samedi 21 mai 2011

HUMBLE PIE "Rock On" (1971) - par Bruno -



Dernier album studio avec Frampton

     Après leur excellent album éponyme ("Humble Pie" (1970) - lien/clic), Humble Pie enchaîne l'année suivante, en 1971, avec « Rock On ». Ce sera le dernier disque studio avec Peter Frampton. Pourtant, le Pie première mouture est au sommet de son art, les membres en total osmose. Ce dernier voulant s'orienter vers des contrées teintées de Jazz, partira après le brutal live «Performance - Rockin' The Fillmore», et tentera sa chance en solo (et rencontrera un succès phénoménal et inattendu avec un des double-live les plus vendus des 70's : "Frampton Comes Alive").
 

   Ce « Rock On », qui porte très bien son nom, s'immerge dans un Heavy-rock prolétaire, calleux, rêche, chargé de guitares (only Gibson) aux consonances drues et pures (ne se parant que de la saturation naturelle des amplis Marshall et Orange), suintant un Blues fiévreux, et, plus en filigrane, de Soul, soutenu par une basse et une batterie lourdes, appuyées et travaillées. Fini les jolies ballades aux senteurs champêtres, ici c'est l'électricité qui parle.

« Shine On » : superbe entrée en matière par un Heavy-rock qui cumule dans un riff de Peter l'orfèvrerie et la métallurgie, avec chant expiatoire. Un titre que Peter joue encore actuellement sur scène.
« Sour Grain » : riff implacable, chant belliqueux et gouaille rageuse de Steve, soutenue toutes les 2 phrases par Peter qui semble forcer sa voix pour rester au niveau.
« 79 th & Sunset » : country-rock avec piano Honky-tonk, chanté communément par Steve et Peter.
« Stone Cold Fever » : Hard-blues au riff binaire et plombé, rugissement de Steve, réponse de voix d'ogre de Greg, break surprenant avec solo presque jazzy marchant sur les plates-bandes de Ten Years After, basse sourde et hypnotique, traits d'harmonica plaintif.
« Rollin' Stone » : encore du lourd avec cette reprise, débutant comme une jam de fin de soirée arrosée, toujours l'harmonica en toile de fonds, un chant habité, expiatoire, une tension montant progressivement avec une batterie devenant agressive, accalmie avec un solo aérien (sonnant Jimmy Page), puis final sur un Boogie-rock précurseur d'un Foghat. Parfois, ce genre d'exercice usé alors jusqu'à la corde peut se montrer ennuyeux ou lassant, or ici il n'en est rien, car le groupe n'interprète pas ce Blues lourd et rampant mais le vit, au point que l'on pourrait presque palper cette tension. Une tension qui finit par exploser non pas par un déluge sonore et bordélique mais par un Hard-Blues avec un « H » majuscule, qui à lui seul aurait pu faire l'objet d'une composition distincte.

« A song for Jenny » : un country rock assez stonien avec arpèges et slide (sur une pedal-steel ?), chant dolent, explosion de chœurs Gospel avec orgue.
« The Light » : Heavy-pop âpre, avec un riff crunchy donnant l'impression d'être recraché par un ampli en fin de vie, épaulé par quelques touches d'orgue, un Peter au chant mesuré bousculé sur les refrains par Marriott.
« Big George » : voix lourde et pesante, du Stones, celui de « Let it Bleed », en mode Heavy-rock, avec solo de saxophone de Bobby Keys (!).
« Strange Days » : pièce inspirée par les deux premiers Santana, avec piano bien évidemment dans le style de Gregg Rolie, solo éthéré, chant incantatoire de
Steve. 

« Red neck Jump » : final sur un croisement entre un Rock'n'Roll bastringue et une chanson de pub. (prémices du Pub-Rock ?).
   

 En mettant le live de côté, on peut dire que Frampton a terminé sa carrière au sein du Pie de fort belle manière ; en participant à un des meilleurs albums de Hard-blues, ou Heavy-blues-soul-rock des 70's, et au-delà.

On parle souvent d'Humble Pie au travers de Marriott et de Frampton, pourtant il est indéniable que, comme tant de groupes majeurs des 60's et des 70's, cette formation est le ciment de quatre musiciens d'exception ; et non juste le résultat de deux leaders. Déjà, Greg Ridley est un bassiste au jeu sûr chargé d'un groove certes un peu lourd mais foncièrement vivant, doublé d'un bon chanteur à la voix grave et rustre ajoutant de la force aux chansons.

     Et puis il y a Jerry Shirley, le discret benjamin, toujours soudé au temps sans jamais paraître une seule fois métronomique, sachant habiller avec pertinence son jeu de cymbales et de charleston ; rien d'ostentatoire chez Jerry, pas non plus de « Moby Dick », de « The Mule », ou de « Soul Sacrifice » pour frimer et se faire valoir. Cela ne semble pas rentrer dans ses considérations, ce qui n'enlève rien à son talent. Eddie Clarke s'en souviendra lorsqu'il montera Fastway en 83.

     Humble Pie fait donc partie de ses groupes où l'on peut prendre plaisir à écouter distinctement chacun des musiciens.
Pour la petite histoire, d'après Sir Jimmy Page himself, ce serait Humble Pie qui incita Led Zeppelin à visiter d'autres horizons afin d'éviter la compétition, ou la comparaison, sur le même terrain musical.
     Jerry Shirley suivra Steve Marriott jusqu'au dernier souffle du Pie. Puis il intégrera Fastway, le groupe de Fast Eddie Clarke. Plus tard, il montera un Humble Pie, avec pour seul membre d'origine, lui-même, pour des tournées aux USA avec l'aide de Charlie Hunn.

     Plus tard, Peter Frampton reconnaîtra que les années passées avec Humble Pie furent peut-être les plus lumineuses de sa carrière, que ce groupe était extraordinaire, que Steve Marriott ne l'était pas moins. Il lui appris à composer et à ouvrir ses oreilles, partageant sa riche culture musicale. Le décès de Marriott marquât profondément Frampton - c'était au moment où ils s'étaient mis à réécrire ensemble en vue d'une tournée commune, voire d'une reformation du Pie -.






Greg Ridley décèdera en Espagne, en 2003, suite à une pneumonie.
Steve Marriott, dégoutté de l'industrie musicale, se tournera vers une carrière pépère, jouant dans les clubs.

Frampton et Marriott devaient remonter le Pie. Hélas, Steve périt dans les flammes de sa maison.

Humble Pie, suite de l'aventure : Smokin' + Survol de la fin de la carrière du Pie

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire