- Retour du compositeur autrichien ? Claude… Ça veut dire quoi Knaben
Wunderhorn ? Ce n'est pas une symphonie…
- "Le cor merveilleux de l'enfant" : titre de recueils de poésies et de
contes traditionnels allemands… Mahler en a mis en musique une douzaine
au fil du temps…
- Je vois, ils forment un cycle de Lieder comme le Chant de la terre
déjà commenté, une œuvre ultime de Mahler ?
- Non un filet garni de lieder isolés mais la thématique est la même et
on retrouve des réminiscences musicales piochées dans les
symphonies…
- Heuuu, je connais bien Anne Sofie von Hotter mais le chanteur Thomas
Quasthoff est affreusement handicapé ! Pas de bras, peu de jambes… Une
voix magique certes…
- Un enfant "thalidomide", un scandale sanitaire début des années 60.
Trop jeune Sonia pour que tu connaisses. Un chanteur plutôt de lieder
que d'opéra, évidement…
Mahler Jeune |
Évoquons brièvement l'affaire "thalidomide", une tragédie médicamenteuse
du début des années 60. Le sujet musical
sera plus gai
avec ses charmants lieder. Fin des années cinquante, la pharmacopée
est bien maigre
pour soulager anxiété et nausées chez les futures mamans… Une molécule,
"le thalidomide", est commercialisée en 1957 par Grünenthal GmbH pour
soulager ces troubles. Ce sédatif découvert en 1953 ne présente pas le
risque létal du surdosage lié aux barbituriques… Pourtant certains
médecins et pharmaciens critiquent assez vite le manque de vigilance lors
des tests. Aux USA, Frances Oldham Kelsey
inquiète du manque de transparence et experte pour la FED interdira
l'usage du médicament et en France (la lenteur administrative a parfois du
bon) l'AMM ne sera jamais délivrée. Le mal est hélas en marche : le
thalidomide provoquera de graves malformations chez le fœtus ! Notamment
le non développement des membres. 30 000 enfants, surtout en Allemagne,
Pays-Bas et Angleterre naitront avec des moignons en lieu et place des
bras et jambes… Thomas Quasthoff
sera de ceux-là… Je me rappelle de ce scandale qui éclata quand, entrant
au lycée en 6ème (à l'époque), je commençais à découvrir un
monde idyllique où le fric à tout prix conduisait à des drames de ce genre
; d'autres suivront, du Mediator aux
prothèses mammaires
PIP "bricolées" par feu Jean-Claude Mas. (400 000 femmes victimes de son escroquerie).
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Thomas Quasthoff |
Des Knaben Wunderhorn (version littéraire) :
L'éclosion du courant romantique à la fin du siècle des lumières éveille
chez les poètes allemands une passion pour les chants traditionnels et
populaires. Ceux du moyen-âge bien sûr avec ses chevaliers et ses drames
épiques qui feront également les choux gras des auteurs d'opéra, mais aussi
ceux de l'époque. Le fantastique est bien présent dans la thématique tout
comme les chants de soldats en ces années de guerres napoléoniennes… Et de
citer Goethe et son
Faust
et de nombreux poèmes mis en musique par
Schubert. (Le roi des Aulnes.)
Rassembler un patrimoine populaire n'échappe pas à l'esprit nationaliste de
mise en cette époque politiquement troublée et guerrière. Deux dramaturges
et poètes en vue, Clemens Brentano (1778-1842) et
Achim von Arnim (1781-1831) s'associent pour
compiler une somme vertigineuse des textes des chansons populaires
germaniques. Leur travail conduira à la rédaction entre 1805 et
1808 de trois forts volumes réunissant mille titres et publiés sous
le titre générique
Des Knaben Wunderhorn
! Dans le même esprit, les frères Grimm rassembleront les contes et
légendes parfois glauques dans lequel
Wagner
puisera avec gourmandise.
Quoique complices, les deux écrivains adoptent des méthodes d'écritures
différentes. Brentano souhaitait ne rien changer à l'authenticité sur
le fond et la forme de la versification. À l'inverse,
von Arnim modernise le style, coupe ou ajoute à son gré quand il
estime la rédaction trop longue ou trop datée. Il en conserve cependant
l'esprit. Il y aurait maintes anecdotes à raconter à propos de ce travail
littéraire, mais pour cet article, l'idée à retenir est que les poésies
constituant
Des Knaben Wunderhorn seront une
mine d'or pour les compositeurs de lieder ; Mahler étant le plus connu,
certes, mais n'oublions pas :
Carl Maria von Weber,
Schubert,
Schumann,
Brahms,
Richard Strauss
et sans doute d'autres petits maîtres.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Des Knaben Wunderhorn (version musicale) :
Anne Sofie von Otter |
La chronologie de la composition des lieder écoutés ce jour est floue et les spécialistes consultés le reconnaissent. Mahler a composé en dehors de ses symphonies comportant parfois des parties lyriques (2, 3, 4, 8) plusieurs cycle de Lied qui forment un tout indissociable ; Lieder eines fahrenden Gesellen (Chants d'un compagnon errant), les Rückert-Lieder (Rückert-Lieder) et Les Kindertotenlieder (Chants pour des enfants morts, sur des poèmes de Rückert). Le chant de la terre, chef-d'œuvre absolu (Clic) est une symphonie Lyrique. Composés entre 1900 et 1904, les deux derniers cycles empruntent des textes de Friedrich Rückert, écrivain, traducteur, pédagogue et orientaliste célèbre en Bavière. Deux cycles de cinq lieder qui marquent l'aboutissement de l'art de Mahler dans le domaine.
Les
Lieder eines fahrenden Gesellen
marquent les débuts officiels de
Mahler
dans l'univers du lieder (il existe aussi trois ouvrages de jeunesse peu
connus). Au nombre de quatre, le premier est extrait des
Des Knaben Wunderhorn, les trois
autres poèmes sont de la plume
du compositeur lui-même. Ensemble achevé en 1885,
Gustav a environ vingt-cinq ans, il sera orchestré plus tard et créé en
1896.
Pour la douzaine de lieder
Des Knaben Wunderhorn, il est tentant pour les interprètes de chercher une unité stylistique et
émotionnelle qui n'existe pas… Ils ont été composés au fil du temps, quand
Mahler
se plongeait à ses moments perdus dans les livres de
Clemens Brentano et Achim von Arnim. Le romantique autrichien
raffolait du climat épique et élégiaque, un rien sarcastique et affligé qui
caractérise ces chansons. Écrits entre 1892 et 1898 pour voix
et piano puis orchestrés, ils seront publiés dans un recueil nommé
Humoresk
en 1899. Ils peuvent être chantés de manière unitaire (un bis) où
dans leur complétude mais aucun ordre n'est imposé, chaque artiste fait ses
choix. La
partition
n'impose aucune tessiture masculine ou féminine précise, on trouvera parmi
les chanteurs des sopranos, des ténors, des basses, etc.…
Mahler
n'a inscrit qu'une ligne de chant, donc si certains lieder peuvent mettre en
jeu deux voix qui se répondent, toute initiative en duo est proscrite. Il
est d'usage de préférer une seul interprète pour tout le lied. Curiosité et
parodie :
Urlicht
– Lumière primitive (1893) se
retrouve dans la
2ème symphonie
; quant à
Des Antonius von Padua Fischpredigt, il utilise les thèmes du scherzo de cette
2ème symphonie
et se gausse du
prêche aux poissons de saint Antoine de Padoue. Enfin
Es sungen drei Engel –
Trois anges chantaient (1895)
composé pour la
3ème symphonie
pour voix d'alto, chœur de femme et de garçons est ici ajouté comme un
13ème lied (il n'a jamais été composé pour accompagnement de
piano).
On remarquera dans ces musiques fantasques plusieurs lieder en forme de
marche militaire grotesque, à commencer par
Revelge. Ces marches sont nombreuses dans les symphonies, elles sont la
représentation de l'avancée dérisoire de l'homme vers un destin qu'il ne
maîtrise pas, un chemin chaotique inexorable vers la mort, concept naturel
mais philosophiquement absurde pour
Mahler.
Orchestration
: 1 picolo, 2 flûtes, 2 hautbois + cor anglais, 2 clarinettes, 2 bassons, 4
cors, 2 trompettes, (pas de trombones !), quatre timbales, triangle, tambour
militaire, grosse caisse, cymbales, harpe et cordes.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Historiquement, la discographie est assez foutraque. En 1915 :
premier enregistrement du Lied "Wer hat dies Liedlein erdacht" par
Oskar Fried, chef et ami très proche de
Mahler. Suivront quasi exclusivement des captations isolées sur une seule face de
78 tours de ce lied cousin du scherzo de la
2ème symphonie. En 1950, l'arrivée du microsillon offre l'opportunité à
Felix Prohaska, pédagogue et chef d'opéra viennois d'enregistrer les 12 lieder chantés
par
Lorna Sydney
(Mezzo), et
Alfred Poell (baryton). Ne m'en demander pas plus, l'histoire les a injustement
oubliés. Il faut attendre les années 60 pour voir apparaître dans les
bacs de nouvelles intégrales dont, dans un premier temps la 2ème
mouture de
Felix Prohaska
dont je parle en conclusion. Depuis, une flopée d'interprétations d'un ou
quelques lieder ont été publiées; mais les intégrales de qualité sont
relativement rares par rapport à la pléthore d'enregistrements des
symphonies.
Les disponibilités YouTube sont maigres… Coup de chance, le disque paru en
1999 opposant
Anne Sofie von Otter
à
Thomas
Quasthoff, l'orchestre philharmonique de Berlin
étant dirigé par un grand mahlérien,
Claudio Abbado, était dispersé en vidéos unitaires, mais le Toon en a fait une playlist…
Espérons qu'elle sera maintenue !
Je ne présente plus
Claudio Abbado, déjà vedette de 12 articles, il fait son retour. Grand Mahlérien, je vous
invite à relire le RIP écrit en 2014 lors du décès du maestro après
plus de dix ans de lutte contre le cancer.
(Clic)
Bon pied bon œil, la mezzo-soprano d'origine suédoise
Anne Sofie von Otter
poursuit sa fin de carrière en proposant des albums originaux de temps à
autres. Un article lui a été consacré avec un portrait détaillé lors de la
sortie de son album "Douce France" en
2014. Une reprise de célèbres chansons à texte françaises. Nous l'avons
aussi entendu dans le
Requiem de
Duruflé (Clic)
Si
Thomas
Quasthoff
était né en 1900 et non en 1959 avec son terrible handicap, il
ne nous aurait pas enchantés de sa voix de baryton d'une rare fluidité. Non,
il aurait été recueilli par le cirque
Barnum et tenu un rôle dans
Freaks, le bouleversant chef-d'œuvre de
Tod Browning mettant en scène des
monstres anatomiques… Il possède de courtes jambes comparables à celles des
victimes du nanisme et juste deux mains fixées directement aux épaules… Son
père et ses deux frères, avec l'appui de sa mère, vont tout faire pour
offrir une vie quasi normale au petit garçon. Pas de climat déprimant,
Thomas intègre le plus normalement possible la vie familiale. Son père
remarque très tôt les dons musicaux (oreilles et chant) chez son fils. Il
tente de le faire admettre au conservatoire en vain car l'étude du piano y
est obligatoire… C'est lors d'un radio-crochet de la NDR à Hambourg qu'il
bluffe l'assistance en tenant la scène pendant 1H30 au lieu des cinq minutes
habituellement accordées dans ce genre d'émission.
Il commence des études de droit qui l'ennuient, enchaine les petits boulots
comme animateur à la NDR. C'est ainsi - belle revanche sur la rigidité des
règles conventionnelles - que la pittoresque soprano
Charlotte Lehmann, professeur à Hanovre, propose de prendre en charge
Thomas
pendant cinq ans ; il étudie aussi la musicologie.
Claudio Abbado vers 1999 |
Bien entendu,
Thomas
ne peut accéder a priori aux scènes lyriques à ses débuts, mais il va se
distinguer comme chanteur de lieder (en langue allemande, le répertoire est infini) ou comme soliste dans les messes et les oratorios. Un exemple : il fait
un tabac dans le Voyage d'hiver
de
Franz Schubert
accompagné par le pianiste
Charles Spencer. La voix de baryton est d'une tessiture large couvrant cinq styles
différents, du baryton léger (Pelleas)
jusqu'au baryton-basse comme
Walter Berry
ou
Nicolaï Ghiaurov (Boris Godounov). Les frontières ne
sont pas très délimitées,
Thomas
se classe dans la catégorie
Baryton basse un peu
lyrique
comme
Dietrich Fischer-Dieskau. Je trouve à ce sujet que les voix des deux chanteurs m'émeuvent autant :
souplesse du phrasé, clarté de la diction, ton velouté chez
Fischer-Dieskau
mais moins apprêté chez
Quasthoff
au timbre plus carré. Mais à ce niveau… on ne compare rien, on admire, point
!
Il réalise un rêve en 2004 en interprétant à Vienne le rôle d'Amfortas, roi cloué au lit par une malédiction dans le
Parsifal
de
Wagner, un rôle éprouvant. Autres rôles marquants :
Méphistophélès de la
Damnation de Faust
de
Berlioz, en version de concert, à l'invitation de
Bernard Haitink, Fidelio… Il aurait souhaité chanter
Rigoletto ; le personnage créé par
Verdi
est un bouffon, souvent un nain au XVIème siècle. Il s'est
illustré néanmoins avec Falstaff et
Don
Carlos de
Guiseppe Verdi.
Thomas
Quasthoff
aura triomphé de l'indicible, sa bouille ronde et rigolarde et son talent
attirant la sympathie et non l'apitoiement.
En 2012, il quitte la scène pour devenir professeur à l'Académie de musique Hanns Eisler à Berlin. Mais incorrigible, en 2017 il rejoint un trio de Jazz berlinois où il
chante des standards de jazz, de soul et de blues de
Marvin Gaye,
John Lennon,
Stevie Wonder,
Ray Charles et… lui-même.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Pour ce disque,
Claudio Abbado
et ses deux complices retiennent un ordre assez classique pour les douze
lieder auxquels ils ajoutent Urlicht
extrait de la
2ème symphonie. Ils laissent de côté le lied évoquant un paradis pour jardin d'enfants et
concluant la
4ème symphonie de 1899. Un texte amusant également chanté à partir du recueil des
Des Knaben Wunderhorn ; à noter
qu'une voix de soprano est requise pour accentuer l'aspect ludique du
poème.
Peu de commentaires à faire sur cette suite de lieder magnifiquement
chantés, il faut bien le dire. Un mot sur la direction d'Abbado, légère et truculente, sans effets appuyés à l'inverse de certains
mouvements des symphonies. La partition ne se prête pas à des envolées
dramatiques et rappelle en cela la
4ème symphonie
qui, elle aussi, ne comporte pas de trombones, un signal au maestro de
service J.
Le premier lied "Revelge" est une marche comme
Mahler
les aime tant. Un texte ambigu entonné vigoureusement par un soldat atteint
par une balle et qui voit passer ses compagnons d'arme indifférents à son
sort. L'homme a-t-il perdu la raison ? Les esprits des soldats laissent le
champ libre au tambour qui semble devenu le guide suprême de la troupe.
"
tralali, tralalei, tralala ; je dois marcher jusqu'à la mort…". Mort et
absurdité, deux thématiques fortes dans
l'univers mahlérien.
Thomas
Quasthoff
se révèle le personnage idéal : viril, braillard, gagné par l'ironie
aberrante de la situation et un soupçon pleurnichard, aucune coquetterie
propre à l'opéra ; génie de
Thomas
Quasthoff. La courte introduction orchestrale montre la maîtrise atteinte par
Mahler
pour exprimer ce climat : rythme saccadé, trompette et bois sarcastiques,
caisse claire et tambour. [V1 -3:30] Et que dire de la folie orchestrale
quand la marche se développe dans une loufoquerie barbare et gueularde de
troupiers dans la seconde moitié du Lied…
La nature, les mésaventures des villageois sont les autres dadas du compositeur autrichien. Bien que le second texte, "Rheinlegendchen", soit écrit au masculin (ils le sont presque tous), il nous est chanté par la mezzo Anne Sofie von Otter. Un paysan, une bien-aimée à venir, un anneau qu'avale un poisson, un roi… Petit conte burlesque sur les rives du Rhin. Le premier quatrain résume la fantaisie de l'affaire : "Tantôt je fauche près du Neckar, tantôt je fauche près du Rhin, / Tantôt j'ai une bien-aimée, tantôt je suis seul ! À quoi cela sert-il de faucher si ma faux ne coupe pas ? À quoi sert une bien-aimée si elle ne veut pas rester ?" Si la voix de la diva est un savoureusement féminine (on préfère une contralto), elle apporte aussi , comme le baryton, une jubilation et une clarté dans la diction qui enchantent. Cela est encore plus net dans Verlor'ne Müh, qu'Abbado se refuse de faire chanter en alternance comme le dialogue entre deux jeunes gens peut le permettre.
Bon ! En un mot, une version qui se place au sommet de la discographie, je
vous laisse savourer l'ensemble, sachant que les textes et leurs traductions
sont disponibles dans le site :
Lieder net Archive
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Mahler
n'est pas le seul compositeur à avoir puisé dans les mille pages du
Knaben Wunderhon
pour composer des lieder. À ce sujet, le baryton
Thomas Hampson
a gravé une anthologie de lieder de divers compositeurs et pas des moindres
:
Brahms,
Mendelssohn,
Richard Strauss,
Schumann,
Loewe,
Carl Maria von Weber,
Zemlinsky
et même
Schoenberg. Deux copieux CD, des interprétations pour lesquelles le chanteur
américain est accompagné au piano par le légendaire
Geoffrey Parsons
(1929-1995). Le baryton a enregistré seul avec un orchestre de
chambre l'intégrale du cycle de Mahler
et une sélection de quelques titres dans un disque en compagnie de
Michael Tilson-Thomas
et de l'orchestre de San-francisco.
1 |
Revelge |
Réveil
/ Le matin entre trois et quatre heures |
Thomas Quasthoff |
2 |
Rheinlegendchen |
Petite légende du Rhin |
Anne Sofie von Otter |
3 |
Trost im Unglück |
Consolation dans le malheur |
Thomas Quasthoff |
4 |
Verlor'ne Müh |
Duo Garçon, allons dehors ! / Petite sotte, |
Anne Sofie von Otter |
5 |
Der Schildwache Nachtlied |
Chant de nuit de la sentinelle |
Thomas Quasthoff |
6 |
Das irdische Leben |
La vie ici-bas |
Anne Sofie von Otter |
7 |
Lied des Verfolgten im Turm |
Chant du prisonnier dans la tour |
Thomas Quasthoff |
8 |
Wer hat dies Liedlein erdacht? |
Qui a inventé cette petite chanson ? |
Anne Sofie von Otter |
9 |
Des Antonius von Padua Fischpredigt |
Le prêche de Saint Antoine de Padoue aux poissons |
Thomas Quasthoff |
10 |
Lob des hohen Verstandes |
Éloge de la haute sagesse |
Thomas Quasthoff |
11 |
Wo die schönen Trompeten blasen |
Où les fières trompettes sonnent |
Anne Sofie von Otter |
12 |
Der Tamboursg'sell |
Le tambour |
Thomas Quasthoff |
13 |
Urlicht |
Lumière primaire |
Anne Sofie von Otter |
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Si le trio
Anne Sofie von Otter,
Thomas
Quasthoff
et
Claudio Abbado
se place sur le podium des interprétations remarquables, pour varier les
plaisirs et montrer que la crème des chanteurs et des chefs de renom ont
été tentés d'affronter cette boîte à joujoux de lieder, voici trois autres
versions exemplaires.
En 1963 paraît la première intégrale en stéréophonie. Un coup de
maître ! Le baryton
Heinz Rehfuss
helvète-américain (1917-1988). Le chanteur a une voix plus grave que
Quasthoff
mais tout aussi bonhomme et ne se limite pas à chanter pas, non il incarne
lui aussi avec sarcasme et drôlerie les personnages.
Maureen Forrester
qui chanta le
Chant de la terre
avec
Fritz Reiner
(seule réelle concurrente de
Ferrier
dans le registre contralto) est tout à fait dans le ton. On comprend
pourquoi le chef d'opéra
Felix Prohaska
fut le pionnier de l'enregistrement de l'ouvrage. Il obtient des couleurs
enchantées de l'orchestre de l'opéra de Vienne (Vanguard – 5/6). Un CD qui obtint 5 des plus hautes récompenses
de la presse spécialisée lors de sa réédition !
De 1967 à 1969,
Leonard Bernstein
qui enregistre pas à pas son premier cycle des symphonies de
Mahler
à New-York invite
Walter Berry
(1929-2000) et
Christa Ludwig
(1928 -) à graver ces lieder. Les deux chanteurs sont mariés à la
ville. Je trouve
Berry un peu terne, mais je ne peux jamais faire l'impasse sur l'alto velouté
de
Ludwig qui, elle aussi signa l'un des
Chant de la terre inoubliable avec
Klemperer. Le choix de chanter les lieder 1, 2, 3 et 8 en voix alternées est fort
discutable, comme toujours (Sony – 4/6).
Riccardo Chailly
nous a offert une belle intégrale des symphonies lors de son passage comme
directeur du
Concertgebouw d'Amsterdam. En 2000, il rassemble deux des meilleurs chanteurs de l'époque :
Barbara Bonney
incandescente et
Mathias Goerne
"athlétique" pour ce qui est sans doute la meilleure version moderne
exæquo avec celle dirigée par
Abbado. Bonne idée, il confie le lied de la
4ème symphonie
en complément mais chantée par une mezzo-soprano légère :
Sara Fulgoni, très logique. Même initiative pour le lied 10 "Revelge" confié à un ténor (pour faire songer à l'adolescent blessé ?), un ténor
suédois disparu bien tôt,
Gösta Winbergh
(1943-1972). Prise de son fabuleuse (DECCA – 5/6).
Il existe une gravure de 1968 réunissant la soprano
Elisabeth Schwarzkopf, le baryton
Dietrich Fischer-Dieskau, l'orchestre symphonique de Londres
étant dirigé par
George Szell. Un casting de rêve qui ne peut qu'attirer le chaland ! Moi le premier.
Quelle déception ! Plusieurs lieder sont chantés en duo (admettons pour
Wo die schönen Trompeten blasen
un dialogue garçon-fille) ;
Mahler
s'opposait farouchement à cela.
Fischer-Dieskau
chante ces miniatures avec une sévérité digne d'Amfortas
dans
Parsifal. Ça marchait bien dans les
Kindertotenlieder
avec
Böhm
(magnifique) mais là…
Elisabeth Schwarzkopf
divine chez
Strauss
fait des vocalises et minaude. La direction très sèche de
Szell
qui jouait peu
Mahler
dérive vers
Hindemith. Incompréhensible pour moi et opinion bien entendu tout à fait personnelle
(EMI
- 3/6). Pour les fans de ces immenses artistes uniquement, mais qui
cependant devraient aussi se régaler avec au moins une des versions
présentées.
(Possibilités d'écoute des trois interprétations sur Deezer : Chailly, tout comme celles de Bernstein et de Prohaska ; et en toute objectivité, faites-vous un avis pour : Elisabeth Schwarzkopf-Dietrich Fischer-Dieskau)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire