeune femme une béquille mémorielle providentielle. (J'hésite entre comparer
cette phrase à du Proust ou au Charabia de Houellebecq.).
(*) Un état plus général allez-vous penser. Brahms ci-contre en est furax…
Sonia… énonce un postulat qui se vérifie depuis l'époque classique :
la symphonie et le quatuor à cordes sont devenus depuis plus de deux siècles
les genres musicaux les plus vénérés et craints par les compositeurs.
Présentent-ils des difficultés d'écriture plus ardues que les concertos,
trios, ou toute autre forme d'ouvrage ? Mes compétences sont trop limitées
pour répondre à cette question avec pertinence. Mais pour
Brahms, le problème semblait être une évidence…
En 1873, il est loin le temps où, vingt et un ans plus tôt, Brahms, jeune pianiste déjà talentueux et compositeur débutant, bourlinguait à pied dans les campagnes hambourgeoise avec son ami le violoniste virtuose Eduard Reményi, un hongrois réfugié depuis l'insurrection de 1848, qui va l'initier aux musiques folk et tziganes de sa patrie, thématique si présente plus tard dans l'œuvre de Brahms. ("L'Orient de Brahms" note le musicologue Jean-Michel Ferran.) Leur saga en binôme les conduit jusqu'à Hanovre où Reményi retrouve Joseph Joachim, autre violoniste austro-hongrois de génie. Joachim s'agace un peu du comportement exubérant de Reményi qui occupe tout l'espace, mais repère vite chez le plus réservé Brahms un grand talent en devenir. Joachim leur organise un concert en duo et, surtout, leur conseille d'aller rencontrer Franz Liszt à Weimar. Liszt, à la fois pianiste hors du commun et chantre du romantisme…
Eduard Reményi et Brahms |
Brahms
est désorienté en arrivant chez
Liszt
qui vit entouré d'une faune d'admirateurs et disciples plus ou moins
excentriques.
Liszt
appréciera les qualités du jeune pianiste et apprenti compositeur en
déchiffrant à vue son
scherzo opus 4, mais celui qu'il surnomme "le
romantique du nord" n'a pas précisément
d'appétence pour le romantisme et son sentimentalisme exacerbé.
Tous ces contacts dans le gotha musical allemand lui offrent cependant un
carnet d'adresse non négligeable et il se verra ainsi propulsé dans la
carrière de virtuose et de compositeur grâce à
Robert Schumann
qu'il rencontre en septembre 1853.
Schumann
est déjà dépressif, premier signe d'une maladie mentale dont il mourra trois
ans plus tard…
Brahms
lui a fait écouter la première des
trois sonates
portant les n° d'opus 1, 2 et 5.
(Clic). Schumann
est l'un des rares compositeurs qui a su succéder avec talent à
Beethoven
comme symphoniste avec
quatre opus
écrits entre 1841 et 1850
(Index). Il est aussi l'auteur de
trois quatuors
datant de 1842. Il engage
Brahms
a ne pas hésiter à travailler dans les deux genres. Il faudra attendre vingt
ans pour que
Johannes
arrive à surmonter un étrange complexe…
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De quel complexe parle-t-on ? Faisons un retour en 1827, année de la mort de Beethoven. Beethoven dont l'ultime leg est une série de cinq quatuors dont le N°14 opus 131 (en réalité le 15ème, un petit problème de numérotation) est totalement visionnaire… d'une magnificence qui stupéfie encore de nous jours. (Clic) Lors d'un concert avec cet opus 131 au programme, le génial et déjà très malade Schubert aurait dit "…Après cela que nous reste-t-il à écrire ?". Il apportera lui-même sa réponse avec le 15ème quatuor et le quintette de 1828. Mais la phrase fait école et la 9ème symphonie "Ode à la joie" de 1824 produit le même effet chez les nouvelles générations de compositeurs qui n'osent plus pour la plupart écrire dans les deux genres. Même si Mendelssohn et Schumann produisent dans ces genres des œuvres plus qu'honorables, force est de constater qu'elles ne concurrencent pas pleinement une perfection absolue que Ludwig van semble avoir inconsciemment imposée.
Le quatuor Hellmesberger en 1873 |
XXX |
Brahms, le perfectionniste, souffre de cette inhibition, répétant "Beethoven est un géant dont j'entends toujours les pas derrière
moi".
La musicologie nous apprend qu'il aurait écrit une petite vingtaine de
quatuors depuis deux décennies après 1853, tous détruits ou non
publiés, et travaillerait sans parvenir à ses fins à une symphonie depuis la
même date. Pourtant, avec 50 opus à son catalogue, on est subjugué par les
facilités inouïes avec lesquelles il a enrichi le patrimoine de la musique
de chambre : des
sonates
diverses, 4
trios
dont un avec
cor, 2
sextuors, un
quintette avec piano, les deux premiers
quatuors également avec piano. La présence du piano dans ces œuvres, sauf dans les deux
sextuors, lui permet-elle d'échapper aux affres de ne pas obtenir un bel équilibre
des timbres entre les quatre instruments à cordes d'un quatuor classique ;
il est un pianiste de premier plan, n'oublions pas ! Ajoutons : des
lieder à profusion, de la
musique chorale, des pièces pour piano…
Côté musique symphonique, la production est chiche : 2 élégantes
sérénades pour orchestre, de 1857/59 et le majestueux
Concerto N°1
pour
piano
de 1859, une œuvre de bravoure de 50 minutes qui pose question quant
au soi-disant rejet du romantisme au bénéfice d'une inspiration prétendument
néo-classique. Le concerto n'a rien à envier par son envergure à l'Empereur
de
Beethoven. J'ai souvent souhaité vous faire écouter l'un des
quatuors avec piano, des œuvres remarquables. Mais très curieusement, la maigre discographie
sur YouTube laisse supposer à tort d'un manque de maîtrise pour composer
dans ce genre peu fréquenté.
La composition du
Requiem allemand
créé triomphalement en 1869, après dix ans de gestation, a-t-elle
atténué la frilosité de
Brahms
à s'engager dans l'écriture d'une symphonie en vue de la publier ? La
question reste ouverte… Les certitudes demeurent floues sur la genèse de la
1ère symphonie
terminée en 1873 mais créée en 1876. Affirmer que
Brahms
a vaincu ses craintes après vingt ans de travail n'est pas une aberration…
Le
Requiem allemand
lui demanda au moins dix ans de rédaction. Dire que
Brahms
est l'archétype du créateur exigeant avec lui-même devient une lapalissade.
En 1876, le succès de la
1ère symphonie
sera bien au rendez-vous !
Pour les deux premiers quatuors, il est possible de raisonner de la même manière. Une douzaine de quatuor aurait été couchés sur le papier avant 1873. C'est attristant ce rejet systématique par leur auteur, il y avait surement des passages enthousiasmants. Brahms associait dans ses lieder un sens inné de la mélodie élégiaque et le souci d'apporter une dimension instrumentale quasi symphonique à la partie de piano, les talents requis pour aborder sereinement le travail sur les deux genres qu'il croyait lui résister.
Clara Schumann (vers 1878-1879)
Pastel de Franz von Lenbach |
Son futur ami Dvořák de huit ans son cadet sera moins pusillanime en publiant quatorze quatuors couvrant la période 1862-1895, un catalogue dont, très franchement, seuls les trois derniers sont des hits du genre. Les premiers sont trop longs (jusqu'à 1H10) et comporte des passages superflus de l'avis même de leur auteur, le matériel mélodique est souvent peu captivant. Dvořák essayera d'en simplifier quelques-uns. Les intégrales sont rares au disque…
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Le contexte de création des deux premiers reste donc mystérieux,
Brahms
recourt à un processus créatif par étapes, sur plusieurs projets en même
temps, à l'inverse de
Mozart
ou de
Haydn
qui pouvaient composer une symphonie ou un quatuor en une journée ou une
nuit ! Il est cocasse de retrouver réunis dans un même
Opus 51
les deux
premiers quatuors
stylistiquement fort différents. Les deux
quatuors
ont été dédicacés à Theodor Billroth, chirurgien, musicien amateur et
ami du compositeur.
Le
1er, en ut mineur, aurait été commencé en 1865 mais sera créé le 11
décembre 1873 à Vienne par le
quatuor Hellmesberger.
Le 2ème, en la mineur attendait son heure depuis 1869. La création aura lieu en privé devant Clara Schuman, le 3 décembre 1875 de nouveau à Vienne et par le quatuor Hellmesberger.
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Le
quatuor Hellmesberger
fondé en 1860 fut un atout majeur dans le succès des ouvrages de
Brahms. Historiquement, ce premier quatuor professionnel créa ou inscrivit à son
catalogue les ultimes quatuors de
Beethoven
ou de
Schubert
de la fin des années 1820 réputés alors injouables… Il perdurera
jusqu'en 1901.
Nous écoutons aujourd'hui l'interprétation de l'ère numérique par le Quatuor de Tokyo. Il est fondé en 1969 par quatre étudiants nippons venus se perfectionner à la Juilliard School. Ils resteront aux USA jusqu'à la dissolution du groupe en 2013. À partir de 1995, les artistes jouent tous sur des instruments ayant appartenu à Paganini et fabriqués par Stradivarius entre 1680 et 1726. Pendant plus de cinquante ans d'existence, il y aura de nombreux changements dans l'ensemble, et pas forcément par des musiciens du Pays du Soleil Levant. En 2001, pour ce disque, le britannique Clive Greensmith occupe le poste de violoncelliste. Kazuhide Isomura restera toute sa vie l'altiste en titre. Leur discographie dans le répertoire romantique et les six opus de Bartok est remarquable.
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Quatuor de Tokyo en 2001 |
X |
Quatuor à cordes op.51 n°1 en ut mineur (Partition)
1 – Allegro : Finies les formes
sonates simples et le petit adagio introductif de quinze mesures si prisé
des classiques…
Brahms
déborde d'imagination : le premier motif frappe les trois coups ;
frémissements aux cordes graves, ascension crescendo épique des violons dans
l'aigu, [00:11] une chevauchée interrompue par deux accords en tutti du
quatuor, syncopés et martelés f, l'alto seul assagit le propos… petit
motif intermédiaire de deux mesures répété une fois en parcourant sol
majeur, sol ♭ majeur, fa majeur, et f>p ! L'effet héroïque est
saisissant. [00:20] Le second motif, élégiaque car en fa mineur, déploie sa
cantilène. [00:43] On retrouve l'ut mineur et une nouvelle section se
développe de manière plus incisive, sans nuance et sauvage, avec
l'insistance agressive du violon solo. [01:01] Le second thème se veut plus
lyrique, recourt au mi ♭ mineur, joue la carte de la poésie et s'appuie sur
un solfège démoniaque, puis évolue vers une rythmique plus guillerette.
[01:54] Étrange conclusion du groupe thématique où s'oppose une mélodie
oscillante et nonchalante du violon solo et, de nouveau, cette cavalcade
presque sardonique affirmée et staccato qui s'insinue dans tout l'allegro…
[02:47] Brahms
a prévu une reprise in extenso de toute cette introduction, à l'ancienne,
mais le
quatuor de Tokyo
ne la fait pas, limitant ainsi l'allegro à huit minutes. Le développement se
nourrit des matériaux mélodiques exposés à profusion dans le groupe
thématique initial.
Je n'ajoute plus d'autres détails. Vous avez vu le genre pour 2 minutes 47 secondes😆… Ce début d'analyse illustre pourquoi, cherchant une telle acmé musicale, Brahms ne travaillait pas à la va vite sur un coin de table. Il y a peu de tutti et de nombreux jeux sur doubles cordes ; également un discours très concertant et quasi symphonique dans lequel la sonorité d'un quintette voire d'un sextuor n'est pas si éloignée. L'allegro poursuit sa route chevaleresque jusqu'à une coda aux accents extatiques ; mais la douceur vient néanmoins achever le mouvement. Les sauts incessants de tonalité fleurent bon le chromatisme et l'écriture schubertienne.
À noter pour les super pros qu'une analyse complète ressemble à ça : (Clic 😅 analyse savante et/ou écoute de la version du quartet Emerson disponible avec le timing et une partition déroulante sur YouTube). Bon courage !!! Ça change des sudokus…
Theodor Billroth (1829-1894) Pionnier de la chirurgie digestive moderne |
2 – Romanze, poco adagio : {Playlist 2} Tonalité dominante : la ♭majeur. Sommairement, le mouvement lent présente une symétrie de type ABA+coda. Ce mouvement optimiste s'organise dans un premier temps en lignes cantabile qui s'entrecroisent entre les quatre instrumentistes. [02:14] La seconde thématique en mineur plus ponctuée se perd dans un souffle plus anxieux qu'accentuent de sombres pizzicati du violoncelle. [03:47] Le chant mélodieux initial fait un retour plus idyllique, ponctué lui-aussi de quelques pizzicati.
3 – Allegretto molto moderato e comodo : {Playlist 3} Bien que non noté scherzo, l'allegretto en épouse la forme et dure plus longtemps que la Romance et même que l'allegro sans la reprise. Un tel déséquilibre de forme induit une légère monotonie, d'autant que le matériel thématique ne retrouve pas l'inventivité de l'allegro ou la magie de la Romanze. Une élégante chorégraphie caractérise le thème 1. [02:16] Le thème 2 prolonge ce climat dansant mais égayé de pizzicati. [03:03] Seul le thème 1 est repris avant le trio. [04:12] Plus amusant mais bien court, le trio recourt à une thématique plus vivante, quasi tzigane ; on songera aussi à un air de valse. Il comporte deux sections et son écriture est plus variée que la partie scherzo reprise da capo [05:31]. Une forme académique qui témoigne du néo classisme cher à Brahms.
4 - Allegro, alla breve : {Playlist 4} Le final, lui, ne dure que 6 minutes. Brahms est encore en cours de recherche formelle. La structure est fortement bousculée mêlant deux thèmes propres à cet allegro et des citations des mouvements précédents. Il est complexe mais plein de vie. Le premier thème est véhément. [00:41] Une transition aux accents pathétiques prépare l'entrée du second thème [01:02] plus mélodique. La brièveté du mouvement permet l'écriture d'une conclusion fantasque dans laquelle le compositeur se libère enfin des dogmes du passé.
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Brahms (assis) et Joachim en 1855 |
Quatuor à cordes op.51 n°2 en la mineur (Partition)
(Écoute de la version du
quartet Emerson
disponible avec le timing et une partition déroulante sur
YouTube).
Contrairement aux derniers quatuors de
Beethoven
comportant de 4 à 7 mouvements, les quatuors de
Brahms
conservent l'organisation classique : rapide-lent-rapide-rapide en quatre
mouvements. Seules quelques menues libertés avec la forme sonate académique
les distinguent des formes anciennes.
Mendelssohn
et
Schumann
adoptaient aussi ce plan usuel.
1 – Allegro non troppo :
l'introduction présente une totale similitude avec le quatuor en ut mineur.
Le thème 1 est exposé sur vingt mesures (noté
expressivo). [00:34]
Brahms
intercale un motif secondaire plus viril avant l'exposition du Thème 2
[01:16], en do majeur, plus lyrique et scandé par des pizzicati au
violoncelle. Un passage crescendo impétueux suivi d'une mélopée mélancolique
conclut l'énoncé de ce premier groupe thématique élégiaque pour lequel une
reprise in extenso est prévue mais, que là aussi, le
quatuor de Tokyo
ne fait pas. [03:45] Le développement donne la part belle au violon solo qui
enchaîne des motifs syncopés et arpégés avec enthousiasme. [05:08] Le
mouvement se termine suivant un plan hérité du premier groupe thématique
moyennant quelques facéties de tonalité. [07:41] La coda rompt avec
fantaisie et allégresse cette impression de reprise un peu académique.
2 – Andante moderato :
{Playlist 2} On retrouve l'architecture ABA'. Le premier thème en la majeur
aux accents nocturnes est chanté par le violon, une cantilène accompagnée
par une obsédante suite d'arpèges à l'alto et au violoncelle. Le violon II
accompagne son confrère plus tardivement. [02:53] La section centrale
survient tel un orage, une mélodie martiale f du violon faisant écho
au violoncelle, s'oppose aux trémolos frénétiques du violon II et de l'alto.
Une seconde idée plus paisible s'insinue en alternance avec ce motif
tempétueux. Le mouvement se termine en fa majeur et sereinement, retrouvant
le climat nostalgique initial.
3 – Quasi minuetto : {Playlist 3} A l'opposé du long scherzo du 1er quatuor, Brahms revient à un court mouvement de transition de cinq minutes, léger et facétieux. Les rôles de chaque instrumentiste sont diversifiés, on ne s'ennuie pas ! Un premier motif poétique est répété comme à l'accoutumée [00:28]. [01:10] la seconde idée plus guillerette atténue la toujours possible morosité attendue dans l'écriture en la mineur avec un tempo retenu. [01:38] Brahms substitue au trio un allegretto vivace vif argent dans lequel toutes les notes sont indiquées "piquées", technique offrant une verve festive à ce passage adoptant par ailleurs la tonalité bonhomme de la majeur. [02:16] Un court intermède interrompt un temps ce sujet festif en revenant au climat initial. [03:42] Le premier groupe thématique est rejoué da capo.
4 - Allegro non assai :
{Playlist 4} Le final s'élance avec vivacité sur un rythme ¾ de valse. Idée
peu courante : vers la seizième mesure, l'alto bénéficie d'un solo sur ce
motif. Une transition ardente conduit à l'énoncé du second thème, une
mélodie très articulée et concertante. Le final se développe en
rondo, on y entendra des citations du
folk bohémien, un dada de
Brahms
depuis sa rencontre avec
Eduard Reményi. La coda se révèle joyeuse et enflammée.
Écoute au casque ou avec des enceintes additionnelles plus que conseillée. Le son des PC, sauf exception, est vraiment une injure à la musique…
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La discographie semble a priori moins abondante que pour les cycles de quatuors de Mozart ou de Beethoven et les quatre derniers opus de Schubert. Néanmoins, on dispose de beaux enregistrements de ceux de Brahms qui sont complexes à mettre en valeur.
En explorant ma discothèque perso et après écoute sur Deezer ou YouTube de
quelques ensembles réputés, je suggère en dehors du disque de ce jour
quelques interprétations qui ont marqué l'histoire récente de l'Opus 51. L'intégrale du
Quatuor Amadeus
de 1960 a vieilli sur le plan technique, c'est dommage. Quant au
Quatuor de Cleveland
avec lequel j'avais découvert ces deux quatuors joués de manière un peu
folle, il a hélas quitté le catalogue… Donc :
En 1966, Le
quatuor Janacek
de Prague gravait avec une rare élégance ce duo de quatuors en respectant
parfaitement leur individualité (Supraphon – 5/6).
En 1986, au sommet de leur carrière, le
quatuor Melos
démontre que ces quatuors semblent avoir été écrits à leur intention !
Fermeté du trait, transparence des lignes mélodiques, etc. Une symbiose
passionnée entre un classicisme et un romantisme qui ne dit pas son nom (DG
– 6/6).
(Deezer)
En complément les trois quatuors de
Schumann
avec le même niveau de maîtrise.
En 1993, le
Quatuor Alban Berg
a lui aussi atteint la maturité pour proposer une intégrale qui fit date
malgré une infime raideur. La réédition avec en complément le quintette avec
piano est une excellente idée. (EMI – 5/6)
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