Quand on veut parler de Jacques Higelin, on trouve toujours de
la matière et, encore une fois, en piochant dans sa discothèque (Qui compte une
trentaine d’albums), je parlerai de l'un de mes préférés.
Une impro d’un autre monde
Jacques Higelin est un extra terrestre. En 1974, il écrivait la première page du
rock en français avec «BBH 75», l’année suivante il récidivait avec «Irradié»
et son groupe les Super Goujats avec le tout
jeune Louis Bertignac. Et puis en 1976 il calme ses ardeurs
électriques et revient à des chansons que l’on retrouvera quelques années plus
tard dans sa carrière. «Le Minimum», par sa construction : un titre
parfait pour un début de concert, l’entrée progressive de tous les musiciens jusqu'à
l’explosion finale. Ce qu’il fera dans l’arène de Bercy en 1985 ou les musiciens arriveront progressivement sur la piste les
uns après les autres. «Géant Jones» L’histoire de ce boxeur sur
une musique très funky avec son riff de basse furieux de Jacky Thomas. De ces 4 min 56 en studio, il en fera
une version dantesque sur le «Live à Mogador» (1981) de 11 min 17. «La Rousse au Chocolat», Un titre qui reste l'un
de mes préférés dans tout ceux qu’il a pu composer. Une des premières
apparitions de l’accordéon dans un morceau d’Higelin. Et cette très belle
ballade a aussi connu une superbe version en live au «Casino de Paris» (1983) .
«Je veux cette
fille», Un petit country-rock qui passe comme une lettre à la poste avec
les solos de Pierre Chérèze et de Christian Leroux qui se tirent la bourre aux guitares.
«J'suis qu'un grain de poussière», Du Higelin dans son élément, le
capitaine tient bien la barre de son navire ; des paroles de haute voltige et
une musique qui nous ramèneraient presque à l’époque de Saravah. «Aujourd’hui la crise», Un Higelin qui se pose des
questions sur le système de l’époque sur une musique un peut lourdingue, mais
on lui pardonne tout ! «Rien», Encore un joli titre avec une ligne
musicale claire et nette, un morceau qui n’est pas le plus connu et pourtant Higelin
prouve dans ces moments là qu’il était un grand parolier et un grand poète. «Coup de Blues»,
Morceau génial ! On pourrait imaginer maître Jacques dans les couloirs du
métro l’interpréter avec son accordéon devant un parterre de gens rentrant du
boulot. Un exercice de style en prise de son direct. Son coté musique de rue
fait revivre le Paris des années cinquante. A ma connaissance, je ne crois pas qu’un
artiste ait écrit un morceau dans ce genre (Peut
être Yves Jamait dans un style différent).
«Alertez les Bébés», Le gros morceau, la pièce
maîtresse de l’album. Une pléthore de notes de piano pour un titre qui a une
histoire. Il fut écrit en une nuit par un Higelin en état second. Il se lèvera se
sentant fébrile pour aller boire un verre d’eau dans la cuisine, il prendra une
feuille et un crayon qui traînaient là et se mettra à écrire d’une traite les
paroles qui deviendront «Alertez les bébés» ; puis il repart se coucher.
Le lendemain il découvre les feuillets sur la table et ne se souvient pas les avoir
écrits , il peine même à reconnaître son écriture tant les mots ont été écrits
avec violence. Il enregistrera le morceau seul au piano en demandant à l’ingénieur
de son de faire tourner la bande et de quitter le studio. Un peu plus de dix
minutes de musiques improvisée ou Higelin va hurler, gémir, chanter un texte
hallucinant. Une seule prise, celle du disque et l’essoufflement au final n’est
sûrement pas du chiqué. Évidemment il serait simpliste de dire que c’est le sommet de
l’album, mais son insertion en avant dernière position sur l’album arriverait
presque à occulter les autres titres ; heureusement, il n’en est rien. «Demain ça s'ra vachement mieux», Une fin d’album qui reprend la
musique de «Aujourd'hui la
crise !»
Avec un Jacques
dans ses délires qui présente ses musiciens avec les surnoms qu’il leur a donné :
Pierre Chérèze dit «Blaireau», Christian Leroux dit «Basile», Jacky
Thomas dit «Blett», le regretté
Michel Santangelli dit «Frère Pochtron» à la batterie et un Higelin qui se qualifie de dernier des ringards.
«Alertez les
Bébés» : Un grand disque dans l’histoire de la chanson française ?
Oui assurément ! Il sera certifié disque d’or et remportera le grand prix
du disque.
Même
mort Higelin
et ses albums restent vivants et intemporels.
Beau billet pour un grand disque ! Merci pour l'anecdote au sujet de l'enregistrement de la chanson-titre du disque, l'immense et atypique «Alertez les bébés» . Quel bonheur de lire un billet sur jacques Higelin !
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