vendredi 24 décembre 2021

Georg Philipp TELEMANN - Quatre Cantates de Noël - Ludger REMY (1997) - par Claude TOON


- Coucou les amis du Deblocnot !  Onzième Noël ensemble, c'est dingue ce que le temps passe… La veille de Noël tombe (boum) un vendredi cette année, coup de bol, j'ai piqué la place à Luc qui a publié hier ; vous suivez ? Je suis au bureau pour la matinée. Sonia court dans tous les sens… SONIAAAAAAAAAA !!!!!
- Hein, heu, oui Claude, je flippe, M'sieur Luc m'a chargée de rédiger un billet pour le jour de l'an, souhaiter la bonne année aux lecteurs, si je m'en sors bien, il y aurait la fameuse augmentation à la clé… Je peux pas trop t'aider du coup…
- Humm, la fameuse augmentation dite de l'arlésienne… Un bon enchaînement avec mes cantates baroques de la Nativité ou la chanson immortelle : Il est né le divin enfant, comprendre entre guillemets "Depuis plus de quatre mille ans, nous le promettaient les prophètes", sous-entendu l'augmentation de Sonia, ah ah….
- Pas drôle Claude, quoique Luc en prophète, comme Philippulus dans Tintin, une idée amusante… Aller, je vais rédiger mon truc… 


Jésus par Fra Angelico (vers 1420)

Bon Ok, encore des cantates, mes lecteurs vont penser que j'ai une une culture limitées et imagination toute aussi étriquée voire obsessionnelle. Rapport aux oratorios de Noël de Graupner en 2020 ou de Bach en 2012 (Clic) & (Clic). Avouons que les traditions sympathiques ont du bon : une musique baroque légère, une crèche, un petit Jésus, des moutons, etc. Et que les fâcheux, les anti-tout, les wokistes, les intégristes de la laïcité qui devrait s'appliquer au blog ne viennent pas me les briser menues comme disait Lino Ventura. On vit une période d'intégrisme multiculturel qui nous renvoie à l'Inquisition médiévale version agnostique-profane-séculière-athéiste (je frappe large). Allez : Pace domine…

Je me défonce le ciboulot pour renouveler l'iconographie de ce papier. C'est vrai… La crèche, ben il y en a déjà une sur la jaquette du disque. Les sapins, les cadeaux, les sentons ? Mon billet va ressembler à une publicité de Carrouf ! Une bourriche d'huitres, un ballotin de chocolat ou de foie gras, pareil ; et puis c'est un billet musicologique et non gastronomique. Si les lecteurs ressentent que votre rédacteur est en galère et cherche comment remplir sa page, aucune vexation de ma part… C'est la réalité 😊.

- PAAAAAAT, t'as pas une idée lumineuse d'illustration pour mon billet Noël du 24 décembre ?
- Bof, chais pô moi… Une crèche en chocolat… Une coquille d'huitre à la place de la mangeoire pour le divin poupon… 
♪ Il ♬ est né ♬ le divin  poupon ♪♪♪

- Merci Pat, t'es vraiment un pote (Pffffffff, enfoiré – en voix off).

La peinture, la belle, la vraie, vole souvent à mon secours. Ce portrait du petit Jésus (facilement trois ans) de Fra Angelico (vers 1390-1455) est un exemple. Ce peintre, moine de son état, est très connu pour ses peintures et fresques d'inspiration religieuse, sur bois, et datant de la première Renaissance ; l'artiste était un grand novateur (Clic). Ce dominicain déjà reconnu de son temps comme un homme inspiré et humaniste a été béatifié en 1982 par Jean-Paul II. (Fête le 18 février.) En 1984 il est proclamé saint patron des artistes, notamment des peintres. Ce portrait du jeune Christ s'inspire du style icône et fait partie d'une œuvre beaucoup plus imposante Le présentant porté par sa Mère. Désolé pour les micros fissures mais le tableau ayant six cents ans environ… Suite à cette digression picturale, place à la zique…

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Georg Philipp Telemann (1681-1767)

L'an passé je brocardais les portraits "officiels" et totalement interchangeables des compositeurs de l'époque baroque tardif. Une similitude due à la perruque poudrée que portaient tous ces messieurs. Il y avait même un musicien inventé de toute pièce prénommé Luke Sladeberg, j'aurais pu insérer le visage de Louis XIV à la place de Graupner, le moins connu. Telemann est contemporain de Bach, Haendel et Vivaldi. Avec l'habitude, ils sont reconnaissables sur ces portraits souvent les seuls ou presque existants. Ne coupons pas en quatre les cheveux des perruques en énumérant les dates de naissance des compositeurs cités. Telemann voit le jour en 1681 à Magdebourg. Le début de sa carrière est donc contemporain à ceux de Bach, Haendel et Vivaldi tous disparus entre 1740 et 1760. Par contre, le compositeur connaît une longévité exceptionnelle pour le siècle des lumières, vivant jusqu'à l'âge canonique de 86 ans (+ 1767 à Hambourg).

En cette année 1767, Mozart parcourt déjà l'Europe avant d'initier le courant classique et même, en fin de siècle, préfigurer le romantisme dans ses concertos pour piano. Il côtoiera C.P.E. Bach, deuxième fils de Bach et lui aussi grande figure du classicisme. Telemann reste associé à l'âge baroque.

Beaucoup sont des célébrités de nos jours, voire pour la plupart considérés comme des génies. Telemann occupe une place en arrière-plan, ce qui est paradoxale pour cet homme qui à l'époque baroque connaissait une incroyable notoriété. Une explication à cela ? Peut-être…

Les mélomanes même débutants reconnaissent facilement les quatre saisons, des airs et chœurs de Haendel. Et que dire de Bach ? Je pense connaître par cœur les concertos brandebourgeois ou les suites pour orchestre et reconnaître en aveugle nombre de grands arias ou chœurs tirés des Passions ou des cantates les plus jouées. Pareil pour le Messie ou Water Music de Haendel ou les vivifiants concertos pour mandolines de Vivaldi. Ce répertoire intime et propre à chaque mélomane assure leurs popularités. À l'opposé, j'avoue mon incapacité à pratiquer cet exercice mnésique à l'écoute d'un air extrait d'une ouverture, concerto ou cantate de Telemann tiré au hasard dans un superbe coffret de 30 CD réunissant une charmante sélection d'une centaine d'œuvres du maître qui fut pressenti en priorité pour occuper le poste de Cantor de Leipzig à la place de Bach jugé comme plus médiocre 😊…


Ludger Remy (1944-2017)

La production de Telemann est quantitativement fabuleuse : 6000 ouvrages dont 3700 connus. Rapidement : 600 suites orchestrales, des centaines d'oratorios, cantates, concertos et passions et des pièces pour clavecins ou maints instruments, Telemann jouait de tout… Mais l'inventivité mélodique ne concurrence pas par son académisme l'originalité géniale de ses confrères et leurs thèmes qui touchent droit au cœur dès la première audition.

Ô attention, sa musique n'est jamais terne ou ennuyeuse, mais nous écoutons à vrai dire des pièces de circonstance écrites avec simplicité et soin pour un public peu exigeant : divertissements ou offices religieux, contrairement aux concertos brandebourgeois si variés mélodiquement et aux orchestrations fantasques. Lors de l'écoute en série des pièces orchestrales de Telemann, on doit admettre un systématisme d'inspiration parfois lassant. Une musique que j'écoute comme B.O. pendant mes heures de lecture. On appréciera cependant l'élégance de la composition, l'équilibre et le raffinement des orchestrations.

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Les quatre cantates du temps de l'Avent ou pour le jour de Noël écoutées ce jour ont été enregistrées par Ludger Remy en 1997 pour le label CPO. Ce petit label allemand un peu confidentiel a vu le jour à l'ère numérique en 1986 pour promouvoir des compositeurs de toutes les époques, injustement oubliés par les grandes firmes. Il y a un certain nombre de commentaires du blog qui peuvent lui dire merci.

Claveciniste et chef d'orchestre, spécialiste du baroque, Ludger Remy a disparu prématurément en 2017 à 68 ans. En 1968, l'homme abandonne le métier de vétérinaire pour la musique ! Quand une passion vous tient… Il étudie le clavecin pendant 7 ans. Il enseignera l'art de ce clavier à Cologne.

Son attirance pour la musique ancienne en particulier le conduit à créer des ensembles chorals et instrumentaux comme "Ensemble Vocal du Forum de Musique Ancienne de Brême". Fasciné par Telemann, et d'autres compositeurs plus ou moins célèbres comme C.P.E. Bach, Philipp Heinrich Erlebach, Georg Gebel, Gottfried, Heinrich Stölzel ou même Heinrich Schütz, de la génération précédente, il constitue une discographie d'œuvres profanes ou sacrées baroques.

L'enregistrement a été gravé avec les solistes rompus au chant baroque allemand : Dorothee Mields : soprano ; Britta Schwarz : alto ; Wilfried Jochens : ténor ; Dirk Schmidt : basse. Michael Stein. Le Telemann Chamber Orchestra et le Magdeburg Chamber Choir étant étant dirigés par Ludger Remy.

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Fra Angelico - Nativité (1440)

Telemann plaçait la composition d'œuvres religieuses comme son plus haut sacerdoce. D'où leur nombre quasi surréaliste… Il confie cette volonté dans l'une de ses biographies, celle rédigée en 1718 évoquant la période passée à Eisenach en tant que maître de chapelle. Les deux premières cantates de l'album datent de ces années-là et sont des inédits au disque.

Saget der Tochter Zion, TWV 1:1235 date des années 1722/1723 et son livret en accord avec le rite luthérien a été rédigé par Hermann Ulrich von Lingen, secrétaire des archives d'Eisenach. Cet intellectuel en écrira un second pour Telemann vers 1728/1729. Toutes les cantates sont brèves, de 11 à 18 minutes. La première cantate écoutée déploie une orchestration à la fois légère et ardente. Ainsi l'introduction en fanfare des trompettes souligne la joie et l'attente du Messie, thème spirituel de l'Avent, elle est d'ailleurs chantée le premier dimanche de ce cycle liturgique. Je ne détaille pas en précision. Pour les quatre cantates, on retrouve les ouvertures, arias, récitatifs et chœurs avec ou sans soliste(s) caractéristiques du style de Bach, la force mystique en moins peut-être.

[15:56] La date d'écriture de Saget den verzagten Herzen, TWV 1:1233 est incertaine, sa publication a eu lieu en 1727 après diverses corrections, travail courant à l'époque. Destinée aussi au temps de l'Avent, elle débute de manière inhabituelle par une sinfonia purement instrumentale aux accents de pastorale. Suit un chœur en duo avec les solistes. Telemann fait preuve d'une réjouissante fantaisie dans l'effectif retenu pour la succession des pièces dans les cantates comme le montre le tableau ci-dessous.

[27:38] La cantate Auf Zion, TWV 1:109 est destinée au culte du jour de Noël. L'année de sa composition est inconnue (avant 1730 ?) mais toujours interprétée en décembre 1760 à Hambourg… Le texte fera songer à une crèche textuelle : les bergers, les chérubins, l'allégresse du petit peuple enfin récompensé d'une aussi longue attente. À noter la présence de deux flûtes, instrument très apprécié par Telemann.

[43:40] Dernière cantate de ce programme, Göttliches Kind, lass mit, TWV 1:1020, également destinée à l'office de la nativité, est sans doute plus tardive et présente une orchestration généreuse utilisée énergiquement (timbales et trompettes). Elle fait par ailleurs référence à la lettre de Saint-Paul à Thimoté, le choix des textes ont donc évolué comme en témoigne ce recours au Nouveau Testament en complément de passage d'écriture profane. L'air de basse initial est précédé de quelques mesures brillantes et glorieuses appuyées par les trompettes et les timbales, encore une trouvaille.

L'interprétation est enthousiasmante. La sonorité de l'orchestre ne présente plus les timbres parfois nasillards qui furent un frein à l'adoption des exécutions"authentiques" de la musique baroque. Les cordes sont soyeuses. L'espace sonore occupé par l'orchestre (une douzaine de musiciens, solistes compris) est harmonieusement réparti. Un orgue positif alterne avec un clavecin pour agrémenter les couleurs. Enfin, les chanteurs séduisent par leurs lignes vocales sans fioritures opératiques. Un beau disque pour Noël et pour amateur de baroque.


1 - Saget der Tochter Zion, TWV 1:1235

"Dis à la fille de Sion"

2 - Saget den verzagten Herzen, TWV 1:1233

"Dites au cœur brisé"

Pour soprano, alto, ténor, basse et chœur.
3 trompettes, timbales, 2 hautbois, 2 violons, alto
et basse continue

Pour soprano, alto, ténor, basse et chœur.
2 hautbois d'amour, 2 violons, alto et basse continue

I. Sonata. Saget der Tochter Zion
II. Zerstreuet euch, entflieht
III. Mein Herze, wirf den Sündenwust von dir
IV. Komm, mein Herze steht dir offen
V. Jesu, mein Hort und Erretter

Quatuor vocal
Aria basse
Récitatif ténor
Aria soprano
Chœur

xxxxxxxxxxxxxxxxxx

I. Sinfonia
II. Saget den verzagten Herzen
III. Das ward erfüllet
IV. So komm denn auch, mein Heil    
V. Tausendmal begehr ich dich
VI. Siehe, ich steht vor der Tür und klopfe an
VII. Keinem andern sag ich zu
VIII. Schon auf Erden
IX. O, so komm denn, süßes Herz

 

 

Chœur
Récitatif soprano
Aria Alto
Chœur
Récitatif basse
Chœur
Aria Ténor
Chœur

 

3 - Auf Zion, TWV 1:109

"À Sion"

4 - Göttliches Kind, lass mit, TWV 1:1020

" Enfant divin, fais-moi savoir"

Pour soprano, alto, ténor, basse et chœur.
2 flûtes à bec, 2 hautbois, 2 violons, alto et basse continue

Pour soprano, alto, ténor, basse et chœur.
3 trompettes, timbales, 2 hautbois d'amour, 2 violons, alto
et basse continue

I. Auf, Zion, und lass in geheiligten Hallen
II. Ermuntre dich, mein schwacher Geist
III. Und es war Nacht
IV. Wieviel Läßt schön in deinen Werken
V. So froh, der Ehrfurcht ganz ergeben
VI. Du Volk Israels, zittre nicht!
VII. Fröhlich laßt uns Gott Lobsingen

VIII. Kaum sähe sich die fromme Schar
IX. Ehre sei Gott in der Höhe!
X. Wir singen dir mit deinem Heer

 

Aria basse
Chœur

Récitatif ténor
Chœur
Aria Alto
Aria soprano
Chœur
Récitatif basse
Chœur
Chœur

I. Kindlich groß ist das gottselige Geheimnis
II. Erstaunet, forschende Gedanken
III. So soll denn nun der dunkle Ball
IV. Göttliches Kind, lass mit entzücken
V. Ach, welcher holde Ton ergetzet Herz und Ohren

VI. Meine Seele erhebt den Herrn
VII. Steige, falle, zirkle, walle
VIII. Für solche gnadenreiche Zeit

Supprimé par Yoube 😪

Aria basse
Aria soprano
Récitatif ténor
Aria Alto & basse
Récitatif ténor,
alto et basse
Aria Ténor
Aria basse
Chœur


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