Jacques HIGELIN - No man's land (1978) - par Pat Slade
On ne peut pas oublier le poète paladin de la chanson française, 4 ans
après sa disparition son œuvre perdure toujours.
Higelin en zone neutre
En disparaissant de la surface de la planète, le grand
Jacques a laissé la chanson
française en deuil. A notre époque, quel artiste peut se targuer de remuer
et d’attirer des foules à ses concerts ?
Jacques Higelin remuait son
public que ce soit sur scène ou à l'écoute de ses rondelles de polychlorure
de vinyle.
«No Man’s Land» enregistré au château d’Hérouville est un album qui n’aurait pas du
exister. Higelin
n’est pas satisfait de l’album et il voulait retourner au studio en pleine
nuit pour détruire les bandes. Heureusement que Laurent Thibault (ex. Magma) patron du château d’Hérouville et Francis Moze (ex. Magma et bassiste sur
l’album) arrivent à dissuader l’artiste de ne pas le faire et arrivent à le
convaincre que c’est son meilleur album, ce qui se révèlera vrai. C’est un
album charnière, Higelin
sort de sa période rock qui comprenait «BBH 75»
(clic)
et «Irradié» et commence une reconversion musicale où l’on en trouvera des bribes
dans «Alertez les Bébés»
(clic). Et pour clore ce chapitre rock, il ne fera qu’un titre avant de ne
faire que du Higelin.
Dan Ar Braz - J.Higelin
«No Man’s Land» est un album qui contient de grandes chansons qui pour la plupart
resteront des classiques joués sur scènes. On commence par le dernier rock
«Banlieue Boogie Blues», une petite version de 4:10, mais on préfèrera celle de Mogador en
1981 avec ses 12:27. Après cette entrée en matière plutôt balèze,
maître Jacques va endosser
l’habit de poète paladin qu’il conservera toute sa vie. Il va
s’entourer d’une partie des musiciens qui étaient avec lui sur «Alertez les Bébés» Pierre Chérèze (guitare),
Michel Santangeli (batterie) et
Christian Leroux (guitare) mais d’autres
viendront rejoindre l’équipe déjà en place :
Dan Ar Braz, guitariste barbu et bien
connu pour avoir tourné avec
Alan Stivell,
Serge Perathoner au clavier qui a un CV
long comme le bras (France Gall,
J Hallyday,
Yves Simon, etc.), il va aussi faire appel au petits chanteurs de l'école de Bondy.
«Pars» : la chanson emblématique, la clef de voûte de ses passages sur
scène, il va croiser David Bowie
et lui emprunter son mellotron pour en jouer en plus de l’accordéon.
Pour l’anecdote, Higelin
à Hérouville habitait dans une bergerie et Yves Simon
enregistrait en même temps l’album «Un autre désir». Alors que ce dernier terminait son enregistrement et devait repartir
le lendemain, il va avec Higelin
tourner autour du château en parlant toute la nuit, mais toutes les dix
minutes, le temps de faire le tour, il croisait un gars qui faisait la
même chose mais dans l’autre sens, c’était David Bowie qui se demandait : «c’est qui ces deux mecs ?», les deux artistes francophones l’ayant bien sur reconnu. Bowie
était la pour produire l’album d’Iggy Pop «The Idiot» et enregistrer le sien «Low», vers trois heure du matin, il va arrêter Yves et Jacques
pour tailler le bout de gras.
«Denise» : un titre un peu trop speed avec des paroles pas trop ésotériques. «Un Aviateur dans l’Ascenseur» : un titre que j’aime beaucoup, à son concert à Bercy en 1985,
après un marathon musical comme il savait en faire alors que la salle se
vidait et que les lumières étaient rallumées, il reviendra pour les
quelques poignées que nous étions pour jouer ce titre, seul au piano.
«Lettre à la p'tite amie de l'ennemi
public no 1» : un morceau sur Jacques Mesrine qui,
à l’époque, défrayait la chronique avant de finir troué comme une passoire
à la porte de Clignancourt.
«L…comme Beauté» : fini le rocker de banlieue, un texte magnifique avec un piano au son
métallique et un accompagnement de toute beauté. «Les Robots» : surement le point faible de l’album, heureusement que le final
«L’Amour sans savoir ce que c’est» vient corriger ce faux pas. Un début très pessimiste et sombre, mais
comme un coup de vent, Jacques
sait redonner de l’espoir même dans ses morceaux les plus noirs et puis
avec l’apparition d’un chœur d’enfants qui montre que tout n’est pas
pourri sur cette foutue planète, le morceau a eu comme titre «De Nul Par Et d’Ailleurs (No Man’s Land)». Higelin
gagne là ses galons de grand parolier et de grand interprète.
La suite ce sera Champagne et caviar, que ce soit par les albums comme
par la reconnaissance du public.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire