Mois de mai et début juin tristounets dans le monde des artistes "classique" de renom avec trois disparitions majeures : La compositrice Kaija Saariaho d'origine finlandaise mais vivant à Paris, la diva afro-américaine Grace Bumbry et le pianiste Menahem Pressler pilier du Beaux-arts trio qui aurait fêté ses cent ans en cette fin d'année 2023.
Claude avait consacré un billet à Kaija Saariaho en 2012 (Clic). La musique de la compositrice qui nous a quittés à seulement 70 ans le 2 juin mêlait musique instrumentale et électroacoustique mais avec une poésie délaissant les théories acoustiques ésotériques trop à la mode de nos jours, au bénéfice d'un large public.
Grace Bumbry avait atteint le bel âge de 86 ans avant son départ le 7 mai (1937-2023). Pour ma génération, elle représentait avec la soprano Leontyne Price ces divas afro-américaines qui accédaient enfin aux scènes lyriques classiques. Citons Vénus dans Tannhäuser de Wagner à Bayreuth en 1961, invitée par Wieland Wagner (une afro-américaine à Bayreuth !!! mein Gott !!!), Carmen pour Karajan à Salzbourg avec une élocution française plus intelligible que celle d'autres consœurs même francophones ; elle fut aussi une vénéneuse Salomé d'anthologie au Metropolitan avec une direction hallucinée de James Levine débutant… Des rôles de premier plan qui lui valurent des surnoms comme la Vénus noire ou la Carmen noire…
Le pianiste
Menahem Pressler
s'est éteint à Londres à 99 ans le 6 mai. D'origine allemande, il avait fui le
nazisme pour la Palestine en 1938 après l'horrible "nuit de cristal"…
Il sera l'un des rares survivants de la shoah dans sa famille. Puis en
1946, départ pour les USA où il débute à Philadelphie accompagné par
Eugène Ormandy. Il crée en 1955 le célèbre
Beaux-arts trio
avec au violon (il en jouait aussi)
Daniel Guilet
et au violoncelle,
Bernard Greenhouse. Voir un billet de 2018 consacré au
Trio N°1
de Schubert (Clic). Il sera le membre jamais remplacé jusqu'au dernier concert en
2009. Le trio joua plus de cinquante ans. Inépuisable, il poursuit
une carrière solo notamment en interprétant
Chopin
et gravant un CD en 2018, une anthologie de musique française (Debussy,
Ravel,
Fauré, évidement si je puis dire). En 2014, il rejoint la
Philharmonie de Berlin
pour le concert du nouvel an dirigé par
Simon Rattle, interprétant le
concerto K 488
(sublime N°23) de
Mozart
et
Chopin. Citons Jérôme Bastianelli de Diapason à propos du virtuose jouant
les sonates de
Mozart
: "Le jeu de Pressler se caractérise par sa transparence, qui laisse
entendre les moindres frémissements des voix intermédiaires, les
moindres saveurs de l’écriture harmonique. Et l’on appréciera tout
autant la variété des couleurs de ce piano jovial mais profond."
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Le web propose des biographies plus complètes, inutile de les concurrencer. Une sélection de leurs œuvres me parait être le meilleur hommage à rendre.
Grace Bumbry interprète Carmen à Salzbourg, deux airs : Habanera ("L'amour est un oiseau rebelle…") et seguedille ("Près de la porte de Séville") {Playlist 1 & 2} et, en complément : les quatre derniers lieder de Richard Strauss à Strasbourg en 1991. {Playlist 3 à 6}
De
Kaija Saariaho, voici une étrange et poétique œuvre contemporaine titrée Lictbogen (Arches de lumière) ; un genre propre à la créatrice : Musique instrumentale d'ensemble. Je laisse la compositrice nous indiquer les grandes lignes de son
inspiration : "Le titre de cette pièce trouve son origine dans une aurore boréale à
laquelle j'ai eu la chance d'assister dans le ciel arctique, à l'époque
où les premières pensées concernant cette pièce s'agitaient dans mon
esprit. En regardant les mouvements de ces lumières silencieuses envahir
l'immensité du ciel noir, la musique a commencé à trouver sa forme et
son langage. Quelle est la dépendance — et même en existe-t-il ? — entre
le phénomène naturel et ma pièce, je ne saurais le dire."
Lictbogen fut créée en 1986, dédiée à Paul Méfano et conçue pour neuf instruments : 2 violons, alto, violoncelle, contrebasse, percussion, piano, flûte, harpe) et son électronique en temps réel. John Storgards dirige l'ensemble Avanti.
Impossible de ne pas écouter les deux facettes de l'art de
Menahem Pressler, comme soliste du
Beaux-arts trio
et seul face au clavier…
Pour commencer une merveille : le
trio N°1
de
Brahms
enregistré en 1986. No comment…
Puis un florilège de musiques françaises et un nocturne de
Chopin
extrait de ses disques récents, à plus de 90 ans :
Debussy
|
Fauré |
Playlist 1 - Rêverie, L. 68
Playlist 2 - I. Danseuses de Delphes
Playlist 3 – II. Voiles
Playlist 4 – VIII. La fille aux cheveux de lin
Playlist 5 – X. La cathédrale engloutie
Playlist 6 – XII. Minstrels Playlist 7 – Deux arabesques, L. 66 |
Playlist 8 - Barcarolle
No. 6, Op. 70 |
Ravel |
Chopin |
Playlist 9 - Miroirs, M. 43 - II. Oiseaux
tristes
Playlist 10 - Pavane pour une infante défunte, M. 19
|
Playlist 11 - Nocturne No. 20
|
Je ne savais pas pour Grace Bumbry, un grande Carmen au coté de Jon Vickers et de Mirella Freni même si je n'aime pas trop l'orchestration de Karajan que je trouve trop rigide à la différence de celle de Claudio Abbado
RépondreSupprimerIl existe aussi une autre version avec les mêmes chanteurs mais ce n'est plus le philarmonique de Vienne par Karajan mais par l'orchestre de l'opéra de Paris dirigé par Rafael Fruhbeck de Burgos qui est meilleur (je trouve !)
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