jeudi 1 avril 2021

CANNIBAL BOTANY de Stephen King (2021) – par Claude Toon

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- Tiens Claude… Le romancier américain se lance dans l'horreur végétale… Tu vas agacer les végétariens et végans si maintenant les plantes se bouffent entre-elles !
- Ô Sonia, ce n'est pas la première fois que l'auteur de Shining, Carrie, Ça, etc. a des soucis avec la végétation… Avec Stephen, nous aimons le parfum du sang, hihihi !
- Ah bon, mais dis donc, je ne le trouve pas chez Amazon ou à la Fnac, même en anglais.       
- Logique, un pote me l'a ramené de New-York, un exemplaire dit spécimen ; parution pour l'été aux States et pour les fêtes en français…      
- Ok, je note dans la liste de livres à lire ou à offrir… Tiens pour Nema, mais je crois qu'elle n'aime pas trop les pavés de 700 pages…



Stephen King végétalisé (Creepshow 1982)

Les romans fantastiques mettant en scène des animaux féroces, parfois atteints de gigantisme, sont légions. Déjà avec Stephen King en 1982, nous risquions de devenir la pâtée d'un Saint-bernard devenu fou furieux de rage et prénommé Cujo. Un Survival terrifiant, dans une bagnole où se sont réfugiées maman et fifille, après que le gentil toutou ait été mordu par une chauve-souris (enragée)… De la fiction au cinoche, en passant par la BD, on doit subir les attaques de : piranhas, alligators, anaconda, sangliers, moustiques géants (Mosquito, un chef-d'œuvre), araignées, mantes religieuses ou fourmis survitaminées (Them, une chouette série B avec James Whitmore en flic héroïque) ; stop, la liste est sans fin… La mode actuelle est aux requins depuis les dents de la mer : la série crescendo delirium des sharknado (6 épisodes 😖), ou le requin format magnum, alias Mégalodon (dans le coma après un coup de boule de Jason Statham, passons pudiquement). Tiens, lire le billet récent de Luc sur Tremors, une série B hilarante dans lequel des bouseux sympas d'un bled paumé du Nevada ont maille à partir avec des vers de terre super maous costauds (Clic).


Pour le gazon et les arbres, en se limitant à la littérature de gare mais pas toujours, les références sont moindres, quoique voici une petite sélection.      
En 1975, Ward Moore (Présence du futur - Denoël) décrit avec humour dans "Encore un peu de verdure" un looser prêt à tout pour gagner sa croûte, promu VRP tentant de caser un produit d'une chimiste freelance permettant de faire reverdir les pelouses les plus calcinées… le héros finira réfugié sur une barque sur l'océan (comme disait Ravel), avec quelques survivants d'une planète ravagée par la végétation… heu, en réalité il y a quelques brindilles qui commencent à pousser entre deux planches de la barcasse 😨
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Ah, chez Bob Morane, dans
l'Orchidée noire, un participant d'une expédition à Bornéo se fait mâchouiller par un monstre végétal heureusement découpé par ses compagnons à la machette façon macédoine, ouf 😜 ; d'où en fin de volume un dossier documenté sur les plantes carnivores, les vraies, celles plutôt friandes d'insectes (Henri Vernes, auteur pour les adolescent(e)s des années 50-70 passionnés d'aventure et de vulgarisation scientifique - Marabout).          

Dans le Seigneur des anneaux de Tolkien, de vieux arbres ronchons et cavaleurs défendent leur aire de vie et se révoltent (dans le film tout au moins).  



Smack !! (Sans mordre la langue
😀)

Dans mes chroniques on pourra butiner : Amazonia de James Rollins nous entraîne visiter un arbre mutant, habitable, mais provoquant le gigantisme dans la faune environnante, notamment les alligators (Clic). En 2018, dans les Geôliers de Serge Brussolo (Clic), on peut se faire retaper voire ressusciter en pénétrant certains arbres E.T. ; mais bonjour les effets secondaires : la dermatose florale ou pire !
Et pour en finir sur le sujet :
Mauvaise Herbe, petite nouvelle de Stephen King portée à l'écran dans Creepshow en 1982. Résumé : de nos jours en New Hampshire, Jordy Verrill (Stephen King joue le rôle), un fermier un peu nigaud et vénal récupère une météorite tombée dans son champ pour se faire du blé auprès des scientifiques… En fait de blé, il se transformera en bonhomme Cetelem étouffant dans l'herbe qui enferme son corps dans un cocon verdoyant ; herbe fougueuse qui envahira tout jusqu'à Boston et sans doute plus loin… (Question : ce ne serait pas une idée piquée à John Brunner dans La Conquête du chaos de 1964, si ma mémoire est bonne ?)

- AH AHH AHHH AHHHH AAATCHOUUUM  !!!!!!!!!!
- La crève Claude ? Je te prépare une tisane aux herbes et au miel… Herbes médicinales bien sûr, hihi…
- Berchi Zonia, Rhube des foins (forzément)… Moi qui déteste jardiner ; par contre j'adore la forêt, ce qui m'amène à l'ouvrage commenté ce jour…

Pour ce nouvel Opus retour à Derry, ville imaginaire du Maine, bourgade et État fétiches de l'auteur. L'Amérique ancestrale des pionniers du Mayflower avec ses légendes sataniques et ses sombres forêts. Et il s'en passe des histoires à faire peur sous la plume de Stephen King. Des récits glaçants influencés par son voisin historique de Providence, H.P. Lovecraft (1890-1937) fondateur de la littérature horrifique yankee après Edgar Poe… Il y a du choix entre la soucoupe volante télépathe à ne pas déterrer (Les Tommyknockers), d'autres E.T. qui rendent pétomanes puis zombiques (Dreamcatcher) ou encore un septuor de gosses luttant sans merci contre une entité maléfique, elle aussi d'origine stellaire et prenant l'allure d'un clown grimaçant et assassin… (Ça, un régal de 1500 pages). Pour ne citer que trois romans marquants.


Miam, crac, gloup (personne n'a pensé à enlever le panneau)

Jerry Nightmare a déniché le job du siècle : éboueur-forestier. Avec le CV du plus gros consommateur de bourbon et de bibine du Maine, on ne fait pas le difficile, on se trimbale avec un sac poubelle et un ramasse-déchets dans les orées de la forêt pour récolter papiers gras, canettes, capotes voire seringues abandonnées par les ados lors des escapades nocturnes. Faut dire que quand on s'appelle Nightmare (cauchemar in french), ça vous poursuit une vie entière. Une trouvaille et une lampée de 43° ; encore dix pas, une autre trouvaille et 0,1 g de plus. En fin de taf, il déraille pas mal le Jerry

Jerry n'aurait pas dû trop s'enfoncer sous les ramures afin d'éviter de tomber sur une paire de chênes immémoriaux dont les troncs se sont entremêlés, disons même ingérés. Phénomène naturel ? Bizarre, surtout pour l'esprit embrumé de Jerry. Il n'a pas souvenir de ce duo d'arbres qui se bécotent ou plutôt s'entredévorent dirait-on. Et en plus, les racines se sont arrachées du sol, pas vraiment sur place, non elles laissent chacune une tranchée de plusieurs mètres… Cela dit les tornades provoquent souvent ces déracinements… Jerry n'est pas un prix Nobel mais quand même, un arbre déraciné… ben il tombe sur l'humus sans bouloter son voisin de futaie. Bref, un mystère de plus… Jerry lâche l'affaire et rentre dard-dard cuver chez bobonne. Ça lui évitera une mauvaise nuit car il n'a pas eu le temps de voir des racines frétiller dans les tranchées énigmatiques !

Jerry en parle au Pub de son pote Bruce Gregor, les deux compères ayant en commun le foie dans un état alarmant… Marrade dans le troquet, les témoignages et bobards de Jerry ? Tout le monde s'en fout, l'important c'est la tournée générale qui les accompagne. On se poilera moins quand le petit Freddy Moore, dix ans, disparaît et que l'on retrouve son cadavre quasi exsangue au pied du couple de chênes !! Puis celui de Sarah Grenstein, 12 ans, cinq jours plus tard, elle ne sera pas la dernière victime, la forêt a faim ! La chasse aux tueurs d'enfants est ouverte, pourquoi déposer les cadavres au pied de cet arbre gémellaire ? Ont-ils été martyrisés sur place ? Un rituel païen macabre de plus ? Pourquoi aucun indice matériel du monstre : empreintes, ADN, leurs chairs disparues, etc. ?


Et si depuis des siècles la forêt
en avait sa claque ?

La traque commence. Et revoici l'inspecteur Ralph Anderson fraîchement muté de l'Oklahoma où une terrifiante affaire de démon mexicain a flingué sa carrière (lire L'Outsider). Ah ! Ça y va les théories fantasques dans la populace : serait-ce un maléfice jeté par la vielle Simone Bretchett, une centenaire qui vivote dans un taudis pestilentiel (en dehors de la ville), une descendante en ligne directe d'une Sorcière brulée à Salem prétend la rumeur. Surenchère ; de nombreux habitants de Derry auraient aperçu John J. Joubert (serial Killer originaire du Maine exécuté en 1996 dans le Nebraska pour triple infanticide) et hop l'option réincarnation, le fantôme sanguinaire ; Bruce Gregor fait fortune grâce aux piliers de comptoir improvisés enquêteurs… Autre supposition, le retour du diabolique Manitou, démon indien régional cher à Graham Masterton,  idée propagée par les fans locaux et crédules de l'auteur à succès. 

Jerry devient le suspect principal et finit au gnouf (il a découvert seul les cupulifères fusionnelles - ça jette ce mot 😉 -, et seul son ADN est présent sur les lieux en dehors de ceux des gosses). Les vieilles rivalités ancestrales entre les familles des victimes se réveillent… Ralph Anderson enquête avec Jeannie, sa compagne et complice. Sarah et Freddy s'étaient éloignés du groupe lors de parties d'indiens-trappeurs organisées par un pasteur trumpiste et baptiste Herman Mudgett, un illuminé qui prêche le rétablissement de la peine de mort dans le Maine… ce qui fait vachement avancer l'affaire !  Comme dans Ça, les ami(e)s bouleversé(e)s des jeunes victimes créent une confrérie de mômes détectives pour aider Ralph

On atteindra l'indicible. Est-ce : encore des E.T., de la sorcellerie, un virus botanique vengeur (extraterrestre ou militaire) qui éradiquera les humains et leurs engins qui ravagent le monde végétal excédé ? Je ne dirais rien de rien !!!! Une belle panique gagnera Derry quand une multitude d'arbres commenceront à galoper sur leurs racines telles des ballerines (pas vite certes, mais inexorablement) pour assiéger Derry… Mais où Stephen King va-t-il chercher des idées pareilles !?

 

Le style King ne change guère, un anglais accessible sans trop de difficulté. Un gros pavé de 700 pages (compter 800 après traduction française). Personnages pittoresques : peu de braves gens, des commères, des poivrots, des obsédés de la gâchette, des politiciens véreux. Et bien entendu les digressions pour épicer le récit. On a hâte de savoir si un chêne ou un sapin à jeun va frapper à votre porte !

- Allooooo… La garde nationaaaaale… On a un problèèèèème…



Version anglaise : 724 pages – espérons une bonne traduction française.

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